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22/11/2012 | FRANCE | N°11-19523;11-19806

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 22 novembre 2012, 11-19523 et suivant


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Joint les pourvois n° Y 11-19.523 et F 11-19.806 ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué et les productions, que dans la nuit du 5 au 6 novembre 2005, le local dans lequel la société La Comté (la société) exerçait une activité commerciale de location de films vidéo a été détruit à l'occasion de violences urbaines ; qu'un tribunal pour enfants a condamné pénalement plusieurs mineurs et les a condamnés solidairement entre eux, et in solidum avec leurs civilement responsables, à payer une indemnité

à la société ;que cette dernière, exerçant son action directe, a assigné les a...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Joint les pourvois n° Y 11-19.523 et F 11-19.806 ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué et les productions, que dans la nuit du 5 au 6 novembre 2005, le local dans lequel la société La Comté (la société) exerçait une activité commerciale de location de films vidéo a été détruit à l'occasion de violences urbaines ; qu'un tribunal pour enfants a condamné pénalement plusieurs mineurs et les a condamnés solidairement entre eux, et in solidum avec leurs civilement responsables, à payer une indemnité à la société ;que cette dernière, exerçant son action directe, a assigné les assureurs des civilement responsables des mineurs condamnés en paiement de cette indemnité ;
Sur les moyens uniques des pourvois principaux des sociétés Generali IARD et Pacifica et les moyens uniques, identiques, des pourvois provoqués de la société AXA France IARD, réunis :
Vu les articles L. 121-2 et L. 121-8 du code des assurances, ensemble l'article 4 du code de procédure civile ;
Attendu que pour condamner in solidum la société Generali IARD, avec les sociétés Allianz IARD, venue aux droits de la société AGF IARD, Pacifica, venue aux droits de la société Assurances fédérales IARD, BPCE assurances anciennement GCE assurances, venue aux droits de la société Ecureuil assurances, AXA France IARD, AGF courtage et Generali assurances IARD, (les assureurs) à payer à la société une certaine somme, l'arrêt énonce que s'il n'est pas contesté qu'aucun des contrats d'assurance, mis à part celui de la société AGF, ne contient de disposition dérogatoire à l'article L. 121-8 du code des assurances et qu'au contraire chaque contrat, mis à part celui de la société AGF, reprend les termes de l'exclusion légale, celle-ci doit se combiner avec les dispositions impératives et d'ordre public de l'article L. 121-2 du même code, selon lesquelles l'assureur est garant des pertes et dommages causés par des personnes dont l'assuré est civilement responsable en vertu de l'article 1384 du code civil, quelles que soient la nature et la gravité des fautes de ces personnes ; qu'en d'autres termes, l'exclusion contractuelle de garantie ne peut jouer que dans le cas où c'est l'assuré lui-même qui est personnellement à l'origine du dommage, mais ne peut être opposée par l'assureur à l'assuré ou à la victime dans le cadre de l'action directe dans le cas où le dommage pour lequel la garantie est sollicitée est imputable à une personne dont l'assuré a été déclaré civilement responsable ;
Qu'en statuant ainsi, après avoir constaté que les dommages pour lesquels la société La Comté réclamait la garantie des assureurs avaient été causés par les enfants mineurs des assurés à l'occasion d'un mouvement de violences urbaines qualifié d'émeute, alors, d'une part, que les assureurs invoquaient seulement l'exclusion légale de garantie pour les pertes et dommages occasionnés par des émeutes ou par des mouvements populaires prévue par l'article L. 121-8 du code des assurances, et alors, d'autre part, que la prohibition, résultant de l'article L. 121-2 du code des assurances, de stipuler dans un contrat d'assurance une clause excluant la garantie de l'assuré en raison de la nature ou de la gravité de la faute de la personne dont celui-ci est civilement responsable, ne s'applique pas à l'exclusion légale de garantie définie par le texte précédent, la cour d'appel, qui a méconnu l'objet du litige, a violé les textes susvisés ;
Sur les moyens uniques, identiques, des pourvois incidents de la société Allianz IARD, pris en leur première branche :
Vu les articles 1134 du code civil et L. 124-1 du code des assurances ;
Attendu que pour condamner la société Allianz (venant aux droits d'AGF), in solidum avec d'autres assureurs, à payer une certaine somme à la victime et dire que le plafond de garantie prévu au contrat en cas de vols et d'actes de vandalisme commis par les enfants mineurs de l'assuré n'est pas applicable, la cour d'appel énonce que la clause qui limite la prise en charge de ces dommages à 50 000 francs (7 622 euros) ne correspond pas aux faits objet du litige en raison de leur ampleur et n'est donc pas applicable, seul l'étant le plafond relatif aux dommages matériels et aux pertes pécuniaires consécutives de 5 000 000 francs (769 230 euros) ;
Qu'en statuant ainsi, alors que l'ampleur des dommages indemnisables n'était pas une condition d'admission ou d'exclusion du plafond de garantie, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs des pourvois :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt (n° RG : 09/05716) rendu le 13 avril 2011, entre les parties, par la cour d'appel de Rouen ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Caen ;
Condamne la société La Comté aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-deux novembre deux mille douze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat aux Conseils, pour la société Generali IARD, demanderesse au pourvoi principal n° Y 11-19.523.
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR condamné la société Generali Iard, in solidum avec les sociétés Allianz, CGE Assurances, Pacifica et Axa France à payer à la société La Comté la somme de 66.039,89 euros ;
AUX MOTIFS QUE sur l'exclusion de garantie fondée sur les dispositions contractuelles de l'article L. 121-8 du code des assurances : le tribunal, en des motifs que la cour adopte, a justement estimé que les faits à l'origine du sinistre avaient été commis lors de la participation de leurs auteurs à des émeutes ; qu'il sera seulement précisé, pour la compréhension du présent arrêt, que les six mineurs en cause ont été définitivement déclarés coupables d'avoir commis les infractions reprochées dans le cadre de l'épisode de violences urbaines qui a affecté les banlieues des villes en novembre 2005 et qui a donné lieu à l'instauration de l'état d'urgence ; qu'en ce qui concerne les faits objets du présent litige, l'information a établi, et les juridictions de jugement ont retenu que, dans la nuit du samedi 5 au dimanche 6 novembre, plusieurs dizaines de personnes, munies de diverses armes et de cocktails molotov se sont livrées à des attaques par vagues successives des commerces du quartier de la Madeleine à Evreux, ont également incendié des véhicules et commis des violences sur les forces de l'ordre et les pompiers qui tentaient de maîtriser les incendies ; que la chronologie des événements figurant en tête de l'ordonnance de renvoi du 24 octobre 2006, qui mentionne l'arrivée des premiers flux de population sur le quartier de la Madeleine vers 20 heures, le début des incendies de voiture à 21 heures 30 par 200 jeunes devant le chantier de la communauté d'agglomération, est particulièrement éloquent sur le rattachement direct des dommages causés au commerce de la société La Comté aux faits justement qualifiés d'émeutes, peu important à cet égard que la participation à une émeute ne soit pas en tant que telle pénalement qualifiable ; qu'il n'est pas contesté qu'aucun des contrats d'assurance, mis à part celui des AGF, ne contient de disposition dérogatoire à l'article L. 121-8 du code des assurances, qui dispose que, sauf convention contraire, l'assureur ne répond pas des pertes et dommages occasionnés soit par la guerre étrangère, soit par la guerre civile, soit par des émeutes ou par des mouvements populaires ; qu'au contraire, chaque contrat, mis à part celui des AGF, reprend les termes de l'exclusion légale ; que, cependant, cette exclusion doit se combiner avec les dispositions impératives et d'ordre public de l'article L. 121-2 du même code, selon lesquelles l'assureur est garanti des pertes et dommages causés par des personnes dont l'assuré est civilement responsable en vertu de l'article 1384 du code civil, quelles que soient la nature et la gravité des fautes de ces personnes ; qu'il résulte dès lors de la combinaison de ces deux articles qu'une clause de la police d'assurance ne saurait exclure, directement ou indirectement, la garantie de l'assuré, dès lors que ce dernier a été déclaré civilement responsable des conséquences d'une faute de la personne dont il doit répondre, quelles qu'aient été les caractéristiques de cette faute, et par conséquent même si cette faute a été commise dans des circonstances de fait visées par l'exclusion de garantie, telles qu'en l'espèce la participation à une émeute ; qu'en d'autres termes, l'exclusion contractuelle de garantie ne peut jouer que dans le cas où c'est l'assuré lui-même qui est personnellement à l'origine du dommage, mais ne peut être opposée par l'assureur à l'assuré ou à la victime dans le cadre de l'action directe dans le cas où le dommage pour lequel la garantie est sollicitée est imputable à une personne dont l'assuré a été déclaré civilement responsable ; que, dès lors, la cour retiendra que les compagnies CGE, Generali, Axa France et Pacifica ne peuvent opposer à la société La Comté les clauses de non-garantie relatives aux sinistres trouvant leur origine dans des émeutes, puisque la responsabilité de leurs assurés est recherchée en qualité de civilement responsable ;
1) ALORS QUE l'assureur ne répond pas, sauf convention contraire, des pertes et dommages occasionnés par des émeutes ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a relevé que le contrat souscrit par les époux X... auprès de la société Concorde Assurances devenu Generali ne contenait aucune disposition dérogatoire à l'article L. 121-8 du code des assurances, qui dispose que l'assureur ne répond pas des pertes et dommages occasionnés par des émeutes ou par des mouvements populaires ; qu'elle a également constaté, par motifs propres comme adoptés, que les dommages subis par la société La Comté résultaient des émeutes survenues à Evreux dans la nuit du 5 au 6 novembre 2005 ; qu'en décidant néanmoins que la société Generali Iard devait sa garantie pour ces dommages, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé l'article L. 121-8 du code des assurances ;
2) ALORS QUE les juges du fond qui sont liés par les conclusions prises devant eux, ne peuvent modifier les termes du litige dont ils sont saisis ; que dans ses écritures, la société Generali rappelait que sa police d'assurance ne comportait aucune clause relative au risque d'émeute, ce dont il résultait qu'elle ne dérogeait pas à l'exclusion légale de ce risque édictée par l'article L. 121-8 du code des assurances (cf. concl., p. 4 § 8) ; qu'en décidant que la société Generali ne pouvait « opposer les clauses de non-garantie relatives aux sinistres trouvant leur origine dans des émeutes » (cf. arrêt, p. 6 § 5), quand celle-ci se prévalait non d'une exclusion conventionnelle de garantie mais d'une exclusion légale, la cour d'appel a méconnu l'objet du litige et violé l'article 4 du code de procédure civile ;
3) ALORS QUE la prohibition, résultant de l'article L. 121-2 du code des assurances, de stipuler dans un contrat d'assurance une clause excluant la garantie de l'assuré en raison de la nature ou de la gravité de la faute de la personne dont il est civilement responsable, ne s'applique qu'aux clauses d'exclusion contractuellement prévues par les parties au contrat d'assurance ; qu'elle ne concerne pas les exclusions de garantie d'origine légale ; qu'en s'abstenant de rechercher, comme il lui était demandé (cf. concl., p. 7 § 10), si l'article L. 121-8 du code des assurances, dont elle a écarté l'application au bénéfice de l'article L. 121-2 de ce code, n'est pas une disposition spéciale dérogeant à ce dernier texte, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 121-8 du code des assurances ;
4) ALORS, en tout état de cause, QUE l'article L. 121-2 du code des assurances autorise l'exclusion de garantie, en matière de responsabilité du fait d'autrui, lorsqu'elle n'est pas fondée sur la nature ou la gravité de la faute de celui dont l'assuré doit répondre, mais sur une autre circonstance, indépendante de cette faute ; que l'exclusion énoncée à l'article L. 121-8 du code des assurances n'évoque que les dommages causés par la guerre, une émeute ou un mouvement populaire, sans aucune référence à la faute à l'origine de ces dommages ; que dès lors, en affirmant que la société Generali Iard ne pouvait opposer à la société La Comté la non-garantie relative aux sinistres trouvant leur origine dans des émeutes, la cour d'appel a violé l'article L. 121-2 du code des assurances.Moyen produit au pourvoi principal par la Me Balat, avocat aux Conseils, pour la société Pacifica, demanderesse au pourvoi principal n° F 11-19.806.
Il est reproché à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir condamné la société Pacifica, in solidum avec les compagnies Allianz, GCE Assurances, Generali et Axa France, à payer à la société La Comté la somme de 66.039,89 € majorée des intérêts au taux légal à compter de l'assignation ;
AUX MOTIFS QUE les six mineurs en cause ont été définitivement déclarés coupables d'avoir commis les infractions reprochées dans le cadre de l'épisode de violences urbaines qui a affecté les banlieues des villes en novembre 2005, et qui a donné lieu à l'instauration de l'état d'urgence ; qu'en ce qui concerne les faits objets du présent litige, l'information a établi, et les juridictions de jugement ont retenu que, dans la nuit du samedi 5 au dimanche 6 novembre, plusieurs dizaines de personnes, munies de diverses armes et de cocktails molotov se sont livrées à des attaques par vagues successives des commerces du quartier de la Madeleine à Evreux, ont également incendié des véhicules et commis des violences sur les forces de l'ordre et les pompiers qui tentaient de maîtriser les incendies ; que la chronologie des événements figurant en tête de l'ordonnance de renvoi du 24 octobre 2006, qui mentionne l'arrivée des premiers flux de population sur le quartier de la Madeleine vers 20 heures, le début des incendies de voitures à 21 heures 05, diverses agressions par des groupes armés, puis un assaut, vers 21 heures 30 par deux cents jeunes devant le chantier de la communauté d'agglomération, est particulièrement éloquent sur le rattachement direct des dommages causés au commerce de la société La Comté aux faits justement qualifiés d'émeutes ; qu'il importe peu à cet égard que la participation à une émeute ne soit pas en tant que telle pénalement qualifiable, et que, par ailleurs, la volonté de destruction sans mobile particulier animant les auteurs des faits autorise à considérer qu'il s'agissait bel et bien d'une manifestation de contestation de l'ordre établi, assimilable à une revendication d'ordre politique ou social ; qu'il n'est pas contesté qu'aucun des contrats d'assurance, mis à part celui des AGF, devenue Allianz, ne contient de disposition dérogatoire à l'article L. 121-8 du code des assurances, qui dispose que, sauf convention contraire, l'assureur ne répond pas des pertes et dommages occasionnés soit par la guerre étrangère, soit par la guerre civile, soit par des émeutes ou par des mouvements populaires ; qu'au contraire, chaque contrat, mis à part celui des AGF, reprend les termes de l'exclusion légale qui vient d'être rappelée ; que cependant, cette exclusion doit se combiner avec les dispositions impératives et d'ordre public de l'article L. 121-2 du même code, selon lesquelles l'assureur est garant des pertes et dommages causés par des personnes dont l'assuré est civilement responsable en vertu de l'article 1384 du code civil, quelles que soient la nature et la gravité des fautes de ces personnes ; qu'il résulte de la combinaison de ces deux articles qu'une clause de la police d'assurance ne saurait exclure, directement ou indirectement, la garantie de l'assuré, dès lors que ce dernier a été déclaré civilement responsable des conséquences d'une faute de la personne dont il doit répondre, quelles qu'aient été les caractéristiques de cette faute, et par conséquent même si cette faute a été commise dans des circonstances de fait visées par l'exclusion de garantie, telles en l'espèce la participation à une émeute ; qu'en d'autres termes, l'exclusion contractuelle de garantie ne peut jouer que dans le cas où c'est l'assuré lui-même qui est personnellement à l'origine du dommage, mais ne peut être opposée par l'assureur à l'assuré ou à la victime dans le cadre de l'action directe dans le cas où le dommage pour lequel la garantie est sollicitée est imputable à une personne dont l'assuré a été déclaré civilement responsable ; que dès lors, la cour retiendra que les compagnies CGE, Generali, Axa France et Pacifica, ne peuvent opposer à la société La Comté les clauses de non garantie relatives aux sinistres trouvant leur origine dans des émeutes, puisque la responsabilité de leurs assurés est recherchée en qualité de civilement responsable ;
ALORS QUE les dispositions de l'article L. 121-2 du code des assurances, selon lesquelles « l'assureur est garant des pertes et dommages causés par des personnes dont l'assuré est civilement responsable en vertu de l'article 1384 du code civil, quelles que soient la nature et la gravité des fautes de ces personnes », ont uniquement pour effet d'annihiler les clauses d'exclusion se fondant directement sur la nature volontaire, la gravité des agissements ou la qualité de leur auteur principal ; que ces dispositions n'interfèrent en rien sur l'exclusion légale de garantie relative à certains événements objectivement définis, telle que la situation d'émeute visée à l'article L. 121-8 du code des assurances, dont les dispositions sont d'ordre public ; qu'en jugeant dès lors que la compagnie Pacifica ne pouvait opposer à la société La Comté « les clauses de non garantie relatives aux sinistres trouvant leur origine dans des émeutes, puisque la responsabilité de ses assurés est recherchée en qualité de civilement responsable » (arrêt attaqué, p. 6 in fine), cependant que l'assureur est fondé à opposer à l'assuré l'exclusion légale de garantie tirée de l'existence d'une émeute urbaine, même si les agissements litigieux sont le fait d'un individu dont l'assuré est civilement responsable, la cour d'appel a violé l'article L. 121-2 du code des assurances par fausse application et l'article L. 121-8 du même code par refus d'application.Moyen identique produit par la SCP Odent et Poulet, avocat aux Conseils, pour la société AXA France IARD, demanderesse aux pourvois provoqués n° Y 11-19.523 et F 11-19.806.
II est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR condamné l'assureur (la société AXA FRANCE IARD) d'un parent civilement responsable, à dédommager la victime (la société LA COMTE) d'un mineur délinquant, au titre de son préjudice matériel,
AUX MOTIFS QUE, sur l'exclusion de garantie fondée sur les dispositions contractuelles et l'article L. 121-8 du code des assurances, le tribunal, par des motifs adoptés par la cour, avait justement estimé que les faits à l'origine du sinistre avaient été commis lors de la participation par leurs auteurs à des émeutes ; qu'il devait être seulement précisé, pour la compréhension du présent arrêt, que les six mineurs en cause avaient été définitivement déclarés coupables d'avoir commis les infractions reprochées dans le cadre de l'épisode de violences urbaines qui avait affecté les banlieues des villes en novembre 2005 et qui avait donné lieu à l'instauration de l'état d'urgence ; qu'en ce qui concernait les faits objets du litige, l'information avait établi, et les juridictions de jugement avaient retenu que, dans la nuit du samedi 5 au dimanche 6 novembre, plusieurs dizaines de personnes, munies de diverses armes et de cocktails Molotov, s'étaient livrées à des attaques par vagues successives des commerces du quartier de la Madeleine à Evreux, avaient également incendié des véhicules et commis des violences sur les forces de l'ordre et les pompiers qui tentaient de maîtriser les incendies ; que la chronologie des événements figurant en tête de l'ordonnance de renvoi du 24 octobre 2006, qui mentionnait l'arrivée des premiers flux de population sur le quartier de la Madeleine vers 20 h, le début des incendies de voiture à 21 h 05, diverses agressions par des groupes armés, puis un assaut, vers 21 h 30, par 200 jeunes, devant le chantier de la communauté d'agglomération, était particulièrement éloquent sur le rattachement direct des dommages causés au commerce de la société LA COMTE aux faits justement qualifiés d'émeutes, peu important que la participation à une émeute ne soit pas, en tant que telle, pénalement qualifiable, et, par ailleurs, la volonté de destruction sans mobile particulier animant les auteurs des faits autorisait à considérer qu'il s'agissait bel et bien d'une manifestation de contestation de l'ordre établi, assimilable à une revendication d'ordre politique ou social ; qu'il n'était pas contesté qu'aucun des contrats d'assurance, mis à part celui des AGF, devenu ALLIANZ, ne contenait de disposition dérogatoire à l'article L. 121-8 du code des assurances qui dispose que, sauf convention contraire, l'assureur ne répond pas des pertes et dommages occasionnés soit par la guerre étrangère, soit par la guerre civile, soit par des émeutes ou des mouvements populaires ; qu'au contraire, chaque contrat, mis à part celui des AGF, reprenait les termes de l'exclusion légale ; que, cependant, cette exclusion devait se combiner avec les dispositions impératives et d'ordre public de l'article L. 121-2 du même code, selon lesquelles l'assureur est garant des pertes et dommages causés par des personnes dont l'assuré est civilement responsable, en vertu de l'article 1384 du code civil, quelles que soient la nature et la gravité des fautes de ces personnes ; qu'il résultait dès lors de la combinaison de ces deux articles qu'une clause de la police d'assurance ne pouvait exclure, directement ou indirectement, la garantie de l'assuré, dès lors que celui-ci a été déclaré civilement responsable des conséquences d'une faute de la personne dont il doit répondre, quelles qu'aient été les caractéristiques de cette faute, et par conséquent même si cette faute a été commise dans des circonstances de fait visées par l'exclusion de garantie, telles qu'en l'espèce la participation à une émeute ; qu'en d'autres termes, l'exclusion contractuelle de garantie ne peut jouer que dans le cas où c'est l'assuré lui-même qui se trouve personnellement à l'origine du dommage, mais ne peut être opposée, par l'assureur à l'assuré ou à la victime dans le cadre de l'action directe, dans le cas où le dommage pour lequel la garantie est sollicitée est imputable à une personne dont l'assuré est civilement responsable ; que, dès lors, la cour devait retenir que les assureurs, dont la société AXA FRANCE IARD, ne pouvaient opposer à la société LA COMTE les clauses de non-garantie relatives aux sinistres trouvant leur origine dans des émeutes, puisque la responsabilité de leurs assurés était recherchée en qualité de civilement responsables,
1°) ALORS QUE l'exclusion légale de garantie de l'assureur de responsabilité civile, concernant la participation de l'assuré à une émeute, s'applique, que la personne concernée pas de tels agissements soit l'assuré lui-même ou l'un de ses enfants dont il est civilement responsable ; qu'en l'espèce, la cour, qui a décidé que cette exclusion légale de garantie devait être écartée, puisque ce n'était pas l'assuré lui-même qui avait participé à l'émeute ayant occasionné des dommages à la société LA COMTE, mais son fils mineur dont il était civilement responsable, a violé les articles L. 121-2 et L. 121-8 du code des assurances ;
2°) ALORS QUE si l'assureur est garant des pertes et dommages causés par des personnes dont l'assuré est civilement responsable, quelles que soient la nature et la gravité des fautes de ces personnes, les parties peuvent convenir d'exclure de la garantie d'assurance, les conséquences de la participation à une émeute de l'assuré ou des personnes dont il est civilement responsable ; qu'en l'espèce, la cour, qui a énoncé que les parties ne pouvaient exclure de la garantie que les conséquences de la participation à de tels faits de l'assuré lui-même et non des personnes dont il est civilement responsable, a violé les articles L. 113-1, L. 121-2 du code des assurances et 1134 du code civil.Moyen identique produit par la SCP Ortscheidt, avocat aux Conseils, pour la société Allianz IARD, demanderesse aux pourvois incidents n° Y 11-19.523 et F 11-19.806.
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir condamné la société Allianz, in solidum avec les sociétés CGE Assurances, Generali, Pacifica et Axa France à payer à la société La Comté la somme de 66.039,89 euros majorée des intérêts au taux légal à compter de l'assignation et d'avoir dit que le plafond de garantie prévu dans le contrat d'AGF devenue Allianz en ce qui concerne les vols et actes de vandalisme commis par les enfants mineurs de l'assuré n'est pas applicable ;
AUX MOTIFS QUE les plafonds de garantie doivent s'entendre sinistre par sinistre, soit en l'espèce commerce par commerce ; que les demandes d'Allianz, CGE Assurances, et des Assurances Fédérales tendant à voir répartir entre toutes les victimes leurs plafonds respectifs de garantie ne peuvent être admises, étant au demeurant observé qu'elles n'auraient pu aboutir qu'en présence à l'instance, de toutes les victimes concernées ; que leurs montants ne font l'objet d'aucune observation, et seront donc jugés applicables ; qu'enfin, en ce qui concerne le plafond contractuel d'AGF devenue Allianz, la clause qui limite la prise en charge des dommages résultant de faits de vol ou d'actes de vandalisme commis par les enfants mineurs de l'assuré à 50.000 francs ou 7.622 €, ne correspond pas aux faits objet du présent litige en raison de leur ampleur, et n'est donc pas applicable, seul l'étant le plafond relatif aux dommages matériels et aux pertes pécuniaires consécutives de 5.000.000 francs (769.230 €) ;
1°) ALORS QU' il résulte des termes clairs et précis du contrat d'assurance conclu entre la société Allianz, venue aux droits d'AGF, et Madame Y..., l'existence de montants maxima de garanties et franchises par sinistre ; que le contrat comprend « une limitation particulière pour vol ou actes de vandalisme commis par vos enfants mineurs » à hauteur de 50.000 francs, sans distinction selon l'ampleur de ces actes ; qu'en écartant la clause fixant le plafond de la garantie de la société Allianz motif pris que les actes de vandalisme visés dans son contrat d'assurance ne correspondaient pas aux faits de vandalisme commis par le fils de Madame Y..., lesquels avaient revêtu une certaine « ampleur », la cour d'appel a ajouté au contrat d'assurance une condition tenant à « l'ampleur » des actes de vandalisme, en violation de l'article 1134 du code civil ;
2°) ALORS, EN TOUT ETAT DE CAUSE, QUE la cour d'appel ne pouvait considérer, pour écarter la clause qui limite la prise en charge des dommages résultant de faits ou de vol ou d'actes de vandalisme, que les faits visés au contrat ne correspondaient pas aux faits du présent litige en raison de leur ampleur, tout en constatant que les plafonds de garantie devaient s'entendre sinistre par sinistre, soit commerce par commerce, ce dont il s'inférait qu'elle ne pouvait tenir compte de l'ampleur des sinistres dans leur globalité mais uniquement sinistre par sinistre ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé les articles L. 124-1-1 du code des assurances et 1134 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 11-19523;11-19806
Date de la décision : 22/11/2012
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Rouen, 13 avril 2011


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 22 nov. 2012, pourvoi n°11-19523;11-19806


Composition du Tribunal
Président : Mme Flise (président)
Avocat(s) : Me Balat, SCP Boré et Salve de Bruneton, SCP Boulloche, SCP Odent et Poulet, SCP Ortscheidt, SCP Rocheteau et Uzan-Sarano

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:11.19523
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