La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

21/11/2012 | FRANCE | N°11-23704

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 21 novembre 2012, 11-23704


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 13 décembre 2010), qu'engagé le 1er janvier 1985 par la société Le Moorea en qualité de chef de partie, M. X... a été licencié pour faute grave le 5 août 2008, pour avoir agressé un collègue et donné un coup violent au visage de son employeur devant la clientèle ;
Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de dire le licenciement fondé sur une faute grave et de le débouter de ses demandes au titre de la rupture, alors, selon l

e moyen :
1°/ que la faute grave suppose un fait ou un ensemble de faits imp...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 13 décembre 2010), qu'engagé le 1er janvier 1985 par la société Le Moorea en qualité de chef de partie, M. X... a été licencié pour faute grave le 5 août 2008, pour avoir agressé un collègue et donné un coup violent au visage de son employeur devant la clientèle ;
Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de dire le licenciement fondé sur une faute grave et de le débouter de ses demandes au titre de la rupture, alors, selon le moyen :
1°/ que la faute grave suppose un fait ou un ensemble de faits imputable au salarié qui constitue une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise pendant la durée du préavis ; que le fait pour un salarié souffrant d'un syndrome anxio-dépressif et justifiant d'une ancienneté de plus de vingt-trois années sans aucun incident, d'avoir agressé légèrement, une seule fois, son employeur, patron de restaurant, dans un climat de tension entre salariés ne caractérise pas une faute grave ; que pour juger que le licenciement de M. X... repose sur une faute grave, la cour d'appel a retenu que le 13 juillet 2008, le salarié avait " donné un coup de tête " à son patron au cours d'une altercation avec un collègue ; qu'en statuant ainsi quand il s'agissait d'un acte isolé, la cour d'appel qui n'a tenu compte ni de l'ancienneté du salarié, ni du climat de tension régnant dans l'entreprise, ni de l'état psychologique fragile de l'intéressé, victime d'injures raciales, a violé les articles L. 1232-1, L. 1235-1, L. 1234-1 et L. 1234-9 du code du travail ;
2°/ qu'en s'abstenant d'expliquer en quoi le fait reproché au salarié aurait rendu impossible son maintien dans l'entreprise pendant la durée du préavis, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1232-1, L. 1235-1, L. 1234-1 et L. 1234-9 du code du travail ;
Mais attendu qu'ayant souverainement apprécié la valeur et la portée des attestations, la cour d'appel, qui a retenu, d'une part, que le contexte de tension et le comportement raciste de l'employeur n'étaient pas établis et, d'autre part, que le salarié avait, devant d'autres salariés et les clients de l'établissement, agressé un collègue puis donné un violent coup au visage de son employeur tentant de calmer la situation, a pu en déduire que ces faits, nonobstant l'importante ancienneté du salarié, rendaient impossible son maintien dans l'entreprise et constituaient une faute grave ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu les articles 700 du code de procédure civile et 37 de la loi du 10 juillet 1991, rejette la demande ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt et un novembre deux mille douze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Didier et Pinet, avocat aux Conseils, pour M. X....
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR jugé que le licenciement de monsieur Mustapha X... est justifié par une faute grave et d'AVOIR débouté le salarié de ses demandes dirigées contre la société Le Moorea ;
AUX MOTIFS QUE monsieur Mustapha X... a été engagé par la société Le Moorea représentée par son président monsieur A... le 1er janvier 1985 en qualité de plongeur et exerçait en dernier lieu la fonction de chef de partie ; que, par un courrier du 17 et 18 juillet 2008, il était convoqué à un entretien préalable fixé au 30 juillet 2008 auquel il ne se présentait pas et le 5 août 2008 il était licencié pour faute grave aux motifs suivants : « Nous devons à ce jour procéder à votre licenciement pour faute grave et ce en raison de votre attitude inadmissible. Les faits pour lesquels votre licenciement pour faute grave est prononcé sont les suivants : vous avez agressé le dimanche 13 juillet 2008 à 14 heures votre collègue de travail, monsieur Emmanuel Y..., monsieur A..., votre employeur de la société Le Moorea ayant essayé de vous calmer, vous l'avez alors agressé physiquement et violemment en lui donnant un coup de tête, cela devant la clientèle, et en lui occasionnant une ITT. Cette attitude, à savoir l'altercation avec agression avec monsieur Y... puis l'agression physique de monsieur Marcel A... est constitutive d'une faute grave … » (cf. arrêt p. 3 § 1 et 2) ; que si chacune des parties (…) a déposé une plainte donnant des faits survenus le 13 juillet 2008 une version contradictoire, il convient de s'en référer aux attestations et certificats médicaux produits pour déterminer si monsieur X... a commis les faits de violence qui ont motivé son licenciement pour faute grave ; que la société Le Moorea, à laquelle appartient la charge de la preuve de la faute grave, produit diverses attestations faisant état des faits suivants : monsieur Y..., second de cuisine : « atteste avoir été témoin d'un incident qui a eu lieu dans l'établissement le 13 juillet 2008 à 14 h. 30 avec monsieur Mustapha X..., celui-ci a eu des accès de colère et a porté la main sur moi et ensuite mon patron est intervenu et il s'en est pris à lui et l'a frappé », mademoiselle Z..., maître d'hôtel : « j'étais en service en salle et venant de la cuisine, je pouvais entendre une altercation assez violente entre Mustapha X... et Emmanuel Y.... Etant donné la portée des cris, nos clients pouvaient profiter de la dispute. Sur ce, mon patron, monsieur A..., est entré en cuisine pour essayer de calmer Mustapha X... puisque je l'ai aperçu plus énervé que jamais, les yeux sortant des orbites, il a même agressé physiquement Emmanuel Y.... Pour finir, j'ai vu monsieur A... ressortir de la cuisine totalement choqué, m'expliquant que monsieur Mustapha X... lui avait carrément donné un coup de tête », monsieur B..., client : « … Vers 14 heures environ, j'ai entendu des cris provenant de la cuisine de ce restaurant et craignant un accident je me suis précipité vers ce lieu pour assister à un spectacle navrant. En effet, un employé de la cuisine qui, je l'ai appris par la suite, se nommait X... Mustapha, agressait monsieur A... Marcel autant verbalement que physiquement puisqu'il le blessait d'un coup de tête au visage. Commotionné et choqué, monsieur A... a été transporté dans la salle attenante où les premiers soins lui furent donnés », monsieur C..., chef de rang : « déclare avoir vu le dimanche 13 juillet 2008 à 14 heures le cuisinier Mustapha X... complètement hors de lui agresser le second Manu. Monsieur A... est entré dans la cuisine essayant de calmer les protagonistes, Mustapha s'en est alors pris à lui et lui a entre autres donné un coup de tête », monsieur D..., chef de rang : « le dimanche 13 juillet 2008 à 14 h. 30 … dans la cuisine, monsieur Marcel A..., PDG, s'est fait agresser verbalement et physiquement par le chef de partie Mustapha X.... Il l'a frappé au visage », madame E..., cliente : « alors que je me rendais aux toilettes du restaurant … avoir assisté à une altercation. J'ai vu monsieur X... Mustapha agresser verbalement monsieur A... le patron du restaurant et lui donner un coup de tête. J'ai pu constater que le nez de monsieur A... était contusionné », monsieur F..., chef de partie : « avoir assisté à l'altercation entre monsieur Y... Emmanuel et Monsieur Mustapha X.... Monsieur Mustapha X... a agressé monsieur Emmanuel Y... … Monsieur A... est intervenu pour calmer tout le monde, monsieur Mustapha a donné un coup de tête à monsieur A.... Cette altercation est survenu le dimanche 13 juillet à 14 heures » ; que pour contrer le contenu circonstancié et concordant de ces diverses attestations, monsieur X... soutient que mademoiselle Z... serait une « menteuse » au motif que lors de son procès-verbal d'audition devant les services de police elle aurait déclaré avoir « vu le cuisinier Mustapha mettre un coup de tête » sur le visage de son patron et non pas l'avoir appris de ce dernier, alors que ce qui importe est la réalité de ce qui s'est passé et non la façon dont les témoins ensuite restituent ou reconstituent le déroulement d'une action ; que ce qui est établi en l'espèce par l'ensemble concordant des témoignages et par le certificat médical produit est que monsieur X... a présenté effectivement « un gonflement » au niveau de la zone nasale qui a justifié une ITT de 24 heures, ce qui est une constatation médicale objective authentifiant le fait que monsieur X... a donné un coup de tête à monsieur A... ; que, par ailleurs, si monsieur X... produit de son côté un certificat médical faisant état de « plusieurs hématomes et ecchymoses siégeant à la face antérieure de l'ensemble du bras droit » n'entraînant pas d'ITT, cette constatation n'est nullement incompatible avec l'ensemble des déclarations selon lesquelles cet hématome résulte soit de son agression sur monsieur Y..., soit de l'intervention de monsieur A... pour le calmer et n'est pas de nature à contredire le fait qu'il s'en est pris d'abord à monsieur Y... et a ensuite donné un coup de tête à monsieur A... ; que la déposition de monsieur G... indiquant avoir vu « le patron qui bousculait Mustapha » sans pour autant contredire les déclarations des autres témoins quant au coup de tête que ce dernier aurait donné, n'apporte rien de plus au débat ; que de même, la première attestation de monsieur H..., susvisé, qui n'a vu que les « yeux rouges » et le « bleu sur le bras droit » de monsieur X... tout en parlant d'une « altercation » entre monsieur A..., monsieur Y... et monsieur X... sans pourtant qu'il ait vu monsieur X... agresser verbalement ou physiquement monsieur A... et qui n'a rien constaté, contrairement aux autres témoins, sur le visage de ce dernier, est manifestement incomplète et en tout cas contestée par les autres salariés et clients qui ont vu le coup de tête donné à monsieur A... lequel est authentifié par certificat médical ; que quels que soient les témoignages produits par monsieur X... émanant de ses anciens collègues ou amis faisant état à des époques diverses qu'il était gentil, serviable, honnête, non agressif, poli et respectueux des autres, indépendamment du fait qu'ils sont en partie contredits par des témoignages contraires faisant état de son agressivité et d'une altercation avec monsieur Carlos I...
J... au cours de laquelle il aurait sorti un couteau, sont en toute hypothèse sans incidence sur les faits qui ont eu lieu le 13 juillet 2008 et qui sont largement établis par les pièces produites ; que monsieur X... a donc commis des faits de violence qui constituent une faute grave et qui étaient incompatibles avec la poursuite du contrat de travail y compris pendant la durée limitée du préavis ; que c'est en conséquence à juste titre que monsieur X... a été débouté de sa demande d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et de celle formée au titre du préjudice moral subi compte tenu des conditions vexatoires du licenciement, conditions vexatoires nullement établies (Cf. arrêt p. 7 et 8)
1°) ALORS QUE la faute grave suppose un fait ou un ensemble de faits imputable au salarié qui constitue une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise pendant la durée du préavis ; que le fait pour un salarié souffrant d'un syndrome anxio-dépressif et justifiant d'une ancienneté de plus de 23 années sans aucun incident, d'avoir agressé légèrement, une seule fois, son employeur, patron de restaurant, dans un climat de tension entre salariés ne caractérise pas une faute grave ; que pour juger que le licenciement de monsieur X... repose une faute grave, la cour d'appel a retenu que le 13 juillet 2008, le salarié avait « donné un coup de tête » à son patron au cours d'une altercation avec un collègue ; qu'en statuant ainsi quand il s'agissait d'un acte isolé, la cour d'appel qui n'a tenu compte ni de l'ancienneté du salarié, ni du climat de tension régnant dans l'entreprise, ni de l'état psychologique fragile de l'intéressé, victime d'injures raciales, a violé les articles L. 1232-1, L. 1235-1, L. 1234-1 et L. 1234-9 du code du travail ;
2°) ALORS QU'en s'abstenant d'expliquer en quoi le fait reproché au salarié aurait rendu impossible son maintien dans l'entreprise pendant la durée du préavis, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1232-1, L. 1235-1, L. 1234-1 et L. 1234-9 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 11-23704
Date de la décision : 21/11/2012
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 13 décembre 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 21 nov. 2012, pourvoi n°11-23704


Composition du Tribunal
Président : M. Lacabarats (président)
Avocat(s) : SCP Didier et Pinet, SCP Piwnica et Molinié

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:11.23704
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award