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04/07/2012 | FRANCE | N°11-13235

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 04 juillet 2012, 11-13235


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Vu l'article L. 1233-3 du code du travail et l'accord d'entreprise relatif au départ anticipé de fin de carrière du 18 juillet 2007 ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société le Crédit lyonnais a mis en place en 2007 un projet de réduction des effectifs par voie de départs volontaires anticipés, et, dans le cadre d'un accord collectif du 18 juillet 2007, elle a offert la possibilité aux salariés, sous certaines conditions d'ancienneté, d'anticiper le moment de leur cessati

on d'activité tout en bénéficiant d'un revenu de remplacement jusqu'à la l...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Vu l'article L. 1233-3 du code du travail et l'accord d'entreprise relatif au départ anticipé de fin de carrière du 18 juillet 2007 ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société le Crédit lyonnais a mis en place en 2007 un projet de réduction des effectifs par voie de départs volontaires anticipés, et, dans le cadre d'un accord collectif du 18 juillet 2007, elle a offert la possibilité aux salariés, sous certaines conditions d'ancienneté, d'anticiper le moment de leur cessation d'activité tout en bénéficiant d'un revenu de remplacement jusqu'à la liquidation de leur pension de retraite ; que les salariés devaient percevoir, outre une allocation mensuelle représentant 65 % de leur salaire brut antérieur jusqu'à la liquidation de leur retraite, une indemnité de départ fixée par référence au mode de calcul de l'indemnité de mise à la retraite en vigueur dans l'entreprise, dont le montant était arrêté à 1/10 ème de mensualité par année d'ancienneté et 1/15 ème de mensualité par année d'ancienneté au-delà de 10 ans ; que Mmes X..., Y... et Z... et M. A... (les salariés) ont demandé à bénéficier de ce dispositif et que leur contrat a été rompu d'un commun accord par la signature de conventions d'adhésion au dispositif entre juin et octobre 2009 ;
Attendu que pour condamner la société le Crédit lyonnais à payer aux salariés une indemnité de départ équivalente à l'indemnité légale de licenciement telle que prévue à l'article L. 1234-9 du code du travail applicable à la date de la rupture des contrats, l'arrêt retient que les dispositions des articles L. 321-1 et suivants du code du travail sont applicables à toute rupture des contrats de travail reposant sur un motif économique, peu important que les emplois supprimés le soient par voie de départ volontaire, que le texte de l'accord consacré à l'indemnité de départ évoque le montant et les modalités de son calcul qui sont celles applicables à l'indemnité de mise à la retraite à 65 ans, qui ont repris les modalités de l'article L. 1237-7 du code du travail qui ouvre droit à une indemnité au moins égale à l'indemnité de licenciement prévue à l'article L. 1234-9 et que, dès lors, elle était soumise à l'évolution légale de cette dernière et bénéficiait de la modification de son calcul ;
Qu'en statuant ainsi, alors que l'indemnité de départ fixée par l'accord collectif du 18 juillet 2007, à l'intention des salariés consentant à une résiliation amiable de leur contrat de travail, ne constituait pas une indemnité de licenciement et ne relevait pas du régime applicable à celle-ci, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Et vu l'article 627 du code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 24 février 2011, entre les parties, par la cour d'appel d'Orléans ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
Déboute Mmes X..., Y... et Z... et M. A... de leurs demandes ;
Les condamne aux dépens de cassation et à ceux afférents aux instances devant les juges du fond ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quatre juillet deux mille douze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Barthélemy, Matuchansky et Vexliard, avocat aux Conseils, pour la société Crédit Lyonnais.
Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR condamné le Crédit Lyonnais, employeur, à verser à monsieur Gérard A... et mesdames Joëlle X..., Marie-France Y... et Françoise Z..., salariés, respectivement les sommes de 13.504 €, 15.941 €, 16.294 € et 14.600 € à titre d'indemnité de départ, et ordonné la remise sous astreinte à chaque salarié des bulletins de paie afférents aux créances salariales ainsi arrêtées, outre un certificat de travail et une attestation de Pôle Emploi ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE l'accord du 18 juillet 2007 s'intitule « accord d'entreprise relatif au départ anticipé de fin de carrière » ; que le préambule mentionne que « les parties signataires conviennent d'offrir la possibilité à l'ensemble des salariés âgés d'au moins 57 ans au 1er janvier 2008 et au plus tard le 30 juin 2010, d'anticiper le moment de leur cessation d'activité professionnelle salariée tout en bénéficiant d'un revenu de remplacement jusqu'au moment où ils pourront liquider leur pension de retraite. Ce dispositif ouvert sous certaines conditions définies dans le présent accord doit succéder à partir du 1er janvier 2008, à la préretraite d'entreprise en application de l'accord du 12 décembre 2005 non mis en cause et qui fait partie intégrante du plan de sauvegarde de l'emploi en vigueur jusqu'au 31 décembre 2007… » ; que l'article 5-1 intitulé « indemnité de départ » rappelle que « ce dispositif de départ anticipé de fin de carrière fait partie du plan de sauvegarde de l'emploi présenté aux instances représentatives du personnel dans le cadre de la procédure de consultation sur les suppressions d'emplois envisagées, conformément aux dispositions des articles L. 321-1 et suivants du code du travail. De manière à compenser le préjudice lié à la cessation anticipée d'activité, l'adhésion individuelle du salarié à ce dispositif donne lieu au versement d'une indemnité de départ, qui intervient au moment de la rupture du contrat de travail. Son montant et ses modalités de calcul sont celles applicables à l'indemnité de mise à la retraite à 65 ans, en vigueur au sein de LCL. En application des règles actuellement en vigueur, elle représentera donc 1/10ème de mensualité par année d'ancienneté + 1/15ème de mensualité par année d'ancienneté au-delà de 10 ans. Elle sera calculée sur la base de l'ancienneté acquise au moment de la rupture du contrat de travail augmentée de la durée de portage dans les limites prévues à l'article 1 du présent accord. L'indemnité de départ est soumise aux règles sociales et fiscales en vigueur au moment de son versement » ; qu'il se déduit de cet accord d'entreprise plusieurs conséquences ;

a) Le cadre général juridique : que tant le préambule que la première phrase du texte consacrée à l'indemnité de départ évoquent le plan de sauvegarde de l'emploi, qui est replacé dans le cadre des dispositions des articles L. 321-1 et suivants du code du travail, et qui concernait, en 2007, le licenciement économique, avant la recodification ; qu'il s'ensuit que ces départs volontaires sont soumis également aux dispositions de l'article L. 321-1 du code du travail, devenu l'article L. 1233-3, qui sont d'ordre public ; que dans cet esprit, la chambre sociale de la Cour de cassation a précisé, dans un arrêt du 4 avril 2006, que les dispositions des articles L. 321-1 et suivants du code du travail étaient applicables à toute rupture des contrats de travail reposant sur un motif économique, peu important que les emplois supprimés le soient par voie de départ volontaire (n°04-48.055) ;
b) L'analyse du texte même : que le texte consacré à l'indemnité de départ évoque le montant et les modalités de calcul de celle-ci qui sont celles applicables à l'indemnité de mise à la retraite à 65 ans, qui ont repris les modalités de l'article L. 1237-7 du code du travail, qui dispose que la mise à la retraite d'un salarié lui ouvre droit à une indemnité de mise à la retraite au moins égale à l'indemnité de licenciement prévue à l'article L. 1234-9 ; que ce texte énonce également « qu'en application des règles actuellement en vigueur, elle représentera donc 1/10ème de mensualité par année d'ancienneté et 1/15ème de mensualité par année d'ancienneté au-delà de 10 ans » ; que c'est souligner que les partenaires sociaux n'ont pas voulu figer ces calculs, en insérant l'adverbe « actuellement » alors qu'il est précisé, dans la dernière phrase, que l'indemnité de départ est soumise aux règles sociales et fiscales en vigueur au moment de son versement ; qu'il en résulte que les règles de calcul pour l'indemnité de départ étaient calquées, lors de sa conclusion, le 18 juillet 2007, sur celle de l'indemnité légale de licenciement et que les partenaires sociaux ont entendu la soumettre à l'évolution des règles sociales, de manière très explicite ; que depuis le 20 juillet 2008, l'indemnité légale de minimum ne peut être inférieure à une somme calculée par année de service dans l'entreprise, soit un cinquième de mois de salaire par année d'ancienneté jusqu'à 10 ans, et deux 15e de mois par année, au-delà de 10 ans ; que dès lors qu'en pratique, l'indemnité de départ était fondée sur l'indemnité légale de licenciement et qu'elle était soumise aux règles sociales, c'est-à-dire à l'évolution légale de celle-ci, elle ne pouvait se référer seulement au calcul prévu dans l'accord du 18 juillet 2007, mais encore devait se fonder aussi sur les dispositions de l'article L. 1237-7 du code du travail et L. 1234-9, qui ont doublé son mode de calcul ; que dans ces conditions l'analyse des premiers juges et leurs calculs seront confirmés, comme parfaitement fondés, les moyens opposés par le Crédit Lyonnais devant être rejetés comme inopérants, en l'espèce ; qu'il y a lieu d'ordonner la remise à chaque salarié des bulletins de paie afférents aux créances salariales arrêtées aujourd'hui ainsi qu'un certificat de travail et une attestation de Pôle Emploi conformes à cet arrêt, sous astreinte de 30 € par pièce et par jour de retard, à défaut d'exécution dans un délai de 30 jours après la notification de cet arrêt, la cour se réservant de liquider cette astreinte ; qu'enfin, la banque devra régler, de manière supplémentaire à chaque salarié, une somme arbitrée à 600 € pour les frais exposés en appel, en plus de la somme de 500 € allouée en première instance à chacun (arrêt, pp. 5-7) ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE l'accord d'entreprise relatif au départ anticipé de fin de carrière du 18 juillet 2007, entre la SA LCL et les partenaires sociaux détermine que ce dispositif doit succéder à partir du 1er janvier 2008, à la préretraite d'entreprise en application de l'accord du 12 décembre 2005 non mis en cause et qui fait partie intégrante du plan de sauvegarde de l'emploi en vigueur jusqu'au 31 décembre 2007 ; que l'article 5 du présent accord précise que du fait de la rupture du contrat de travail dans le cadre du départ anticipé de fin de carrière à partir de 2008, le salarié bénéficiera du dispositif financier constitué d'une part d'une indemnité de départ et d'autre part d'une allocation mensuelle versée sous forme d'une rente ; qu'en l'espèce, monsieur A... et autres ont bénéficié de ces dispositions basées sur l'accord sus-cité ; que le 31 juillet 2009, monsieur A... perçoit son indemnité de départ dans le cadre du départ anticipé de fin de carrière ; que le 01 novembre 2009, madame X... ; que le 31 octobre 2009, madame Y... et le 31 juillet 2009, madame Z... ; que les modalités de calcul représentent 1/10ème de mensualité par année d'ancienneté au-delà de 10 ans ; que cependant le montant de l'indemnité de mise à la retraite dû au salarié est déterminé par les dispositions conventionnelles et légales en vigueur au jour de la rupture du contrat de travail résultant de la mise à la retraite, peu important que celle-ci ait été précédée d'un accord entre l'employeur et le salarié organisant la suspension du contrat de travail et ouvrant droit à des avantages particuliers (Cass. Soc. 30 septembre 2009) ; que dans le cas d'espèce, l'article R. 1234-2 du code du travail dispose que les modalités de calcul sont de 2/15ème par année au-delà de 10 ans d'ancienneté, selon le décret du 18 juillet 2008 ; que cependant selon l'article L. 2251-1 du code du travail dispose qu'un accord ou une convention peut comporter des stipulations plus favorables aux salariés que les dispositions légales en vigueur ; qu'ils ne peuvent déroger aux dispositions qui revêtent un caractère d'ordre public ; que les dispositions d'ordre public sont immédiatement applicables ; qu'en l'espèce, l'accord DAFC a été signé avec les partenaires sociaux le 18 juillet 2007, avant les nouvelles dispositions qui établissent un mode de calcul plus favorable pour l'indemnité de licenciement qui s'applique pour les départs en retraite ; que les salariés ont quitté l'entreprise de juillet à novembre 2009 ; que les dispositions de la loi du 25 juin 2008, plus favorables que l'accord signé au sein de l'entreprise, doivent s'appliquer ; que la société LCL ne peut argumenter qu'il s'agit d'une rupture d'un commun accord, puisqu'elle-même s'appuie dans l'accord signé du 18 juillet 2007 sur les dispositions de l'article L. 321-1 (ancien) et suivants du code du travail, nouveau L. 1233-2 et suivants du code du travail ; qu'il convient de rappeler qu'une opération de réduction d'effectifs réalisée au moyen de départs volontaires est soumise aux dispositions des articles L. 1233-2 et suivants et non à l'article L. 1237-11 du code du travail ; que dans le cas d'espèce, le taux de l'indemnité de licenciement doit trouver son application dans l'article L. 1234-9 et de l'article R. 1234-2 du code du travail puisque la loi du 25 juin 2008 a abrogé la différence de calcul pour une rupture à titre économique ou à titre personnel ; qu'il convient de rappeler que l'employeur est garant dans l'entreprise du respect de la loi, peu important que des accords soient signés avec des partenaires sociaux, cela ne l'exonère pas de cette obligation, qui est un principe fondamental du droit du travail ; qu'en conséquence, le conseil fait droit à la demande de monsieur A... et autres dans le principe et le quantum et condamne la SA LCL à verser à – monsieur A... : 13.504 euros d'indemnité de départ, - madame X... : 15.941 euros d'indemnité de départ, - madame Y... : 16.294 euros d'indemnité de départ, - madame Z... : 14.600 euros d'indemnité de départ (jugement, pp.5-6) ;
ALORS, EN PREMIER LIEU, QUE si l'employeur qui envisage de supprimer des emplois pour motif économique est tenu de respecter les dispositions d'ordre public des articles L. 1233-2 et suivants du code du travail, peu important que les emplois ne soient supprimés que par la voie de départs volontaires, cette obligation ne concerne toutefois que la procédure de licenciement économique et n'a pas pour effet de transformer la nature de la rupture du contrat qui, s'agissant d'une rupture d'un commun accord, conserve son régime propre ; qu'en retenant dès lors, par motifs propres et adoptés, que le départ volontaire des salariés ayant adhéré au dispositif DAFC ne pouvait s'analyser en une rupture d'un commun accord et était soumis aux dispositions de l'article L. 1233-3 du code du travail, pour en déduire que l'indemnité conventionnelle de départ était fondée sur l'indemnité légale de licenciement et qu'elle était tributaire de l'évolution légale de celle-ci, la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil ensemble, par fausse application, les articles L. 1233-2 et suivants, L. 1234-9 et L. 1237-7 du code du travail ;
ALORS, EN SECOND LIEU, QUE l'accord d'entreprise du 18 juillet 2007 prévoyait le versement d'une allocation de départ anticipé dont le montant et les modalités de calcul étaient « celles applicables à l'indemnité de mise à la retraite à 65 ans, en vigueur au sein de LCL », et il précisait qu'« en application des règles actuellement en vigueur, (l'indemnité de départ) représentera donc 1/10ème de mensualité par année d'ancienneté + 1/15ème de mensualité par année d'ancienneté au-delà de 10 ans » ; que, selon les termes de l'accord collectif, l'indemnité de départ étant ainsi fixée par référence au mode de calcul de l'indemnité de mise à la retraite en vigueur à la date de signature de l'accord, et expressément arrêtée à 1/10ème de mensualité par année d'ancienneté et 1/15ème de mensualité par année d'ancienneté au-delà de 10 ans, la cour d'appel, qui a néanmoins jugé que l'indemnité conventionnelle de départ était fondée sur l'indemnité légale de licenciement et qu'elle était tributaire de l'évolution légale de celle-ci, a violé l'article 1134 du code civil.


Sens de l'arrêt : Cassation sans renvoi
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Orléans, 24 février 2011


Publications
Proposition de citation: Cass. Soc., 04 jui. 2012, pourvoi n°11-13235

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Composition du Tribunal
Président : M. Lacabarats (président)
Avocat(s) : SCP Barthélemy, Matuchansky et Vexliard, SCP Masse-Dessen et Thouvenin

Origine de la décision
Formation : Chambre sociale
Date de la décision : 04/07/2012
Date de l'import : 15/09/2022

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 11-13235
Numéro NOR : JURITEXT000026160674 ?
Numéro d'affaire : 11-13235
Numéro de décision : 51201672
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.cassation;arret;2012-07-04;11.13235 ?
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