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04/07/2012 | FRANCE | N°11-17469

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 04 juillet 2012, 11-17469


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Chambéry, 10 mars 2011), que Mme X... et M. Y... ont été respectivement engagés le 3 avril 2006 et le 22 août 2007 par la société Guy Dauphin environnement, la première en qualité de "réceptionnaire pont bascule", le second en qualité de conducteur d'engins, exerçant en dernier lieu les fonctions de chef de chantier ; qu'à la suite de la découverte d'anomalies relatives au paiement des factures mettant en cause ces deux salariés, la société a, d'

une part, déposé à leur encontre une plainte qui a été classée sans suite et...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Chambéry, 10 mars 2011), que Mme X... et M. Y... ont été respectivement engagés le 3 avril 2006 et le 22 août 2007 par la société Guy Dauphin environnement, la première en qualité de "réceptionnaire pont bascule", le second en qualité de conducteur d'engins, exerçant en dernier lieu les fonctions de chef de chantier ; qu'à la suite de la découverte d'anomalies relatives au paiement des factures mettant en cause ces deux salariés, la société a, d'une part, déposé à leur encontre une plainte qui a été classée sans suite et, d'autre part, procédé à leur licenciement, le 22 juin 2009, pour faute grave ; que contestant le bien-fondé de ces licenciements, les deux salariés ont séparément saisi le conseil de prud'hommes et demandé paiement de diverses indemnités ;
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de faire droit à ces demandes alors, selon le moyen :
1°/ que le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'il ne peut fonder sa décision sur des moyens qu'il a relevés d'office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations ; qu'il résulte des mentions de l'arrêt que, dans leurs conclusions, les salariés se bornaient à soutenir que les faits allégués pour fonder leur licenciement pour faute grave n'étaient pas établis dans la mesure où les factures litigieuses correspondaient à de livraisons de métaux non fictives mais réelles effectuées par M. Y..., pour son compte, avec l'assentiment du directeur du site ; qu'ayant ainsi soulevé d'office le moyen pris de ce que dans la mesure où il ne figurait pas dans la lettre de licenciement, le grief tiré de la réalisation d'opérations fictives ne pouvait être utilement invoqué par l'employeur au contentieux, sans avoir préalablement invité les parties à présenter leurs observations, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 16 du code de procédure civile ;
2°/ que le juge a l'obligation d'examiner l'ensemble des griefs invoqués dans la lettre de licenciement, qui fixe les limites du litige, et doit restituer aux faits qui y sont énoncés leur exacte qualification, sans s'arrêter à celle que l'employeur leur a donnée ; qu'il ressort des constatations de l'arrêt attaqué que, dans les lettres de licenciement, l'employeur avait fait état de la participation active des salariés à des opérations fictives ayant donné lieu, au travers de fausses factures, à des décaissements en espèces contrepartie ; qu'en considérant que ce grief, dont elle a estimé qu'il était fondé, ne pouvait pas être utilement invoqué devant elle dans la mesure où, dans la lettre de licenciement, le seul grief que l'employeur ait qualifié de faute grave consistait dans la réalisation d'opérations avec la société pour le propre compte des salariés en méconnaissance des consignes en vigueur, la cour d'appel, qui a méconnu son office, a violé les articles L. 1232-6 du code du travail et 12 du code de procédure civile ;
Mais attendu qu'ayant exactement rappelé que la lettre de licenciement fixe les limites du litige et que c'est au regard des motifs énoncés dans la lettre que s'apprécie le bien-fondé du licenciement, la cour d'appel qui a relevé que le licenciement des salariés était uniquement motivé par la méconnaissance des consignes ou directives données par la société n'a pas méconnu le principe de contradiction ni méconnu son office en appréciant le bien-fondé du licenciement en considération de ce seul motif ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Guy Dauphin environnement aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quatre juillet deux mille douze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par Me Haas, avocat aux Conseils, pour la société Guy Dauphin environnement
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué D'AVOIR dit que les licenciements de Mme X... et de M. Y... étaient sans cause réelle et sérieuse et, en conséquence, D'AVOIR condamné la société Guy Dauphin Environnement à leur payer diverses sommes à titre de rappels de salaire, d'indemnités de rupture et de dommages-intérêts ;
AUX MOTIFS QUE la lettre de licenciement qui, en vertu de l'article L. 1232-6 du code du travail, doit comporter l'énoncé du ou des motifs invoqués par l'employeur, fixe définitivement les limites du licenciement de sorte que c'est à la lumière de ces principes que doit s'apprécier le caractère réel et sérieux de la cause fondant le licenciement ; que la société Guy Dauphin Environnement, après avoir rappelé dans chaque lettre de licenciement adressée aux deux salariés en cause les circonstances dans lesquelles elle a mis en lumière et vérifié l'existence d'encaissements en espèces au profit de Stéphane Y..., effectués sous couvert de factures établies, avec la complicité de Céline X..., au nom d'un membre de sa famille ou de son collègue, Nicolas A..., en dehors de toute livraison de matériaux effectuée par les intéressés, entend fonder leur licenciement pour faute grave, non pas sur les faits de faux, usage de faux, escroqueries et de complicité d'escroquerie qu'elle décrit et dénonce, mais sur le fait pour Stéphane Y... d'avoir, avec la participation de Céline X..., fait personnellement du commerce avec l'entreprise en violation des consignes en vigueur ; qu'en effet, les lettres de licenciement énoncent respectivement : - à l'égard de Stéphane Y... : «ces faits constituent des manquements caractérisés à toutes nos règles d'éthique dans la mesure où vous avez irrégulièrement introduit des métaux pour en faire commerce avec la société en utilisant l'identité d'un membre de votre famille et d'un de vos collègues de travail » ; - à l'égard de Céline X... : «ces faits constituent de graves anomalies en ce que vous avez participé à la violation des consignes en vigueur dans notre entreprise visant à interdire au personnel de faire commerce avec notre société. Ces règlements ont été effectués de surcroît dans la limite de montants visant à ce que notre société ne puisse le constater » ; que ne justifiant pas avoir transmis à ses salariés des directives leur faisant interdiction de réaliser des opérations avec elle pour leur propre compte, l'infraction à ces consignes qu'elle qualifie de faute grave constituant le motif du licenciement, non seulement n'est pas démontrée, mais repose sur des allégations en totale contradiction avec les éléments de fait versés aux débats et démontrant la commission d'escroqueries au moyen de fausses factures, c'est-à-dire la réalisation d'opérations radicalement fictives ; qu'il s'ensuit que la faute grave alléguée dans la lettre de licenciement n'étant pas prouvée, et le juge ne disposant pas du pouvoir de la requalifier ni de retenir un autre motif que celui notifié au salarié dans ladite lettre, les licenciements disciplinaires prononcés sont dépourvus de cause réelle et sérieuse ;
ALORS, 1°), QUE le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'il ne peut fonder sa décision sur des moyens qu'il a relevés d'office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations ; qu'il résulte des mentions de l'arrêt que, dans leurs conclusions, les salariés se bornaient à soutenir que les faits allégués pour fonder leur licenciement pour faute grave n'étaient pas établis dans la mesure où les factures litigieuses correspondaient à de livraisons de métaux non fictives mais réelles effectuées par M. Y..., pour son compte, avec l'assentiment du directeur du site ; qu'ayant ainsi soulevé d'office le moyen pris de ce que dans la mesure où il ne figurait pas dans la lettre de licenciement, le grief tiré de la réalisation d'opérations fictives ne pouvait être utilement invoqué par l'employeur au contentieux, sans avoir préalablement invité les parties à présenter leurs observations, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 16 du code de procédure civile ;
ALORS, 2°), QUE le juge a l'obligation d'examiner l'ensemble des griefs invoqués dans la lettre de licenciement, qui fixe les limites du litige, et doit restituer aux faits qui y sont énoncés leur exacte qualification, sans s'arrêter à celle que l'employeur leur a donnée ; qu'il ressort des constatations de l'arrêt attaqué que, dans les lettres de licenciement, l'employeur avait fait état de la participation active des salariés à des opérations fictives ayant donné lieu, au travers de fausses factures, à des décaissements en espèces contrepartie ; qu'en considérant que ce grief, dont elle a estimé qu'il était fondé, ne pouvait pas être utilement invoqué devant elle dans la mesure où, dans la lettre de licenciement, le seul grief que l'employeur ait qualifié de faute grave consistait dans la réalisation d'opérations avec la société pour le propre compte des salariés en méconnaissance des consignes en vigueur, la cour d'appel, qui a méconnu son office, a violé les articles L. 1232-6 du code du travail et 12 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 11-17469
Date de la décision : 04/07/2012
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Chambéry, 10 mars 2011


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 04 jui. 2012, pourvoi n°11-17469


Composition du Tribunal
Président : M. Frouin (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Haas

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:11.17469
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