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11/09/2012 | FRANCE | N°11-87119

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 11 septembre 2012, 11-87119


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

- M. Alain X...,

contre l'arrêt de la cour d'appel de COLMAR, chambre correctionnelle, en date du 15 septembre 2011, qui l'a condamné, pour homicide et blessures involontaires, à dix-huit mois d'emprisonnement avec sursis, et 8 000 euros d'amende, pour contraventions de blessures involontaires, à 750 et 50 euros d'amende, et a prononcé sur les intérêts civils ;

Vu les mémoires en demande, en défense et les observations complémentaires produits ; >
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 221-6, R. 625-2...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

- M. Alain X...,

contre l'arrêt de la cour d'appel de COLMAR, chambre correctionnelle, en date du 15 septembre 2011, qui l'a condamné, pour homicide et blessures involontaires, à dix-huit mois d'emprisonnement avec sursis, et 8 000 euros d'amende, pour contraventions de blessures involontaires, à 750 et 50 euros d'amende, et a prononcé sur les intérêts civils ;

Vu les mémoires en demande, en défense et les observations complémentaires produits ;

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 221-6, R. 625-2, R. 622-1 du code pénal, 459, 591 et 593 du code de procédure pénale ;

" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré M. X... coupable d'homicide et de blessures par imprudence et l'a condamné à une peine de dix-huit mois d'emprisonnement avec sursis et à deux amendes contraventionnelles et s'est prononcé sur les intérêts civils ;

" aux motifs que le premier juge a procédé dans le jugement déféré à une exact et précise analyse des circonstances de l'explosion ayant affecté le bâtiment n° 5 de l'Ecole de Chimie de Mulhouse le 24 mars 2006 vers 12h30, de la recherche des causes de ce sinistre et des expertises judiciaires réalisées dans le cadre de cette procédure pénale, tous éléments ayant entraîné la mise en examen de M. X..., professeur de ladite école et titulaire d'un laboratoire indépendant, sous la responsabilité directe du directeur de l'école, agrégée depuis au sein de l'Université de Haute Alsace ; que la cour adopte sans réserve cet exposé à la fois objectif et détaillé ; que, sur la culpabilité du prévenu, recherchée sur la base des faits d'homicide involontaire et de blessures involontaires avec ou sans ITT visés dans la prévention, qu'il convient de rappeler qu'en l'espèce, il y a lieu de vérifier la présence de la part de M. X... d'une violation manifestement délibérée d'une obligation de prudence ou de sécurité imposée par la loi ou le règlement ou d'une faute caractérisée exposant autrui à un risque d'une particulière gravité qui ne pouvait être ignoré par l'auteur éventuel ; qu'il est constant en l'espèce que M. X... avait entrepris de réaliser quelques jours avant la survenue du sinistre le 24 mars 2006 une expérience de polymérisation d'une durée globale de 50 heures environ ;
- que, pour réaliser cette expérience, M. X... a procédé à un montage comprenant une bouteille métallique d'éthylène, de divers tubes flexibles, d'un mono détendeur, d'un détendeur domestique, d'une liaison en verre en forme d'" Y " et d'une chambre de polymérisation, précédée d'un robinet en verre ;
- qu'il est encore constant et non contesté que M. X... a fait fonctionner ce montage le mercredi 22 mars et le jeudi 23 mars 2006 au matin, ayant d'une part décidé de fractionner la durée de l'expérience, vu l'impossibilité de suivre cette dernière en continu, et, d'autre part, en raison de l'aspect peu satisfaisant des résultats obtenus, de laisser passer " quelques jours " avant de reprendre cette expérience ;
- qu'il n'est pas inutile de rappeler également que l'explosion a eu lieu le vendredi 24 mars 2006 à 12h30 environ, soit juste avant le départ en week-end de M. X..., à propos duquel ce dernier a donné deux versions différentes, sans raison particulière ;
- qu'en effet, il a déclaré qu'il avait recherché à la Poste une lettre recommandée avant de partir directement à son domicile de Strasbourg ;
- que, dans la seconde version, il indiquait vouloir revenir à son laboratoire en début d'après-midi pour y rechercher des documents avant de partir en week-end ;
- qu'il est enfin constant que l'explosion a eu lieu pendant son absence des lieux, et heureusement, pendant la pause de midi au cours de laquelle peu de personnes étaient présentes dans le bâtiment n° 5 affecté par l'explosion et en grande partie dévasté par elle ;
que dans le cadre de la procédure une expertise judiciaire a été réalisée le 30 décembre 2006, suivie d'un rapport complémentaire en date du 20 juin 2008, dont les conclusions sont complétées par un rapport établi par A... de la société Air liquide en date du 25 juillet 2006 ; qu'il résulte de l'ensemble de ces éléments techniques et de ceux récoltés sur les lieux mêmes de l'explosion qu'il est établi que M. X... a transporté lui-même dans son laboratoire une bouteille d'éthylène nécessaire à une expérience de polymérisation ;
- qu'il est toujours établi que cette bouteille a été maintenue en place par le prévenu pendant de nombreux jours, y compris en dehors de rares plages pendant lesquelles sa présence était nécessaire à la réalisation de l'expérience, dans un local confiné, sans aération et en présence indiscutablement de 3 sources d'ignition et de décharges électrostatiques, à savoir une étuve en fonction avec déclenchement par thermostat électrique, un téléphone et un ordinateur, alors qu'une telle bouteille d'éthylène doit être obligatoirement conservée, en dehors des périodes très limitées pendant lesquelles elle est indispensable pour réaliser une manipulation, dans un casier aéré, situé à l'extérieur des bâtiments et à l'abri de toute source d'ignition ou de décharges électrostatiques ;
que M. X..., vu sa formation scientifique, sa fonction et son ancienneté dans la branche, qu'il invoque d'ailleurs à hauteur de 40 années, ne pouvait ignorer l'existence de ces règles impératives qu'il a violées délibérément en continu pratiquement pendant deux semaines, si l'on excepte les périodes d'expérience proprement dites, au demeurant fort courtes ;
- qu'il l'a fait également au cours de la période contemporaine de l'explosion puisqu'il résulte de ses propres déclarations qu'il voulait reprendre l'expérience " dans quelques jours ", vu ses résultats décevants, sans pour autant seulement envisager de déplacer la bouteille d'éthylène, pleine aux deux tiers lorsqu'il l'a introduite dans son laboratoire, pour l'entreposer dans un local extérieur aéré et dépourvu de toute source d'ignition ou de décharges électrostatiques ;
- que cette violation délibérée d'une obligation de prudence et de sécurité de la part du prévenu est encore aggravée par divers éléments dont l'existence est établie à la procédure ; qu'en premier lieu qu'il ne peut être contesté que le prévenu a emprunté cette bouteille de gaz très inflammable et explosif sans aucune formalité administrative qui aurait pu permettre son suivi sur le plan de la sécurité, étant en outre observé que ce laxisme sur le plan de la sécurité a duré plusieurs semaines, avec maintien de cette bouteille dans le laboratoire du prévenu sans même qu'une date de retour dans son laboratoire d'origine, celui de chimie organique, n'ait même été envisagée ;
- que de même il ne peut être contesté par le prévenu que celui-ci avait conscience du risque extrêmement grave qu'il faisait ainsi courir à la multitude des usagers de l'Ecole de Chimie, étudiants, enseignants, femmes de ménage ; qu'en second lieu qu'il résulte des constatations objectives réalisées sur les lieux de l'explosion du 24 mars 2006 que la serrure du laboratoire personnel de M. X... a été retrouvée en position ouverte et que la bouteille d'éthylène dont le contenu a occasionné l'explosion, ce qui n'est contesté par personne, se trouvait sur place, vide, avec des traces de chauffage intense sur sa partie supérieure, et son robinet ouvert à deux tours, ce qui a permis aux experts de calculer le débit de la fuite et sa durée approximative de 4 à 14 minutes ; que sur ces points que M. X... a été précisément mis en cause pour sa pratique d'ouverture " démesurée " des bouteilles de gaz dans son laboratoire au cours de sa carrière, étant rappelé que là aussi une règle de sécurité est appliquée par tous : à savoir qu'on ne doit procéder à l'ouverture du robinet de ces bouteilles que de 1/ 4 de tour, au maximum de 1/ 2 tour, règle que M. X... a négligé d'appliquer malgré divers rappels de ses collègues et collaborateurs dont les déclarations ont été recueillies au cours de la procédure ;
- qu'en cette matière également, M. X... ne pouvait pas ignorer les risques que son comportement occasionnait pour les tiers lors de la manipulation de gaz très inflammables ou explosifs ;
- qu'il a cependant délibérément choisi d'ignorer cette règle de sécurité impérative, et ce, à de multiples reprises, y compris le jour de l'explosion le 24 mars 2006 ;
- qu'en effet, il n'est pas inutile de rappeler que la bouteille d'éthylène en cause a été retrouvée ouverte à 2 tours, soit 1, 5 tours de plus que le maximum, ce qui correspond exactement à sa pratique désastreuse telle que décrite précisément par les témoins B... C. et C... X. notamment ; qu'en troisième lieu qu'il faut également relever qu'aucun collier de serrage de type Serflex n'a été retrouvé sur les lieux de l'explosion, ce qui correspond exactement aux constatations opérées objectivement par les experts judiciaires sur le montage expérimental reconstitué par M. X... à la demande du CHSCT, aucun collier de serrage n'ayant été utilisé à cette occasion par ce dernier ;
- que sur ce point, ce n'est que tardivement que M. X... a fait référence au placement sur le montage expérimental réel de tels colliers, après plusieurs auditions par les enquêteurs ;
- qu'en particulier, il est incapable de préciser l'origine de ces éventuels colliers de serrage, variant dans ses explications sur ce point de façon incompréhensible et peu plausible ;
- qu'il s'agit là aussi d'un problème technique dont le prévenu ne pouvait ignorer l'importance capitale dans la manipulation d'un gaz dangereux, dont il n'avait pas un usage quotidien » ;
qu'en quatrième lieu qu'il ne peut être contesté que le montage expérimental réel créé par M. X... présentait un caractère " hasardeux " selon les experts, et qu'il relevait d'un " bricolage " indigne d'un professionnel ayant quanrante ans d'ancienneté à ses dires ;
- qu'en effet ce montage, réalisé avec des éléments de récupération, usagés et dépareillés, reliait notamment, et cela ne peut être contesté, au moyen de tuyaux flexibles des abouts de détendeurs de diamètre très différents, alors cependant qu'il existe des liaisons de ce type répondant à ces problèmes d'ordre technique, sans que le prévenu n'ait apporté au cours de la longue procédure suivie la moindre explication quant à ces " bricolages " et quant à ces réutilisations de matériels d'origine incertaine ; qu'il ne peut être contesté dans ces circonstances que l'emmanchement des flexibles de diamètre inadapté sur des abouts de diamètres supérieurs a pour conséquences une très faible résistance à la pression du gaz, voire au poids propre du flexible, et ainsi de rendre inopérante la pose de colliers de serrage éventuels par la suite ;
- qu'il faut y rajouter l'usage d'une dérivation en " Y " et un robinet, de verre tous les deux, dont la fragilité est évidente pour tous ;
que l'expertise judiciaire, non critiquée sur ce point reconnu par tous, a établi que l'explosion du 24 mars 2006 est due à une fuite d'éthylène consécutive au démanchement d'un flexible, utilisé dans le montage initial de l'about d'un des deux détendeurs utilisés par le prévenu ;
- qu'il s'évince de ces constatations que le prévenu, qui a reconnu un manque certain de rigueur dans sa pratique, a délibérément méprisé les règles élémentaires de prudence et de sécurité dans la manipulation d'un gaz dangereux, alors cependant qu'il disposait indiscutablement des connaissances nécessaires en la matière et alors même qu'il se trouvait dans un environnement quotidiennement fréquenté par de nombreuses personnes appartenant au milieu universitaire ;
que l'enquête, l'information et les expertises réalisées à propos de l'explosion du 24 mars 2006 n'ont pas permis de donner la moindre consistance à l'hypothèse soutenue par le prévenu de l'intervention d'un tiers, malgré les investigations menées sur ce point ;
que par contre qu'il est établi par les éléments tirés de la procédure et des audiences que M. X... a bien commis des violations multiples et délibérées d'obligations de prudence et de sécurité imposées par les textes applicables à son activité, ces fautes caractérisées exposant de nombreux tiers présents dans les locaux universitaires à des risques d'une gravité exceptionnelle que le prévenu ne pouvait ignorer compte tenu de sa formation scientifique et de l'ancienneté importante qu'il met en avant lui-même ; que, dès lors, le jugement déféré sera confirmé quant à la culpabilité dans les termes des préventions retenues contre lui de façon détaillée ;

" et aux motifs adoptés que les experts concluaient :
- que l'explosion survenue dans l'immeuble était une explosion en phase gazeuse,
- que l'origine de cette explosion se situait dans le laboratoire affecté à M. X...,
- que la cause principale de l'explosion résultait d'une importante accumulation d'éthylène dans le laboratoire consécutive à un déversement provenant de la bouteille d'éthylène utilisée par M. X... ;
- que ce déversement d'éthylène était la conséquence de l'éjection du tuyau souple Tricolaire dont le diamètre était inadapté au diamètre des abouts du détendeur Eurofro et du détendeur ménager qu'il raccordait ; que, de plus, dans le montage réalisé par M. X..., les connexions du tube notamment sur les abouts du détendeur n'étaient pas solidement assujetties au moyen de colliers de serrage (ou de maintien) ;
- que le robinet de la bouteille d'éthylène étant ouvert, il s'en était suivi un déversement de gaz d'au moins 460 litres par minutes en aval du détendeur Eurofro et le gaz déversé entraînait avec l'air la formation d'un mélange explosible. Selon la chronologie des faits, ce déversement avait pu débuter à partir de 12h10, après le départ de M. Y... et avait duré 14 minutes, l'explosion étant survenue vers 12h24 ;
- que, selon toute vraisemblance, l'étincelle électrique jaillissant dans le corps de l'interrupteur à l'ouverture ou la fermeture du circuit alimentant l'étuve installée sur la paillasse du laboratoire avait enflammé le mélange explosif air-éthylène ;

" et aux motifs très eventuellement adoptés que M. X... soutient avoir fermé le robinet de la bouteille d'éthylène le jeudi, n'ayant effectué aucune manipulation le vendredi matin, jour de l'explosion ; que là encore, personne ne peut confirmer les dires de M. X... ; que seul M. Y... a affirmé que le vendredi matin la bouteille était fermée » ; que « l'on se demande bien comment il a pu faire cette constatation, sauf à imaginer qu'il ait lui-même manipulé le robinet, M. Y... a par ailleurs été dans l'incapacité d'indiquer si le montage comprenait des colliers de serrage ; que le robinet de la bouteille était ouvert de deux tours au moment où elle a été retrouvée dans les décombres ; que, pour explication, M. X... soutient la thèse d'un acte de malveillance et ce d'autant qu'il se disait certain d'avoir verrouillé la porte de son laboratoire en quittant les lieux ; qu'or, l'expertise de la serrure retrouvée dans les décombres indiquait que la porte était fermée mais non verrouillée, le pêne ne présentant aucune déformation ; qu'il doit être relevé que M. X... a quelque peu varié dans ses déclarations concernant son emploi du temps ; qu'en effet, devant le CHSCT, il indiquait avoir quitté son laboratoire en fin de matinée dans l'intention de partir directement en week-end et de regagner son domicile à Strasbourg ; que, lors de sa garde à vue, il indiquait au contraire qu'il comptait regagner son laboratoire en début d'après midi pour y récupérer des rapports de travaux pratiques ; il indiquait enfin qu'il s'était absenté pour se rendre à la poste afin d'y retirer un recommandé ; que M. X... précisait qu'il verrouillait toujours la porte de son laboratoire sauf lorsqu'il s'abstenait de courts instants pour se rendre à son bureau ; qu'en tout état de cause, que M. Z..., magasinier, s'est montré formel dans ses déclarations indiquant que la porte du laboratoire de M. X... était verrouillée à 11h45 ; qu'aucun témoin ne remarquait une intrusion suspecte dans les instants ayant précédé l'explosion ; que faut-il sur ce point rappeler les déclarations de M. Y..., présent ce matin là, travaillant visiblement porte ouverte puisqu'il a pu apercevoir M. Z... à 11h45, et qui n'a jamais vu quiconque d'extérieur pénétrer à l'étage ni même un collègue dont la présence aurait été suspecte ; qu'encore aurait-il fallu que cet intrus ait été informé de l'expérimentation en cours avec l'éthylène dans le laboratoire de M. X... ; que les investigations effectuées quant aux personnes susceptibles d'avoir détenu les clés du laboratoire de M. X... ne permettaient pas d'établir qu'un membre du personnel de l'école avait pu s'introduire dans le laboratoire en l'absence de M. X... ; que dès lors qu'aucun élément ne permet de retenir la thèse d'un acte volontaire, la défense s'appuyant principalement sur le fait que la porte du laboratoire était selon M. X... verrouillée, affirmation confirmée par M. Z... et M. Y... qui cependant ont fait état de souvenirs contradictoires et alors même, comme rappelé antérieurement, que M. X... a varié dans ses déclarations concernant le moment où il envisageait de quitter l'école pour se rendre à Strasbourg ;

" 1°) alors que tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision et répondre aux chefs péremptoires des conclusions des parties ; que l'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence ; que les incriminations d'homicide et de blessures par imprudence exigent, pour recevoir application, qu'une faute puisse être imputée au prévenu et que soit constatée l'existence certaine d'un lien de causalité entre cette faute du prévenu et le décès ou les blessures de la victime ; que la cour d'appel a retenu à l'encontre du prévenu une faute caractérisée consistant à avoir, le vendredi 24 mars 2006, ouvert de manière démesurée, de deux tours, le robinet de la bouteille d'éthylène se trouvant dans son laboratoire, tandis que la pratique était de ne l'ouvrir que d'un quart de tour, de n'avoir pas utilisé de serflex pour éviter le démanchement du flexible (tuyau) de communication avec le second détendeur de l'installation et d'avoir plus généralement procédé à un montage hasardeux, par utilisation d'un flexible ne correspondant pas au diamètre de chacun des détendeurs utilisés, ce qui avait été la cause de l'accident selon l'expertise réalisée ; qu'en considérant que le jour des faits, le prévenu avait ouvert inconsidérément le robinet de la bouteille d'éthylène, alors qu'elle avait constaté auparavant qu'il était « constant et non contesté que M. X... a vait fait fonctionner ce montage le mercredi 22 mars et le jeudi 23 mars 2006 au matin, ayant d'une part décidé de fractionner la durée de l'expérience, vu l'impossibilité de suivre cette dernière en continu, et, d'autre part, en raison de l'aspect peu satisfaisant des résultats obtenus, de laisser passer " quelques jours " avant de reprendre cette expérience », la cour d'appel qui admet ainsi que, le jour des faits, le prévenu n'avait pas ouvert le robinet du détendeur, s'est prononcée par des motifs contradictoires ne permettant pas de s'assurer que le prévenu était l'auteur de cette faute qu'elle considérait comme la cause de l'explosion ;

" 2°) alors que, à supposer qu'il n'existe aucune contradiction de motifs, faute d'avoir précisé quels éléments permettaient de considérer que le prévenu était en train de faire une expérimentation en utilisant la bouteille d'éthylène le jour de l'explosion, tandis qu'il contestait ce fait, le seul constat de l'ouverture du robinet dans un laboratoire où plusieurs personnes pouvaient entrer, si la porte de ce laboratoire n'était pas fermée à clé avant l'explosion, comme semble le considérer la cour d'appel, ne suffisant pas à établir ce fait et laissant subsister un doute sur le fait que le prévenu avait commis une faute ayant avec certitude causé des dommages visés à la prévention, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;

" 3°) alors que, si la cour d'appel affirme qu'il n'a pas été possible d'établir qu'un tiers était effectivement entré dans le laboratoire entre 11h20 et 12h30, moment de l'explosion, faute pour elle de s'expliquer sur le doute existant sur les circonstances de l'accident du fait de la possibilité qu'un tiers soit entré dans le laboratoire en l'absence du prévenu, les conclusions déposées pour ce dernier soutenant que la preuve s'en trouvait dans le fait que si la porte était ouverte au moment de l'explosion, deux témoins avaient constaté qu'elle était fermée à clés trois quart d'heure auparavant, à 11h45, et dès lors que si personne n'avait vu entrer un tiers dans le laboratoire du prévenu, personne n'avait non plus prétendu avoir vu le prévenu dans ce laboratoire pendant cet intervalle, ce qui ne permettait pas d'exclure l'hypothèse de l'entrée d'un tiers dans ce laboratoire, la cour d'appel a de toute façon privé sa décision de base légale ;

" 4°) alors que, le tribunal correctionnel a considéré, par motifs éventuellement adoptés, que la thèse d'un acte intentionnel ne pouvait être retenue dès lors qu'elle était fondée, d'une part, sur les témoignages de M. Z... et M. Y..., affirmant que la porte était fermée à clé à 11h45, lesquels avaient « fait état de souvenirs contradictoires », leur divergence portant sur le fait que M. Y... prétendait avoir essayé d'ouvrir la porte avec sa clé en présence de M. Z..., tandis que ce dernier ne le reconnaissait pas, tout en affirmant également que la porte était fermée à clé à 11h45, et que, d'autre part, les explications du prévenu sur son emploi du temps avaient varié, ayant une première fois affirmé vouloir partir à Strasbourg après avoir quitté son laboratoire le matin et ensuite, pendant sa garde à vue, avoir voulu revenir dans l'après-midi avant de partir pour Strasbourg ; qu'en l'état de tels motifs qui ne permettent pas de savoir dans quelles circonstances l'ouverture du robinet a eu lieu, n'excluant pas que la porte ait été fermée à clé par le professeur à son départ du laboratoire à 11h20, comme il en avait l'habitude selon plusieurs témoignages invoqués dans les conclusions délaissées sur ce point, et n'excluant pas que le prévenu ne soit pas revenu avant l'explosion dans son laboratoire pour ouvrir cette porte, la cour ayant par ailleurs constaté qu'il n'était pas sur les lieux au moment de l'accident, et ainsi qu'un tiers ait pu ouvrir le robinet de la bouteille d'éthylène, la cour d'appel n'établit pas que les dommages en cause ont été causé avec certitude par le fait du prévenu ;

" 5°) alors qu'en se fondant pour rendre sa décision sur les affirmations du prévenu pendant sa garde à vue, selon lesquelles il avait l'intention de revenir au laboratoire dans l'après-midi, à une époque où la loi n'imposait pas encore d'informer la personne du droit de garder le silence et du droit à l'assistance d'un avocat pendant toute la garde à vue, la cour d'appel a méconnu l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme ;

" 6°) alors que, faute d'avoir précisé sur quels éléments elle s'appuyait pour considérer que le flexible utilisé n'était pas adapté à deux détendeurs dont les abouts n'étaient pas de même diamètre, ce qui aurait causé la fuite de gaz, avec ou en l'absence de serflex, et sans répondre aux conclusions déposées pour le prévenu qui contestaient le fondement de l'expertise réalisée à partir d'un flexible dont rien n'établissait qu'il était le même que celui utilisé dans l'expérience et qui constataient que la chambre de l'instruction avait admis qu'en l'absence de traces de ce flexible et de questions pertinentes sur l'utilisation de serflex à l'occasion de l'expertise, il n'était pas possible d'avoir la moindre certitude sur le démanchement du flexible avant l'explosion, ce qui était aggravé par l'absence de recherche de tels éléments dans les gravats à la suite de l'explosion et de l'impossibilité de retrouver le second détendeur utilisé dans le montage, la cour d'appel qui considère pourtant que le démanchement de ce flexible est la cause de l'explosion, a privé sa décision de base légale ;

" 7°) alors que, le flexible s'était démanché spontanément sous la pression du gaz, voire sous l'effet de son propre poids, en se fondant sur l'expertise réalisée, sans répondre aux conclusions qui soutenaient qu'une telle affirmation était contredite par le fait que le même montage n'avait entraîné aucun démanchement du flexible les jours précédant l'explosion et que les experts n'avaient pas répondu à la question essentielle de savoir en combien de temps le flexible avait pu se démancher, alors qu'un démanchement immédiat sous la pression du gaz aurait nécessairement été constaté par le professeur X..., s'il avait lui-même ouvert le robinet de la bouteille d'éthylène, la cour d'appel a encore privé son arrêt de base légale ;

" 8°) alors que la cour d'appel retient, par ailleurs, à l'encontre du professeur un manquement délibéré aux obligations particulières de sécurité prévues par un arrêté en ce qu'il a laissé la bouteille d'éthylène dans un local non aéré tandis qu'il ne l'utilisait pas ; qu'en relevant cependant que l'expertise judiciaire a établi que l'explosion était due à une fuite d'éthylène consécutive au démanchement d'un flexible fixé dans le montage aux abouts des deux détendeurs utilisés par le prévenu et à l'ouverture inconsidérée du robinet du manodétendeur de la bouteille, la cour d'appel ne pouvait, sans se contredire ou mieux s'en expliquer considérer que la faute ayant consisté pour le prévenu à garder une bouteille de gaz dans son laboratoire permettait de caractériser les infractions d'homicide et blessures par imprudence, dès lors que la seule présence de la bouteille de gaz, si elle avait été fermée, dans le laboratoire, n'apparaissait pas avoir été la cause de l'explosion, selon ses propres constatations ; qu'en l'état de ces motifs contradictoires et à tout le moins insuffisants, la cour d'appel n'a pu établir le lien de causalité certain entre la faute reprochée et l'explosion ;

" 9°) alors qu'enfin, la cour d'appel a retenu à l'encontre du prévenu une faute consistant à avoir emprunté une bouteille d'éthylène sans aucune formalité admini strative, qu'en relevant cependant que l'expertise judiciaire a établi que l'explosion était due à une fuite d'éthylène consécutive au démanchement d'un flexible utilisé dans le montage du prévenu et à l'ouverture inconsidérée du robinet du manodétendeur de la bouteille auquel il était fixé, elle ne pouvait sans se contredire ou mieux s'en expliquer, considérer que cette faute permettait de caractériser les infractions d'homicide et blessures par imprudence, dès lors que le respect des obligations en cause n'aurait pu empêcher l'accident qu'elle attribuait au démanchement du flexible ;
qu'en l'état de ces motifs contradictoires et à tout le moins insuffisants, la cour d'appel n'a pu établir l'existence d'un lien de causalité certain entre cette faute et les dommages " ;

Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles 121-3, 221-6, R. 625-2, R. 622-1 du code pénal, 459, 591 et 593 du code de procédure pénale ;

" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré M. X... coupable d'homicide et de blessures par imprudence et l'a condamné à une peine de dix-huit mois d'emprisonnement avec sursis et à deux amendes contraventionnelles et s'est prononcé sur les intérêts civils, après avoir constaté une faute caractérisée à son encontre ;

" aux motifs que le premier juge a procédé dans le jugement déféré à une exact et précise analyse des circonstances de l'explosion ayant affecté le bâtiment n° 5 de l'Ecole de chimie de Mulhouse le 24 mars 2006 vers 12h30, de la recherche des causes de ce sinistre et des expertises judiciaires réalisées dans le cadre de cette procédure pénale, tous éléments ayant entraîné la mise en examen de M. X..., professeur de ladite école et titulaire d'un laboratoire indépendant, sous la responsabilité directe du directeur de l'école, agrégée depuis au sein de l'Université de Haute Alsace ; que la cour adopte sans réserve cet exposé à la fois objectif et détaillé ; que sur la culpabilité du prévenu, recherchée sur la base des faits d'homicide involontaire et de blessures involontaires avec ou sans ITT visés dans la prévention, qu'il convient de rappeler qu'en l'espèce, il y a lieu de vérifier la présence de la part de M. X... d'une violation manifestement délibérée d'une obligation de prudence ou de sécurité imposée par la loi ou le règlement ou d'une faute caractérisée exposant autrui à un risque d'une particulière gravité qui ne pouvait être ignoré par l'auteur éventuel ; qu'il est constant en l'espèce que M. X... avait entrepris de réaliser quelques jours avant la survenue du sinistre le 24 mars 2006 une expérience de polymérisation d'une durée globale de 50 heures environ ;
- que, pour réaliser cette expérience, M. X... a procédé à un montage comprenant une bouteille métallique d'éthylène, de divers tubes flexibles, d'un mono détendeur, d'un détendeur domestique, d'une liaison en verre en forme d'" Y " et d'une chambre de polymérisation, précédée d'un robinet en verre ;
- qu'il est encore constant et non contesté que M. X... a fait fonctionner ce montage le mercredi 22 mars et le jeudi 23 mars 2006 au matin, ayant, d'une part, décidé de fractionner la durée de l'expérience, vu l'impossibilité de suivre cette dernière en continu, et, d'autre part, en raison de l'aspect peu satisfaisant des résultats obtenus, de laisser passer " quelques jours " avant de reprendre cette expérience ;
- qu'il n'est pas inutile de rappeler également que l'explosion a eu lieu le vendredi 24 mars 2006 à 12h30 environ, soit juste avant le départ en week-end de M. X..., à propos duquel ce dernier a donné deux versions différentes, sans raison particulière ;
- qu'en effet, il a déclaré qu'il avait recherché à la Poste une lettre recommandée avant de partir directement à son domicile de Strasbourg ;
- que dans la seconde version, il indiquait vouloir revenir à son laboratoire en début d'après-midi pour y rechercher des documents avant de partir en week-end ;
- qu'il est enfin constant que l'explosion a eu lieu pendant son absence des lieux, et heureusement, pendant la pause de midi au cours de laquelle peu de personnes étaient présentes dans le bâtiment n° 5 affecté par l'explosion et en grande partie dévasté par elle ; que, dans le cadre de la procédure une expertise judiciaire a été réalisée le 30 décembre 2006, suivie d'un rapport complémentaire en date du 20 juin 2008, dont les conclusions sont complétées par un rapport établi par A... de la société Air Liquide en date du 25 juillet 2006 ; qu'il résulte de l'ensemble de ces éléments techniques et de ceux récoltés sur les lieux mêmes de l'explosion qu'il est établi que M. X... a transporté lui-même dans son laboratoire une bouteille d'éthylène nécessaire à une expérience de polymérisation ;
- qu'il est toujours établi que cette bouteille a été maintenue en place par le prévenu pendant de nombreux jours, y compris en dehors de rares plages pendant lesquelles sa présence était nécessaire à la réalisation de l'expérience, dans un local confiné, sans aération et en présence indiscutablement de trois sources d'ignition et de décharges électrostatiques, à savoir une étuve en fonction avec déclenchement par thermostat électrique, un téléphone et un ordinateur, alors qu'une telle bouteille d'éthylène doit être obligatoirement conservée, en dehors des périodes très limitées pendant lesquelles elle est indispensable pour réaliser une manipulation, dans un casier aéré, situé à l'extérieur des bâtiments et à l'abri de toute source d'ignition ou de décharges électrostatiques ; que M. X..., vu sa formation scientifique, sa fonction et son ancienneté dans la branche, qu'il invoque d'ailleurs à hauteur de 40 années, ne pouvait ignorer l'existence de ces règles impératives qu'il a violées délibérément en continu pratiquement pendant deux semaines, si l'on excepte les périodes d'expérience proprement dites, au demeurant fort courtes ;
- qu'il l'a fait également au cours de la période contemporaine de l'explosion puisqu'il résulte de ses propres déclarations qu'il voulait reprendre l'expérience " dans quelques jours ", vu ses résultats décevants, sans pour autant seulement envisager de déplacer la bouteille d'éthylène, pleine aux deux tiers lorsqu'il l'a introduite dans son laboratoire, pour l'entreposer dans un local extérieur aéré et dépourvu de toute source d'ignition ou de décharges électrostatiques ;
- que cette violation délibérée d'une obligation de prudence et de sécurité de la part du prévenu est encore aggravée par divers éléments dont l'existence est établie à la procédure ;
qu'en premier lieu qu'il ne peut être contesté que le prévenu a emprunté cette bouteille de gaz très inflammable et explosif sans aucune formalité administrative qui aurait pu permettre son suivi sur le plan de la sécurité, étant en outre observé que ce laxisme sur le plan de la sécurité a duré plusieurs semaines, avec maintien de cette bouteille dans le laboratoire du prévenu sans même qu'une date de retour dans son laboratoire d'origine, celui de chimie organique, n'ait même été envisagée ;
- que de même il ne peut être contesté par le prévenu que celui-ci avait conscience du risque extrêmement grave qu'il faisait ainsi courir à la multitude des usagers de l'Ecole de Chimie, étudiants, enseignants, femmes de ménage... ;
qu'en second lieu qu'il résulte des constatations objectives réalisées sur les lieux de l'explosion du 24 mars 2006 que la serrure du laboratoire personnel de M. X... a été retrouvée en position ouverte et que la bouteille d'éthylène dont le contenu a occasionné l'explosion, ce qui n'est contesté par personne, se trouvait sur place, vide, avec des traces de chauffage intense sur sa partie supérieure, et son robinet ouvert à 2 tours, ce qui a permis aux experts de calculer le débit de la fuite et sa durée approximative de 4 à 14 minutes ; que sur ces points que M. X... a été précisément mis en cause pour sa pratique d'ouverture " démesurée " des bouteilles de gaz dans son laboratoire au cours de sa carrière, étant rappelé que là aussi une règle de sécurité est appliquée par tous : à savoir qu'on ne doit procéder à l'ouverture du robinet de ces bouteilles que de 1/ 4 de tour, au maximum de 1/ 2 tour, règle que M. X... a négligé d'appliquer malgré divers rappels de ses collègues et collaborateurs dont les déclarations ont été recueillies au cours de la procédure ;
- qu'en cette matière également, M. X... ne pouvait pas ignorer les risques que son comportement occasionnait pour les tiers lors de la manipulation de gaz très inflammables ou explosifs ;
- qu'il a cependant délibérément choisi d'ignorer cette règle de sécurité impérative, et ce, à de multiples reprises, y compris le jour de l'explosion le 24 mars 2006 ;
- qu'en effet, il n'est pas inutile de rappeler que la bouteille d'éthylène en cause a été retrouvée ouverte à 2 tours, soit 1, 5 tours de plus que le maximum, ce qui correspond exactement à sa pratique désastreuse telle que décrite précisément par les témoins B... C. et C... X. notamment » ; qu'en troisième lieu qu'il faut également relever qu'aucun collier de serrage de type Serflex n'a été retrouvé sur les lieux de l'explosion, ce qui correspond exactement aux constatations opérées objectivement par les experts judiciaires sur le montage expérimental reconstitué par M. X... à la demande du CHSCT, aucun collier de serrage n'ayant été utilisé à cette occasion par ce dernier ;
- que sur ce point, ce n'est que tardivement que M. X... a fait référence au placement sur le montage expérimental réel de tels colliers, après plusieurs auditions par les enquêteurs ;
- qu'en particulier, il est incapable de préciser l'origine de ces éventuels colliers de serrage, variant dans ses explications sur ce point de façon incompréhensible et peu plausible ;
- qu'il s'agit là aussi d'un problème technique dont le prévenu ne pouvait ignorer l'importance capitale dans la manipulation d'un gaz dangereux, dont il n'avait pas un usage quotidien ;
qu'en quatrième lieu qu'il ne peut être contesté que le montage expérimental réel créé par M. X... présentait un caractère " hasardeux " selon les experts, et qu'il relevait d'un " bricolage " indigne d'un professionnel ayant 40 ans d'ancienneté à ses dires ;
- qu'en effet ce montage, réalisé avec des éléments de récupération, usagés et dépareillés, reliait notamment, et cela ne peut être contesté, au moyen de tuyaux flexibles des abouts de détendeurs de diamètre très différents, alors cependant qu'il existe des liaisons de ce type répondant à ces problèmes d'ordre technique, sans que le prévenu n'ait apporté au cours de la longue procédure suivie la moindre explication quant à ces " bricolages " et quant à ces réutilisations de matériels d'origine incertaine ; qu'il ne peut être contesté dans ces circonstances que l'emmanchement des flexibles de diamètre inadapté sur des abouts de diamètres supérieurs a pour conséquences une très faible résistance à la pression du gaz, voire au poids propre du flexible, et ainsi de rendre inopérante la pose de colliers de serrage éventuels par la suite ;
- qu'il faut y rajouter l'usage d'une dérivation en " Y " et un robinet, de verre tous les deux, dont la fragilité est évidente pour tous ;
que l'expertise judiciaire, non critiquée sur ce point reconnu par tous, a établi que l'explosion du 24 mars 2006 est due à une fuite d'éthylène consécutive au démanchement d'un flexible, utilisé dans le montage initial de l'about d'un des deux détendeurs utilisés par le prévenu ;
- qu'il s'évince de ces constatations que le prévenu, qui a reconnu un manque certain de rigueur dans sa pratique, a délibérément méprisé les règles élémentaires de prudence et de sécurité dans la manipulation d'un gaz dangereux, alors cependant qu'il disposait indiscutablement des connaissances nécessaires en la matière et alors même qu'il se trouvait dans un environnement quotidiennement fréquenté par de nombreuses personnes appartenant au milieu universitaire ;
que l'enquête, l'information et les expertises réalisées à propos de l'explosion du 24 mars 2006 n'ont pas permis de donner la moindre consistance à l'hypothèse soutenue par le prévenu de l'intervention d'un tiers, malgré les investigations menées sur ce point ; que par contre qu'il est établi par les éléments tirés de la procédure et des audiences que M. X... a bien commis des violations multiples et délibérées d'obligations de prudence et de sécurité imposées par les textes applicables à son activité, ces fautes caractérisées exposant de nombreux tiers présents dans les locaux universitaires à des risques d'une gravité exceptionnelle que le prévenu ne pouvait ignorer compte tenu de sa formation scientifique et de l'ancienneté importante qu'il met en avant lui-même ; que, dès lors le jugement déféré sera confirmé quant à la culpabilité dans les termes des préventions retenues contre lui de façon détaillée ;

" alors que la faute caractérisée suppose une faute d'une particulière gravité exposant autrui à un risque grave pour autrui que le prévenu ne pouvait ignorer ; que, la cour d'appel a retenu à l'encontre du prévenu une faute caractérisée consistant à avoir ouvert de manière démesurée, de deux tours, le robinet de la bouteille d'éthylène, tandis que la pratique était de ne l'ouvrir que d'un quart de tour, de n'avoir pas utilisé de serflex pour éviter le démanchement du flexible de communication avec le second détendeur de l'installation et d'avoir plus généralement procédé à un montage hasardeux, par utilisation d'un flexible ne correspondant pas au diamètre de chacun des détendeurs utilisés, ce qui avait été la cause de l'accident selon l'expertise réalisée ; qu'en l'état de ces motifs, sans répondre aux conclusions qui soutenaient qu'à supposer ces fautes établies, dès lors que le prévenu avait mis en danger sa propre vie, il en résultait nécessairement qu'il ignorait le risque qu'il faisait courir à autrui, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale " ;

Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles 121-3, 221-6, R. 625-2, R. 622-1 du code pénal, 459, 591 et 593 du code de procédure pénale ;

" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré M. X... coupable d'homicide et de blessures par imprudence et l'a condamné à une peine de dix-huit mois d'emprisonnement avec sursis et à deux amendes contraventionnelles et s'est prononcé sur les intérêts civils, après avoir relevé à son encontre la violation manifestement délibérée d'une obligation particulière de sécurité prévue par la loi ou le règlement et la méconnaissance de règles de sécurité ;

" aux motifs que le premier juge a procédé dans le jugement déféré à une exact et précise analyse des circonstances de l'explosion ayant affecté le bâtiment n° 5 de l'Ecole de chimie de Mulhouse le 24 mars 2006 vers 12h30, de la recherche des causes de ce sinistre et des expertises judiciaires réalisées dans le cadre de cette procédure pénale, tous éléments ayant entraîné la mise en examen de M. X..., professeur de ladite école et titulaire d'un laboratoire indépendant, sous la responsabilité directe du directeur de l'école, agrégée depuis au sein de l'Université de Haute Alsace ; que la cour adopte sans réserve cet exposé à la fois objectif et détaillé ; que, sur la culpabilité du prévenu, recherchée sur la base des faits d'homicide involontaire et de blessures involontaires avec ou sans ITT visés dans la prévention, qu'il convient de rappeler qu'en l'espèce, il y a lieu de vérifier la présence de la part de M. X... d'une violation manifestement délibérée d'une obligation de prudence ou de sécurité imposée par la loi ou le règlement ou d'une faute caractérisée exposant autrui à un risque d'une particulière gravité qui ne pouvait être ignoré par l'auteur éventuel ; qu'il est constant en l'espèce que M. X... avait entrepris de réaliser quelques jours avant la survenue du sinistre le 24 mars 2006 une expérience de polymérisation d'une durée globale de cinquante heures environ ;
- que, pour réaliser cette expérience, M. X... a procédé à un montage comprenant une bouteille métallique d'éthylène, de divers tubes flexibles, d'un mono détendeur, d'un détendeur domestique, d'une liaison en verre en forme d'" Y " et d'une chambre de polymérisation, précédée d'un robinet en verre ;
- qu'il est encore constant et non contesté que M. X... a fait fonctionner ce montage le mercredi 22 mars et le jeudi 23 mars 2006 au matin, ayant d'une part décidé de fractionner la durée de l'expérience, vu l'impossibilité de suivre cette dernière en continu, et, d'autre part, en raison de l'aspect peu satisfaisant des résultats obtenus, de laisser passer " quelques jours " avant de reprendre cette expérience ;
- qu'il n'est pas inutile de rappeler également que l'explosion a eu lieu le vendredi 24 mars 2006 à 12h30 environ, soit juste avant le départ en week-end de M. X..., à propos duquel ce dernier a donné deux versions différentes, sans raison particulière ;
- qu'en effet, il a déclaré qu'il avait recherché à la Poste une lettre recommandée avant de partir directement à son domicile de Strasbourg ;
- que, dans la seconde version, il indiquait vouloir revenir à son laboratoire en début d'après-midi pour y rechercher des documents avant de partir en week-end ;
- qu'il est enfin constant que l'explosion a eu lieu pendant son absence des lieux, et heureusement, pendant la pause de midi au cours de laquelle peu de personnes étaient présentes dans le bâtiment n° 5 affecté par l'explosion et en grande partie dévasté par elle ;
« que dans le cadre de la procédure une expertise judiciaire a été réalisée le 30 décembre 2006, suivie d'un rapport complémentaire en date du 20 juin 2008, dont les conclusions sont complétées par un rapport établi par A... de la société Air Liquide en date du 25 juillet 2006 ; qu'il résulte de l'ensemble de ces éléments techniques et de ceux récoltés sur les lieux mêmes de l'explosion qu'il est établi que M. X... a transporté lui-même dans son laboratoire une bouteille d'éthylène nécessaire à une expérience de polymérisation ;
- qu'il est toujours établi que cette bouteille a été maintenue en place par le prévenu pendant de nombreux jours, y compris en dehors de rares plages pendant lesquelles sa présence était nécessaire à la réalisation de l'expérience, dans un local confiné, sans aération et en présence indiscutablement de trois sources d'ignition et de décharges électrostatiques, à savoir une étuve en fonction avec déclenchement par thermostat électrique, un téléphone et un ordinateur, alors qu'une telle bouteille d'éthylène doit être obligatoirement conservée, en dehors des périodes très limitées pendant lesquelles elle est indispensable pour réaliser une manipulation, dans un casier aéré, situé à l'extérieur des bâtiments et à l'abri de toute source d'ignition ou de décharges électrostatiques ; que M. X..., vu sa formation scientifique, sa fonction et son ancienneté dans la branche, qu'il invoque d'ailleurs à hauteur de 40 années, ne pouvait ignorer l'existence de ces règles impératives qu'il a violées délibérément en continu pratiquement pendant deux semaines, si l'on excepte les périodes d'expérience proprement dites, au demeurant fort courtes » ;
- qu'il l'a fait également au cours de la période contemporaine de l'explosion puisqu'il résulte de ses propres déclarations qu'il voulait reprendre l'expérience " dans quelques jours ", vu ses résultats décevants, sans pour autant seulement envisager de déplacer la bouteille d'éthylène, pleine aux deux tiers lorsqu'il l'a introduite dans son laboratoire, pour l'entreposer dans un local extérieur aéré et dépourvu de toute source d'ignition ou de décharges électrostatiques ;
- que cette violation délibérée d'une obligation de prudence et de sécurité de la part du prévenu est encore aggravée par divers éléments dont l'existence est établie à la procédure ;
qu'en premier lieu qu'il ne peut être contesté que le prévenu a emprunté cette bouteille de gaz très inflammable et explosif sans aucune formalité administrative qui aurait pu permettre son suivi sur le plan de la sécurité, étant en outre observé que ce laxisme sur le plan de la sécurité a duré plusieurs semaines, avec maintien de cette bouteille dans le laboratoire du prévenu sans même qu'une date de retour dans son laboratoire d'origine, celui de chimie organique, n'ait même été envisagée ;
- que de même il ne peut être contesté par le prévenu que celui-ci avait conscience du risque extrêmement grave qu'il faisait ainsi courir à la multitude des usagers de l'Ecole de chimie, étudiants, enseignants, femmes de ménage... ; qu'en second lieu qu'il résulte des constatations objectives réalisées sur les lieux de l'explosion du 24 mars 2006 que la serrure du laboratoire personnel de M. X... a été retrouvée en position ouverte et que la bouteille d'éthylène dont le contenu a occasionné l'explosion, ce qui n'est contesté par personne, se trouvait sur place, vide, avec des traces de chauffage intense sur sa partie supérieure, et son robinet ouvert à 2 tours, ce qui a permis aux experts de calculer le débit de la fuite et sa durée approximative de 4 à 14 minutes ; que sur ces points que M. X... a été précisément mis en cause pour sa pratique d'ouverture " démesurée " des bouteilles de gaz dans son laboratoire au cours de sa carrière, étant rappelé que là aussi une règle de sécurité est appliquée par tous : à savoir qu'on ne doit procéder à l'ouverture du robinet de ces bouteilles que de 1/ 4 de tour, au maximum de 1/ 2 tour, règle que M. X... a négligé d'appliquer malgré divers rappels de ses collègues et collaborateurs dont les déclarations ont été recueillies au cours de la procédure ;
- qu'en cette matière également, M. X... ne pouvait pas ignorer les risques que son comportement occasionnait pour les tiers lors de la manipulation de gaz très inflammables ou explosifs ;
- qu'il a cependant délibérément choisi d'ignorer cette règle de sécurité impérative, et ce, à de multiples reprises, y compris le jour de l'explosion le 24 mars 2006 ;
- qu'en effet, il n'est pas inutile de rappeler que la bouteille d'éthylène en cause a été retrouvée ouverte à deux tours, soit 1, 5 tours de plus que le maximum, ce qui correspond exactement à sa pratique désastreuse telle que décrite précisément par les témoins B... C. et C... X. notamment ; qu'en troisième lieu qu'il faut également relever qu'aucun collier de serrage de type Serflex n'a été retrouvé sur les lieux de l'explosion, ce qui correspond exactement aux constatations opérées objectivement par les experts judiciaires sur le montage expérimental reconstitué par M. X... à la demande du CHSCT, aucun collier de serrage n'ayant été utilisé à cette occasion par ce dernier ;
- que sur ce point, ce n'est que tardivement que M. X... a fait référence au placement sur le montage expérimental réel de tels colliers, après plusieurs auditions par les enquêteurs ;
- qu'en particulier, il est incapable de préciser l'origine de ces éventuels colliers de serrage, variant dans ses explications sur ce point de façon incompréhensible et peu plausible ;
- qu'il s'agit là aussi d'un problème technique dont le prévenu ne pouvait ignorer l'importance capitale dans la manipulation d'un gaz dangereux, dont il n'avait pas un usage quotidien ;
qu'en quatrième lieu qu'il ne peut être contesté que le montage expérimental réel créé par M. X... présentait un caractère " hasardeux " selon les experts, et qu'il relevait d'un " bricolage " indigne d'un professionnel ayant 40 ans d'ancienneté à ses dires ;
- qu'en effet ce montage, réalisé avec des éléments de récupération, usagés et dépareillés, reliait notamment, et cela ne peut être contesté, au moyen de tuyaux flexibles des abouts de détendeurs de diamètre très différents, alors cependant qu'il existe des liaisons de ce type répondant à ces problèmes d'ordre technique, sans que le prévenu n'ait apporté au cours de la longue procédure suivie la moindre explication quant à ces " bricolages " et quant à ces réutilisations de matériels d'origine incertaine ;
qu'il ne peut être contesté dans ces circonstances que l'emmanchement des flexibles de diamètre inadapté sur des abouts de diamètres supérieurs a pour conséquences une très faible résistance à la pression du gaz, voire au poids propre du flexible, et ainsi de rendre inopérante la pose de colliers de serrage éventuels par la suite ;
- qu'il faut y rajouter l'usage d'une dérivation en " Y " et un robinet, de verre tous les deux, dont la fragilité est évidente pour tous ; que l'expertise judiciaire, non critiquée sur ce point reconnu par tous, a établi que l'explosion du 24 mars 2006 est due à une fuite d'éthylène consécutive au démanchement d'un flexible, utilisé dans le montage initial de l'about d'un des deux détendeurs utilisés par le prévenu ;
- qu'il s'évince de ces constatations que le prévenu, qui a reconnu un manque certain de rigueur dans sa pratique, a délibérément méprisé les règles élémentaires de prudence et de sécurité dans la manipulation d'un gaz dangereux, alors cependant qu'il disposait indiscutablement des connaissances nécessaires en la matière et alors même qu'il se trouvait dans un environnement quotidiennement fréquenté par de nombreuses personnes appartenant au milieu universitaire ; que l'enquête, l'information et les expertises réalisées à propos de l'explosion du 24 mars 2006 n'ont pas permis de donner la moindre consistance à l'hypothèse soutenue par le prévenu de l'intervention d'un tiers, malgré les investigations menées sur ce point ;
que par contre qu'il est établi par les éléments tirés de la procédure et des audiences que M. X... a bien commis des violations multiples et délibérées d'obligations de prudence et de sécurité imposées par les textes applicables à son activité, ces fautes caractérisées exposant de nombreux tiers présents dans les locaux universitaires à des risques d'une gravité exceptionnelle que le prévenu ne pouvait ignorer compte tenu de sa formation scientifique et de l'ancienneté importante qu'il met en avant lui-même ; que, dès lors, le jugement déféré sera confirmé quant à la culpabilité dans les termes des préventions retenues contre lui de façon détaillée ;

" 1°) alors que le fait d'avoir gardé la bouteille d'éthylène dans le laboratoire et de n'avoir pas déclaré son déplacement n'étant pas la cause de l'explosion selon les motifs de l'arrêt, en considérant que ces faits permettaient de caractériser les délits reprochés au prévenu, la cour d'appel a violé les articles 221-6, R. 625-2, R. 622-1 du code pénal ;

" 2°) alors que l'obligation de sécurité prévue par la loi ou le règlement doit être suffisamment précise au regard de son objet pour que son non-respect soit constitutif de la faute qualifiée que constitue la violation manifestement délibérée d'une obligation particulière de sécurité au sens de l'article 121-3, alinéa 4, du code pénal ; que la cour d'appel retient à l'encontre du prévenu la violation manifestement délibérée d'une obligation particulière de prudence et de sécurité prévue par la loi ou le règlement, en l'espèce l'article R. 12 de l'arrêté du 4 juin 1982 portant approbation des dispositions complétant le règlement de sécurité contre les risques d'incendie et de panique dans les établissements recevant du public (ERP types R et X) ; que cet article prévoit que « l'emploi de bouteilles individuelles de gaz ou de mélanges spéciaux est admis, pour un usage ponctuel (limité à la capacité nécessaire aux manipulations, expériences ou travaux en cours) et temporaire, sous réserve que celles-ci soient fixées sur un chariot mobile ou maintenues dans un râtelier » ; que, dès lors que cet article ne précise pas cette notion d'usage ponctuel et temporaire en fonction de la durée de l'expérience, cette disposition n'est pas assez précise pour être considérée comme prévoyant une obligation particulière de sécurité au sens de l'article 121-3, alinéa 4, du code pénal ;

" 3°) alors qu'en vertu de l'article 121-3, alinéa 4, du code pénal, la violation de l'obligation particulière de sécurité prévue par la loi ou le règlement doit être manifestement délibérée ; que dès lors que l'article R. 12 de l'arrêté précité ne précisait pas ce qu'il fallait entendre par la notion d'utilisation ponctuelle et temporaire pour une expérience comme celle du prévenu qu'il avait décidé de fractionner sur plusieurs jours, la cour d'appel qui n'a pas constaté en quoi la violation de cet arrêté était manifestement délibérée tandis que le prévenu pouvait considérer que, pendant toute la phase expérimentale, il agissait dans le cadre d'une utilisation ponctuelle et temporaire au sens de cet article R. 12, elle a méconnu l'article 121-3 du code pénal ;

" 4°) alors que, la contradiction de motifs équivaut à l'absence de motifs ; que la cour d'appel retient à l'encontre du prévenu une violation manifestement délibérée de l'article R 12 de l'arrêté du 4 juin 1982 portant approbation des dispositions complétant le règlement de sécurité contre les risques d'incendie et de panique dans les établissements recevant du public (ERP types R et X) pour avoir conservé une bouteille d'éthylène, tandis que cet article n'autoriserait l'utilisation de bouteilles dangereuses que le temps de l'expérience ; qu'en retenant la culpabilité du prévenu pour avoir utilisé cette bouteille d'éthylène le jour des faits, à supposer la septième branche du premier moyen de cassation rejetée, alors que la méconnaissance de l'article R. 12 suppose que cette bouteille ne soit pas en cours d'utilisation, la cour d'appel s'est prononcée par des motifs contradictoires ;

" 5°) alors que, en considérant que l'utilisation de la bouteille de gaz était intervenue sans aucune formalité administrative qui aurait pu permettre son suivi sur le plan de la sécurité, la cour d'appel qui ne précise pas le fondement d'une telle obligation et en quoi le prévenu était personnellement tenu d'en assurer la mise en oeuvre, tandis que les conclusions déposées pour lui remarquaient que personne dans le site universitaire n'était informé de cette obligation et qu'il appartenait à la direction de l'université ou de l'école de chimie d'en assurer la mise en oeuvre, ce qu'elles n'avaient pas fait, ce qui ne permettait pas de considérer que le prévenu avait lui-même commis une faute et qu'il ne pouvait ignorer le risque qu'il faisait ainsi courir à autrui, la cour d'appel a privé sa décision de base légale " ;

Les moyens étant réunis ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure qu'une explosion s'est produite le 24 mars 2006, à l'Ecole de chimie de Mulhouse, faisant un mort et plusieurs blessés ; que l'enquête a établi que le déversement d'éthylène s'échappant d'une bouteille, se trouvant dans le laboratoire de M. X... pour une expérience de polymérisation, est à l'origine du sinistre ; que les experts ont conclu que la fuite de ce gaz était consécutive au démanchement d'un flexible, utilisé dans le montage réalisé pour l'expérimentation et ont relevé une série d'imprudences, de négligences, de manquements à des obligations de sécurité ou de prudence imposées par la loi ou le règlement imputable à M. X..., qui a concouru à la réalisation du dommage ; qu'à l'issue de l'information, le juge d'instruction a renvoyé ce dernier devant le tribunal correctionnel sous la prévention d'homicide et de blessures involontaires ;

Attendu que, pour déclarer le prévenu coupable, le tribunal correctionnel retient à sa charge une série de négligences, en ayant établi un montage expérimental sans respecter les règles de l'art s'agissant du choix des flexibles et de leur fixation, en omettant de refermer la bouteille d'éthylène à l'issue de son utilisation, en l'entreposant dans un local non ventilé et présentant des sources d'ignition contrairement aux prescriptions du fabricant et en la conservant dans son laboratoire alors même que l'expérience nécessitant l'usage de l'éthylène était interrompue et ne devait pas reprendre avant plusieurs jours, et ce, en violation des dispositions de l'article R. 12 de l'arrêté du 4 juin 1982 modifié portant règlement de sécurité contre les risques d'incendie et de panique dans les établissements de type R ; que les juges du premier degré ajoutent que ces fautes sont directement à l'origine du dommage provoqué par l'explosion, M. X... ayant personnellement procédé à l'installation du montage, omis de refermer la bouteille d'éthylène et conservé cette bouteille dans des conditions contraires à la réglementation en vigueur ; que le prévenu a relevé appel de cette décision ;

Attendu que, pour confirmer le jugement sur la culpabilité, l'arrêt énonce que M. X... a bien commis des violations multiples et délibérées d'obligations de prudence et de sécurité imposées par les textes applicables à son activité, ces fautes caractérisées exposant de nombreux tiers présents dans les locaux universitaires à des risques d'une gravité exceptionnelle que le prévenu ne pouvait ignorer compte tenu de sa formation scientifique et de l'ancienneté importante qu'il met en avant lui-même ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations, d'où il résulte que le prévenu, qui n'a pas causé directement le dommage, mais qui a créé ou contribué à créer la situation qui a permis de le réaliser ou qui n'a pas pris les mesures permettant de l'éviter, a commis des fautes caractérisées exposant autrui à un risque d'une particulière gravité qu'il ne pouvait ignorer, l'arrêt n'encourt pas la censure ;

D'où il suit que les moyens ne sauraient être accueillis ;

Mais sur le moyen de cassation relevé d'office, pris de la violation des articles 132-3, 132-7, 221-6, 222-20, R. 625-3 et R. 622-1 du code pénal ;

Vu lesdits articles ;

Attendu qu'une seule peine doit être prononcée lorsque des délits et des contraventions sont compris dans la même poursuite et que les faits de la prévention procèdent d'une même action coupable ;

Attendu qu'après avoir déclaré coupable M. X... des infractions précitées, la cour d'appel l'a condamné à la peine de dix-huit mois d'emprisonnement avec sursis et 8 000 euros d'amende pour les délits d'homicide et blessures involontaires et à deux amendes de 750 et 50 euros pour les contraventions de blessures involontaires ;

Mais attendu qu'en prononçant ainsi, alors que les délits d'homicide et de blessures involontaires et les contraventions de blessures involontaires, qui procédaient d'une même action coupable, ne pouvaient être punis séparément, la cour d'appel a méconnu les textes susvisés et le principe ci-dessus rappelé ;

D'où il suit que la cassation est encourue de ce chef ; qu'elle aura lieu sans renvoi, la Cour de cassation étant en mesure d'appliquer directement la règle de droit et de mettre fin au litige, ainsi que le permet l'article L. 411-3 du code de l'organisation judiciaire ;

Par ces motifs :

CASSE et ANNULE, en ses seules dispositions relatives à la peine, l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Colmar, en date du 15 septembre 2011, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;

DIT que M. X... est condamné à la peine de dix-huit mois d'emprisonnement avec sursis et 8 000 euros d'amende pour l'ensemble des délits et contraventions d'homicide et blessures involontaires dont il a été déclaré coupable ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi ;

ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Colmar, sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ;

FIXE à 2 500 euros la somme que M. X... devra payer à l'Université de Haute-Alsace au titre de l'article 618-1 du code de procédure pénale ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Louvel président, Mme Mirguet conseiller rapporteur, M. Arnould conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : M. Bétron ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 11-87119
Date de la décision : 11/09/2012
Sens de l'arrêt : Cassation partielle sans renvoi
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Colmar, 15 septembre 2011


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 11 sep. 2012, pourvoi n°11-87119


Composition du Tribunal
Président : M. Louvel (président)
Avocat(s) : SCP Boré et Salve de Bruneton, SCP Lyon-Caen et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:11.87119
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