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28/11/2012 | FRANCE | N°11-22385

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 28 novembre 2012, 11-22385


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé le 13 septembre 2007 par la société Avant garde Antilles Guyane en qualité de directeur des ventes ; qu'affecté à la Guadeloupe, il a été détaché en Martinique jusqu'au 1er mars 2008, date à laquelle il est revenu en poste à la Guadeloupe ; qu'un mois plus tard, l'employeur a proposé au salarié un poste de directeur de l'agence de Guyane que celui-ci a refusé par courrier du 30 avril 2008 ; qu'il a été licencié le 20 mai 2008 ; qu'il a saisi l

a juridiction prud'homale ;
Sur le premier moyen :
Vu l'article 1134 du code...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé le 13 septembre 2007 par la société Avant garde Antilles Guyane en qualité de directeur des ventes ; qu'affecté à la Guadeloupe, il a été détaché en Martinique jusqu'au 1er mars 2008, date à laquelle il est revenu en poste à la Guadeloupe ; qu'un mois plus tard, l'employeur a proposé au salarié un poste de directeur de l'agence de Guyane que celui-ci a refusé par courrier du 30 avril 2008 ; qu'il a été licencié le 20 mai 2008 ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale ;
Sur le premier moyen :
Vu l'article 1134 du code civil ;
Attendu que pour dire le licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse, l'arrêt retient que le salarié ne pouvait pas refuser une modification non péjorative de son contrat de travail ;
Attendu, cependant, que le contrat de travail d'un salarié ne peut être modifié sans son accord, peu important que la modification soit plus avantageuse pour lui ;
Qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Et sur le second moyen :
Vu l'article L. 3171-4 du code du travail ;
Attendu qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié d'étayer sa demande par la production d'éléments suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés pour permettre à l'employeur de répondre en fournissant ses propres éléments ;
Attendu que pour débouter le salarié de sa demande tendant au paiement d'heures supplémentaires, l'arrêt retient qu'il n'apporte pas la démonstration, comme le prévoit le texte applicable, par un commencement de preuve que sa revendication à ce titre repose sur des éléments objectifs ;
Qu'en statuant ainsi, en faisant peser la charge de la preuve des heures supplémentaires sur le seul salarié, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il déboute le salarié de ses demandes tendant au paiement de rappels de salaire au titre du salaire conventionnel et de commissions, l'arrêt rendu le 28 mars 2011, entre les parties, par la cour d'appel de Basse-Terre ; remet, en conséquence, sur les autres points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Fort-de-France ;
Condamne la société Avant garde Antilles Guyane aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Avant garde Antilles Guyane et condamne cette société à payer à M. X... la somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit novembre deux mille douze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Barthélemy, Matuchansky et Vexliard, avocat aux Conseils, pour M. X....
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Le moyen reproche à l'arrêt partiellement confirmatif attaqué D'AVOIR jugé que le licenciement de monsieur X..., salarié, par la société Avant Garde, son employeur, était fondé sur une cause réelle et sérieuse ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE les motifs de licenciement énoncés dans la lettre de rupture du 20 mai 2008 fixaient les limites du litige, que sachant qu'ici l'employeur avait retenu une faute grave, il lui appartenait d'en rapporter la preuve ; qu'il convenait de souligner d'ores et déjà que le licenciement dont il s'agissait n'était pas de nature économique et que le processus de modification du contrat de travail propre à ce type de licenciement ne saurait s'appliquer ici ; que le grief retenu par la société Avant Garde à l'encontre de Jean X... portait sur le refus de celui-ci d'accepter une mutation, alors qu'il venait d'être de nouveau affecté au siège de Baie-Mahault (Guadeloupe) après avoir effectué une mission en Martinique, vers une agence située en Guyane dont il lui était demandé de prendre la direction ; que pour l'employeur, la faute grave était constituée par le comportement « déloyal » du salarié qui était revenu brutalement sur son accord au regard de la mutation tout en pratiquant une surenchère d'exigences relativement au poste proposé ; qu'il convenait de rappeler que le contrat conclu entre les parties le 13 septembre 2007 ne comportait pas de clause de mobilité ; qu'il affectait certes monsieur X... au siège de l'entreprise en Guadeloupe mais avec la fonction de directeur des ventes et un champ d'activités englobant l'espace Antilles-Guyane ; que le salarié conscient de son statut au sein de l'encadrement de l'entreprise, avait d'ailleurs accepté, dès les premiers temps de son emploi, une mission auprès de l'agence située en Martinique pendant plusieurs mois (septembre 2007 – mars 2008), n'excluant pas de satisfaire ainsi à une certaine mobilité géographique en ce qu'elle ne lui apparaissait pas contraire à l'économie générale de son contrat de travail, que lors du retour du salarié au siège de Guadeloupe, un avenant au contrat de travail lui était proposé, le 1er mars 2008 afin de lui confier la direction des « ventes indirectes » pour la zone Antilles-Guyane pour répondre à une évolution récente du marché dans le domaine de l'informatique ; que bien que cet avenant consacrait une progression de salaire fixe et prévoyait une indemnité de logement, il ne fut pas signé ; que Jean X... formulait des exigences supplémentaires quant à la définition du poste et au champ géographique de sa fonction (extension vers Mayotte) ; qu'à cette même époque la société Avant Garde se trouvait devant un autre impératif d'organisation en raison de la vacance du poste de directeur d'agence en Guyane ; qu'elle faisait à Jean X... une proposition pour ce poste similaire à celui qu'il avait occupé temporairement lors de sa mission en Martinique ; que cette proposition était à nouveau en progression quant au salaire par rapport à l'avenant non signé du 1er mars (passage de 2.000 euros fixe/mois à 2.200 euros fixe/mois, plus 750 euros d'indemnité de logement) et au contrat initial (1.600 euros fixe/mois) ; que Jean X... formait une contre-proposition à 4.200 euros net/mois hors avantages ; qu'après une période de réflexion, Jean X... refusait cette dernière proposition le 30 avril 2008 ; que c'était en cet état que la procédure de licenciement était lancée par l'employeur le 2 mai 2008 ; que l'analyse des éléments versés au dossier et de la chronologie des faits montraient, en un laps de temps assez bref, une effectivité de pourparlers contractuels renouvelés dans un cadre demeurant strictement fonctionnel et découlant du pouvoir général d'organisation de l'employeur ; que le processus de choix successifs des fonctions proposées au salarié était de la responsabilité de l'employeur qui, en l'occurrence, offrait à chaque fois une progression de rémunération et était resté dans le cadre contractuel en ce qui concernait l'activité s'exerçant sur une zone géographique étendue (Antilles-Guyane, voire Océan indien) ; que le salarié cadre s'était montré ici partie prenante dans la négociation de son poste dans une mesure légitime et qu'il ne saurait lui être reproché en cela une déloyauté justifiant son licenciement pour faute grave ; que c'était en ce sens à bon droit que le premier juge avait exclu la faute grave ; qu'en revanche, au regard de la nature de la fonction de Jean X... au sein de l'entreprise et de la zone commerciale de celle-ci, il ne pouvait pour autant réitérer son opposition par deux fois à des modifications non péjoratives de son contrat de travail en les refusant purement et simplement sans s'exposer à la rupture de celui-ci pour une cause que la cour, avec le premier juge, considérait réelle et sérieuse (arrêt, p. 4 à 6 §1) ;
AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE monsieur Jean X... soutenait que son licenciement n'était pas justifié car son lieu de travail porté sur le contrat de travail signé entre les parties le 13 septembre 2007 était situé 1 rue Fulton ZI De Jarry à Baie-Mahault et que la mutation correspondait à une modification de son contrat de travail, modification qu'il avait parfaitement le droit de refuser ; que la Cour de cassation dans ses arrêts du 3 juin 2003 disposait que la mention du lieu de travail avait une valeur d'information à moins qu'il ne soit stipulé par une clause claire et précise que le salarié exécuterait son travail exclusivement dans ce lieu ; que cependant le licenciement n'était pas intervenu pour faute grave mais pour une cause réelle et sérieuse (jugement, p. 3, § 3 à 5) ;
ALORS, D'UNE PART, QUE le contrat de travail d'un salarié ne peut être modifié sans son accord, peu important que ladite modification soit plus avantageuse pour lui ; qu'en déterminant, pour juger le licenciement de monsieur X... fondé sur une cause réelle et sérieuse, par le motif erroné que le salarié n'avait pu valablement refuser « des modifications non péjoratives de son contrat de travail » proposées par l'employeur (arrêt, p. 6, § 1), la cour d'appel a violé les articles L. 1232-1 et L. 1235-1 du code du travail, ensemble l'article 1134 du code civil ;
ALORS, D'AUTRE PART, QUE le seul refus par un salarié d'une modification de son contrat de travail ne constitue pas en soi une cause de licenciement ; que qu'il appartient à l'employeur de justifier, dans la lettre de licenciement, des motifs qui ont rendu nécessaire la modification proposée ; qu'en retenant que le licenciement de monsieur X... consécutivement à son refus de la modification de son contrat de travail était fondé sur une cause réelle et sérieuse, après avoir pourtant constaté que la lettre de licenciement était motivée par le seul refus du salarié d'accepter sa mutation en Guyane, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et violé les articles L. 1232-1 et L. 1235-1 du code du travail, ensemble l'article 1134 du code civil ;
ALORS, ENFIN, QUE l'acceptation par un salarié de la modification de son contrat de travail ne se présume pas et doit résulter d'une manifestation de volonté dépourvue de toute équivoque ; qu'en déduisant, de la circonstance inopérante que le salarié avait accepté une mission temporaire en Martinique, que celui-ci avait accepté de « satisfaire à une certaine mobilité géographique » (arrêt, p. 5, § 3), que tout en ayant retenu que le contrat de travail conclu entre les parties ne comportait pas de clause de mobilité, la cour d'appel, qui n'a pas caractérisé la volonté non équivoque du salarié d'accepter une modification de son contrat de travail a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1221-1 du code du travail, ensemble l'article 1134 du code civil.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

Le moyen reproche à l'arrêt partiellement confirmatif attaqué D'AVOIR débouté monsieur X..., salarié, de sa demande en paiement d'heures supplémentaires ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE monsieur X... ne craignait pas de réclamer à la fois le statut de cadre supérieur (qui venait cependant d'être rejeté) et de présenter une demande pour avoir paiement d'heures supplémentaires à hauteur de 12.136,64 euros ; que le jugement était confirmé sur ce point en ce qu'il avait débouté Jean X... du surplus de ses demandes ; que l'existence d'heures supplémentaires résultait de l'examen par le juge des éléments fournis par l'employeur et de ceux fournis par le salarié sur lequel il formait sa conviction ; qu'il était constant que les fonctions de Jean X... étaient de celles qui ne sauraient être encadrées dans des horaires préétablis strictement, celui-ci bénéficiant de la plus grande latitude dans l'organisation de son temps de travail, y compris celle d'adresser des courriels à des heures tardives l'ensemble ne pouvant apporter la démonstration, comme le prévoyait le texte applicable, par un commencement de preuve, de ce que sa revendication à ce titre reposait sur des éléments objectifs ; que cette demande était rejetée par voie de confirmation (arrêt, p. 6, §7, p. 7§1) ;
ALORS, D'UNE PART, QUE seuls les cadres dirigeants échappent aux dispositions relatives à la durée du temps de travail ; qu'en écartant la demande en paiement d'heures supplémentaires du salarié par la seule considération qu'il jouissait d'une grande latitude dans l'organisation de son temps de travail tout en constatant cependant que le salarié n'avait pas le statut de cadre supérieur, la cour d'appel a violé les articles L. 3111-1 et L. 3111-2 du code du travail ;
ALORS, D'AUTRE PART, QUE le juge ne peut, pour rejeter une demande en paiement d'heures supplémentaires, se fonder exclusivement sur l'insuffisance des preuves apportées par le salarié et doit examiner les éléments que l'employeur est tenu de lui fournir et justifiant les horaires effectués ; qu'en retenant que la grande latitude dans l'organisation de son temps de travail dont le salarié disposait excluait qu'il puisse rapporter la preuve d'heures supplémentaires, sans rechercher si l'employeur avait fourni des éléments de nature à justifier les horaires effectués par le salarié, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 3171-4 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 11-22385
Date de la décision : 28/11/2012
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Basse-Terre, 28 mars 2011


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 28 nov. 2012, pourvoi n°11-22385


Composition du Tribunal
Président : M. Linden (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Barthélemy, Matuchansky et Vexliard, SCP Lyon-Caen et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:11.22385
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