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24/10/2012 | FRANCE | N°11-13315

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 24 octobre 2012, 11-13315


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé par la société Roussel Uclaf, devenue Aventis pharma puis Sanofi chimie en qualité de chimiste 1er degré par contrat à durée indéterminée à compter du 18 mars 1974, puis promu au poste de chef d'atelier de fabrication le 13 décembre 1984, pour occuper en dernier lieu la fonction d'ingénieur hygiène, sécurité, environnement au coefficient 460 ; qu'à compter de 1996, il est devenu délégué syndical et a occupé différents mandats au sein d'orga

nismes paritaires ou syndicaux ainsi que des mandats de conseiller prud'homme ;...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé par la société Roussel Uclaf, devenue Aventis pharma puis Sanofi chimie en qualité de chimiste 1er degré par contrat à durée indéterminée à compter du 18 mars 1974, puis promu au poste de chef d'atelier de fabrication le 13 décembre 1984, pour occuper en dernier lieu la fonction d'ingénieur hygiène, sécurité, environnement au coefficient 460 ; qu'à compter de 1996, il est devenu délégué syndical et a occupé différents mandats au sein d'organismes paritaires ou syndicaux ainsi que des mandats de conseiller prud'homme ; qu'estimant être victime d'une discrimination hiérarchique et salariale du fait de ces activités, M. X... a saisi la juridiction prud'homale, le 16 février 2005, d'une demande au titre de la discrimination syndicale ;
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu les articles L. 1132-1, L. 1134-1 et L. 2141-5 du code du travail ;
Attendu que, pour rejeter la demande du salarié, la cour d'appel retient que le fait pour le salarié de ne pas avoir eu d'entretien annuel d'évaluation, s'il constitue un non-respect des accords syndicaux, ne peut toutefois être constitutif d'une discrimination dans la mesure où il résulte des pièces versées aux débats qu'il a bien été convié à une réunion en septembre 2005 dont l'objet était précisément de faire le point sur la situation des représentants élus et mandatés et de procéder à l'examen de leur situation individuelle mais qu'il ne s'est pas rendu à cette réunion ni n'en a sollicité le déplacement en cas d'empêchement ;
Qu'en statuant ainsi, alors que l'absence d'entretien d'évaluation de 1997 à 2005, qui était de nature à priver l'intéressé d'une possibilité de promotion professionnelle et laissait ainsi supposer l'existence d'une discrimination liée à l'exercice de fonctions syndicales, ne pouvait être justifiée par la seule absence du salarié à une réunion collective concernant la situation des salariés représentants élus ou mandatés organisée par l'employeur en septembre 2005, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Et sur le moyen unique, pris en sa deuxième branche :
Vu les articles L. 1132-1, L. 1134-1 et L. 2141-5 du code du travail ;
Attendu que, pour statuer comme elle a fait, la cour d'appel, après avoir constaté que les données résultant de l'évolution de la rémunération des salariés constituant le panel font apparaître entre 1997, date à laquelle le salarié a commencé l'exercice de ses fonctions représentatives et 2006, une évolution moyenne de 33,41 % alors que dans le même temps la rémunération du salarié n'a augmenté que de 26,47 %, retient que toutefois si l'on se réfère à la période antérieure à l'exercice par le salarié de mandats représentatifs et plus précisément située entre 1987 et 1997, l'évolution moyenne de la rémunération des salariés composant le panel s'est élevée à 52,63 % alors que celle du salarié n'a augmenté que de 44,43 %, et qu'il résulte donc de ces éléments que de tous temps le salarié a eu une progression de salaire inférieure à la moyenne des autres salariés de la population prise en considération et que cette progression de salaire ne s'est pas particulièrement infléchie à compter de l'exercice par celui-ci de fonctions représentatives, l'écart avec l'augmentation moyenne de la rémunération des salariés considérés s'étant au contraire réduit entre 1997 et 2006 de telle sorte qu'aucun lien ne peut être retenu entre le montant de la rémunération du salarié et son activité représentative ;
Qu'en se déterminant ainsi, alors que la seule circonstance que la rémunération du salarié connaissait une progression moindre que celle de la moyenne des autres salariés avant l'exercice de ses fonctions représentatives et que cette différence de progression ne s'est pas infléchie à compter de l'exercice de ces fonctions ne pouvait être de nature à justifier objectivement l'absence de toute discrimination, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 4 janvier 2011, entre les parties, par la cour d'appel de Riom ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Limoges ;
Condamne la société Sanofi chimie aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer 2 500 euros à M. X... ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre octobre deux mille douze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Masse-Dessen et Thouvenin, avocat aux Conseils, pour M. X...

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit qu'il n'y avait pas de discrimination syndicale à l'égard du salarié et d'AVOIR débouté ce dernier de sa demande de condamnation de l'employeur à lui payer la somme de 450.000 € à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice matériel et la somme de 50.000 € titre de réparation du préjudice moral ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE pour caractériser 1'inégalité de traitement dont il prétend être l'objet, Monsieur X... se fonde d'une part sur une analyse des bilans sociaux des années 2007 et 2008 établissant que sa rémunération mensuelle est très inférieure à celle des cadres se trouvant au coefficient 460 et d'autre part sur un panel de comparaison de salariés qui selon lui se trouvaient dans une situation comparable en 1996 mais dont la rémunération a connu une évolution moyenne bien supérieure à la sienne ; que les bilans sociaux n'étant que la synthèse d'un certain nombre de données générales et statistiques relatives aux conditions de travail et de rémunération au sein de l'entreprise, il ne peut en être tirée aucune conclusion susceptible de caractériser une inégalité de traitement sur un plan individuel ; que s'agissant du panel de comparaison produit par Monsieur X... devant la cour, celui-ci n'apparaît pas pertinent dans la mesure où il comprend des salariés ayant des âges et des anciennetés très différents de celui-ci et qui sont entrés dans l'entreprise avec des niveaux et des coefficients différents et supérieurs pour deux d'entre eux à celui-ci ; que la société SANOFI CHIMIE produit de son côté différents panels de comparaison ; que le panel 1 à savoir celui de tous les salariés qui se trouvaient au coefficient 460 au 1er janvier 1997 et qui comme Monsieur X... sont toujours actuellement au coefficient 460 fait apparaître comme a pu le constater la commission d'arbitrage que Monsieur X... se situe dans la moyenne des évolutions salariales des membres le composant ; que toutefois le plus pertinent apparaît être le panel 2 concernant les personnes qui étaient au coefficient 460 en janvier 1997 quelles que soient leurs évolutions ultérieures, ce panel d'ailleurs réclamé par la commission d'arbitrage lors de sa réunion du 27 mars 2006, étant celui qui se rapproche le plus de la population visée par les accords syndicaux des 16 juin 1999 et 14 mai 2004 puisque concernant des salariés qui exercent des fonctions à un niveau de classification au moins équivalent et qui se situent dans la même tranche d'ancienneté que Monsieur X..., même s'il ne s'agit pas ici d'apprécier le montant du salaire auquel pouvait prétendre le salarié en application des dispositions spécifiques aux représentants du personnel prévues dans les accords de droit syndical, mais de rechercher l'existence ou non d'une discrimination syndicale dans l'évolution des salaires de Monsieur X... par rapport à celle des autres salariés de l'entreprise ; que les données résultants de l'évolution de la rémunération des salariés constituant ce panel font apparaître qu'entre 1997 date à laquelle Monsieur X... a commencé l'exercice de ses fonctions représentatives et 2006, une évolution moyenne de 33,41 % alors que dans le même temps la rémunération de Monsieur X... n'a augmenté que de 26,47 % ; que toutefois si l'on se réfère à la période antérieure à l'exercice par Monsieur X... de mandats représentatifs et plus précisément située entre 1987 et 1997 l'évolution moyenne de la rémunération des salariés composant le panel s'est élevée à 52,63 % alors que celle de Monsieur X... n'a augmenté que de 44,43 % ; qu'il résulte donc de ces éléments que de tous temps Monsieur X... a eu une progression de salaire inférieure à la moyenne des autres salariés de la population prise en considération et que cette progression de salaire ne s'est pas particulièrement infléchie à compter de l'exercice par celui-ci de fonctions représentatives, l'écart avec l'augmentation moyenne de la rémunération des salariés considérés s'étant au contraire réduit entre 1997 et 2006 de telle sorte qu'aucun lien ne peut être retenu entre le montant de la rémunération de Monsieur X... et son activité représentative ; que par ailleurs le fait pour Monsieur X... de ne pas avoir eu d'entretien annuel d'évaluation, s'il constitue un non-respect des accords syndicaux, ne peut toutefois être constitutif d'une discrimination dans la mesure où il résulte des pièces versées aux débats qu'il a bien été convié à une réunion en septembre 2005 dont l'objet était précisément de faire le point sur la situation des représentants élus et mandatés et de procéder à l'examen de leur situation individuelle mais qu'il ne s'est pas rendu à cette réunion ni n'en a sollicité le déplacement en cas d'empêchement ; que de même Monsieur X... n'établit en rien ni d'ailleurs n'allègue s'être vu refuser sa participation à une formation professionnelle dont il avait sollicité le bénéfice ; que dans ces conditions c'est à juste titre que le conseil des prud'hommes a estimé qu'il n'y avait pas de discrimination syndicale à l'égard de Monsieur X... et a débouté celui-ci de ses demandes en dommages et intérêts tant en ce qui concerne le préjudice matériel que le préjudice moral ;
ET AUX MOTIFS éventuellement adoptés QUE l'accord de droit syndical en vigueur dans l'entreprise AVENTIS pour les employés consacrant moins de la moitié de leur temps à leur activité professionnelle -ce qui est le cas de M. X... en l'espèce- a été respecté, pour preuve les multiples entretiens et réunions ayant eu lieu entre les parties pour tenter de trouver une solution mutuellement acceptable ; que, même en l'absence de tout accord sur les panels au sein de la commission de suivi et d'arbitrage, ainsi que le relève la mission de Conseillers Rapporteurs, les éléments de comparaison produits par l'employeur avec des paramètres professionnels analogues (notamment quant à la fonction, au coefficient et à l'ancienneté) ne mettent pas en évidence de déséquilibre salarial et catégoriel injustifiable au détriment de M. X... (de l'ordre de cinq points seulement pour ce qui est de l'évolution de rémunération en pourcentage du panel au coefficient 460, sur une évolution moyenne de 31,06%)qui, aux dires d'AVENTIS, connaissait déjà une évolution inférieure à la moyenne dès avant 1997 (mais n'accuse en outre aucun retard suspect par rapport à ses collègues exerçant la fonction H.S.E.) ; que le demandeur produit quant à lui des éléments de comparaison avec des collègues à lui qui sont placés dans des conditions de travail significativement différentes (notamment quant à la fonction, à la responsabilité, à la formation, au coefficient et à l'ancienneté), empêchant par là même toute comparaison objective des situations catégorielles et salariales, étant ici rappelé que M. X... était déchargé de toute responsabilité de gestion et d'encadrement de personnel à sa propre demande et ajuste titre ; qu'il est établi que le demandeur se situe aujourd'hui à un niveau de salaire nettement supérieur au minimum conventionnel de sa catégorie professionnelle, qu'il a été régulièrement augmenté et qu'il ne fournit pas de justification à sa demande d'un repositionnement salarial qui le situerait au niveau des dirigeants du site de l'usine ; que, s'il devait être établi que le statut de Conseiller Prud'homme de M. X... entraîne pour lui des frais supplémentaires, la responsabilité ne saurait en être attribuée à son employeur AVENTIS PHARMA ALORS QUE le salarié qui exerce des activités de représentation du personnel quel que soit le temps consacré à son activité professionnelle, bénéficie comme tous les salariés d'un entretien annuel ; qu'en l'espèce Monsieur X... avait fait valoir que depuis 1996, il n'avait bénéficié d'aucun entretien annuel d'évaluation professionnelle en sorte qu'il n'avait bénéficié d'aucune évolution professionnelle depuis 1997 ; qu'en décidant que le salarié n'avait été victime d'une discrimination syndicale, tout constatant néanmoins que le salarié n'avait pas eu d'entretien annuel d'évaluation, tout au plus avait-il été convié à une réunion en septembre 2005 afin de faire le point sur la situation des représentants élus et mandatés et de procéder à l'examen de leur situation individuelle, la Cour d'appel a violé les articles L 1132-1 et L 2141-5 du Code du travail, ensemble l'article 30 de l'accord de droit syndical AVENTIS FRANCE du 14 mai 2004 ;
ALORS ENCORE QU'il appartient à l'employeur de prouver que la disparité laissant supposer l'existence d'une discrimination syndicale, est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination fondée sur l'appartenance à un syndicat ; qu'en justifiant la disparité de l'évolution de la rémunération de Monsieur X... entre 1997 et 2006 de 26,47 % au regard de l'évolution moyenne de 33,41 % du panel 2, en relevant seulement qu'à la période antérieure à l'exercice par Monsieur X... de mandats représentatifs entre 1987 et 1997 l'évolution moyenne de la rémunération des salariés composant le panel s'est élevée à 52,63 % alors que celle de Monsieur X... n'a augmenté que de 44,43 %, en sorte qu'un écart se serait maintenu, sans expliquer pour la période litigieuse de 1997 à 2006 la disparité par un élément objectif contemporain à la période considéré et étranger à toute discrimination, la Cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles L 1132-1, L 1134-1 et L 2141-5 du Code du travail ;
ALORS ENSUITE QU'en se contentant d'énoncer que le panel 1 de l'employeur concernant tous les salariés qui se trouvaient au coefficient 460 au 1er janvier 1997 et qui comme Monsieur X... sont toujours actuellement au coefficient 460, fait apparaître que Monsieur X... se situe dans la moyenne des évolutions salariales des membres le composant, sans autre précision, tout en constatant par ailleurs que le panel 2 démontrait une disparité de traitement dans l'évolution des salaires entre 1997 et 2006, la Cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles L 1132-1, L 1134-1 et L 2141-5 du Code du travail ;
ALORS QU'en se contentant d'énoncer pour écarter le panel de comparaison proposé par Monsieur X..., que celui-ci n'apparaît pas pertinent dans la mesure où il comprend des salariés ayant des âges et des anciennetés très différents de celui-ci et qui sont entrés dans l'entreprise avec des niveaux et des coefficients différents et supérieurs pour deux d'entre eux à celui-ci, sans rechercher si, en 1996 date à laquelle Monsieur X... a débuté l'exercice de son activité syndicale, les salariés de ce panel étaient placés dans une situation comparable, la Cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles L 1132-1, L 1134-1 et L 2141-5 du Code du travail ;
ALORS ENFIN QUE qu'il appartient au salarié qui s'estime victime d'une discrimination de soumettre au juge les éléments de fait laissant supposer son existence, qu'il n'incombe pas au salarié de rapporter la preuve de la discrimination syndicale ; qu'en écartant des bilans sociaux des années 2007 et 2008 établissant que sa rémunération mensuelle est très inférieure à celle des cadres se trouvant au coefficient 460 au seul motif général que les bilans sociaux ne sont que la synthèse d'un certain nombre de données générales et statistiques relatives aux conditions de travail et de rémunération au sein de l'entreprise non susceptibles de caractériser une inégalité de traitement sur un plan individuel, la Cour d'appel a violé l'article L 1134-1 du Code du travail ensemble l'article 1353 du Code civil.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 11-13315
Date de la décision : 24/10/2012
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Riom, 04 janvier 2011


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 24 oct. 2012, pourvoi n°11-13315


Composition du Tribunal
Président : M. Frouin (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Gatineau et Fattaccini, SCP Masse-Dessen et Thouvenin

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:11.13315
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