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19/09/2012 | FRANCE | N°11-16205

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 19 septembre 2012, 11-16205


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Vu les articles L. 3121-45, dans sa version alors applicable, L. 3171-4 et D. 3171-10 du code du travail ;
Attendu qu'il résulte de la combinaison de ces textes qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre de jours de travail effectués par le salarié dans le cadre d'une convention de forfait en jours, l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier des jours effectivement travaillés par le salarié ; qu'au vu de ces éléments et de ceux fournis par le sal

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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Vu les articles L. 3121-45, dans sa version alors applicable, L. 3171-4 et D. 3171-10 du code du travail ;
Attendu qu'il résulte de la combinaison de ces textes qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre de jours de travail effectués par le salarié dans le cadre d'une convention de forfait en jours, l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier des jours effectivement travaillés par le salarié ; qu'au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles ; qu'ainsi la preuve n'incombe spécialement à aucune des parties, et le juge ne peut, pour rejeter une demande de paiement de jours travaillés, se fonder sur l'insuffisance des preuves apportées par le salarié mais doit examiner les éléments de nature à justifier les jours effectivement travaillés par le salarié et que l'employeur est tenu de lui fournir ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé le 30 octobre 2000 en qualité de directeur du développement, statut cadre, par la société Charles Garnier, relevant de la convention collective de la bijouterie, orfèvrerie et joaillerie ; qu'une convention individuelle de forfait, portant sur 217 jours de travail, a été conclue sur le fondement de l'accord collectif du 4 décembre 1998 ; qu'à la suite de l'ouverture d'une procédure collective, le salarié a été licencié le 18 octobre 2007 pour motif économique ; qu'estimant ne pas avoir été rempli de ses droits, il a saisi la juridiction prud'homale notamment d'une demande en paiement de jours supplémentaires travaillés au-delà du forfait ;
Attendu que pour rejeter la demande de paiement d'une somme au titre des jours travaillés au-delà du forfait de 217 jours, l'arrêt retient que le salarié produit une télécopie, datée du 20 septembre 2007, antérieure à quinze jours de l'ouverture de la procédure de liquidation judiciaire de la SA Charles Garnier, par lequel le service de la comptabilité de l'entreprise donnait un "accord de paiement" à la société d'experts comptables, gérant les feuilles de paye de l'entreprise, pour le règlement de ses "journées travaillées" en 2005, 2006 et 2007 ainsi qu'un courriel, daté du 3 décembre 2007, postérieur à la liquidation judiciaire de l'entreprise, adressé au salarié par le cabinet d'expert comptable de l'entreprise, aux termes duquel celle-ci lui envoyait "le détail de son bulletin de paie comportant, outre une correction sur ses congés payés, un complément de salaire pour ses journées travaillées, de 2005, 2006 et 2007 ; que ces documents ne sont pas probants de l'existence de jours travaillés non compris dans le forfait jours du salarié ;
Qu'en statuant ainsi, en faisant reposer sur le seul salarié la charge de la preuve des jours travaillés en dépassement des 217 jours fixés par la convention de forfait en jours, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a débouté le salarié de ses demandes en paiement de compléments de salaires et congés payés afférents pour les années 2005, 2006 et 2007, l'arrêt rendu le 17 février 2011, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Condamne la société Charles Garnier aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Charles Garnier à payer à M. X... la somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf septembre deux mille douze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Potier de La Varde et Buk-Lament, avocat aux Conseils, pour M. X....
M. Thierry X... fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté ses demandes en paiement de compléments de salaires et congés payés afférents pour les années 2005, 2006 et 2007 ;
AUX MOTIFS QUE, s'agissant d'un litige sur la durée du travail, si l'employeur doit fournir les éléments de nature à justifier des horaires effectivement réalisés par l'intéressé, celui- ci doit préalablement fournir des éléments pour étayer sa demande ; qu'aux termes de l'article D. 3171-10 du code du travail, la durée du travail des salariés mentionnés à l'article L. 3121-43 du code du travail, comme bénéficiant de convention de forfait jours, est décomptée chaque année par récapitulation du nombre de journées ou demi-journées travaillées par chaque salarié ; mais que, alors que la convention de forfait précitée précisait qu'il incombait à M. X... d'établir et communiquer chaque mois le décompte de ses jours travaillés, le salarié ne produit aucun de ces décomptes ; qu'il verse aux débats deux documents, qu'il prétend avoir été établis nécessairement par l'employeur sur la base des décomptes qu'il déclare avoir alors remis au service de comptabilité de l'entreprise ; mais que ces documents sont contestés par le mandataire liquidateur de la SA Charles Garnier qui soutient qu'ils auraient été établis juste avant ou après l'ouverture de la procédure collective par des personnes n'ayant pas ou plus qualité pour représenter la société ; qu'en effet, il produit l'un de ces documents, qu'il déclare être une télécopie, datée du 20 septembre 2007, donc antérieure de quinze jours de l'ouverture de la procédure de liquidation judiciaire de la SA Charles Garnier, par lequel le service de comptabilité de l'entreprise donnait un "accord de paiement" à Mme Y..., de la société d'experts comptables gérant les feuilles de paye de l'entreprise, pour le règlement de ses "journées travaillées" en 2005, 2006 et 2007 ; que, selon ce document, M. X... avait effectué :- en 2005 : 252 jours travaillés, sur un forfait annuel de 215 jours, soit une différence en sa faveur de 37 jours,- en 2006 : 267 jours travaillés, sur un forfait annuel de 216, soit une différence en sa faveur de 51 jours,- en 2007 : 210 jours travaillés, sur un même forfait de 216 jours, soit aucune différence ;Que, cependant, ce document n'est pas signé et ne comporte que le tampon de l'entreprise ; qu'il n'a donc aucune valeur probante d'ordre de paiement, soumis aux règles strictes de la comptabilité ; qu'au surplus, bien que s'agissant, selon le salarié, d'une télécopie adressée par le service de comptabilité à Mme Y..., ce document ne comporte aucune mention attestant de la date exacte de son envoi et de sa réception ; que, par ailleurs, le salarié verse aussi un courriel, daté du 3 décembre 2007, donc postérieur, à la liquidation judiciaire de l'entreprise, adressé au salarié par Mme Y..., du cabinet d'expert comptable de l'entreprise, aux termes duquel celle-ci lui envoyait « le détail de son bulletin de paie comportant, outre une correction sur ses congés payés, un complément de salaire pour ses journées travaillées de 2005,2006 et 2007 selon accord avec M. Z..., soit:- 37 jours (travaillés) en 2005, pour un montant de 14.248,84 euros,- 51 jours (travaillés) en 2006 pour un montant de 19.793,10 euros,- 11 jours (travaillés) en 2007 pour un montant de 5.139,34 euros, ainsi que ses congés payés pour un montant de 6.900 Euros et son indemnité de préavis de 6186,67 euros » ;que, cependant, alors que l'entreprise était déjà en liquidation judiciaire depuis le 4 octobre 2007, ce courrier ne saurait valoir accord du représentant de l'entreprise pour retenir ce quantum de jours travaillés de l'intéressé, alors qu'à cette date, seul le mandataire liquidateur était le représentant légal de la SA Charles Garnier et non M. Z... qui, en tout état de cause, n'avait aucun mandat ni responsabilité établie dans l'entreprise ; que ces documents ne sont en conséquence pas probants de l'existence de jours travaillés non compris dans le forfait jours de M. X... ; que, de même, si le salarié produit des documents signés par la PDG de la SA Charles Garnier, Mme Linda Z..., précisant les "périodes d'activité à l'étranger" du salarié, soit 210 en 2005, 245,7 en 2006 et 197,7 en 2007, ces documents n'étant pas datés, il n'est donc pas démontré qu'ils ont été établis par la PDG de l'entreprise alors qu'elle avait pouvoir de représenter celle-ci, c'est à dire avant l'ouverture de la procédure collective ; qu'en tout état de cause, comme l'a exactement relevé le conseil de prud'hommes, M. X... ne démontre pas qu'il n'a pu prendre, du fait de l'employeur, les jours de repos compensateur de remplacement auxquels lui donnait droit les jours travaillés qu'il allègue sans communiquer ses propres décomptes et en l'absence de preuve de toute demande en ce sens de sa part ;
1°) ALORS Qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre de jours de travail effectués par le salarié dans le cadre d'une convention de forfaits en jours, l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier des jours effectivement travaillé par le salarié et que le juge forme sa conviction au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles, sans que la preuve incombe en particulier à l'une des parties ; qu'en énonçant, pour débouter M. X... de ses demandes en paiement de compléments de salaires et congés payés afférents pour les années 2005, 2006 et 2007, que les documents produits aux débats par le salarié ne permettaient pas d'apporter la preuve de l'existence de jours travaillés non compris dans le forfait jours, sans même relever si l'employeur avait communiqué, comme il le lui incombait, des éléments permettant de déterminer le nombre de jours effectués, la cour d'appel qui a ainsi fait peser la charge de la preuve des jours travaillés sur le seul salarié a violé les articles L. 3121-45, L. 3171-4 et D. 3171-10 du code du travail ;
2°) ALORS QUE, selon l'article D 3171-11 du code du travail, à défaut de précision conventionnelle contraire, les salariés sont informés du nombre d'heures de repos compensateur de remplacement et de contrepartie obligatoire en repos portés à leur crédit par un document annexé au bulletin de paie ; qu'en énonçant, pour débouter M. X... de sa demande en paiement de compléments de salaires et congés payés afférents fondée sur l'application de la convention de forfait du 30 octobre 2000, laquelle ne comportait pas de précision contraire à celles du texte précité, qu'il appartenait au salarié de rapporter la preuve qu'il n'avait pas pu prendre, du fait de l'employeur, les jours de repos compensateur de remplacement auxquels lui donnaient droit les jours travaillés, la cour d'appel a violé les dispositions du texte susvisé et celles des articles L. 3171-4 du code du travail et 1315 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 11-16205
Date de la décision : 19/09/2012
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 17 février 2011


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 19 sep. 2012, pourvoi n°11-16205


Composition du Tribunal
Président : M. Gosselin (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Potier de La Varde et Buk-Lament, SCP de Chaisemartin et Courjon

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:11.16205
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