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19/09/2012 | FRANCE | N°10-17388

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 19 septembre 2012, 10-17388


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé le 15 janvier 2001 en qualité de chauffeur par la société Ambulances Caplain, qui n'occupe pas plus de 20 salariés et est soumise à la fois à la convention collective nationale des transports routiers du 21 décembre 1950 et à l'accord-cadre du 4 mai 2000 sur l'aménagement et la réduction du temps de travail (ARTT) des entreprises de transport sanitaire ; que le salarié a démissionné le 6 mars 2007 puis a saisi la juridiction prud'homale de diverses de

mandes liées à l'exécution comme à la rupture de son contrat de trava...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé le 15 janvier 2001 en qualité de chauffeur par la société Ambulances Caplain, qui n'occupe pas plus de 20 salariés et est soumise à la fois à la convention collective nationale des transports routiers du 21 décembre 1950 et à l'accord-cadre du 4 mai 2000 sur l'aménagement et la réduction du temps de travail (ARTT) des entreprises de transport sanitaire ; que le salarié a démissionné le 6 mars 2007 puis a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes liées à l'exécution comme à la rupture de son contrat de travail ;
Sur le premier moyen, pris en sa première branche :
Vu les articles L. 212-5 I devenu L. 3121-22 du code du travail, 3 de la loi n° 2003-47 du 17 janvier 2003, 4 de la loi n° 2005-296 du 31 mars 2005 et 6. 4 c) de l'ARTT des personnels des entreprises de transport sanitaire en date du 4 mai 2000, étendu par arrêté du 30 juillet 2001 ;
Attendu qu'il résulte de ces textes qu'en l'absence de convention ou d'accord collectif fixant le taux de majoration applicable aux heures supplémentaires, le taux de majoration des quatre premières heures supplémentaires applicable aux entreprises de 20 salariés au plus est fixé, par dérogation aux dispositions de l'article L. 212-5, à 10 % ;
Attendu que pour fixer à 25 % le taux de majoration applicable aux quatre premières heures de travail accomplies par le salarié au-delà de 35 heures par semaine, l'arrêt relève que depuis le 1er janvier 2003, dans les entreprises ayant 20 salariés au plus, les heures supplémentaires accomplies à l'intérieur de cette même tranche donnent lieu à majoration de 25 %, que le paiement intervenu du 1er janvier 2003 à mars 2007 avec majoration de 10 % l'a été en contradiction avec les " dispositions conventionnelles applicables " stipulant, à compter du 1er janvier 2003, un unique taux de majoration de 25 % pour toutes les heures supplémentaires effectuées de la 36e à la 43e incluse, que l'employeur n'a donné aucune explication à son application continue du taux de 10 % et ne s'est prévalu d'aucun fondement juridique de nature à justifier sa position ;
Qu'en statuant ainsi, alors que l'effectif de l'entreprise n'excédait pas 20 salariés et que ni l'accord-cadre du 4 mai 2000 ni l'accord ARTT du 18 avril 2002 ne fixaient de taux de majoration des heures supplémentaires, de sorte que seule la bonification légale de 10 % était applicable, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Sur le même moyen, pris en sa deuxième branche :
Vu les articles L. 212-5-1, devenu L. 3121-26 et L. 3121-27 du code du travail, ensemble l'article 10 de l'accord-cadre sur l'aménagement et la réduction du temps de travail des personnels des entreprises de transport sanitaire du 4 mai 2000 ;
Attendu que pour faire application à la cause d'un contingent annuel de 130 heures supplémentaires, l'arrêt relève que la seule référence chiffrée à un contingent conventionnel d'heures supplémentaires dont il est justifié est l'accord-cadre du 4 mai 2000, lequel précise que le repos compensateur est applicable aux salariés ayant effectué des heures supplémentaires au-delà du contingent annuel légal de 130 heures par an ; qu'outre que ce texte ne dit pas que devra être pris en compte, pour le calcul des repos compensateurs, le contingent annuel légal d'heures supplémentaires, l'article L. 212-6 du code du travail dit que ce n'est qu'à défaut de contingent conventionnel que doit être appliqué le contingent légal ; qu'à cet égard, la seule indication chiffrée, 130 en l'occurrence, l'est sur un texte de nature conventionnelle et doit donc être retenue ; qu'enfin, l'employeur se prévaut d'un contingent de 180 heures sans préciser sur quel texte il fonde sa prétention ;
Qu'en se déterminant ainsi, sans vérifier si la société, qui se prévalait des dispositions de l'article 10 de l'accord-cadre du 4 mai 2000 fixant le contingent litigieux à 130 heures dans le cadre de l'aménagement et la réduction du temps de travail mais à 180 heures en dehors de cet aménagement, avait mis en place un tel dispositif, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
Sur le moyen, pris en sa troisième branche :
Vu l'article L. 212-5-1, devenu les articles L. 3121-26 et L. 3121-27 du code du travail ;
Attendu que pour décider que la société doit au salarié, au titre de l'accomplissement d'heures supplémentaires au-delà du contingent annuel, une somme à calculer sur la base d'un droit à repos compensateur correspondant à 100 % des heures supplémentaires accomplies dans ces conditions, l'arrêt énonce qu'il y a lieu de se conformer aux dispositions ici applicables de l'accord-cadre du 4 mai 2000 ;
Qu'en statuant ainsi, alors que, dans le cas des entreprises de 20 salariés ou moins, l'article L. 212-5-1 précité fixe la durée du repos compensateur à 50 % de celle des heures supplémentaires accomplies au-delà du contingent, et que l'accord-cadre du 4 mai 2000 ne comporte pas de disposition dérogeant à ce pourcentage, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Et sur le second moyen :
Vu l'article 624 du code de procédure civile ;
Attendu que la cassation prononcée sur le premier moyen entraîne par voie de conséquence la cassation sur le second moyen, qui s'y rattache par un lien de dépendance nécessaire ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 12 mars 2010, entre les parties, par la cour d'appel de Caen ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Rouen ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes des parties ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf septembre deux mille douze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par Me Foussard, avocat aux Conseils, pour la société Ambulances Caplain.

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

L'arrêt attaqué encourt la censure EN CE QU'IL a condamné la société AMBULANCE CAPLAIN à payer à Monsieur X... la somme de 972, 78 € à titre de rappel de salaire correspondant à la majoration des heures supplémentaires accomplies de la 36e à la 39e heure hebdomadaires, sur la base d'un taux de majoration de 25 % et décidé que la société AMBULANCE CAPLAIN devait à Monsieur X..., au titre de l'accomplissement d'heures supplémentaires au-delà du contingent annuel, une somme à calculer sur la base d'un droit à repos compensateur à hauteur de 100 % des heures supplémentaires accomplies dans ces conditions ;
AUX MOTIFS QUE la société AMBULANCE CAPLAIN entrait dans la catégorie des entreprises de 20 salariés au plus ; que Monsieur X... qui, à lire ses écritures, semble en douter, ne verse aux débats strictement aucun élément de nature à donner corps à son doute ; que dans les entreprises relevant de cette catégorie et selon les dispositions conventionnelles applicables, les heures supplémentaires accomplies dans la tranche 36-39 (heures par semaine) ont donné lieu, en 2002, à bonification de 10 % sauf accord d'entreprise sur ce point dont Monsieur X... ne se prévaut pas même de son existence éventuelle ; depuis le 1er janvier 2003, les heures supplémentaires accomplies dans cette même tranche donnent lieu à majoration de 25 % ; du 2 janvier 2003 à mars 2007, la société AMBULANCE CAPLAIN a donc continué de payer à Monsieur X... des heures supplémentaires au taux de base majorée de 10 % et ce en contradiction avec les dispositions conventionnelles applicables stipulant, à compter du 1er janvier 2003, un unique taux de majoration de 25 % pour toutes les heures supplémentaires effectuées de la 36e à la 43e heure incluse ;
ET AUX MOTIFS QUE la seule référence à un contingent conventionnel d'heures supplémentaires dont il est ici justifié l'est à l'accord-cadre du 4 mai 2000 déjà évoqué ; que ce texte précise que le repos compensateur est applicable aux salariés ayant effectué des heures supplémentaires au-delà du contingent annuel égal de 130 par an ; que dans ce cas, précise encore ce texte, la durée de ce repos est égale à 100 % de ces heures supplémentaires dans les entreprises de plus de 10 salariés, ce qui était le cas de la société AMBULANCE CAPLAIN ; que la seule indication chiffrée d'un contingent d'heures supplémentaires l'est à ce texte conventionnel ; que celui-ci ne dit pas que devrait être pris en compte pour le calcul des repos compensateurs, le contingent annuel légal d'heures supplémentaires, dont il n'est pas contesté que son chiffre a varié au cours de la période de cinq ans ici prise en compte, l'article L. 212-6 déjà cité dit que ce n'est qu'à défaut de contingent conventionnel que doit être appliqué le contingent légal ; que la seule indication chiffrée, 130, en l'occurrence, l'est sur un texte de nature conventionnelle ; que seul ce chiffre doit donc être retenu et non pas celui de 180 dont entend se prévaloir la société AMBULANCE CAPLAIN, sans qu'elle précise sur quel texte elle fonde sa prétention ; que seront comptabilisées les heures supplémentaires que Monsieur X... a effectuées et qui ont été payées, dont le nombre est porté sur les bulletins de salaire et, du total annuel de celle-ci, sera déduit le contingent annuel conventionnel de 130 heures ; que conformément aux dispositions applicables de l'accord-cadre du 4 mai 2000, son droit à repos compensateur sera de 100 % des heures supplémentaires accomplies chaque année au-delà du contingent de 130 ;
ALORS QUE, premièrement, les entreprises de transport sanitaire occupant 20 salariés au plus ont été, jusqu'au 31 décembre 2008, soumises à une régime transitoire légal s'agissant du taux de majoration des heures supplémentaires accomplies au-delà de la 35e heure, les quatre premières heures supplémentaires devant donner lieu à une majoration de salaire dont le taux était fixé, conformément aux dispositions légales, à 10 % ; de sorte qu'en décidant que, du mois de janvier 2003 au mois de mars 2007, la société AMBULANCE CAPLAIN aurait dû appliquer un taux de majoration de 25 % aux heures supplémentaires effectuées de la 36e à la 39e heure incluse, tout en constatant que l'effectif de l'entreprise était, pendant cette période, inférieur à 20 salariés, en se bornant à se référer à des « dispositions conventionnelles applicables », sans autre précision, tout en visant l'accord-cadre du 4 mai 2000 qui ne fait que renvoyer aux dispositions légales et réglementaires à cet égard, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des dispositions de l'article L. 212-1, devenu L. 3121-10, l'article L. 212-5 I devenu L. 3121-22 du Code du travail, de l'article 3 de la loi n° 2003-47 du 17 janvier 2003 ainsi que des articles 1134 du Code civil et 6. 4 c) de l'accord-cadre sur l'aménagement et la réduction du temps de travail des personnels des entreprises de transport sanitaire en date du 4 mai 2000 ;
ALORS QUE, deuxièmement, au sein des entreprises de transport sanitaire n'ayant pas mis en place de dispositif d'aménagement/ réduction du temps de travail, seules les heures accomplies, à partir du mois de janvier 2003, au-delà d'un contingent au moins égal à 180 heures, donnaient lieu à un repos compensateur correspondant à un pourcentage du temps effectué en heures supplémentaires ; de sorte qu'en décidant, en l'espèce, que les parties devaient calculer le montant dû au titre des repos compensateurs correspondant aux heures supplémentaires effectuées au-delà d'un contingent de 130 heures, sans même s'interroger sur le point de savoir si la société AMBULANCE CAPLAIN avait mis en place un dispositif d'aménagement/ réduction du temps de travail, la Cour d'Appel a privé sa décision de base légale au regard des dispositions de l'article L. 212-5-1 du code du travail recodifié sous les articles L. 3121-26 et L. 3121-27 du même code, ensemble des dispositions de l'article 10 de l'accord-cadre sur l'aménagement et la réduction du temps de travail des personnels des entreprises de transport sanitaire du 4 mai 2000 ;
ALORS QUE, troisièmement, au sein des entreprises de transport sanitaire occupant 20 salariés au plus et n'ayant pas mis en place de dispositif d'aménagement/ réduction du temps de travail, les heures accomplies, entre le mois de janvier 2003 et la fin de l'année 2007, au-delà du contingent annuel d'heures supplémentaires donnaient lieu à un repos compensateur à hauteur de 50 % du temps effectué en heures supplémentaires ; de sorte qu'en décidant, en l'espèce, que les parties devaient calculer le montant dû au titre des repos compensateurs correspondant aux heures supplémentaires effectuées au-delà d'un contingent sur la base d'un taux de 100 % du temps effectué en heures supplémentaires au-delà du contingent, tout en constatant que l'effectif de l'entreprise était inférieur à 20 salariés, la Cour d'Appel a violé les dispositions de l'article L. 212-5-1 du code du travail recodifié sous les articles L. 3121-26 et L. 3121-27 du même code.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

L'arrêt infirmatif attaqué encourt la censure EN CE QU'IL a décidé que la rupture du contrat de travail devait s'analyser en un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse et condamné la société AMBULANCE CAPLAIN à payer à Monsieur X... diverses sommes au titre des indemnités de rupture ;
AUX MOTIFS QUE celle-ci (la rupture) résulte de la lettre datée du 6 mars 2007, que Monsieur X... a adressé à son employeur ; que s'il y évoque certes sa démission, il y explique sa décision par les reproches, qu'il estime infondés, que lui a fait son employeur ; que c'est donc le comportement de son employeur à son égard qui est la cause de sa décision ; qu'une et démission exprimée dans ces permet équivoque ; que de surcroît Monsieur X... l'a rétractée par lettre de rétractation qui n'a pas été acceptée par son employeur ; que cette pseudo-démission n'en était donc pas une et doit s'analyser en une prise d'acte par le salarié de la rupture de son contrat de travail à raison des manquements à ces obligations qu'il reproche à son employeur ; qu'une rupture du contrat de travail ainsi exprimée produit les effets, soit d'un licenciement sans cause réelle sérieuse si les faits invoqués la justifiaient, soit, dans le cas contraire, d'une démission ; qu'il vient d'être démontré que la société AMBULANCE CAPLAIN a manqué à ses obligations à l'égard de M. X. en le rémunérant d'une partie de ses heures supplémentaires à un taux inférieur au taux conventionnel applicable et en lui imposant, pendant six ans au moins, de nombreux et importants dépassements de ses durées maximales de travail conventionnellement autorisées ;
ALORS QUE, pour justifier la prise d'acte de la rupture du contrat de travail par le salarié, les manquements de l'employeur doivent être suffisamment graves et caractérisés ; que le seul désaccord entre le salarié et son employeur sur l'application d'une réglementation complexe distinguant diverses situations et diverses périodes, comme celle applicable en matière de temps de travail autorisé dans le secteur des transports routiers, ne justifie pas, en lui-même, la rupture du contrat de travail ; qu'en décidant, en l'espèce, que Monsieur X... avait, par sa lettre du 6 mars 2007, pris acte à juste titre de la rupture du contrat de travail de sorte que celle-ci devait produire les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, en se bornant à faire état de dépassements des durées maximales de travail conventionnellement autorisées de manière globale, sans aucune précision sur les faits et les périodes concernées, ni viser aucune disposition conventionnelle particulière, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles 1134 du Code civil, L. 122-14-3 du Code du travail, recodifié sous les articles L. 1235-1, L. 1232-1, L. 1233-2 et L. 1235-9 du même Code, et L. 122-14-4 du Code du travail, recodifié sous les articles L. 1235-2, L. 1235-3, L. 1235-11, L. 1235-4, L. 1235-12 et L. 1235-13 du même Code ensemble des dispositions de l'accord-cadre sur l'aménagement et la réduction du temps de travail des personnels des entreprises de transport sanitaire du 4 mai 2000.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 10-17388
Date de la décision : 19/09/2012
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Caen, 12 mars 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 19 sep. 2012, pourvoi n°10-17388


Composition du Tribunal
Président : M. Blatman (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Foussard, SCP Masse-Dessen et Thouvenin

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:10.17388
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