LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique ci-après annexé :
Attendu qu'ayant exactement retenu que la clause fixant le prix initial du bail pendant les six premières années et un palier au-delà duquel un nouveau prix était fixé, en totale indépendance avec l'application des règles de la révision légale, était licite et que la simple application d'une clause claire et précise ne souffrant aucune interprétation était de la compétence du juge des référés, la cour d'appel qui a relevé que la société Dafy Moto ne contestait pas avoir bénéficié d'un allégement de loyers en contrepartie de travaux qu'elle n'a pas exécutés, a pu, sans trancher une contestation sérieuse, allouer une provision à la bailleresse ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Dafy Moto aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Dafy Moto à payer à la SCI de la Weppe la somme de 2 500 euros, rejette la demande de la société Dafy Moto ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du seize octobre deux mille douze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
.Moyen produit par la SCP Gadiou et Chevallier, avocat aux Conseils, pour la société Dafy Moto.
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit n'y avoir lieu à contestation sérieuse et d'AVOIR condamné la Société DAFY MOTO à payer à la SCI DE LA WEPPE la somme de 48.000 € à titre provisionnel à valoir sur son indemnisation définitive à déterminer par les juges du fond ;
AUX MOTIFS ADOPTES QUE selon la Société DAFY MOTO, l'article 26 du bail fait échec aux dispositions des articles L. 145-37 et L. 145-39 du code de commerce qui sont d'ordre public ; que c'est méconnaître l'article 7 dudit bail qui prescrit une clause d'échelle mobile de révision des loyers ; que les dispositions des articles L. 145-38 et L. 145-39 sont donc bien respectées, considérant en outre que le loyer a bien été révisé durant la période de location ; que comme l'indique la SCI DE LA WEPPE, le bail en cause constitue un bail avec franchise, usuellement utilisé en cas d'existence de travaux à la charge du locataire, ce qui est exactement le cas en l'espèce ; que la doctrine est claire et conforme à la jurisprudence ; que les parties étaient parfaitement libres en l'espèce de solliciter une révision du loyer initialement fixé ; que les dispositions de l'article 1131 du code civil n'ont donc pas matière à s'appliquer ; qu'après mise en demeure réitérée, la Société DAFY MOTO n'a pas effectué les travaux et s'apprête à libérer les locaux le 14/05/2009 ; qu'à l'évidence, elle n'est pas en mesure d'effectuer les travaux prévus avant cette date ; que la Société DAFY MOTO soutient que ces dispositions sont déséquilibrées dans leurs engagements réciproques ; qu'elle fait état de travaux très importants, supérieurs à 80.000 € ht alors que la franchise des loyers consentie était de l'ordre de 48.000 € ht ; que la Société DAFY MOTO qui procède à la location de nombreux locaux commerciaux a cependant signé le bail le 15 mai 2003, en parfaite connaissance de cause ; que les travaux sollicités étaient parfaitement repris dans un descriptif annexé audit bail et il était parfaitement loisible à la Société DAFY MOTO de les faire estimer et évaluer afin de connaître exactement la portée de son engagement ; que de surcroît, depuis 2003, la Société DAFY MOTO n'a effectué qu'une petite partie des travaux ; qu'ici encore, elle aurait pu en faire évaluer les montants dans l'intervalle, voire se rapprocher de son bailleur pour négocier une autre franchise de loyers si elle estimait que son engagement était disproportionné ; qu'elle n'en a rien fait ; que son engagement était clair et librement consenti, qu'elle ne peut aujourd'hui le renier ; qu'en conséquence, il sera fait droit à la demande de la SCI DE LA WEPPE et de condamner la Société DAFY MOTO à lui payer par provision la somme de 48.000 € ;
ET AUX MOTIFS PROPRES QU'il résulte de la lecture du bail et de son article 26 que le bailleur et le preneur ont convenu en contrepartie des travaux parfaitement définis à exécuter par le preneur d'une baisse de loyer pendant les six premières années ; que cette clause qui fixait le prix initial du loyer et un palier au-delà duquel un nouveau prix était fixé est parfaitement licite ; que le bail peut prévoir une évolution prédéterminée et progressive du loyer en totale indépendance avec l'application des règles de la révision légale ou d'une éventuelle indexation de loyer ; que cette clause intrinsèquement valable et parfaitement précise n'a pas empêché l'application de l'article 7 du bail qui contenait, comme l'article L. 145-39 du code de commerce en prévoit la possibilité, une clause d'échelle mobile ; qu'ainsi, elle n'a pas empêché l'application de la révision du loyer ; qu'elle ne serait nulle que si elle prévoyait un engagement des parties à ne pas demander en cours de bail la révision du loyer fixé initialement d'un commun accord ; que tel n'est pas le cas et la Société DAFY ne peut plaider que le bail est nul pour ne pas avoir respecté les articles L. 145-37, 38 et 39 du code de commerce ; qu'il n'y a donc pas là de contestation sérieuse et il est superflu de répondre sur l'argument de procédure ; qu'en ce qui concerne le déséquilibre des obligations réciproques plaidé en second lieu, la cour remarque que la Société DAFY MOTO, qui n'en est sûrement pas à sa première signature en matière de baux commerciaux, a signé en connaissance de cause une clause qui reprenait dans le détail les travaux à effectuer, dont elle pouvait faire évaluer le coût, qui dans son esprit de l'époque ne lui ont pas paru disproportionnés vis-à-vis de son engagement et de l'allégement du loyer, d'autant qu'il est évident que le coût en aurait été moindre que leur évaluation faite 5 ans plus tard, qu'il n'est pas douteux qu'elle n'aurait pas signé le bail litigieux si elle avait eu le moindre soupçon d'un quelconque déséquilibre, qu'elle cherche à se soustraire à un engagement qu'elle a pris librement et qu'elle n'a pas assumé ; qu'en outre, la SCI ne demande qu'une provision à hauteur de l'avantage consenti, soit 48.000 € ; qu'à l'instar du premier juge, la Cour n'est pas convaincue par l'argument et l'article 1134 du code civil trouve ici pleinement application ; qu'il s'en suit que la simple application d'une clause claire et précise, qui ne souffre aucune interprétation, est bien de la compétence du juge des référés, que la société appelante ne nie pas avoir bénéficié d'un allégement de loyers en contrepartie de travaux qu'elle n'a pas exécutés que pour la partie de l'équipement électrique ; que dès lors, la demande ne se heurtant à aucune contestation et le montant en ayant été limité par le bailleur, il y a lieu d'y faire droit et de confirmer l'ordonnance entreprise ;
ALORS QUE, D'UNE PART, nonobstant une clause d'échelle mobile, la clause par laquelle les parties décident de fixer par avance et forfaitairement le prix du bail, pendant les neuf premières années de son application, est nulle en ce qu'elle ne leur confère plus la faculté de demander sa révision triennale ; qu'en relevant, pour retenir sa compétence en référé et condamner la Société DAFY MOTO à paiement d'une provision, qu'en l'état de la clause d'échelle mobile stipulée dans le contrat de bail commercial conclu avec la SCI DE LA WEPPE, les clauses par lesquelles les parties se sont convenu de fixer le loyer annuel ht à 48.163 euros pendant six ans puis à 54.881 € pendant les trois années suivantes (articles 26) en contrepartie de quoi le preneur s'engage à effectuer un certain nombre de travaux (article 31-1) sont valables, la Cour d'appel, qui a tranché une contestation sérieuse, a violé les articles 873 alinéa 2 du code de procédure civile, ensemble, les articles L. 145-37, L. 145-38, L. 145-39 et L. 145-15 du code de commerce ;
ALORS QUE, D'AUTRE PART, le juge des référés, qui n'est compétent pour ordonner l'exécution d'une obligation qu'à la condition que son existence ne soit pas sérieusement contestable, ne peut, sans trancher le fond du litige, se prononcer sur la qualification d'un contrat dont dépend l'obligation à paiement ; qu'en qualifiant le contrat de bail de contrat de franchise, cependant que cette qualification était dûment contestée, la Cour d'appel a violé l'article 873 alinéa 2 du code de procédure civile ;
ALORS, ENFIN, QUE le juge des référés, qui interprète les clauses d'un contrat, tranche une contestation sérieuse ; qu'en retenant, pour se dire compétente et condamner la Société DAFY MOTO à paiement d'une provision, que les clauses du bail doivent s'interpréter comme étant un bail avec franchise, la Cour d'appel, qui a tranché une contestation sérieuse, a violé l'article 873 alinéa 2 du code de procédure civile.