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13/09/2012 | FRANCE | N°11-19500

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 13 septembre 2012, 11-19500


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le premier moyen, pris en sa troisième branche :
Vu les articles 455 et 458 du code de procédure civile ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué et les productions, que M. X..., salarié en qualité de magasinier de la société Cemex Granulats, anciennement dénommée société Morillon Corvol (l'employeur), a été victime le 22 avril 2003 d'un accident du travail alors qu'il déplaçait manuellement une roue d'un poids de six cents kilos ;
Attendu que, pour dire que cet accident était dû à la fau

te inexcusable de l'employeur, l'arrêt retient qu'il ne pouvait ignorer le danger p...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le premier moyen, pris en sa troisième branche :
Vu les articles 455 et 458 du code de procédure civile ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué et les productions, que M. X..., salarié en qualité de magasinier de la société Cemex Granulats, anciennement dénommée société Morillon Corvol (l'employeur), a été victime le 22 avril 2003 d'un accident du travail alors qu'il déplaçait manuellement une roue d'un poids de six cents kilos ;
Attendu que, pour dire que cet accident était dû à la faute inexcusable de l'employeur, l'arrêt retient qu'il ne pouvait ignorer le danger particulier présenté par le travail confié au salarié dès lors que le déplacement de la pièce en cause ne pouvait être effectué sans risque qu'au moyen d'équipements adéquats, engin de manutention et de levage, avec élingues, et qu'il a été procédé à son déplacement manuel, sans qu'il soit justifié de circonstances propres à légitimer, à raison notamment de la configuration des lieux, la mise en oeuvre d'un procédé aussi dangereux, étant observé de surcroît que l'employeur avait parfaitement connaissance de l'absence d'élingues et qu'il n'est même pas justifié de la présence sur le site le jour de l'accident de matériel mécanique de levage adapté ;
Qu'en se déterminant ainsi, sans s'expliquer sur le compte-rendu de réunion du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail, produit par l'employeur, faisant état de la présence sur le site le jour de l'accident d'un engin de manutention et d'une série d'élingues, la cour d'appel, a méconnu les exigences des textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 12 avril 2011, entre les parties, par la cour d'appel d'Amiens ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Douai ;
Laisse les dépens à la charge du Trésor public ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du treize septembre deux mille douze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

.
Moyens produits par la SCP Didier et Pinet, avocat aux Conseils, pour la société Cemex Granulats.
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que l'accident du travail dont a été victime monsieur X... le 22 avril 2003 est dû à la faute inexcusable de la société Morillon Corvol ;
AUX MOTIFS QUE monsieur X..., employé de la société Morillon Corvol en qualité de magasinier depuis 1974, a été victime le 22 avril 2003 d'un accident aux temps et lieu de travail (fractures multiples : fracture spiroïde du fémur droit, fracture du Hoffa du condyle externe droit et fracture du bimalléolaire gauche), déclaré sans réserve par son employeur et dont le caractère professionnel a été reconnu d'emblée par la CPAM de l'Aisne suivant décision du 16 mai 2003 ; qu'après échec de la tentative de conciliation, monsieur X... a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale de Laon d'une demande tendant à voir reconnaître, avec toutes conséquences de droit, la faute inexcusable de son employeur, la société Morillon Corvol ; que statuant, par jugement du 16 juin 2009, dont appel, le tribunal s'est déterminé comme indiqué ci-dessus ; qu'en vertu du contrat de travail le liant à son salarié, l'employeur est tenu envers celui-ci d'une obligation de sécurité de résultat, notamment en ce qui concerne les accidents du travail ; que le manquement à cette obligation a le caractère d'une faute inexcusable au sens de l'article L. 452-1 du code de la sécurité sociale, lorsque l'employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était exposé le salarié et qu'il n'a pas pris les mesures nécessaires pour l'en préserver ; qu'il ressort des éléments concordants du dossier que monsieur X... a été victime le 22 avril 2003 d'un accident survenu aux temps et lieu du travail, dans des circonstances parfaitement déterminées, rappelées dans la déclaration d'accident du travail faite par l'employeur (« déplacement d'une roue dentée en la roulant sur le sol lorsque celle-ci a été déséquilibrée et lui est tombée sur les jambes »), dont la prise en charge a été décidée d'emblée par la Caisse, sans instruction complémentaire, au vu des mentions précises et circonstanciées de la déclaration ; qu'il est par ailleurs établi, comme relevé par les premiers juges, que l'employeur ne pouvait ignorer le danger particulier présenté par le travail confié au salarié dès lors que le déplacement de la pièce en cause (une roue dentée de grande dimension et de masse importante) ne pouvait être effectué sans risque qu'au moyen d‘équipements adéquats (engin de manutention et de levage, avec élingues) et qu'il a été procédé à son déplacement manuel, sans qu'il soit justifié de circonstances propres à légitimer, à raison notamment de la configuration des lieux ou des modifications qui leur ont été apportées, la mise en oeuvre d'un procédé aussi dangereux, étant observé de surcroît que l'employeur avait parfaitement connaissance de l'absence d'élingues et qu'il n'est même justifié de la présence sur le site le jour de l'accident de matériel mécanique de levage adapté ; qu'il résulte de ces éléments que l'employeur, bien qu'averti de l'absence dans l'atelier de moyens de manutention adaptés et des dangers présentés par un déplacement manuel de la pièce, n'a pas pris les mesures nécessaires pour préserver le salarié des risques encourus, toutes circonstances caractérisant la faute inexcusable de l'employeur ; que le jugement entrepris qui s'est prononcé en sens contraire doit par conséquent être infirmé ; qu'en l'absence de faute inexcusable susceptible d'être imputée au salarié, la majoration de rente sera fixée au taux maximum, avec évolution en fonction de la propre évolution du taux d'IPP ;
1°/ ALORS QUE le manquement de l'employeur à son obligation de sécurité ne revêt le caractère de faute inexcusable, exigée par l'article L. 452-1 du code de la sécurité sociale, que lorsque l'employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était exposé le salarié et qu'il n'a pas pris les mesures nécessaires pour l'en préserver ; qu'il n'existe aucune présomption de faute inexcusable de l'employeur ; qu'il appartient en conséquence au salarié victime d'un accident du travail de rapporter la preuve, d'une part, que l'employeur devait avoir conscience du danger auquel le salarié était exposé et, d'autre part, qu'il n'a pas pris les mesures nécessaires pour l'en préserver ; qu'en retenant, pour caractériser la faute inexcusable de l'employeur, qu'il n'était pas justifié de la présence sur le site le jour de l'accident de matériel mécanique de levage adapté, propre à éviter l'accident dont a été victime le salarié, alors qu'il appartenait au contraire à ce dernier de prouver que le site était dépourvu d'un tel matériel, la cour d'appel, qui a inversé la charge de la preuve, a violé l'article L. 452-1 du code de la sécurité sociale, ensemble l'article 1315 du code civil ;
2°/ ALORS QUE les juges du fond, tenus de motiver leur décision, ne peuvent statuer par voie de simple affirmation ; qu'en se bornant, pour caractériser la faute inexcusable de l'employeur, à affirmer péremptoirement que ce dernier avait parfaitement connaissance de l'absence d'élingues sur le site, sans préciser sur quel élément de preuve elle fondait une telle assertion, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
3°/ ALORS QUE les juges du fond, tenus de motiver leur décision, doivent examiner, ne serait-ce que succinctement, les pièces versées aux débats par les parties ; que l'employeur versait aux débats un compte-rendu du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail de la réunion extraordinaire du 19 mai 2003, dont il ressortait expressément que le site était équipé, au jour de l'accident, d'un « engin de manutention et d'une série d'élingues » (pièce n° 4 produite en appel par la société Morillon Corvol) ; que les termes de ce compte-rendu étaient corroborés par l'une des pièces versées aux débats par le salarié lui-même, dont il s'évinçait que « les moyens de levage mis à la disposition du personnel ont la capacité nécessaire pour effectuer la manutention » (pièce n° 43 produite en appel par monsieur X...) ; qu'en concluant à l'absence d'élingues et en considérant qu'il n'était pas justifié de la présence sur le site le jour de l'accident de matériel mécanique de levage adapté, sans expliquer en quoi ledit compte-rendu, confirmé par les pièces produites par le salarié, ne pouvait emporter sa conviction, la cour d'appel ne met pas la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle sur le point de savoir si elle a analysé, au moins sommairement, ledit compte-rendu, violant ainsi l'article 455 du code de procédure civile.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR fixé au maximum le montant de la majoration de rente versée à monsieur X... et dit que cette majoration suivra l'évolution du taux d'IPP ;
AUX MOTIFS QUE monsieur X..., employé de la société Morillon Corvol en qualité de magasinier depuis 1974, a été victime le 22 avril 2003 d'un accident aux temps et lieu de travail (fractures multiples : fracture spiroïde du fémur droit, fracture du Hoffa du condyle externe droit et fracture du bimalléolaire gauche), déclaré sans réserve par son employeur et dont le caractère professionnel a été reconnu d'emblée par la CPAM de l'Aisne suivant décision du 16 mai 2003 ; qu'après échec de la tentative de conciliation, monsieur X... a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale de Laon d'une demande tendant à voir reconnaître, avec toutes conséquences de droit, la faute inexcusable de son employeur, la société Morillon Corvol ; que statuant, par jugement du 16 juin 2009, dont appel, le tribunal s'est déterminé comme indiqué cidessus ; qu'en vertu du contrat de travail le liant à son salarié, l'employeur est tenu envers celui-ci d'une obligation de sécurité de résultat, notamment en ce qui concerne les accidents du travail ; que le manquement à cette obligation a le caractère d'une faute inexcusable au sens de l'article L. 452-1 du code de la sécurité sociale, lorsque l'employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était exposé le salarié et qu'il n'a pas pris les mesures nécessaires pour l'en préserver ; qu'il ressort des éléments concordants du dossier que monsieur X... a été victime le 22 avril 2003 d'un accident survenu aux temps et lieu du travail, dans des circonstances parfaitement déterminées, rappelées dans la déclaration d'accident du travail faite par l'employeur (« déplacement d'une roue dentée en la roulant sur le sol lorsque celle-ci a été déséquilibrée et lui est tombée sur les jambes »), dont la prise en charge a été décidée d'emblée par la Caisse, sans instruction complémentaire, au vu des mentions précises et circonstanciées de la déclaration ; qu'il est par ailleurs établi, comme relevé par les premiers juges, que l'employeur ne pouvait ignorer le danger particulier présenté par le travail confié au salarié dès lors que le déplacement de la pièce en cause (une roue dentée de grande dimension et de masse importante) ne pouvait être effectué sans risque qu'au moyen d‘équipements adéquats (engin de manutention et de levage, avec élingues) et qu'il a été procédé à son déplacement manuel, sans qu'il soit justifié de circonstances propres à légitimer, à raison notamment de la configuration des lieux ou des modifications qui leur ont été apportées, la mise en oeuvre d'un procédé aussi dangereux, étant observé de surcroît que l'employeur avait parfaitement connaissance de l'absence d'élingues et qu'il n'est même justifié de la présence sur le site le jour de l'accident de matériel mécanique de levage adapté ; qu'il résulte de ces éléments que l'employeur, bien qu'averti de l'absence dans l'atelier de moyens de manutention adaptés et des dangers présentés par un déplacement manuel de la pièce, n'a pas pris les mesures nécessaires pour préserver le salarié des risques encourus, toutes circonstances caractérisant la faute inexcusable de l'employeur ; que le jugement entrepris qui s'est prononcé en sens contraire doit par conséquent être infirmé ; qu'en l'absence de faute inexcusable susceptible d'être imputée au salarié, la majoration de rente sera fixée au taux maximum, avec évolution en fonction de la propre évolution du taux d'IPP ;
ALORS QUE la majoration de la rente prévue lorsque l'accident du travail est dû à la faute inexcusable de l'employeur peut être réduite lorsque le salarié victime a lui-même commis une faute inexcusable ; qu'en affirmant péremptoirement qu'aucune faute inexcusable n'était susceptible d'être imputée au salarié, sans rechercher si l'initiative prise par ce dernier, salarié expérimenté, de déplacer seul, et manuellement, une roue dentée pesant près de 600 kg, ne pouvait présenter le caractère d'une faute inexcusable, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 452-1, L. 452-2 et L. 453-1 du code de la sécurité sociale.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 11-19500
Date de la décision : 13/09/2012
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Amiens, 12 avril 2011


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 13 sep. 2012, pourvoi n°11-19500


Composition du Tribunal
Président : M. Loriferne (président)
Avocat(s) : Me Balat, SCP Didier et Pinet

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:11.19500
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