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10/10/2012 | FRANCE | N°11-24401

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 10 octobre 2012, 11-24401


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., engagé en février 1986 par la société Hertz France au sein de laquelle il exerçait en dernier lieu les fonctions de directeur des opérations, a été licencié pour faute grave, le 3 novembre 2008, après convocation à entretien préalable le 14 octobre 2008 ; que le salarié a saisi la juridiction prud'homale pour contester le bien fondé du licenciement et demander le paiement d'un rappel de bonus ;

Sur le premier moyen :

Vu l'article L. 1332-4 du c

ode du travail ;

Attendu que la cour d'appel, pour dire non prescrits les faits ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., engagé en février 1986 par la société Hertz France au sein de laquelle il exerçait en dernier lieu les fonctions de directeur des opérations, a été licencié pour faute grave, le 3 novembre 2008, après convocation à entretien préalable le 14 octobre 2008 ; que le salarié a saisi la juridiction prud'homale pour contester le bien fondé du licenciement et demander le paiement d'un rappel de bonus ;

Sur le premier moyen :

Vu l'article L. 1332-4 du code du travail ;

Attendu que la cour d'appel, pour dire non prescrits les faits reprochés au salarié, a retenu d'abord que la société déclarait n'en avoir eu connaissance que fin septembre 2008, ensuite que le salarié n'était pas en mesure d'établir qu'il en avait averti sa direction générale avant le 15 septembre 2008 ;

Attendu, cependant, que lorsqu'un fait fautif donnant lieu à l'engagement de poursuites disciplinaires a eu lieu plus de deux mois avant le déclenchement de celles-ci, il appartient à l'employeur de rapporter la preuve qu'il n'en a eu connaissance que dans les deux mois ayant précédé l'engagement de ces poursuites ;

Qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel, qui a inversé la charge de la preuve, a violé le texte susvisé ;

Sur le second moyen :

Vu les articles 1134 du code civil et 12 du code de procédure civile ;

Attendu que la cour d'appel, pour rejeter la demande de rappel de bonus au titre de l'année 2008 formée par le salarié, a relevé que celui-ci qui ne produisait que ses bulletins de salaires et l'avenant à son contrat de travail du 29 avril 1999 ne comportant aucune précision sur les critères retenus ni le mode de calcul du bonus annuel, et qui se prévalait de très bons résultats pour 2008 sans en apporter la démonstration, ne mettait pas la cour en mesure de statuer sur sa demande ;

Qu'en statuant ainsi, par un motif inopérant, alors qu'il lui appartenait de déterminer le montant du bonus auquel le salarié était fondé à prétendre au vu des éléments de la cause, la cour d'appel, qui n'a pas exercé son office, a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 8 juillet 2011, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris ;

Condamne la Société Hertz France aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la Société Hertz France et la condamne à payer à M. X... la somme de 2 500 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix octobre deux mille douze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Roger et Sevaux, avocat aux Conseils, pour M. X...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir décidé que le licenciement de Monsieur X... reposait sur une cause réelle et sérieuse ;

Aux motifs que Monsieur X... demande en premier lieu à la cour de dire que son licenciement résulte d'une fraude à la loi et est donc nul ; qu'il prétend que la véritable cause de son licenciement est économique, et fait valoir à l'appui que son poste a été supprimé et qu'un plan de sauvegarde de l'emploi était en cours pour réduire les effectifs, après la prise de contrôle de la Société Hertz par un fond de pension américain ; que toutefois l'existence d'un plan de sauvegarde de l'emploi dans le contexte d'une réduction au niveau mondial des effectifs du groupe Hertz, non contestés, ne saurait occulter les faits constatés commis par le gérant de la Société Snap, Monsieur Y..., sur le secteur dont Monsieur X... avait la charge ; que la Cour doit examiner en premier lieu la justification des griefs développés à l'encontre de Monsieur X..., suite à ces faits, et dire ensuite, le cas échéant, qu'à défaut d'autre fondement, le licenciement était économique (arrêt p. 5, § 9 à 12) ;

Alors de première part qu'en cas de coexistence d'un motif économique et d'un motif personnel à l'appui d'un licenciement, il appartient au juge de rechercher celui qui a été la cause première et déterminante du licenciement et d'apprécier le bien-fondé du licenciement au regard de cette seule cause ; qu'en affirmant toutefois, pour décider que le licenciement de Monsieur X... reposait sur une cause réelle et sérieuse, qu'elle devait examiner en premier lieu le caractère réel et sérieux des griefs développés par la Société Hertz à l'encontre de Monsieur X... et dire ensuite qu'à défaut d'autre fondement le licenciement était économique, quand elle était tenue de déterminer la cause première et déterminante du licenciement et d'apprécier le bien-fondé du licenciement au regard de cette seule cause, la Cour d'appel a violé l'article L.1232-1 du Code du travail ;

Et aux motifs que la Société Hertz France déclare n'avoir eu connaissance des pratiques irrégulières de la Société Snap et de son gérant, et de l'usage frauduleux de certains véhicules loués, que fin septembre 2008 ; que si Monsieur X... conteste la date du 29 septembre citée dans la lettre de licenciement, il n'est pas en mesure de produire aucune pièce établissant qu'il a porté à la connaissance de son directeur général Monsieur Z... avant la lettre que celui-ci a signée le 15 septembre 2008 pour dénoncer le contrat avec la société Snap, et alors que la convocation à l'entretien préalable lui a été adressée le 14 octobre ; que les griefs faits à Monsieur X... ne sont pas prescrits (arrêt p. 5, § 13 à 15, p. 6, § 1 à 3) ;

Alors de deuxième part qu'aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul, à l'engagement de poursuites disciplinaires au-delà d'un délai de deux mois à compter du jour où l'employeur en a eu connaissance à moins que ce fait ait donné lieu dans le même délai à l'exercice de poursuite pénale ; que dès lors que les faits ont été commis plus de deux mois avant l'engagement des poursuites disciplinaires, il appartient à l'employeur de rapporter la preuve de ce qu'il n'en a eu connaissance que plus tard ; qu'en décidant que les faits reprochés à Monsieur X... pour justifier son licenciement pour faute grave n'étaient pas prescrits, aux motifs qu'il ne rapportait pas la preuve de ce que son employeur aurait eu connaissance des faits qui lui étaient reprochés deux mois avant le 14 octobre 2008, date de sa convocation à un entretien préalable à un licenciement, quand ces faits ayant été commis deux mois avant cette date, il appartenait à la Société Hertz de rapporter la preuve de ce qu'elle n'en avait pas eu connaissance au moment de leur commission, la Cour d'appel a inversé la charge de la preuve et violé l'article 1315 du Code civil ;

Et aux motifs encore qu'un rapport d'audit de janvier 2008, communiqué à Monsieur X..., avait signalé des pratiques irrégulières au regard des procédures contractuelles entre Hertz et son correspondant la Société Snap ; qu'il est établi que Monsieur X... a été informé par son directeur de la sécurité des renseignements parvenus à celui-ci des services de police à propos de véhicules appartenant à Hertz impliqués dans des infractions ou en possession de délinquants notoires ; qu'il était également informé du taux important de restitutions tardives et de sinistres, voire de paiements en espèce et à tout le moins en mesure de les constater ; que ni un courrier simple du 20 juin 2008, ni la mesure consistant à retirer au correspondant l'accès de la clientèle par internet n'étaient de nature à arrêter les dérives constatées ; qu'il ressort du courriel daté du 8 septembre 2008 de Monsieur A..., responsable de la sécurité, à Monsieur X..., que la situation n'a cessé de se dégrader en août et septembre, alors que ce dernier se refusait encore à cette date, ainsi qu'en atteste le responsable de la sécurité d'en aviser la hiérarchie ; qu'il ressort de ces observations que le retard apporté par Monsieur X... à aviser sa hiérarchie, ajouté au caractère tardif et inapproprié de mesures prises par lui, ont permis au gérant de la Société Snap de poursuivre ses pratiques jusqu'à la rupture du contrat la liant à Hertz ; que cependant le comportement de Monsieur X... face à une situation inhabituelle survenue chez un correspondant dont par ailleurs le chiffre d'affaires était important, ne relève pas d'une volonté délibérée de contrevenir aux dispositions du contrat de travail mais davantage d'une mauvaise appréciation de faits dont il n'est pas contestable qu'il était informé, et des mesures à prendre pour contrôler la dite situation ; que compte tenu de l'ancienneté, de la qualité du parcours professionnel et du niveau hiérarchique de Monsieur X... ces faits constituent une cause réelle et sérieuse de licenciement, mais non une faute grave ; que la décision des premiers juges sera confirmée sur ce point (arrêt p. 6, § 4 à 12) ;

Alors, de troisième part, qu'ayant considéré que le comportement de Monsieur X... ne procédait pas d'une volonté délibérée de contrevenir à ses obligations mais relevait d'une simple mauvaise appréciation des faits, la Cour d'appel ne pouvait, sans violer les articles L.1232-1 et L.1331-1 du Code du travail, considérer que cette erreur d'appréciation, par là-même dépourvue de tout caractère fautif, était susceptible de conférer une cause réelle et sérieuse à un licenciement pour motif disciplinaire ;

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Monsieur X... de sa demande tendant à voir la Société Hertz condamnée à lui payer la somme de 67.572 euros au titre de rappel de salaire variable pour l'année 2008 ;

Aux motifs que Monsieur X... forme une demande de rappel de bonus au titre de l'année 2008 ; que toutefois, il ne produit à la cour que ses bulletins de salaire dont celui de mars 2008 mentionnant le versement du bonus au titre de 2007, et l'avenant du 29 avril 1999 à son contrat de travail qui n'apporte aucune précision sur les critères retenus ni le mode de calcul ; que Monsieur X..., qui par ailleurs dans ses conclusions fait état de très bons résultats pour 2008 dont il n'apporte cependant pas la démonstration ne met pas la cour en mesure de statuer sur sa demande ; que sa demande sera rejetée (arrêt p. 6, § 14 à 15, p. 7, § 1 à 2) ;

Alors, de première part que lorsque le calcul de la rémunération dépend d'éléments détenus par l'employeur, celui-ci est tenu de la produire en vue d'une discussion contradictoire ; qu'en énonçant, pour débouter Monsieur X... de sa demande de paiement d'un rappel de bonus pour l'année 2008, que celui-ci produit des bulletins de salaires dont un mentionne le versement d'un bonus pour l'année 2007, un avenant à son contrat de travail qui n'apporte aucune précision, et ne démontre pas les bons résultats pour l'année 2008, quand il appartenait à l'employeur de justifier des éléments de calcul de cette prime et des résultats de l'année 2008, la Cour d'appel a inversé la charge de la preuve, en violation de l'article 1315 du Code civil ;

Alors, de seconde part, que lorsque le droit à une rémunération variable résulte du contrat de travail et à défaut d'un accord entre l'employeur et le salarié sur le montant de cette rémunération, il incombe au juge de la déterminer en fonction des critères visés au contrat et des accords conclus les années précédentes, de sorte que, si l'objectif de résultats dont le contrat de travail fait dépendre la rémunération variable n'a pas été déterminé, il appartient au juge de le fixer par référence aux années antérieures ; qu'en rejetant la demande de Monsieur X... de paiement d'un rappel de bonus pour l'année 2008, aux motifs que son bulletin de salaire mentionne le versement du bonus pour l'année 2007, mais que son contrat de travail n'apporte aucune précision sur les critères retenus et le mode de calcul, ce dont il résultait l'absence d'accord entre Monsieur X... et la Société Hertz sur le montant de ce bonus, la Cour d'appel, qui devait fixer le montant du bonus, a violé l'article 1134 du Code civil.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 11-24401
Date de la décision : 10/10/2012
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 08 juillet 2011


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 10 oct. 2012, pourvoi n°11-24401


Composition du Tribunal
Président : M. Frouin (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Célice, Blancpain et Soltner, SCP Roger et Sevaux

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:11.24401
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