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31/10/2012 | FRANCE | N°11-18690

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 31 octobre 2012, 11-18690


Sur le moyen unique :
Vu l'article L. 3171-4 du code du travail ;
Attendu qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié d'étayer sa demande par la production d'éléments suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés pour permettre à l'employeur de répondre en fournissant ses propres éléments ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X... a été engagée le 9 juillet 2002 par M. Y..., alors député du Rhône et président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales,

en qualité d'assistante de président de commission moyennant une rémunératio...

Sur le moyen unique :
Vu l'article L. 3171-4 du code du travail ;
Attendu qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié d'étayer sa demande par la production d'éléments suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés pour permettre à l'employeur de répondre en fournissant ses propres éléments ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X... a été engagée le 9 juillet 2002 par M. Y..., alors député du Rhône et président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, en qualité d'assistante de président de commission moyennant une rémunération mensuelle de 4 142, 10 euros ; que la salariée a démissionné le 25 mai 2007, après avoir saisi la juridiction prud'homale d'une demande en paiement d'un rappel de salaire à titre d'heures supplémentaires ;
Attendu que pour débouter la salariée de sa demande, l'arrêt retient que les pièces versées aux débats tant prises individuellement que considérées conjointement n'étayent nullement ses affirmations sur l'accomplissement d'heures supplémentaires ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses propres constatations que la salariée avait produit un tableau des heures supplémentaires réalisées, ainsi que d'autres pièces relatives aux heures supplémentaires alléguées, documents auxquels l'employeur pouvait répondre, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 31 mars 2011, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Condamne M. Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne M. Y... à payer à Mme X... la somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du trente et un octobre deux mille douze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils pour Mme X...

Ce moyen fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir débouté Madame Lorraine X... de sa demande en paiement d'un rappel de salaires pour heures supplémentaires effectuées de l'année 2002 à l'année 2007 ainsi que pour repos compensateur ;
AUX MOTIFS QU'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié d'étayer sa demande par la production d'éléments suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés pour permettre à l'employeur de répondre en fournissant ses propres éléments ; qu'en l'espèce, Madame Lorraine X... produit :- un avenant à son contrat de travail relatif à la question des heures supplémentaires ; qu'il s'agit d'un document établi le même jour que le contrat principal, avant toute prise de fonction, sur un modèle fourni aux députés par les services de l'Assemblée nationale et ne présumant en rien de la réalisation effective d'heures supplémentaires au cours de la collaboration à venir mais ayant plutôt pour objet de garantir l'élu qu'il pourra en exiger de ses assistants ; que cette pièce n'a aucune portée sur la question débattue ;- un tableau des heures supplémentaires réalisées ; que ce document a été établi de manière unilatérale par Madame Lorraine X... ; qu'il fait état, de a date d'embauche jusqu'au 27 octobre 2005, de 12, 5 heures supplémentaires hebdomadaires ; que l'immuabilité de ce chiffre répété mécaniquement semaine après semaine ne répond pas à l'exigence de précision devant s'attacher aux éléments fournis par le salarié et rend la pièce produite, même si son auteure a pris garde de ne pas y inclure les périodes où elle était absente, particulièrement suspecte de confection a posteriori et pour les besoins de la cause ; qu'aucun élément extrinsèque tel qu'un relevé établi au jour le jour ou des extraits d'agenda ne vient corroborer, ne serait-ce que partiellement, les mentions de ce tableau qui en cet état sont dépourvues de toute crédibilité ;- des courriels reçus ou envoyés par Madame Lorraine X... depuis son poste de travail à l'Assemblée nationale ; que sont ainsi versés aux débats 39 courriels « du matin » entre 8 et 9 heures, et 115 courriels " du soir ", à partir de 18 heures 33, le plus tardif étant de 23 heures 34 ; qu'indépendamment de la question de la pertinence des dates et heures figurant sur ces impressions de documents informatiques, il s'avère qu'à trois exceptions près sur l'ensemble de la période couverte (12 juillet 2002-24 octobre 2006, soit environ 1 000 jours travaillés) les courriels du matin et ceux du soir ne sont pas du même jour ; que ces documents permettraient donc tout au plus de supposer que, selon les jours, Madame Lorraine X... travaillait soit tôt le matin soit tard le soir sans que cela renseigne sur son temps de pause méridien ni rende plausible une amplitude journalière habituelle couvrant à la fois les plages du matin et du soir dont se déduirait la vraisemblance de l'accomplissement d'heures supplémentaires ;- les notes et les discours qu'elle aurait rédigés, les rapports avec les membres du groupe parlementaire auquel appartenait Monsieur Jean-Michel Y... ; que ces documents et ce travail relationnel constituaient un des aspects du poste de Madame Lorraine X... et leur volume rapporté à la durée de l'embauche ne laisse aucunement présager un surcroît de travail mais l'accomplissement ordinaire d'une tâche courante dévolue à la salariée ;- la liste des déjeuners auxquels Madame Lorraine X... a participé ; qu'il est produit une liste dressée a posteriori et unilatéralement mettant l'employeur dans l'impossibilité de discuter utilement la valeur et le contenu du document ; que cette liste n'est corroborée par aucun élément objectif tels qu'un extrait d'agenda, une invitation, la rédaction d'un compte rendu, que Monsieur Jean-Michel Y... n'aurait pas manqué de faire établir s'il s'était agi de se faire assister de la salariée dans un cadre purement professionnel ; qu'il est donc impossible de rattacher ces déjeuners, en supposant leur réalité, à un quelconque travail de Madame Lorraine X... faisant présumer l'existence d'heures supplémentaires ;- des attestations ; qu'elles ont en commun d'être particulièrement vagues et de ne s'appuyer sur aucune constatation objective et vérifiable ; que plusieurs d'entre elles ne font que louer les qualités professionnelles de Madame Lorraine X..., constatées durant sa collaboration avec Monsieur Jean-Michel Y..., voire dans des fonctions ultérieures ; qu'elles n'apportent donc rien d'utile au débat qui ne porte aucunement sur ce point ; que Monsieur Marc A..., assistant parlementaire, tient pour une certitude que Madame Lorraine X... travaillait bien audelà de 35 heures par semaine et affirme que les heures supplémentaires peuvent être qualifiées d'inhérentes à sa fonction, appréciation totalement imprécise et sans portée ; que Monsieur Jean-François B..., secrétaire général de l'union syndicale des collaborateurs parlementaires de l'Assemblée nationale, tient des propos généraux et polémiques sur les horaires accomplis par les collaborateurs parlementaires et leur rémunération, sans aucune référence à la situation concrète de Madame Lorraine X... dont le nom n'est même pas cité ; que Monsieur Michel C..., agent d'accueil, indiqué que Madame Lorraine X... passe devant lui aux environs de 9 heures 15 et court pour être à l'heure à son poste, ce qui n'implique pas une surcharge de travail et ne corrobore pas les arrivées très matinales alléguées par la salariée ; que Monsieur Gilles D..., responsable des agents de la commission des affaires sociales d'avril 2005 à mai 2007, affirme que Madame Lorraine X... était présente dès le matin et qu'il la voyait également le soir lorsqu'il était de service, sans donner aucune précision de fréquence ou d'horaires, qu'elle « était là sans arrêt » et « faisait certainement beaucoup plus que 35 heures », propos hyperboliques et conjecturaux dénués d'intérêt ; que Madame Marie-Claude E..., secrétaire des services à la commission des affaires sociales, fait état de la disponibilité de Madame Lorraine X... « même en séance de nuit », sans être plus précise ; qu'il se déduit de son témoignage que le volume et le rythme de travail étaient nécessairement différents selon que l'Assemblée était ou non en Session, ce qui ne s'accorde pas du tout avec un nombre indifférencié d'heures supplémentaires tout au long de l'année tel qu'allégué par Madame Lorraine X... ; que Madame Chantal F..., qui a exercé de 1988 à 1993 les mêmes fonctions que Madame Lorraine X... auprès d'un précédent président de la commission des affaires sociales, décrit les tâches qu'elle avait à accomplir et évoque « un travail très lourd et chronophage » en indiquant que, à son époque, « il convenait d'être à disposition du président sans pouvoir fixer d'horaire car les débordements étaient habituels », l'intéressée n'ayant toutefois pas été témoin des conditions de travail propres à Madame Lorraine X... et décrivant une absence de fixité des horaires qui n'implique pas nécessairement la réalisation d'heures supplémentaires, expression que du reste l'attestante n'utilise pas ; que Monsieur Thierry G..., compagnon de Madame Lorraine X..., travaillant de son côté comme cadre dirigeant dans un organe de presse, ne peut être un témoin objectif et utile des heures réellement accomplies par la salariée pour le compte de Monsieur Jean-Michel Y... ; que l'objet principal de l'attestation de Monsieur Benjamin (selon la carte d'identité produite) ou Dominique (selon l'entête du papier utilisé) H... est de « porter un diagnostic sur l'affection, au demeurant fort répandue, dont est atteint M. le professeur Y... », ce qui remplit les paragraphes 2 et 4 du document, propos dépourvus de toute objectivité et hors sujet ; que le deuxième paragraphe, partant de la pétition de principe selon laquelle Monsieur Y... prétend que Madame Lorraine X... avait une activité « réduite à une vague et modeste tâche d'assistance », affirme que cela est peu vraisemblable puisqu'elle a « été par la suite engagée en tant que proche collaboratrice » par deux ministres ; que s'il n'y a pas matière à écarter cette pièce des débats, comme le demande Monsieur Jean-Michel Y..., il convient de constater qu'elle est d'une particulière vacuité au regard des éléments du litige ; qu'il apparaît ainsi que les pièces versées aux débats par Madame Lorraine X..., tant prises individuellement que considérées conjointement, n'étayent nullement ses affirmations sur l'accomplissement d'heures supplémentaires ; Que de son côté, Monsieur Jean-Michel Y... produit des attestations précises et concordantes établissant que Madame Lorraine X... participait à un travail d'équipe et ne peut s'attribuer l'entière paternité des tâches qu'elle invoque ; qu'il est également avéré que l'importance de la commission des affaires sociales présidée par Monsieur Jean-Michel Y... n'avait pas d'impact significatif sur le volume de travail de Madame Lorraine X..., des services spécifiques de l'Assemblée étant dédiés à cette tâche et cela proportionnellement à là taille de cette commission, ce dont attestent notamment Madame Marie-Pierre I..., chef du secrétariat de la commission, et plusieurs administrateurs affectés à celle-ci, tous indiquant d'ailleurs n'avoir eu que de rares, voire aucun, contacts avec Madame Lorraine X... ; que Madame Chantal F... confirme de son côté que les fonctions des assistants et celles des administrateurs affectés aux commissions ne sont « rigoureusement pas les mêmes » et qu'il « ne peut y avoir de'vase communiquant'entre le staff politique et l'administration » ; que la collaboratrice de Monsieur Jean-Michel Y... la plus proche de Madame Lorraine X..., Madame Marie-Pierre J..., assistante parlementaire, fait état de la grande souplesse de leur employeur concernant leurs horaires et précise plus particulièrement : « concernant les prétendues heures supplémentaires, je me dois d'attester que Lorraine X... arrive rarement avant 9 heures 30 et part très rarement après 19 heures. De plus, le temps consacré au déjeuner se prolongeait très souvent » et que « Madame Lorraine X... était difficilement joignable le lundi matin et le vendredi après-midi ainsi qu'au moment du déjeuner entre 13 et 15 heures où je la voyais souvent disparaître de son bureau voisin du mien le mardi mercredi jeudi » ; Qu'il ne saurait être reproché à Monsieur Jean-Michel Y... de ne pas produire des éléments de nature à justifier de manière plus précise, alors que la salariée ne l'est absolument pas elle-même, les horaires effectivement réalisés par Madame Lorraine X... ; que concernant un éventuel système d'enregistrement automatique, il n'est pas allégué qu'il en existait un au sein de l'Assemblée nationale pour la catégorie d'emploi dont relevait Madame Lorraine X... ; que plus généralement la relation de travail instituée entre un parlementaire et ses assistants est tout à fait singulière, fondée sur l'intuitu personae et une confiance réciproque exclusive de tout système de contrôle a priori ; que dans ce cadre bien particulier il appartient au salarié de bonne foi d'informer son employeur de tout élément que ce dernier n'est pas à même structurellement d'appréhender, ne serait-ce que parce qu'il absent de Paris plusieurs jours par semaine et qu'il ne dispose d'aucun relai pour procéder à de quelconques vérifications d'horaires ; que Madame Lorraine X... ne justifie d'aucune démarche, ou même de la moindre allusion, relative à une difficulté concernant ses horaires de travail avant la cristallisation du litige entre les parties ; qu'encore convient-il d'observer que ses premières récriminations (courrier du 20 octobre 2006) ne portaient nullement sur la réalisation d'heures supplémentaires non payées mais sur une mise à l'écart, doléance d'ailleurs peu compatible avec celle qu'elle développera ultérieurement ; Qu'enfin, c'est de manière totalement gratuite que Madame Lorraine X... insinue que le non paiement de ses prétendues heures supplémentaires permettait à Monsieur Jean-Michel Y... de s'enrichir personnellement sur le compte de la dotation qui lui était attribuée alors que plusieurs salariés font état d'une redistribution du solde de celle-ci en fin d'exercice ; Qu'il s'avère donc que Madame Lorraine X..., tout en disposant d'une grande latitude pour s'organiser dans son travail, n'était pas chargée d'une tâche qu'elle ne pouvait accomplir dans la limite des horaires de son contrat, ce qui exclut la réalisation des heures supplémentaires alléguées ;

ALORS D'UNE PART QU'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié d'étayer sa demande par la production d'éléments suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés pour permettre à l'employeur de répondre en apportant ses propres éléments ; que la Cour d'appel qui, pour rejeter la demande de Madame X... au titre des heures supplémentaires effectuées, a énoncé que le tableau des heures supplémentaires réalisées produit par la salariée a été établi de manière unilatérale par celle-ci et que l'évaluation des heures effectuée forfaitairement semaine après semaine rendait la pièce suspecte de confection a posteriori, que les courriers électroniques faisant état d'heures matinales et tardives de présence de Madame X... à son bureau de l'Assemblée nationale ne renseignaient pas sur son amplitude journalière habituelle de travail du matin au soir et que les diverses attestations versées par la salariée présentaient un caractère trop vague, quand il résultait de ses constatations que la salariée avait produit un décompte des heures qu'elle soutenait avoir réalisées, des documents informatiques précis et des attestations dont certaines précisaient ses heures de présence, tous éléments concordants auquel l'employeur pouvait répondre, a violé l'article L. 3171-4 du code du travail ;
ALORS D'AUTRE PART QUE la preuve des heures de travail effectuées n'incombe spécialement à aucune des parties et que le juge ne peut rejeter une demande en paiement d'heures supplémentaires en se fondant sur l'insuffisance de preuves apportées par un salarié dès lors que celui-ci a produit des éléments de nature à étayer sa demande ; qu'en rejetant comme insuffisants à établir l'existence d'heures supplémentaires accomplies par Madame X... le décompte des heures, les courriers électroniques, les documents de travail, la liste de déjeuners professionnels et les attestations produites par la salariée, tout en constatant par ailleurs que son employeur ne produisait aucun élément de nature à justifier les horaires réalisés par son assistante parlementaire en arguant seulement de la particularité d'une relation de travail fondée sur une confiance réciproque et de l'absence de réclamation antérieure de Madame X..., la cour d'appel, qui a fait peser sur la seule salariée la charge de la preuve des heures supplémentaires effectuées, a violé l'article L. 3171-4 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 11-18690
Date de la décision : 31/10/2012
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 31 mars 2011


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 31 oct. 2012, pourvoi n°11-18690


Composition du Tribunal
Président : M. Gosselin (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Baraduc et Duhamel, SCP Lyon-Caen et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:11.18690
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