La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

08/11/2012 | FRANCE | N°11-23782

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 08 novembre 2012, 11-23782


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué rendu sur renvoi après cassation (2e Civ., 13 novembre 2008, pourvoi n° 07-18.365) et les productions, que la caisse primaire d'assurance maladie de l'Oise (la caisse primaire) a pris en charge au titre de la législation professionnelle l'accident dont a été victime le 4 mars 1999 M. X..., salarié de la société Mather et Platt devenue Tyco Fire and Integrated Solutions France et lui a reconnu un taux d'incapacité permanente partielle de 10 % ; que l'employeur a saisi aux

fins d'annulation de cette décision le tribunal du contentieux de...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué rendu sur renvoi après cassation (2e Civ., 13 novembre 2008, pourvoi n° 07-18.365) et les productions, que la caisse primaire d'assurance maladie de l'Oise (la caisse primaire) a pris en charge au titre de la législation professionnelle l'accident dont a été victime le 4 mars 1999 M. X..., salarié de la société Mather et Platt devenue Tyco Fire and Integrated Solutions France et lui a reconnu un taux d'incapacité permanente partielle de 10 % ; que l'employeur a saisi aux fins d'annulation de cette décision le tribunal du contentieux de l'incapacité de Paris ; que celui-ci, s'estimant insuffisamment informé, a, par jugement du 6 octobre 2005, ordonné une instruction complémentaire afin que soient versées aux débats toutes pièces administratives et médicales détenues par les organismes décideurs ou les médecins-conseils de la Caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés (la Caisse nationale) nécessaires à la solution d'un litige essentiellement médical ; que par ordonnance du même jour, le président du tribunal a enjoint sous astreinte au service médical de la caisse nationale détaché auprès de la caisse primaire de lui faire parvenir, à l'intention du médecin consultant qui devait être désigné, toutes pièces administratives et médicales relatives à cette affaire, ces dernières éventuellement sous double enveloppe "secret médical" ; que le médecin-conseil, chef du service du contrôle médical, a poursuivi la rétractation de cette ordonnance aux motifs que son service n'était qu'un service déconcentré de la caisse nationale et que le secret médical lui interdisait de déférer à cette injonction ; qu'une ordonnance du 21 décembre 2005 lui a opposé que le refus de communication invoqué aurait pour effet d'annihiler tout débat contradictoire au sens de l'article 6 § 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, de gêner l'analyse du médecin expert du tribunal et d'enrayer le cours de la justice ;
Sur le premier moyen commun aux pourvois principal et provoqué :
Attendu que la Caisse nationale et la caisse primaire font grief à l'arrêt de décider que l'agent de la caisse primaire ayant agi au nom de la caisse nationale n'a pas qualité pour la représenter, et de décider en conséquence de tenir pour non avenues les pièces de procédure établies au nom de la caisse nationale, puis de déclarer l'appel irrecevable, alors, selon le moyen :
1°/ qu'en application de l'article L. 144-3 du code de la sécurité sociale, un organisme de sécurité sociale, partie à l'instance, peut être représenté par un employé d'un autre organisme de sécurité sociale ; que la Caisse nationale, si même elle a le caractère d'un établissement public, est un organisme de sécurité sociale ; qu'en lui déniant le droit de se faire représenter par un agent d'une caisse primaire, l'arrêt attaqué a violé l'article L. 144-3 du code de la sécurité sociale ;
2°/ que les dispositions régissant l'organisation de la Caisse nationale, et notamment les articles L. 221-2 et L. 223-3-1 du code de la sécurité sociale en tant que ceux-ci fixent de façon générale la compétence du directeur général de la Caisse nationale, doivent être regardées comme constitutives d'une règle générale puisqu'ayant pour objet d'identifier tous les actes susceptibles d'être accomplis par le directeur général ; qu'en opposant une règle générale pour écarter une règle spéciale, propre à la procédure devant la Cour nationale, les juges du fond ont une nouvelle fois violé l'article L. 144-3 du code de la sécurité sociale, ensemble le principe specialia generalibus derogant ;
3°/ que l'article L. 124-5 du code de la sécurité sociale énonce en termes généraux que "tout organisme de sécurité sociale partie à une instance contentieuse peut s'y faire représenter par … un employé d'un autre organisme de sécurité sociale", sans distinguer selon que les établissements soient publics ou privés ; que cette disposition doit être comprise comme autorisant la représentation de la Caisse nationale par un agent d'une caisse primaire d'assurance maladie ; qu'à cet égard, l'arrêt attaqué a été rendu en violation de l'article L. 124-5 du code de la sécurité sociale ;
4°/ que, si même il fallait appliquer à l'article L. 124-5 du code de la sécurité sociale l'exclusion résultant de l'article L. 122-1 telle qu'applicable aux établissements publics, la règle spéciale posée par l'article L. 144-3, propre aux juridictions appliquées à connaître du contentieux relatif à la sécurité sociale, déroge elle-même à cette exclusion ; qu'en décidant le contraire, les juges du fond ont violé l'article L. 144-3 du code de la sécurité sociale, ensemble le principe speciala generalibus derogant ;
Mais attendu qu'il résulte, d'une part, des dispositions des articles L. 221-3-1 et R. 221-10 du code de la sécurité sociale que le directeur général de la Caisse nationale, à laquelle l'article L. 221-2 du même code confère le statut d'établissement public national à caractère administratif, en assure la représentation en justice et ne peut déléguer sa signature qu'à ceux de ses collaborateurs qui exercent une fonction de direction au sein de l'établissement pour effectuer en son nom soit certains actes, soit tous les actes relatifs à certaines de ses attributions ; qu'il résulte, d'autre part, de la combinaison des articles L. 122-1, L. 124-5 et L. 144-3 du code de la sécurité sociale que les organismes de sécurité sociale ayant la forme d'établissement public ne peuvent être représentés en justice par un agent d'un autre organisme de sécurité sociale ;
Que c'est par une exacte application de ces textes que la Cour nationale a dit que Mme Y..., agent de la caisse primaire, n'avait pas qualité pour représenter la caisse nationale en justice ;
Et attendu que l'arrêt ne décide pas de tenir pour non avenues les pièces de procédure établies au nom de la Caisse nationale ;
D'où il suit que le moyen manque partiellement en fait et n'est pas fondé pour le surplus ;
Mais sur le second moyen commun aux pourvois principal et provoqué qui est recevable :
Vu l'article 625 du code de procédure civile ;
Attendu que, pour déclarer l'appel irrecevable comme dépourvu d'objet, l'arrêt retient que le tribunal du contentieux de l'incapacité de Paris a rendu, le 27 septembre 2007, un jugement disant qu'à la date de consolidation, et dans les rapports entre l'employeur et les organismes sociaux, le taux de l'incapacité permanente partielle attribuée à M. X... devait être ramené à 0 % ; que dans le cadre de cette décision, la juridiction du fond a tenu compte de la non communication des pièces ; que cette décision, non contestée, est devenue définitive et s'impose aux parties ; que l'autorité de chose jugée qu'elle a acquise s'applique au principal et aux accessoires de l'instance en cours et qu'enfin les demandes tendant à contester les mesures d'instruction en lien avec ce litige sont devenues sans objet ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses constatations que le jugement rendu par le tribunal du contentieux de l'incapacité de Paris le 27 septembre 2007 était la suite de l'arrêt qui avait été cassé le 13 novembre 2008 ou qu'il s'y rattachait par un lien de dépendance nécessaire, la Cour nationale a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a déclaré l'appel irrecevable comme dépourvu d'objet, l'arrêt rendu le 15 juin 2011, entre les parties, par la Cour nationale de l'incapacité et de la tarification de l'assurance des accidents du travail ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la Cour nationale de l'incapacité et de la tarification de l'assurance des accidents du travail, autrement composée ;
Condamne la société Tyco Fire and Integrated Solutions France aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Tyco Fire and Integrated Solutions France ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du huit novembre deux mille douze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens communs produits aux pourvois principal et provoqué par Me Foussard, avocat aux Conseils, pour la Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés et la caisse primaire d'assurance maladie de l'Oise.
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

L'arrêt attaqué encourt la censure ;
EN CE QU' il a décidé que l'agent de la CPAM ayant agi au nom de la CNAMTS n'avait pas qualité pour la représenter, et décidé en conséquence de tenir pour non avenues les pièces de procédure établies au nom de la CNAMTS, puis déclaré l'appel irrecevable comme dépourvu d'objet ;
AUX MOTIFS QUE « selon les dispositions de l'article L. 221-2 du code de la sécurité sociale la Caisse Nationale de l'Assurance Maladie des Travailleurs Salariés est un établissement public à caractère administratif doté de la personnalité juridique et de l'autonomie financière ; que selon les dispositions de l'article L. 221-3-1 du même code, il est représenté par son directeur général nommé par décret ; que les caisses primaires d'assurance maladie sont des organismes de droit privé fonctionnant sur le principe défini par l'article L. 122-1 du code de la sécurité sociale ; que cet article dispose que les dispositions relatives à la représentation en justice ne s'appliquent pas aux caisses ayant la forme d'établissement public ; que si les dispositions de l'article L. 124-5 du code de la sécurité sociale permettent à tout organisme de sécurité sociale de se faire représenter par un employé d'un autre organisme, il ressort de la combinaison de ces dispositions que la volonté du législateur est d'écarter la possibilité pour les caisses primaires d'assurance maladie, organismes privés, de représenter en justice la Caisse Nationale de l'Assurance Maladie des Travailleurs Salariés, organisme public » (arrêt, p. 6-7) ;
ALORS QUE, premièrement, en application de l'article L. 144-3 du Code de la sécurité sociale, un organisme de sécurité sociale, partie à l'instance, peut être représenté par un employé d'un autre organisme de sécurité sociale ; que la CNAMTS, si même elle a le caractère d'un établissement public, est un organisme de sécurité sociale ; qu'en lui déniant le droit de se faire représenter par un agent d'une CPAM, l'arrêt attaqué a violé l'article L. 144-3 du Code de la sécurité sociale ;
ALORS QUE, deuxièmement, les dispositions régissant l'organisation de la CNAMTS, et notamment les articles L. 221-2 et L. 223-3-1 du Code de la sécurité sociale en tant que ceux-ci fixent de façon générale la compétence du directeur général de la CNAMTS, doivent être regardées comme constitutives d'une règle générale puisqu'ayant pour objet d'identifier tous les actes susceptibles d'être accomplis par le directeur général ; qu'en opposant une règle générale pour écarter une règle spéciale, propre à la procédure devant la CNITAAT, les juges du fond ont une nouvelle fois violé l'article L. 144-3 du Code de la sécurité sociale, ensemble le principe specialia generalibus derogant ;
ALORS QUE, troisièmement, l'article L. 124-5 du Code de la sécurité sociale énonce en termes généraux que « tout organisme de sécurité sociale partie à une instance contentieuse peut s'y faire représenter par … un employé d'un autre organisme de sécurité sociale », sans distinguer selon que les établissements soient publics ou privés ; que cette disposition doit être comprise comme autorisant la représentation de la Caisse nationale par un agent d'une caisse primaire d'assurance maladie ; qu'à cet égard, l'arrêt attaqué a été rendu en violation de l'article L. 124-5 du Code de la sécurité sociale ;
ET ALORS QUE, quatrièmement, et en tout cas, si même il fallait appliquer à l'article L. 124-5 du Code de la sécurité sociale l'exclusion résultant de l'article L. 122-1 telle qu'applicable aux établissements publics, la règle spéciale posée par l'article L. 144-3, propre aux juridictions appliquées à connaître du contentieux relatif à la sécurité sociale, déroge elle-même à cette exclusion ; qu'en décidant le contraire, les juges du fond ont violé l'article L. 144-3 du Code de la sécurité sociale, ensemble le principe speciala generalibus derogant.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

L'arrêt attaqué encourt la censure ;
EN CE QUE, après avoir constaté que la CNAMTS n'était pas régulièrement représentée, il a déclaré sans objet l'appel dirigé contre la décision du 21 décembre 2005 ;
AUX MOTIFS QUE « la Cour ·constate que le tribunal du contentieux de l'incapacité de Paris a rendu le 27 septembre 2007 un jugement disant qu'à la date de consolidation du 2 septembre 2002 et dans les stricts rapports employeurs-organismes sociaux le taux d'incapacité permanente partielle attribué à M. X... devait être ramené à 0% ; que dans le cadre de cette décision, la juridiction du fond a tenu compte de la non communication des pièces ; que cette décision non contestée est devenue définitive, s'impose aux parties et a acquis l'autorité de la chose jugée ; que la chose jugée s'applique au principal et aux accessoires de l'instance en cours ; que les demandes tendant à contester des mesures d'instruction en lien avec ce litige sont donc devenues sans objet » (arrêt, p. 7) ;
ALORS QUE, lorsqu'une décision de justice est la suite et la conséquence nécessaire d'une précédente décision, l'anéantissement de la première, notamment par l'effet d'une cassation, entraîne l'anéantissement de la seconde, peu important que celle-ci soit passée en force de chose jugée pour n'avoir par fait l'objet d'un recours ; qu'en l'espèce, le jugement ayant statué sur le fond a tenu compte de l'absence de production constatée par l'arrêt du 20 juin 2007 ; que cet arrêt ayant été censuré par la Cour de cassation, le jugement devait nécessairement être anéanti à son tour, par voie de conséquence ; qu'en décidant le contraire, les juges du fond ont violé l'article 625 du Code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 11-23782
Date de la décision : 08/11/2012
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour nationale de l'incapacité et de la tarification (CNITAAT), 15 juin 2011


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 08 nov. 2012, pourvoi n°11-23782


Composition du Tribunal
Président : M. Héderer (conseiller le plus ancien non empêché, faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Balat, Me Foussard

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:11.23782
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award