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12/07/2012 | FRANCE | N°11-24804

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 12 juillet 2012, 11-24804


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Poitiers, 17 juin 2011), que, le 12 mars 1997, M. et Mme X...ont donné à la société Carnot Immobilier un mandat de gestion concernant deux appartements ; que l'un de ceux-ci a été donné à bail le 7 novembre 2002 à M. Y..., qui y a installé son cabinet médical ; qu'ayant reçu un redressement fiscal au motif que l'immeuble ainsi loué était affecté à l'exploitation d'un cabinet médical depuis le mois de janvier 2003 bien que le bénéfice de " la loi Perissol ", po

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LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Poitiers, 17 juin 2011), que, le 12 mars 1997, M. et Mme X...ont donné à la société Carnot Immobilier un mandat de gestion concernant deux appartements ; que l'un de ceux-ci a été donné à bail le 7 novembre 2002 à M. Y..., qui y a installé son cabinet médical ; qu'ayant reçu un redressement fiscal au motif que l'immeuble ainsi loué était affecté à l'exploitation d'un cabinet médical depuis le mois de janvier 2003 bien que le bénéfice de " la loi Perissol ", pour lequel ils avaient opté, fût subordonné à une destination du bien à usage exclusif d'habitation, les époux X...ont assigné la société Carnot Immobilier et M. Y...en paiement de dommages-intérêts ; que la cour d'appel a rejeté leur demande ;

Sur le premier moyen, pris en ses deux branches, tel qu'il est reproduit en annexe :

Attendu que l'arrêt constate que la société Carnot Immobilier n'est pas intervenue comme intermédiaire pour la vente de l'appartement loué à M. Y...et qu'elle a été investie d'un mandat général de gestion ne comportant aucune mention particulière ni aucune instruction des mandants ; qu'ayant ainsi relevé, sans avoir à procéder à la recherche mentionnée par la deuxième branche, qui ne lui avait pas été demandée, que les exigences particulières imposées pour obtenir les avantages fiscaux dont la perte lui était imputée à faute par les époux X..., n'étaient pas entrées dans le champ contractuel du mandat, la cour d'appel a légalement justifié sa décision de ce chef ;

Et sur le second moyen, pris en ses deux branches, tel qu'il est reproduit en annexe :

Attendu que l'arrêt considère que la préoccupation fiscale des bailleurs n'est pas davantage entrée dans le champ contractuel de leurs relations avec M. Y...qu'elle ne l'était à l'égard de leur mandataire ; que la cour d'appel n'a pu qu'en déduire, sans être tenue d'effectuer la recherche énoncée par la seconde branche, qui ne lui était pas demandée, que le préjudice invoqué par les époux X...n'était pas prévisible au sens de l'article 1150 du code civil ; que le second moyen n'est fondé en aucun de ses griefs ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne les époux X...aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du douze juillet deux mille douze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Peignot, Garreau et Bauer-Violas, avocat aux Conseils, pour M. Roland X...et Mme Marie-Madeleine Z....

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Le moyen reproche à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir débouté Monsieur et Madame X...de l'ensemble de leurs demandes formées à l'encontre de la Société CARNOT IMMOBILIER,

AUX MOTIFS QUE
" si l'appartement loué à Monsieur Y...faisait partie d'un programme immobilier bénéficiant d'un dispositif de défiscalisation tel qu'il résulte des lois Périssol ou Méhaignerie, sources d'avantages fiscaux pour les propriétaires bailleurs, ces derniers n'étaient pas obligés d'y recourir, les abattements fiscaux prévus par la loi étant la contrepartie de contraintes concernant la durée minimale de location, le montant du loyer ou encore, comme en l'espèce, une restriction à la destination des lieux.

Qu'ainsi, les époux X..., propriétaires de l'appartement, étaient parfaitement libres de décider de ne pas en bénéficier.

Considérant que la société Carnot Immobilier n'est pas intervenue comme intermédiaire pour la vente de cet appartement, mais a signé avec les époux X..., le 12 mars 1997, un mandat général de gestion ne comportant aucune mention particulière ni aucune instruction des mandants ;

Qu'en particulier, le mandat n'imposait pas au mandataire de s'assurer que la location répondait aux exigences de la loi Périssol ;

Qu'il n'appartenait pas davantage à la société Carnot Immobilier de veiller à l'optimisation fiscale de la gestion locative dont elle était chargée, sa mission consistant, principalement, à rechercher un locataire sérieux et solvable, et à s'assurer du paiement régulier des loyers ;

Considérant que les époux X...n'ont d'ailleurs formulé aucune observation à l'occasion du précédent bail conclu avec Monsieur A..., parlementaire, lequel y a installé ses bureaux et sa permanence pendant plus de cinq ans, alors que le bail qui lui était consenti était, lui aussi, aux fins " d'habitation principale " ;

Considérant ainsi qu'en l'absence d'instruction précise de ses mandants de louer l'appartement à usage exclusif d'habitation afin de bénéficier des avantages de la loi Périssol, aucune faute ne peut être reprochée à la société Carnot Immobilier, ni aucune imprudence, contrairement à ce qu'a estimé le premier juge ;

Considérant que la société Carnot Immobilier sera donc mise hors de cause, et le jugement réformé en ce qu'il a déclaré la société Carnot Immobilier en partie responsable du préjudice des époux X...",

ALORS, D'UNE PART, QU'en tant qu'intermédiaire professionnel qui prête son concours à la rédaction d'un acte, après avoir été mandaté par l'une des parties, l'agent immobilier est tenu de s'assurer que se trouvent réunies toutes les conditions nécessaires à l'efficacité juridique de la convention, de sorte qu'en écartant la responsabilité de la Société CARNOT IMMOBILIER tenue en tant que mandataire des époux X...de s'assurer, ne serait-ce qu'en procédant au simple examen de l'attestation d'assurance remise par Monsieur Y...lors de la signature du bail dans laquelle la MATMUT déclarait le garantir en sa qualité de locataire d'un cabinet médical, qu'étaient réunies toutes les conditions nécessaires à l'efficacité juridique du contrat de bail à usage exclusif d'habitation principale, la cour d'appel a violé les articles 1992 et 1147 du code civil,

ALORS, D'AUTRE PART, QU'il incombe à l'agent immobilier ayant conclu un mandat général de gestion d'un appartement de prouver qu'il s'est acquitté de son obligation de conseil lui imposant de se renseigner sur les besoins de ses mandants afin d'être en mesure de les informer quant à l'adéquation du profil du locataire au projet prévu par les bailleurs, de sorte qu'en écartant la responsabilité de la Société CARNOT IMMOBILIER sans rechercher si, en tant que mandataire des époux X..., elle établissait s'être préalablement renseignée sur les besoins de ses mandants, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1147 et 1192 du code civil.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Le moyen reproche à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir débouté Monsieur et Madame X...de l'ensemble de leurs demandes formées à l'encontre de Monsieur Claude Y...,

AUX MOTIFS QU'
" il est constant que Monsieur Claude Y...a signé un bail d'habitation alors qu'il a aussitôt installé dans les lieux son cabinet médical pour y exercer sa profession de médecin.

Que l'appartement était auparavant loué à Monsieur A..., député, pour y installer sa permanence parlementaire, sans que cette utilisation professionnelle des lieux n'ait attiré l'attention de qui que ce soit.

Considérant en premier lieu que les époux X...ne versent aux débats, à propos du contrôle fiscal dont ils se plaignent, aucune des pièces dont la communication leur a été demandée par Monsieur Y...à trois reprises, les 20 et 22 décembre 2010 et le 26 janvier 2011 ;

Qu'en tout état de cause, il est manifeste que le manquement de Monsieur Y...à la destination des lieux n'est pas la seule cause de ce redressement fiscal, les époux X...étant propriétaires, outre des deux appartements du Clos ... à Poitiers, d'autres biens immobiliers à usage locatif à travers diverses SCI, dont la SCI Gloria, la déclaration des revenus de cette SCI n'ayant été que partielle au titre de l'année 2003 ;

Que par ailleurs, s'agissant de l'année 2004, il a également été reproché aux époux X...de ne pas avoir déclaré la somme de 51. 772 € correspondant à des pensions et retraites, ainsi qu'une rente versée par la société La Mondiale, soit une omission portant sur 57. 385 € ;

Qu'ainsi le redressement opéré à l'encontre des époux X...n'a pas pour seule origine l'affectation à des fins professionnelles de l'appartement loué à Monsieur Y..., si bien que le préjudice dont il est demandé réparation, sans autre précision ni ventilation entre les différentes fraudes ou omissions fiscales commises par les époux X..., n'est pas en relation causale directe avec les manquements contractuels reprochés à Monsieur Y...;

Que les explications et dénégations formulées tardivement par les époux X...dans leurs dernières conclusions du 6 avril 2011 ne sont pas de nature à remettre en cause ce point ;

Considérant par ailleurs, et ainsi qu'il a déjà été dit, que les époux X...n'ont pas donné instruction à la société Carnot Immobilier de veiller à ce que le bien donné en gestion soit exclusivement loué à usage d'habitation afin de bénéficier des avantages fiscaux issus d'un loi de défiscalisation ;

Que de même, dans leurs relations avec Monsieur Y..., cette préoccupation fiscale n'est pas davantage entrée dans le champ contractuel si bien que le préjudice dont il est demandé réparation n'était pas prévisible au moment de la signature du bail, le 7 novembre 2002 ;

Considérant que le préjudice des époux X...étant ni direct ni prévisible au sens de l'article 1150 du code civil, leur demande en dommages-intérêts formée contre Monsieur Y...sera donc rejetée, contrairement à ce qu'a décidé le premier jugement dont le jugement sera infirmé sur ce point également ",

ALORS, D'UNE PART, QUE pour que la responsabilité du débiteur soit engagée, il est indifférent que sa faute ait été la cause exclusive du dommage subi par le créancier, pourvu qu'elle en soit une cause directe et nécessaire, de sorte qu'en jugeant, après avoir relevé que le redressement fiscal opéré à l'encontre des époux X...n'avait pas pour seule origine l'affectation à des fins professionnelles de l'appartement à Monsieur Y..., que le préjudice invoqué par les époux X...n'était pas en relation causale directe avec les manquements contractuels constatés à l'encontre de Monsieur Y...ayant signé un bail d'habitation tout en installant aussitôt dans les lieux son cabinet médical pour y exercer sa profession de médecin, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations dont il s'évinçait que le manquement contractuel commis par Monsieur Y...était une des causes du dommage invoqué par les époux X..., et ainsi a violé les articles 1147 et 1728 du code civil,

ALORS, D'AUTRE PART, QUE si le débiteur a commis un dol ayant provoqué l'inexécution, il est tenu des dommages et intérêts imprévus, la faute dolosive étant caractérisée lorsque, de propos délibéré, le débiteur se refuse à exécuter ses obligations contractuelles, de sorte qu'en jugeant que Monsieur Claude Y...n'était pas tenu du préjudice des époux X...découlant du redressement fiscal ayant pour origine l'affectation du logement à des fins professionnelles, compte tenu de son caractère imprévisible lors de la conclusion du bail, sans rechercher si, comme le faisaient valoir les époux X...dans leurs écritures d'appel (conclusions notifiées le 6 avril 2011, page 7, § 8), ce n'était pas en parfaite connaissance de cause et de façon délibérée, et donc par son dol, que le locataire avait manqué à son obligation de respecter la destination des lieux à usage exclusivement locatif, en installant, dès la conclusion du bail, son cabinet médical dans le lieux loués pour un usage exclusif d'habitation, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1150 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 11-24804
Date de la décision : 12/07/2012
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Poitiers, 17 juin 2011


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 12 jui. 2012, pourvoi n°11-24804


Composition du Tribunal
Président : M. Charruault (président)
Avocat(s) : SCP Coutard et Munier-Apaire, SCP Peignot, Garreau et Bauer-Violas, SCP Potier de La Varde et Buk-Lament

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:11.24804
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