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25/09/2012 | FRANCE | N°11-17285

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 25 septembre 2012, 11-17285


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 1er mars 2011) que M. X..., engagé par contrat écrit à durée indéterminée à effet du 1er septembre 2005 en qualité d'aide à domicile par Mme veuve Y... mise concomitamment sous sauvegarde de justice, a été licencié pour motif économique de suppression de son poste par lettre du 13 octobre 2006 du curateur ; que le 11 octobre 2007, il a saisi la juridiction prudhomale aux fins de voir reconnaître l'existence d'un contrat de travail depuis mai 1996 par les c

onsorts Y..., héritiers de leur mère depuis son décès le 12 mai 2008 a...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 1er mars 2011) que M. X..., engagé par contrat écrit à durée indéterminée à effet du 1er septembre 2005 en qualité d'aide à domicile par Mme veuve Y... mise concomitamment sous sauvegarde de justice, a été licencié pour motif économique de suppression de son poste par lettre du 13 octobre 2006 du curateur ; que le 11 octobre 2007, il a saisi la juridiction prudhomale aux fins de voir reconnaître l'existence d'un contrat de travail depuis mai 1996 par les consorts Y..., héritiers de leur mère depuis son décès le 12 mai 2008 ainsi qu'en paiement de dommages-intérêts pour harcèlement moral et licenciement abusif ;

Sur le premier moyen :

Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de déduire du montant brut de rappels de salaires pour la période non prescrite 11 octobre 2002/17 octobre 2006 de 70 176,03 euros l'équivalent brut de la somme mensuelle nette de 900 euros versée du 11 octobre 2002 au 1er septembre 2005, alors, selon le moyen, qu'il doit être justifié de la divisibilité d'un aveu, même extrajudiciaire ; qu'en retranchant du rattrapage salarial demandé la somme de 900 euros mensuels reconnue à l'occasion d'une procédure d'exécution mais en négligeant ses conclusions qui faisaient valoir, pièce à l'appui, que cette somme se décomposait en 250 euros de petit outillage et fournitures diverses et 650 euros seulement de dédommagement, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

Mais attendu que se fondant sur l'aveu extrajudiciaire du salarié dans sa requête devant le juge de l'exécution en appréciant souverainement sa valeur et sa portée, la cour d'appel, qui n'avait pas à se prononcer sur les éléments qu'elle écartait ni à suivre les parties dans le détail de leur argumentation, a satisfait aux exigences du texte précité ;

Sur le deuxième moyen :

Attendu que le salarié fait aussi grief à l'arrêt de le débouter de sa demande en paiement de dommages-intérêts pour harcèlement moral, alors, selon le moyen :

1°/ que le salarié qui allègue un harcèlement moral présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'un tel harcèlement, et qu'au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs du harcèlement en cause et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs qui sont étrangers à tout harcèlement ; que pour débouter le salarié de sa demande de dommages-intérêts pour harcèlement moral, justifiée par une attestation médicale, la cour d'appel a écarté une agression physique au motif inopérant que le salarié n'avait pas porté plainte ; qu'en se fondant sur ces motifs inopérants, elle a violé les articles L. 1152-1, L. 1152-2 et L. 1154-1 du code du travail ;

2°/ que le juge du harcèlement moral doit en examiner tous les aspects, et encore dire si les griefs invoqués, quoique n'ayant pas chacun la nature d'un harcèlement moral, ont, dans leur ensemble, cette nature ; qu'en négligeant le fait que le salarié n'avait bénéficié d'aucune déclaration sociale et qu'outre une agression physique, il était en butte à des propos humiliants et à une "mise au placard", ce qui l'avait plongé dans une dépression médicalement constatée, la cour d'appel a violé les articles L. 1152-1, L. 1152-2 et L. 1154-1 du code du travail ;

Mais attendu que la cour d'appel, constatant que le salarié n'établissait la matérialité d'aucuns faits précis et concordants susceptibles de faire présumer l'existence d'un harcèlement moral par les consorts Y... ou le curateur, a fait l'exacte application des textes visés au moyen ; que celui-ci n'est pas fondé ;

Sur le troisième moyen :

Attendu que le salarié fait encore grief à l'arrêt de le débouter de sa demande en paiement de dommages-intérêts pour licenciement abusif, alors, selon le moyen, que l'augmentation des charges financières personnelles de l'employeur ne constitue pas une cause économique réelle et sérieuse de licenciement ; qu'ayant exactement qualifié les fonctions exercées par le salarié de gardien d'immeuble, et non pas d'aide à la personne, la cour d'appel, qui a jugé économiquement fondé le licenciement dû à l'accroissement des dépenses personnelles de santé de la propriétaire de l'immeuble, sans rechercher si les revenus générés par ce dernier ne permettaient pas de conserver l'emploi du gardien, n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles L. 1233-3 et L. 1235-1 du code du travail ;

Mais attendu que constatant que les revenus de Mme veuve Y..., lesquels comprenaient ceux générés par l'immeuble, ne lui permettaient plus de faire face à la fois aux dépenses supplémentaires de santé et d'assistance résultant de la dégradation de son état de santé et au paiement des salaires d'un gardien d'immeuble, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ;

Sur le quatrième moyen :

Attendu que le salarié fait enfin grief à l'arrêt de le débouter de sa demande en paiement de dommages-intérêts pour licenciement abusif, alors, selon le moyen, que le reclassement est une obligation pesant sur l'employeur, préalable à toute mesure de licenciement économique ; qu'en jugeant le licenciement économique fondé sur une cause réelle et sérieuse, cependant que l'employeur ne justifiait d'aucun effort de reclassement et aux motifs inopérants que le salarié avait proposé un emploi de substitution ne correspondant pas à sa qualification professionnelle, la cour d'appel a violé les articles L. 6321-1, L. 1233-2, L. 1233-3, L. 1233-4 et L. 1235-1 du code du travail ;

Mais attendu qu'après avoir rappelé que l'employeur tenu d'une obligation de reclassement n'est pas obligé d'assurer une formation qualifiante au salarié, la cour d'appel, constatant que le salarié avait une compétence de gardien d'immeuble pour un particulier et que le seul poste disponible était celui d'assistant de vie auprès de cette personne malade, emploi pour lequel le salarié n'était pas qualifié, en a exactement déduit que le licenciement économique était justifié faute de possibilité de reclassement ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande des consorts Y... ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq septembre deux mille douze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

.

Moyens produits par la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle et Hannotin, avocat aux Conseils, pour M. X....

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir déduit de la somme de 70.176,03 €, à laquelle les consorts Y..., héritiers de l'employeur, ont été condamnés au profit de Monsieur Robert X..., salarié, l'équivalent brut de la somme mensuelle nette de 900 € versée du 11 octobre 2002 au 1er septembre 2005 ;

AUX MOTIFS QUE, dans sa requête présentée au juge de l'exécution du Tribunal de Grande Instance de Toulon le 8 octobre 2008, M. X... expose qu'il a été employé par Mme Y..., à partir du mois de mai 1996, « en qualité de régisseur, sans aucun contrat de travail, ni déclaration à l'URSSAF ni aux autres organismes sociaux », « qu'il s'occupait de l'intendance et de l'entretien de la totalité de la propriété « la Tartane » et qu'il était chargé des contacts avec les locataires des appartements attenants au domicile de l'employeur (14 locataires en permanence) », « qu'il bénéficiait pour ce travail d'une rémunération de ses fonctions de régisseur à hauteur de 900 €/mois et occupait également en compensation de son travail un appartement à titre gratuit, dont la valeur locative peut être évaluée à 300 €/mois », et que « le 1er septembre 2005, un contrat de travail était établi entre M. X... et Mme Y..., dans le cadre de sa mise sous sauvegarde de justice (…) » ; qu'en conséquence, compte tenu de cet aveu clair et non équivoque, pour le calcul du rappel de salaire, la somme totale brute équivalente aux salaires mensuels nets de 900 €, versés par l'employeur du 11 octobre 2002 au 1er septembre 2005, devra être déduite de la rémunération totale brute de 70.176,03 € à laquelle M. X... aurait pu prétendre ;

ALORS QU'il doit être justifié de la divisibilité d'un aveu, même extrajudiciaire ; qu'en retranchant du rattrapage salarial demandé la somme de 900 € mensuels reconnue à l'occasion d'une procédure d'exécution mais en négligeant les conclusions du salarié qui faisaient valoir (p. 8, 3ème §), pièce (n° 66) à l'appui, que cette somme se décomposait en 250 € de petit outillage et fournitures diverses et 650 € seulement de dédommagement, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.

DEUXIÈ

ME MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Monsieur Robert X... de sa demande de 20.000 € de dommages et intérêts pour harcèlement moral ;

AUX MOTIFS QUE M. X... se borne à faire état, d'une part, de l'agression physique dont il dit avoir été victime de la part de Monsieur Richard Y..., le 11 août 2006, sans justifier du dépôt d'une plainte, alors que ce dernier a déposé le même jour à son encontre une plainte, classée sans suite, pour menaces et chantage, et, d'autre part, des critiques émises à son égard par les consorts Y... dans les correspondances déjà évoquées, ainsi qu'au cours de l'instance prud'homale ; que nonobstant les tensions apparues à cette époque entre M. X... et les consorts Y..., ces seuls éléments ne permettent pas de présumer l'existence d'un harcèlement qui aurait été commis par Mme Y..., seule ou avec l'assistance de son curateur, Monsieur Richard Y..., à l'encontre de M. X... ;

1°) ALORS D'UNE PART QUE le salarié qui allègue un harcèlement moral présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'un tel harcèlement, et qu'au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs du harcèlement en cause et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs qui sont étrangers à tout harcèlement ; que pour débouter le salarié de sa demande de dommages-intérêts pour harcèlement moral, justifiée par une attestation médicale, la cour d'appel a écarté une agression physique au motif inopérant que le salarié n'avait pas porté plainte ; qu'en se fondant sur ces motifs inopérants, elle a violé les articles L 1152-1, L 1152-2 et L 1154-1 du code du travail ;

2°) ALORS D'AUTRE PART QUE le juge du harcèlement moral doit en examiner tous les aspects, et encore dire si les griefs invoqués, quoique n'ayant pas chacun la nature d'un harcèlement moral, ont, dans leur ensemble, cette nature ; qu'en négligeant le fait que le salarié n'avait bénéficié d'aucune déclaration sociale et qu'outre une agression physique, il était en butte à des propos humiliants et à une « mise au placard », ce qui l'avait plongé dans une dépression médicalement constatée, la cour d'appel a violé les articles L 1152-1, L 1152-2 et L 1154-1 du code du travail.

TROISIÈ

ME MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Monsieur Robert X... de sa demande de 20.000 € de dommages et intérêts pour licenciement abusif ;

AUX MOTIFS QUE, pour preuve du motif économique du licenciement, les intimés versent aux débats des pièces comptables, fiscales et administratives justifiant des difficultés financières de Mme Y... et de l'impossibilité dans laquelle celle-ci s'est trouvée, compte tenu de ses revenus, de faire face à la fois aux dépenses supplémentaires de sa santé et d'assistance résultant de la dégradation de son état de santé et au paiement des salaires de M. X... ;

ALORS QUE l'augmentation des charges financières personnelles de l'employeur ne constitue pas une cause économique réelle et sérieuse de licenciement ; qu'ayant exactement qualifié les fonctions exercées par le salarié de gardien d'immeuble, et non pas d'aide à la personne, la cour d'appel, qui a jugé économiquement fondé le licenciement dû à l'accroissement des dépenses personnelles de santé de la propriétaire de l'immeuble, sans rechercher si les revenus générés par ce dernier ne permettaient pas de conserver l'emploi du gardien, n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles L 1233-3 et L 1235-1 du code du travail.

QUATRIÈ

ME MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Monsieur Robert X... de sa demande de 20.000 € de dommages et intérêts pour licenciement abusif ;

AUX MOTIFS QUE M. X... n'est pas fondé à faire grief à l'employeur d'avoir méconnu son obligation de reclassement en ne lui proposant pas un poste d'assistant de vie, dès lors qu'il ne justifie pas, ni même ne prétend avoir été qualifié pour ce poste et que, si l'employeur est tenu d'assurer l'adaptation du salarié à l'évolution de son emploi, au besoin en lui assurant une formation complémentaire, l'article L 1233-4 du code du travail ne lui fait pas obligation d'assurer aux salariés la formation initiale qui leur fait défaut ;

ALORS QUE le reclassement est une obligation pesant sur l'employeur, préalable à toute mesure de licenciement économique ; qu'en jugeant le licenciement économique fondé sur une cause réelle et sérieuse, cependant que l'employeur ne justifiait d'aucun effort de reclassement et aux motifs inopérants que le salarié avait proposé un emploi de substitution ne correspondant pas à sa qualification professionnelle, la cour d'appel a violé les articles L 6321-1, L 1233-2, L 1233-3, L 1233-4 et L 1235-1 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 11-17285
Date de la décision : 25/09/2012
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 01 mars 2011


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 25 sep. 2012, pourvoi n°11-17285


Composition du Tribunal
Président : M. Lacabarats (président)
Avocat(s) : SCP Nicolaý, de Lanouvelle et Hannotin, SCP Potier de La Varde et Buk-Lament

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:11.17285
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