LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Donne acte à la société civile immobilière Muguet (SCI) du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre la société Hervé Thermique ;
Sur le premier moyen, ci-après annexé :
Attendu qu'ayant constaté que la discussion contradictoire lors de l'expertise judiciaire n'avait porté que sur les sommes concernant les intérêts bancaires, les charges diverses et les commissions, mais non sur la somme de 545 028 euros, réclamée en sus par la SCI en réparation des intérêts d'emprunts supportés postérieurement à la livraison de l'immeuble, la cour d'appel, qui, appréciant souverainement les éléments de preuve qui lui étaient soumis , n'était pas tenue de s'expliquer sur ceux qu'elle décidait d'écarter, a pu retenir que la SCI ne justifiait pas de son préjudice financier et rejeter la demande d'expertise ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le second moyen, ci-après annexé :
Attendu qu'ayant relevé, sans dénaturation, que la garantie s'appliquait pendant la période de validité de la police pour les pertes de loyers que l'assuré aurait pu recevoir en l'absence de sinistre, déterminé en fonction des baux signés ou des promesses signées d'engagement ferme de bail ou des loyers payés pour des locaux similaires dans la même région, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, qui a souverainement retenu que la SCI ne rapportait pas la preuve, conformément aux documents contractuels, des loyers qu'elle aurait pu raisonnablement percevoir pendant cette période et qui n'avait pas à effectuer des recherches que ses constatations rendaient inopérantes, a pu retenir, sans dénaturation, que la demande d'indemnisation des pertes de loyers ainsi que la demande d'expertise, ne pouvaient être accueillies ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société civile immobilière Muguet aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société civile immobilière Muguet à payer la somme de 2 500 euros à la société Bureau Veritas, la somme de 2 300 euros à la société Sterling Quest Associates représentée par ses mandataires judiciaires, la société MJA Selas et la SCP Thevenot Perdereau, ès qualités, la somme de 2 500 euros à la Mutuelle des architectes français, la somme de 1 250 euros à la société BTP Consultants, la somme de 1 250 euros à la société AXA France IARD, la somme de 2 500 euros à la société Labbe électricité ; rejette les demandes de la société civile immobilière Muguet et de la société Zürich Insurance Ireland Limited ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du six novembre deux mille douze.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par Me Ricard, avocat aux Conseils, pour la société Muguet.
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté la SCI MUGUET de ses demandes de condamnation in solidum en vue du paiement de la somme demandée au titre d'intérêts d'emprunts
AUX MOTIFS PROPRES QUE la SCI MUGUET réclament en sus la somme de 545.028 € en réparation des intérêts d'emprunts supportés postérieurement à la livraison de l'immeuble ; contrairement à ce qui est allégué, la discussion contradictoire lors de l'expertise n'a porté que sur les sommes précitées et retenues par l'expert ainsi que le confirme le dire récapitulatif de la SCI MUGUET du 12 septembre 2006 ; si elle verse aux débats l'ouverture de crédit du 9 octobre 2001, pour autant elle ne justifie pas de son préjudice financier par un quelconque décompte précis ; la demande d'expertise de ce chef doit être rejetée ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE l'expert judiciaire retient au titre des pertes financières 611.485,43 € au titre des intérêts bancaires, 532.001,61 € au titre des charges diverses, 32.175,15 € au titre des commissions ; la SCI MUGUET ne justifie pas de son préjudice financier au-delà de ces montants ;
ALORS QUE le juge ne peut pas rejeter une demande pour la seule raison qu'elle n'a pas été discutée devant un expert ; qu'en se fondant sur l'absence de discussion de la demande litigieuse devant l'expert, et sans se prononcer sur les documents soumis à son examen, la cour d'appel a violé l'article 1353 du code civil ;
ALORS QUE le juge doit se prononcer sur les éléments de preuve régulièrement versés aux débats ; que l'exposante produisait les actes de prêt, un tableau récapitulatif des intérêts versés et une attestation de son commissaire aux comptes (pièces n° 31 à 35, visées dans le bordereau annexé aux conclusions) ; qu'en se bornant à se référer à l'ouverture de crédit sans se prononcer sur les autres pièces établissant le préjudice de l'exposante, la cour d'appel a violé l'article 1353 du code civil.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté la SCI MUGUET de ses demandes complémentaires contre la société ZURICH au-delà des sommes déjà réglées
AUX MOTIFS PROPRES QU'aux termes d'un accord transactionnel signé le 19 juin 2003, la Compagnie ZURICH INSURANCE admet sa garantie due du chef de l'ensemble des dommages directs aux travaux neufs et aux matériels destinés à être incorporés à l'ouvrage ; la transaction est arrêtée à la somme de 1.570.318 euros, la SCI MUGUET se déclarant intégralement et définitivement remplie de ses droits du chef de la garantie de la police souscrite; qu'elle renonçait à toute action de ce chef à l'égard de la Compagnie ZURICH INSURANCE et ce quel que soit le quantum afférent aux mêmes dommages qui pourrait être arrêté dans le cadre de l'expertise judiciaire ; elle réservait toutefois ses droits à l'égard de la Compagnie ZURICH INSURANCE du chef des pertes de revenus locatifs, résultant des retards apportés au chantier à raison de la survenance de l'incendie, en ce qu'ils se rapportent exclusivement aux dommages aux travaux neufs ; il ressort du contrat d'assurance que la garantie trouve à s'appliquer pour tous dommages et pertes matériels pouvant survenir aux biens assurés pendant la période de validité de la police de quelque cause qu'ils proviennent ; la SCI MUGUET est bien fondée à réclamer la garantie du chef des pertes des revenus locatifs dès lors que le sinistre a entraîné des dommages aux travaux neufs, objet de la garantie, et ce quelle que soit l'origine du sinistre ; il convient donc de faire application des conventions spéciales assurance des pertes pécuniaires en ce qu'il doit s'agir « des pertes de loyers anticipés c'est à dire la différence existant entre le total des loyers réellement reçus pendant la période d'indemnisation et le total des loyers que l'assuré aurait raisonnablement pu percevoir pendant cette période, en l'absence de sinistre ; le montant des loyers que l'assuré aurait raisonnablement pu recevoir en l'absence de sinistre, sera déterminé en fonction des baux signés ou des promesses signées d'engagement ferme de bail ou des loyers payés pour des locaux similaires dans la même région en tenant compte de tous les éléments applicables ou qui auraient été applicables, en l'absence de sinistre, pendant la période d'indemnisation » ; l'application de ces clauses suppose indéniablement que durant la période d'indemnisation, la SCI. MUGUET devait recevoir des loyers d'occupants des lieux puisqu'il s'agit des pertes de loyers anticipés calculés sur la base de loyers réellement reçus dont le montant devait être déterminé en fonction de documents contractuels déjà existants ; tel n'est pas le cas en l'espèce, ou en tout état de cause la SCI MUGUET n'en rapporte pas la preuve, ne versant aux débats, pour la première fois en cause d'appel, que les baux signés les 28 avril et 19 juin 2006 avec les sociétés VALEO et SECAP ; il convient donc de rejeter la demande comme non justifiée au regard des documents contractuels ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE la SCI MUGUET réclament en outre à la compagnie ZURICH au titre de la police tous risques chantiers la somme de 2.165.612,29 € au titre des pertes locatives ; si elle précise que l'immeuble est loué aux sociétés Valéo et Secap depuis 2006, elle ne verse aux débats aucun élément de nature à justifier le préjudice locatif invoqué ; il convient par conséquence de rejeter sa demande par application de l'article 1315 du code civil ;
ALORS QUE la société ZURICH garantissait la perte de loyers, définie comme la différence entre les loyers réellement perçus et ceux que l'assuré aurait raisonnablement pu percevoir ; que ces derniers étaient déterminés « en fonction des baux signés ou des promesses signées d'engagement ferme de bail ou des loyers payés pour des locaux similaires, dans la même région, en tenant compte de tous les éléments applicables ou qui auraient été applicables, en l'absence de sinistre, pendant la période d'indemnisation » (dispositions particulières, p. 4) ; que la référence à des locaux « similaires », nécessairement autres que ceux appartenant à la SCI MUGUET, exclut de considérer que la garantie n'était due que si la SCI MUGUET percevait des loyers d'occupants de ses propres locaux ; qu'en énonçant le contraire, la cour d'appel a dénaturé le contrat, en violation de l'article 1134 du code civil
ALORS QUE la clause précitée n'impose aucun mode de preuve des loyers des locaux similaires ; qu'en énonçant que cette preuve devait être déterminée en fonction de documents contractuels déjà existants, la cour d'appel a dénaturé le contrat, en violation de l'article 1134 du code civil
ALORS QUE le juge doit se prononcer sur les éléments de preuve régulièrement versés aux débats ; que l'exposante produisait une expertise déterminant la valeur locative des lieux, dont la perte de loyers pouvait être déduite ; qu'en ne se prononçant pas sur ce document, la cour d'appel a violé l'article 1353 du code civil.