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26/09/2012 | FRANCE | N°10-28262

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 26 septembre 2012, 10-28262


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 28 octobre 2010), que M. X..., engagé à compter du 15 juillet 1998 par la société Lotus, aux droits de laquelle vient la société IBM France, en qualité d'ingénieur d'affaires, moyennant une rémunération composée d'une partie fixe et d'une partie variable, a, par lettre du 7 mars 2007, fait part à son employeur de sa démission ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale d'une demande de requalification de la démission en licenciement sans cause réelle et sérieus

e et diverses demandes en paiement au titre de l'exécution et de la rupt...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 28 octobre 2010), que M. X..., engagé à compter du 15 juillet 1998 par la société Lotus, aux droits de laquelle vient la société IBM France, en qualité d'ingénieur d'affaires, moyennant une rémunération composée d'une partie fixe et d'une partie variable, a, par lettre du 7 mars 2007, fait part à son employeur de sa démission ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale d'une demande de requalification de la démission en licenciement sans cause réelle et sérieuse et diverses demandes en paiement au titre de l'exécution et de la rupture du contrat de travail ;
Sur le premier moyen :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ce moyen qui n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
Sur le deuxième moyen :
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de dire que la démission du salarié s'analyse en une prise d'acte de la rupture du contrat de travail produisant les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse et de le condamner à payer à celui-ci diverses sommes au titre de la rupture, alors, selon le moyen :
1°/ que la censure à intervenir sur le premier moyen de cassation entraînera, par voie de conséquence et en application des articles 624 et 625 du code de procédure civile, la censure de l'arrêt attaqué en ce qu'il a dit que la démission de M. X... s'analysait en une prise d'acte de la rupture du contrat de travail produisant les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, dès l'instant qu'il existe un lien de dépendance nécessaire entre cet aspect du litige et le rappel de commissionnement auquel a été condamné la société IBM France ;
2°/ que la démission est un acte unilatéral par lequel le salarié manifeste de façon claire et non équivoque sa volonté de mettre fin au contrat de travail ; que lorsque le salarié, sans invoquer un vice du consentement de nature à entraîner l'annulation de sa démission, remet en cause celle-ci en raison de faits ou manquements imputables à son employeur, le juge doit, s'il résulte de circonstances antérieures ou contemporaines de la démission qu'à la date à laquelle elle a été donnée, celle-ci était équivoque, l'analyser en une prise d'acte de la rupture qui produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiaient ou dans le cas contraire d'une démission ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que M. X... avait notifié par écrit sa démission le 7 mars 2007 sans l'assortir de la moindre réserve, qu'il n'avait contesté son solde de tout compte, par lequel l'employeur s'estimait créancier d'une somme au titre du remboursement de l'avance sur la prime dite « critical skill bonus », que le 27 avril 2007 et que c'est seulement le 19 juin suivant que le salarié a lui-même formulé une réclamation à l'égard de son employeur au titre des commissions de l'année 2005 ; qu'elle a constaté également que, si une discussion était survenue entre les parties, antérieurement à la démission, à propos du montant desdites commissions, les dernières manifestations de ce différend dataient du mois de juin 2006, soit dix mois avant la démission, cependant que les parties étaient convenues entre-temps, au mois d'octobre 2006, du versement d'un bonus exceptionnel « critical skill bonus » d'un montant de 20 000 euros ; qu'en considérant, en l'état de ces constatations, que la démission donnée sans réserve était équivoque, la cour d'appel, qui a statué par des motifs impropres à faire apparaître le caractère équivoque de la démission, a violé les articles L. 1221-1, L. 1233-1, L. 1237-2 et L. 1235-1 du code du travail, ensemble l'article 1134 du code civil ;
3°/ que la société IBM France faisait valoir dans ses conclusions que la cause de la démission de l'intéressé était son désir d'assumer des fonctions de directeur commercial au sein de la société Sinequa, ce qui lui conférait un statut de dirigeant qu'il n'avait pas au sein de la société IBM France, raison pour laquelle il avait sollicité le raccourcissement de son préavis ; que prive sa décision de base légale au regard des articles L. 1221-1, L. 1233-1, L. 1237-2 et L. 1235-1 du code du travail, ensemble l'article 1134 du code civil, l'arrêt attaqué qui s'abstient de rechercher et de vérifier si le véritable motif de la rupture du contrat de travail de M. X... n'était pas son désir d'une promotion professionnelle chez un tiers plutôt qu'un différend au sujet de ses commissions ;
Mais attendu que la démission est un acte unilatéral par lequel le salarié manifeste de façon claire et non équivoque sa volonté de mettre fin au contrat de travail, que lorsque, sans invoquer un vice du consentement de nature à entraîner l'annulation de sa démission, il remet en cause celle-ci en raison des faits ou manquements imputables à son employeur, le juge doit, s'il résulte de circonstances antérieures ou contemporaines de la démission, qu'à la date où elle a été donnée, celle-ci était équivoque, l'analyser en une prise d'acte de la rupture qui produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, si les faits invoqués la justifiaient ou dans le cas contraire, d'une démission ;
Et attendu qu'ayant relevé que le salarié avait à plusieurs reprises demandé à l'employeur, notamment par courriel du 11 juin 2006, que la question des commissions pour l'année 2005 soit réglée, la cour d'appel a pu en déduire que la démission du 7 mars 2007 était équivoque et devait s'analyser en une prise d'acte de la rupture du contrat de travail qui produisait les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le troisième moyen :
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de le condamner à payer au salarié une somme au titre de la prime qualifiée de "critical skill bonus", alors, selon le moyen :
1°/ que la censure à intervenir sur le deuxième moyen de cassation entraînera, par voie de conséquence et en application des articles 624 et 625 du code de procédure civile, la censure de l'arrêt attaqué en ce qu'il a condamné la société IBM France à payer une somme de 9.641,99 euros au titre de la prime critical skill bonus au motif que la rupture du contrat de travail était intervenue du fait de l'employeur ;
2°/ que le juge a l'obligation de ne pas dénaturer les documents de la cause ; que, selon l'accord des parties des 27 octobre et 11 décembre 2006, « les versements effectués au titre du critical skill bonus les 31 décembre 2006 et 31 décembre 2007 ne sont que des avances » dont l'employeur pouvait demander le remboursement si les conditions d'attribution du bonus n'étaient finalement pas remplies ; que dénature ces termes clairs et précis de l'accord des parties l'arrêt attaqué qui, par motifs adoptés, retient que l'avance de 15 000 euros versée à M. X... à effet du 31 décembre 2006 avait le caractère d'un droit acquis dès son versement ;
3°/ que la prévision, par la convention des parties, du remboursement éventuel d'une avance stipulée remboursable ne constitue pas la stipulation d'une sanction pécuniaire ; que, selon l'accord des parties des 27 octobre et 11 décembre 2006, « les versements effectués au titre du critical skill bonus les 31 décembre 2006 et 31 décembre 2007 n'étaient que des avances » dont l'employeur pouvait demander le remboursement si les conditions d'attribution du bonus n'étaient finalement pas remplies ; que M. X... n'ayant pas rempli, à la date de la rupture de son contrat de travail, les conditions d'attribution du bonus dit critical skill bonus au titre duquel lui avait été consentie une avance remboursable de 15 000 euros, viole les articles L. 1221-1 et L. 1331-2 du code du travail l'arrêt attaqué qui retient que cette avance était définitivement acquise au salarié, alors même qu'il n'en remplissait pas les conditions d'attribution, au motif inopérant que le salarié ne saurait être privé de l'avance qui lui a été versée avant son départ de l'entreprise, sauf à ce que cette privation s'analyse en une sanction pécuniaire ;
Mais attendu qu'après avoir relevé que la convention des parties signée le 27 octobre 2006 prévoyait le paiement d'un bonus exceptionnel, sous réserve de la réalisation des objectifs fixés, et précisait que celui-ci ne serait définitivement acquis que si, au 1er avril 2008, la rupture du contrat de travail à l'initiative du salarié pour quelque motif que ce soit ou à l'initiative de la compagnie pour le motif d'une faute grave n'était pas notifiée, la cour d'appel, qui a constaté que la rupture du contrat de travail était intervenue du fait de l'employeur et en l'absence de faute grave, a légalement justifié sa décision ;
Sur le quatrième moyen :
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de le condamner à payer au salarié une indemnité compensatrice de préavis, alors, selon le moyen, qu'en cas d'inexécution par le salarié du préavis, l'employeur n'est tenu au paiement d'une indemnité compensatrice que lorsqu'il a unilatéralement décidé de dispenser le salarié d'exécuter sa prestation de travail ou lorsque cette inexécution lui est imputable ; qu'en l'espèce, comme cela résultait de l'échange de courriels des 21 mars 2007 et 26 mars 2007 entre la société IBM France et M. X..., c'était à la demande du salarié que la société avait accepté de dispenser le salarié de l'exécution de son préavis à compter du 31 mars 2007 ; qu'il s'ensuit qu'a fait une fausse application de l'article L. 1234-5 du code du travail l'arrêt attaqué qui a condamné la société IBM France à payer à M. X... une indemnité compensatrice de préavis et les congés payés y afférents ;
Mais attendu qu'ayant décidé que la démission du salarié s'analysait en une prise d'acte de la rupture produisant les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, la cour d'appel en a déduit à bon droit que l'intéressé était fondé à obtenir paiement des sommes demandées, peu important qu'il ait, à sa demande, été dispensé par l'employeur d'exécuter son préavis ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société IBM France aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société IBM France à payer à M. X... la somme de 2 500 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six septembre deux mille douze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Célice, Blancpain et Soltner, avocat aux Conseils, pour la compagnie IBM France.
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
(Commissions 2005)
Le moyen fait grief à l'arrêt partiellement infirmatif attaqué D'AVOIR condamné la société IBM FRANCE à payer à Monsieur X... la somme de 94.478 euros bruts à titre de solde des commissions de l'exercice 2005, et consécutivement les sommes de 38.910 euros bruts à titre d'indemnité compensatrice de préavis, et de 3.890 euros bruts au titre des congés payés y afférents ;
AUX MOTIFS QUE « par avenant du 11 juin 2001, le salarié a approuvé la modification de la structure de sa rémunération afin de permettre l'application de la nouvelle rémunération variable introduite par « les plans de commissions arrêtés chaque année et les lettres d'objectifs afférentes (quota letter) » ; que les parties s'accordent, pour l'exercice 2005, sur l'existence d'une « incentive Plan letter » ou « IPL » et d'une « target incentive letter » ou « TI letter » en n'y attachant pas toutefois les mêmes conséquences ; qu'il n'est pas non plus contesté que l'objectif initialement fixé était de 8.300.000 dollars US ainsi qu'il résulte d'un document intitulé « employee target incentive » visant une date d'effet au 1er janvier 2005, que M. X... indique avoir signé et qui constituerait selon lui la « TI Letter », si l'on se réfère à ses explications ; que ce document fait notamment référence à la « lettre d'objectifs en FMS » ; qu'il y est indiqué qu'il doit être retourné au manager, daté et signé, chaque page devant être paraphée ; que l'employeur, qui se contente d'affirmer que le salarié n'avait pas signé de « TI Letter » en ce qui concernait le premier objectif fixé, ne fournit pas d'explications quant au contenu et aux effets de cette pièce ; qu'il est également produit un échange de courriels de novembre 2005 aux termes duquel Mme Y... interroge M. Z... pour qu'il confirme que « seule la TI Letter engage l'employé quant à son mode de rémunération/variable » et que ce dernier répond qu'il « confirme en effet c'est pour cela qu'on demande la signature de ce document qui est le seul qui définit réellement la rémunération de la personne » ; que M. X... dans un message du 22 décembre 2005 indique « je note que le fait de valider FMS ne m'engage en rien dans l'acceptation de la quota lettre modifiée », sans qu'il soit versé aux débats des observations en sens contraire de l'employeur ; que Mme Y... dans un courriel du 19 décembre 2005 précise à M. X... qu'il « faut absolument » qu'il approuve cette nouvelle IPL dans « la journée » afin que de « nouvelles TI Letter » puisent être émises ; qu'il résulte de ces éléments que l'acceptation des modalités de la rémunération du salarié devait se faire pour l'exercice 2005 par la signature d'une « TI Letter », la simple validation dans le système informatique de l'« IPL » ne valant pas accord de l'intéressé quant au changement des modalités de sa rémunération ; qu'aucune « TI Letter » concernant le nouvel objectif dont se prévaut l'employeur n'est produite ; qu'en conséquence, celui-ci ne pouvait imposer au salarié le calcul de sa rémunération sur la base de ce nouvel objectif ; qu'il convient de faire droit à la demande de rappel de commissions et de congés payés y afférents de M. X... à hauteur des sommes réclamées, sur la base de l'objectif qu'il a accepté ; … que la démission est un acte unilatéral par lequel le salarié manifeste de façon claire et non équivoque sa volonté de mettre fin au contrat de travail ; que lorsque le salarié, sans invoquer un vice du consentement de nature à entraîner l'annulation de sa démission, remet en cause, celle-ci en raison des faits ou manquements imputables à son employeur, le juge doit, s'il résulte de circonstances antérieures ou contemporaines de la démission qu'à la date à laquelle elle a été donnée, celle-ci était équivoque, l'analyser en une prise d'acte de la rupture qui produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiaient ou dans le cas contraire d'une démission ; que le salarié a demandé à plusieurs reprises à l'employeur, notamment par courriel du 11 juin 2006, que la question des commissions pour l'année 2005 soit réglée ; qu'il a dénoncé et contesté le 27 avril 2007 le solde tout compte ; que son conseil a saisi l'employeur le 19 juin suivant du non-paiement des commissions ; qu'il apparaît dans ces conditions que la démission de M. X... était équivoque et doit s'analyser en une prise d'acte de la rupture qui produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, dès lors que l'employeur a manqué gravement à ses obligations en réduisant de façon très importante le montant des commissions dues » ;
ALORS, DE PREMIÈRE PART, QUE selon l'article 4 du Code de procédure civile, les termes du litige sont fixés par les écritures des parties ; que, dans ses conclusions, la société IBM FRANCE explicitait clairement que, tandis que l'Incentive Plan Letter (IPL) avait pour objet de déterminer « les objectifs annuels du salarié », la Target Incentive Letter (TI Letter ou TIL) fixait la « structure de la rémunération du salarié » (conclusions, p. 9) et que « l'Incentive Plan Letter contient les objectifs définis et acceptés pour en permettre le calcul selon la TI Letter qui a été acceptée » (conclusions, p. 10) ; que méconnaît les termes du litige, en violation de l'article 4 du Code de procédure civile, l'arrêt attaqué qui retient que la société IBM FRANCE ne fournissait pas d'explications quant au contenu et aux effets de la TI Letter ;
ALORS, DE DEUXIÈME PART, QU'il était constant aux débats que Monsieur X... avait expressément manifesté son acceptation d'une proposition dite « Incentive Plan Letter » (IPL) ayant pour objet de fixer à 17.780.000 $ ses objectifs pour l'exercice 2005 ; qu'en estimant néanmoins que sa commission variable au titre de ce même exercice devait être déterminée par référence à l'objectif de 8.300.000 $ antérieurement convenu, la cour d'appel a privé de tout effet l'accord intervenu sur la fixation de l'objectif à 17.780.000 $ et a ainsi violé les articles L. 1221-1 du Code du travail et 1134 du Code civil ;
ALORS, ENFIN ET EN TOUTE HYPOTHÈSE, QU'au titre de leur obligation de motivation, les juges du fond sont tenus de s'expliquer sur les moyens des conclusions des parties ; qu'il était constant que Monsieur X... avait signé une proposition de l'employeur intitulée « Incentive Plan Letter » (IPL) fixant à 17.780.000 $ ses objectifs pour 2005, mais non la seconde proposition, intitulée « Target Incentive Letter » (TIL) correspondante ; que viole l'article 455 du Code de procédure civile l'arrêt attaqué qui retient que Monsieur X... n'était pas lié par l'objectif de 17.780.000 $ pour 2005, au motif que l'acceptation des modalités de la rémunération devait se faire par la signature de la TIL, sans s'expliquer sur le moyen des conclusions de la société exposante (pp. 9 et 10) faisant valoir que l'IPL avait pour objet de fixer l'objectif du salarié, tandis que la TIL fixait seulement, sur la base de cet objectif ainsi défini, la structure de la rémunération de l'intéressé, de sorte que, si la structure de la rémunération antérieurement convenue demeurait applicable, il y avait bien eu accord sur l'objectif modifié pour 2005.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
(Requalification de la démission)
Le moyen fait grief à l'arrêt partiellement infirmatif attaqué D'AVOIR dit que la démission de Monsieur X... s'analysait en une prise d'acte de la rupture du contrat de travail produisant les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, D'AVOIR condamné la société IBM FRANCE à lui payer les sommes de 38.910 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis, 3.890 € au titre des congés payés y afférents, 27.884,86 € à titre d'indemnité de licenciement et 70.000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, D'AVOIR ordonné la remise par la société IBM FRANCE d'un bulletin de paie récapitulatif et d'un certificat destiné au pôle emploi conformes aux termes de l'arrêt attaqué, et D'AVOIR ordonné s'il y a lieu le remboursement par la société IBM FRANCE aux organismes concernés des indemnités de chômage éventuellement versées au salarié à concurrence de six mois ;
AUX MOTIFS QUE « la démission est un acte unilatéral par lequel le salarié manifeste de façon claire et non équivoque sa volonté de mettre fin au contrat de travail ; que lorsque le salarié, sans invoquer un vice du consentement de nature à entraîner l'annulation de sa démission, remet en cause, celle-ci en raison des faits ou manquements imputables à son employeur, le juge doit, s'il résulte de circonstances antérieures ou contemporaines de la démission qu'à la date à laquelle elle a été donnée, celle-ci était équivoque, l'analyser en une prise d'acte de la rupture qui produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiaient ou dans le cas contraire d'une démission ; que le salarié a demandé à plusieurs reprises à l'employeur, notamment par courriel du 11 juin 2006, que la question des commissions pour l'année 2005 soit réglée ; qu'il a dénoncé et contesté le 27 avril 2007 le solde tout compte ; que son conseil a saisi l'employeur le 19 juin suivant du non-paiement des commissions ; qu'il apparaît dans ces conditions que la démission de M. X... était équivoque et doit s'analyser en une prise d'acte de la rupture qui produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, dès lors que l'employeur a manqué gravement à ses obligations en réduisant de façon très importante le montant des commissions dues » ;
ALORS, D'UNE PART, QUE la censure à intervenir sur le premier moyen de cassation entraînera par voie de conséquence et en application des articles 624 et 625 du Code de procédure civile la censure de l'arrêt attaqué en ce qu'il a dit que la démission de Monsieur X... s'analysait en une prise d'acte de la rupture du contrat de travail produisant les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, dès l'instant qu'il existe un lien de dépendance nécessaire entre cet aspect du litige et le rappel de commissionnement auquel a été condamné la société IBM FRANCE ;
ALORS, D'AUTRE PART, QUE la démission est un acte unilatéral par lequel le salarié manifeste de façon claire et non équivoque sa volonté de mettre fin au contrat de travail ; que lorsque le salarié, sans invoquer un vice du consentement de nature à entraîner l'annulation de sa démission, remet en cause celle-ci en raison de faits ou manquements imputables à son employeur, le juge doit, s'il résulte de circonstances antérieures ou contemporaines de la démission qu'à la date à laquelle elle a été donnée, celle-ci était équivoque, l'analyser en une prise d'acte de la rupture qui produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiaient ou dans le cas contraire d'une démission ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que Monsieur X... avait notifié par écrit sa démission le 7 mars 2007 sans l'assortir de la moindre réserve, qu'il n'avait contesté son solde de tout compte, par lequel l'employeur s'estimait créancier d'une somme au titre du remboursement du l'avance sur la prime dite « critical skill bonus », que le 27 avril 2007 et que c'est seulement le 19 juin suivant que le salarié a lui-même formulé une réclamation à l'égard de son employeur au titre des commissions de l'année 2005 ; qu'elle a constaté également que, si une discussion était survenue entre les parties, antérieurement à la démission, à propos du montant desdites commissions, les dernières manifestations de ce différend dataient du mois de juin 2006, soit 10 mois avant la démission, cependant que les parties étaient convenues entre temps, au mois d'octobre 2006, du versement d'un bonus exceptionnel « critical skill bonus » d'un montant de 20.000 € ; qu'en considérant, en l'état de ces constatations, que la démission donnée sans réserve était équivoque, la cour d'appel qui a statué par des motifs impropres à faire apparaître le caractère équivoque de la démission, a violé les articles L. 1221-1, L. 1233-1, L. 1237-2 et L. 1235-1 du Code du travail, ensemble l'article 1134 du Code civil ;
ALORS, ENFIN ET SUBSIDIAIREMENT, QUE la société IBM FRANCE faisait valoir dans ses conclusions (p. 15 et suivantes) que la cause de la démission de l'intéressé était son désir d'assumer des fonctions de Directeur Commercial au sein de la société SINEQUA, ce qui lui conférait un statut de dirigeant qu'il n'avait pas au sein de la société IBM FRANCE, raison pour laquelle il avait sollicité le raccourcissement de son préavis ; que prive sa décision de base légale au regard des articles L. 1221-1, L. 1233-1, L. 1237-2 et L. 1235-1 du Code du travail, ensemble l'article 1134 du Code civil l'arrêt attaqué qui s'abstient de rechercher et de vérifier si le véritable motif de la rupture du contrat de travail de Monsieur X... n'était pas son désir d'une promotion professionnelle chez un tiers plutôt qu'un différend au sujet de ses commissions.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
(Prime dite Critical Skill Bonus)
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR condamné la société IBM FRANCE à payer à Monsieur X... la somme de 9.641,99 euros au titre de la prime qualifiée de Critical Skill Bonus, avec intérêts au taux légal à compter de la date de réception par la société IBM FRANCE de la convocation devant le bureau de conciliation ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE « la convention passée entre les parties le 27 octobre 2006 prévoit le paiement d'un bonus exceptionnel de 20.000 euros bruts, payable, sous réserve de la réalisation des objectifs, à hauteur de 15.000 euros le 31 décembre 2006 et de 5.000 euros le 31 décembre 2007 ; qu'il est précisé que nonobstant les avances sur paiement du bonus, celui-ci ne sera définitivement acquis que si, au 1er avril 2008, la rupture du contrat de travail « à votre initiative pour quelque motif que soit ou à l'initiative de la compagnie pour le motif d'une faute grave, n'a pas été notifiée » ; que la rupture du contrat de travail est intervenu du fait de l'employeur, qui ne saurait dès lors exiger le remboursement de l'avance versée au titre du bonus exceptionnel et par suite déduire des sommes dues au salarié du fait de la rupture des relations contractuelles le montant de cette avance, la non-réalisation des objectifs assignés au salarié n'étant pas invoquée ; qu'en outre, le salarié ne saurait être privé de l'avance qui lui a été versée avant son départ de l'entreprise, sauf à ce que cette privation s'analyse en une sanction pécuniaire ; que la décision des premiers juges qui ont octroyé à M. X... la somme réclamée au titre de ce bonus sera confirmée » ;
ET AUX MOTIFS DES PREMIERS JUGES QUE « la prime litigieuse a été octroyée par l'employeur dans le cadre d'une convention le 27 octobre 2006 et approuvée par le salarié le 11 décembre 2006 ; que cette convention stipule : "IBM France se propose de vous allouer un bonus exceptionnel d'un montant total de 20.000,00 Euros brut. Ce montant, sous réserve de la totale réalisation des dispositions qui conditionnent son versement vous sera payé selon l'échéancier suivant .. 15.000 € le 31 décembre 2006 et 5.000 € le 31 décembre 2007. Ce bonus exceptionnel ne peut être acquis au prorata temporis. En outre, nonobstant les avances sur paiement du bonus qui interviendront aux dates susmentionnées, à condition de réalisation des objectifs, le bonus exceptionnel de 20.000 € brut ne vous sera définitivement acquis que si, au 1er avril 2008, la rupture de votre contrat de travail à votre initiative pour quelque motif que ce soit ou à l'initiative de la compagnie pour le motif d'une faute grave, n'a pas été notifiée. A défaut pour l'ensemble des conditions requises ci-dessus d'être cumulativement remplies, la Compagnie sera en droit d'exiger le remboursement de toutes les sommes qui vous auront effectivement été versées entre le 31 décembre 2006 et le 31 décembre 2007 compris au titre de ce bonus" ; qu'une prime, même qualifiée de bonus exceptionnel, est un supplément de rémunération qui a la même nature et le même régime juridique que le salaire ; que lorsqu'une prime trouve sa cause dans un engagement unilatéral de l'employeur, il appartient certes à ce dernier d'en fixer, le cas échéant, les conditions d'octroi pour pouvoir en bénéficier, mais il ne saurait subordonner son caractère définitif à la survenance d'un événement ultérieur, notamment à une condition de présence du salarié jusqu'à une certaine date, sans porter atteinte à la liberté du travail ; que l'exercice du droit de rompre à tout moment le contrat de travail ne peut entraîner restitution de la prime pour la période au cours de laquelle elle a été acquise, malgré la volonté de l'employeur de lui conférer la nature de libéralité, ce qu'elle est, et sous condition, ce qu'elle ne peut avoir dans la mesure où un salaire ne peut être répété qu'en cas d'indu ; que, par ailleurs, selon l'article L. 1121-1 du code du travail "Nul ne peut apporter aux droits des personnes et aux libertés individuelles et collectives de restrictions qui ne seraient pas justifiées par la nature de la tâche à accomplir ni proportionnées au but recherché" ; que la condition posée par la partie défenderesse constitue une restriction disproportionnée à la liberté du travail et que la décision de l'employeur vise tout simplement à dépouiller rétroactivement le demandeur d'un droit acquis à un élément de sa rémunération, dont le fait générateur a été acquis du moins jusqu'au 31 décembre 2006 ; qu'en agissant de la sorte la société IBM faisait subir ainsi à son salarié une atteinte illicite ; que Monsieur X... sollicite le remboursement de 9.641,99 Euros au titre du Critical skill bonus ; qu'une somme de 15.000,00 Euros a été versée sur le bulletin de salaire de février 2007 ; que dans un tableau intitulé Récapitulatif paie négative joint à un courrier de la société IBM du 30 juillet 2007, il a été soustrait la même somme laissant, par compensation, apparaître un solde négatif de 9.608,20 Euros ; que par divers versements de sommes dues encore à son salarié, la société IBM arrivait en juillet à une somme toujours négative de 5.358,01 Euros, dont elle se proclamait créancière et dont elle réclame le paiement reconventionnellement ; qu'il reste constant que la somme de 15.000,00 Euros du Critical skill bonus du fait de divers jeux d'écritures a été entièrement déduite au salarié (avant déduction des cotisation sociales hors et sur stock options à hauteur de 2.644,86 Euros) ; qu'il est en droit de pouvoir y prétendre, comme il a été rappelé précédemment, mais que ne sollicitant devant le conseil que le paiement de 9.641,99 Euros, il lui sera fait droit de ce seul montant ; qu'en conséquence la société IBM sera déboutée de sa demande reconventionnelle et qu'elle sera condamnée à payer à Monsieur X... la somme de 9.641,99 Euros, telle que formulée par le demandeur ; que, s'agissant d'une créance salariale, la société IBM devra payer à Monsieur X... les intérêts au taux légal à compter de la date de réception de la convocation devant le bureau de conciliation, avec capitalisation de ces intérêts dans les conditions prévues par l'article 1154 du code civil » ;
ALORS, D'UNE PART, QUE la censure à intervenir sur le deuxième moyen de cassation entraînera par voie de conséquence et en application des articles 624 et 625 du Code de procédure civile la censure de l'arrêt attaqué en ce qu'il a condamné la société IBM FRANCE à payer une somme de 9.641,99 euros au titre de la prime Critical Skill Bonus au motif que la rupture du contrat de travail était intervenue du fait de l'employeur ;
ALORS, D'AUTRE PART, QUE le juge a l'obligation de ne pas dénaturer les documents de la cause ; que, selon l'accord des parties des 27 octobre et 11 décembre 2006, « les versements effectués au titre du Critical Skill Bonus les 31 décembre 2006 et 31 décembre 2007 ne sont que des avances » dont l'employeur pouvait demander le remboursement si les conditions d'attribution du bonus n'étaient finalement pas remplies ; que dénature ces termes clairs et précis de l'accord des parties l'arrêt attaqué qui, par motifs adoptés, retient que l'avance de 15.000 euros versée à Monsieur X... à effet du 31 décembre 2006 avait le caractère d'un droit acquis dès son versement ;
ALORS, ENFIN, QUE la prévision, par la convention des parties, du remboursement éventuel d'une avance stipulée remboursable ne constitue pas la stipulation d'une sanction pécuniaire ; que, selon l'accord des parties des 27 octobre et 11 décembre 2006, « les versements effectués au titre du Critical Skill Bonus les 31 décembre 2006 et 31 décembre 2007 n'étaient que des avances » dont l'employeur pouvait demander le remboursement si les conditions d'attribution du bonus n'étaient finalement pas remplies ; que, Monsieur X... n'ayant pas rempli, à la date de la rupture de son contrat de travail, les conditions d'attribution du bonus dit Critical Skill Bonus au titre duquel lui avait été consentie une avance remboursable de 15.000 euros, viole les articles L. 1221-1 et L. 1331-2 du Code du Travail l'arrêt attaqué qui retient que cette avance était définitivement acquise au salarié, alors même qu'il n'en remplissait pas les conditions d'attribution, au motif inopérant que le salarié ne saurait être privé de l'avance qui lui a été versée avant son départ de l'entreprise, sauf à ce que cette privation s'analyse en une sanction pécuniaire.

QUATRIEME MOYEN DE CASSATION :
(Indemnité de préavis)
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR condamné la société IBM FRANCE à payer les sommes de 38.910 euros bruts à titre d'indemnité compensatrice de préavis, de 3.890 euros bruts au titre des congés payés y afférents ;
AUX MOTIFS QUE « la demande en paiement de l'indemnité compensatrice de préavis et des congés payés y afférents … est fondée en vertu de la convention collective applicable » ;
ALORS QUE, en cas d'inexécution par le salarié du préavis l'employeur n'est tenu au paiement d'une indemnité compensatrice que lorsqu'il a unilatéralement décidé de dispenser le salarié d'exécuter sa prestation de travail ou lorsque cette inexécution lui est imputable ; qu'en l'espèce, comme cela résultait de l'échange de courriels des 21 mars 2007 et 26 mars 2007 entre la société IBM FRANCE et Monsieur X... (pièce n° 5), c'était à la demande du salarié que l a société exposante avait accepté de dispenser le salarié de l'exécution de son préavis à compter du 31 mars 2007 ; qu'il s'ensuit qu'a fait une fausse application de l'article L. 1234-5 du Code du travail l'arrêt attaqué qui a condamné la société IBM FRANCE à payer à Monsieur X... une indemnité compensatrice de préavis et les congés payés y afférents.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 10-28262
Date de la décision : 26/09/2012
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 28 octobre 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 26 sep. 2012, pourvoi n°10-28262


Composition du Tribunal
Président : M. Gosselin (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Spinosi, SCP Célice, Blancpain et Soltner

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:10.28262
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