La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

31/10/2012 | FRANCE | N°11-18428

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 31 octobre 2012, 11-18428


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Basse-Terre, 14 mars 2011), que M. X... a été engagé le 3 juillet 1989 par la société Castel et Fromaget en qualité de conducteur de travaux ; qu'en vertu de deux avenants successifs à son contrat de travail, il a été muté à Fort-de-France puis en Guadeloupe ; qu'après s'être vu proposer une mutation à la Réunion, le salarié a reçu notification d'une mutation à Floirac, en Gironde, à compter du 3 septembre 2007 ; que, licencié le 18 septembre 2007 pour faute grave, il

a saisi la juridiction prud'homale ;
Sur le premier moyen :
Attendu que le ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Basse-Terre, 14 mars 2011), que M. X... a été engagé le 3 juillet 1989 par la société Castel et Fromaget en qualité de conducteur de travaux ; qu'en vertu de deux avenants successifs à son contrat de travail, il a été muté à Fort-de-France puis en Guadeloupe ; qu'après s'être vu proposer une mutation à la Réunion, le salarié a reçu notification d'une mutation à Floirac, en Gironde, à compter du 3 septembre 2007 ; que, licencié le 18 septembre 2007 pour faute grave, il a saisi la juridiction prud'homale ;
Sur le premier moyen :
Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse alors, selon le moyen :
1°/ qu'une modification du contrat de travail, y compris à titre disciplinaire, ne peut être imposée au salarié ; qu'est en conséquence dépourvu de cause réelle et sérieuse le licenciement prononcé ensuite du refus d'une modification du contrat de travail mise en oeuvre sans l'accord du salarié ; qu'il résulte des énonciations de l'arrêt attaqué que la mutation de la Guadeloupe à la région bordelaise avait été mise en oeuvre, en l'absence de clause de mobilité, en conséquence du refus opposé par le salarié à sa mutation à la Réunion ; qu'en jugeant néanmoins son licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse, la cour d'appel a violé les articles L. 1232-1 et L. 1331-1 du code du travail ensemble le principe selon lequel aucun fait fautif ne peut donner lieu à double sanction ;
2°/ que M. X... avait subordonné son acceptation à une mutation à la Réunion à certaines conditions que son employeur avait refusées ; qu'en retenant que M. X... aurait clairement accepté sa mutation vers la Réunion, la cour d'appel a dénaturé son courrier du 1er mars 2007 en violation de l'article 1134 du code civil ;
3°/ que la circonstance que le salarié ait par le passé accepté des mutations géographiques ne peut valoir acceptation générale de telles modifications pour l'avenir ni obligation pour le salarié de s'y plier ; qu'en jugeant le contraire, la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil ;
4°/ que la modification du contrat de travail pour motif économique est soumise aux formalités prescrites par l'article L. 1222-6 du code du travail ; qu'il en résulte que l'employeur qui n'a pas respecté ces formalités ne peut se prévaloir ni d'un refus, ni d'une acceptation de la modification du contrat de travail par le salarié ; que M. X... soutenait que la mutation était justifiée par un motif économique ; que la cour d'appel qui s'est attachée au seul refus de la mutation sans en rechercher la cause n'a pas justifié sa décision au regard de l'article L. 1222-6 du code du travail ;
Mais attendu qu'ayant constaté que le licenciement était intervenu alors que la proposition de mutation du salarié dans la région bordelaise avait été refusée par lui et écarté que le licenciement soit fondé sur un motif économique, la cour d'appel a, sans dénaturer la lettre du 1er mars 2007, exercé les pouvoirs qu'elle tient de l'article L. 1235-1 du code du travail pour retenir que le licenciement était justifié par une cause réelle et sérieuse ; que le moyen, qui critique en sa troisième branche un motif surabondant, n'est pas fondé pour le surplus ;
Sur le second moyen :
Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande de dommages-intérêts pour licenciement vexatoire alors, selon le moyen, que tout jugement doit être motivé à peine de nullité ; que M. X... poursuivait l'indemnisation du préjudice résultant des circonstances vexatoires de son licenciement ; qu'en le déboutant de ce chef de demande sans donner aucun motif à sa décision, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu que, sous couvert d'un grief de défaut de motivation, le moyen critique une omission de statuer sur un chef de demande ; que l'omission de statuer pouvant être réparée par la procédure prévue à l'article 463 du code de procédure civile, le moyen n'est pas recevable ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du trente et un octobre deux mille douze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Masse-Dessen et Thouvenin, avocat aux Conseils, pour M. X....
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté Monsieur Martial X... de sa demande de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
AUX MOTIFS QU'il convient de se rapporter à la lettre de licenciement pour faute grave adressée par l'employeur à Martial X... le 18 septembre 2007 afin d'en examiner la motivation laquelle fixe les limites du présent litige ; qu'il est essentiellement reproché au salarié d'avoir refusé une mutation géographique n'affectant pas par ailleurs l'économie de son contrat de travail ; que la société CASTEL et FROMAGET ayant retenu la faute grave, il lui appartient d'en rapporter la preuve, la Cour ayant pour le surplus a opérer une vérification des motifs pour en estimer le caractère à la fois réel et sérieux ou encore l'illégitimité pure et simple ; que le contrat de travail initial conclu le 03 juillet 1989 entre les parties n'est pas versé aux débats (seuls les avenants successifs à ce contrat ont été produits) mais celles-ci conviennent qu'il ne comporte pas de clause de mobilité ; que ce n'est donc pas sous cet aspect que le présent litige doit être examiné ; que de même, l'analyse juridique fondée sur l'application des dispositions de l'article L.321-1-2 ancien du code du travail ne saurait être retenue, la modification du contrat de travail en ce qui concerne l'affectation géographique de Martial X... ne s'inscrivant pas dans le cadre d'un licenciement fondé sur une cause économique ; qu'il convient donc de se rattacher aux circonstances mêmes de la Martinique avec maintien des éléments substantiels du contrat de travail voire une progression de ceux-ci ; qu'étant basé depuis, sept ans en Guadeloupe, Martial X... se voit proposer, le 18 octobre 2006, une mutation afin de devenir directeur de l'établissement secondaire de la société CASTEL et FROMAGET à la Réunion ; que ce faisant, l'employeur précise que cette mutation ne prendra effet qu'au mois de juillet 2007 en requérant du salarié une réponse ; que Martial X... conteste le fait que cette lettre lui ait été envoyée le 18 octobre et verse aux débats une pièce qui est, selon lui, un courriel qu'il n'aurait reçu que le 13 avril 2007 ; que la cour relève que cette pièce n°7 n'emporte pas la conviction de ce qu'elle serait un courriel, car l'expéditeur et la date d'envoi ne sont pas mentionnés ; que les pièces versées aux débats montrent que toutes les données de ce nouveau poste sont fournies par l'employeur qui s'engage à maintenir les éléments fondamentaux du contrat de travail à l'occasion de ce déplacement tout en mettant en place, pour sa part et légitimement, une nouvelle organisation de l'établissement de Guadeloupe ; que Martial X... persiste à soutenir que cette modification de son lieu de travail ne saurait être admise juridiquement sans appliquer les dispositions de l'article L.321-1-2 ancien du code du travail alors que, comme il est rappelé plus haut, l'employeur n'entend pas procéder à un licenciement pour cause économique et que cet article, comme le précise la loi et la jurisprudence qu'il verse aux débats, ne s'applique que dans une telle hypothèse ; qu'en l'occurrence, la modification du lieu de travail s'analyse en un exercice du pouvoir d'organisation de l'employeur qu'il appartient au salarié de contester ou refuser puis de soumettre le licenciement qui peut en découler si l'employeur n'entend pas revenir sur sa décision ; que la Cour relève que cependant, répondant à cette proposition de mutation à la Réunion, par courrier du 1er mars 2007, Martial X... remercie l'employeur « de la confiance que vous m'avez témoigné en me proposant un nouveau challenge » et « confirme ma décision d'accepter le déplacement dans le département de la Réunion" ; qu'il établit à cette occasion une liste de demandes tenant aux conditions matérielles de ce transfert ; que la société CASTEL et FROMAGET prendra acte de cet accord par courrier du 15, mars. 2007 et précisera, quelques points matériels, notamment une majoration du salaire mais l'absence d'assistante administrative ; que pour des besoins; administratifs, l'employeur fait parvenir à Martial X... une attestation de mutation à LA REUNION à compter du 1er juin 2007 ; qu'au début du mois d'avril 2007, Martial X... va soutenir qu'il n'a pas reçu les lettres des 15 mars 2007 et 18 octobre 2006 ; que selon l'employeur, Martial X... va faire savoir à son employeur par l'intermédiaire "du responsable export" qu'il n'entendait pas se rendre à la Réunion ; que par courrier recommandé en date du 13 juin 2007 avec avis de réception et courriel, dû même jour, la société CASTEL et FROMAGET allait écrire ce qui suit à Martial X... : "Suite à notre proposition de mutation en qualité de responsable de notre agence de la Réunion an date du 18 octobre 2006, complétée, par nos soins le 15 mars 2007 afin de tenir compte de vos démarques et souhaits et à votre accord de principe, nous avons mis en place une nouvelle organisation relative à notre filiale CASTEL et FROMAGET CARAÏBES. Ce dispositif aujourd'hui définitivement arrêté ne nous permet pas de vous maintenir en poste en Guadeloupe. Aussi, votre récent refus dont nous n'avons toujours pas confirmation à cette heure ne nous offre aucune alternative et nous conduit à vous muter en métropole sur la région bordelaise, attaché à notre agence de Floirac en qualité de conducteur de travaux. En conséquence, nous vous demandons de bien vouloir prendre toutes dispositions nécessaires à une entrée en fonction le 3 septembre 2007 " ; que le 26 juin 2007, Martial X... répond par une longue lettre dans laquelle il critique la procédure suivie au regard de l'article L.321-1 -2 du Code du travail refusant toute idée.de mutation qu'il qualifie "d'abus de droit" au regard de cet article en exprimant sa volonté de se maintenir en Guadeloupe, évoquant la nouvelle mutation en région bordelaise comme un "malentendu" ; que c'est en cet état que va intervenir le licenciement litigieux ; qu'au regard de l'ancienneté de Martial X..., des pourparlers prolongés et de son maintien de fait plusieurs jours au sein de l'entreprise après la rupture non précédé d'une mise à pied, il n'est pas considéré que son refus d'accepter toute mutation était de nature à empêcher la poursuite de son contrat de travail, y compris pendant le préavis ; qu'en revanche, force est de constater que Martial X... s'est inscrit dans le cours de son contrat de travail dans une acceptation de la mobilité entre la Guadeloupe et la Martinique nonobstant toute clause la permettant ; que la chronologie des faits met au surplus, en évidence qu'il a accepté clairement la mutation géographique vers la Réunion dans un cadre de progression de son salaire et de négociations des conditions matérielles de son transfert pour, en dernier, lieu, la refuser sans autre ultime explication que celle reposant sur l'article L.321-1-2 ancien du Code du travail .dont il soutient à tort qu'il était ici applicable ; que ce faisant et en refusant la dernière offre de l'employeur de rejoindre le siège social de la société en métropole pour un nouveau poste puisque son emploi avait été désormais pourvu en Guadeloupe en raison de son acceptation formelle de transfert d'activité à la Réunion, Martial X... a eu un comportement global, notamment en raison de sa rétractation de dernière minute en ce qui concerne l'affectation en progression de carrière-.à la Réunion, constitutif d'une légèreté blâmable chez un cadre ancien ayant déjà satisfait antérieurement aune mobilité et par conséquent d'une cause réelle et sérieuse de licenciement ; que c'est donc à tort que le premier jugé, en estimant que l'employeur avait "bafoué" les règles du droit du travail, a déclaré le licenciement illégitime, la décision déférée étant réformée sur ce point.
ALORS QU'une modification du contrat de travail, y compris à titre disciplinaire, ne peut être imposée au salarié ; qu'est en conséquence dépourvu de cause réelle et sérieuse le licenciement prononcé ensuite du refus d'une modification du contrat de travail mise en oeuvre sans l'accord du salarié ; qu'il résulte des énonciations de l'arrêt attaqué que la mutation de la GUADELOUPE à la région bordelaise avait été mise en oeuvre, en l'absence de clause de mobilité, en conséquence du refus opposé par le salarié à sa mutation à la REUNION ; qu'en jugeant néanmoins son licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse, la Cour d'appel a violé les articles L.1232-1 et L.1331-1 du Code du travail ensemble le principe selon lequel aucun fait fautif ne peut donner lieu à double sanction.
ET ALORS QUE Monsieur Martial X... avait subordonné son acceptation à une mutation à LA REUNION à certaines conditions que son employeur avait refusées ; qu'en retenant que Monsieur Martial X... aurait clairement accepté sa mutation vers la REUNION, la Cour d'appel a dénaturé son courrier du 1er mars 2007 en violation de l'article 1134 du Code civil.
ALORS enfin QUE la circonstance que le salarié ait par le passé accepté des mutations géographiques ne peut valoir acceptation générale de telles modifications pour l'avenir ni obligation pour le salarié de s'y plier ; qu'en jugeant le contraire, la Cour d'appel a violé l'article 1134 du Code civil.
ET ALORS en tout cas QUE la modification du contrat de travail pour motif économique est soumise aux formalités prescrites par l'article L. 1222-6 du code du travail ; qu'il en résulte que l'employeur qui n'a pas respecté ces formalités ne peut se prévaloir ni d'un refus, ni d'une acceptation de la modification du contrat de travail par le salarié ; que Monsieur X... soutenait que la mutation était justifiée par un motif économique ; que la Cour d'appel qui s'est attachée au seul refus de la mutation sans en rechercher la cause n'a pas justifié sa décision au regard de l'article L.1222-6 du Code du travail.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté Monsieur Martial X... de sa demande de dommages-intérêts pour licenciement vexatoire.
SANS MOTIF
ALORS QUE tout jugement doit être motivé à peine de nullité ; que Monsieur Martial X... poursuivait l'indemnisation du préjudice résultant des circonstances vexatoires de son licenciement ; qu'en le déboutant de ce chef de demande sans donner aucun motif à sa décision, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 11-18428
Date de la décision : 31/10/2012
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Basse-Terre, 14 mars 2011


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 31 oct. 2012, pourvoi n°11-18428


Composition du Tribunal
Président : M. Blatman (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Gatineau et Fattaccini, SCP Masse-Dessen et Thouvenin

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:11.18428
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award