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04/07/2012 | FRANCE | N°11-13199

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 04 juillet 2012, 11-13199


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 6 janvier 2011), que Mme X..., engagée le1er juillet 1992, par la société Otto Bock, en qualité de facturière, a été licenciée, le 18 octobre 2006 ; qu'elle a saisi la juridiction prud'homale pour contester ce licenciement et demander le paiement de diverses sommes ;
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de le condamner au paiement d'une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, alors, selon le moyen :
1°/ que d

ans ses dernières conclusions d'appel, reprises oralement à l'audience, la sala...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 6 janvier 2011), que Mme X..., engagée le1er juillet 1992, par la société Otto Bock, en qualité de facturière, a été licenciée, le 18 octobre 2006 ; qu'elle a saisi la juridiction prud'homale pour contester ce licenciement et demander le paiement de diverses sommes ;
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de le condamner au paiement d'une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, alors, selon le moyen :
1°/ que dans ses dernières conclusions d'appel, reprises oralement à l'audience, la salariée se bornait à faire valoir la prescription de deux mois de l'article L. 1332-4 et non pas la prescription triennale de l'article L. 1332-5 du code du travail ; qu'en énonçant que « Mme X... est fondée à invoquer la prescription des faits remontant à plus de trois ans, à savoir une lettre d'un client du 14 octobre 1996, les plaintes d'un client du 12 mai 1999, les erreurs constatées en avril 2004 par son supérieur », lors même que la salariée n'invoquait pas cette prescription triennale, la cour d'appel a modifié l'objet du litige dont elle était saisie et a ainsi violé l'article 4 du code de procédure civile ;
2°/ que la prescription triennale de l'article L. 1332-5 du code du travail ne s'applique qu'aux faits qui ont été frappés de sanction en leur temps ; qu'en déclarant prescrites les erreurs de la salariée énoncées dans une lettre d'un client le 14 octobre 1996, résultant des plaintes d'un client du 12 mai 1999 et constatées en avril 2004 par son supérieur hiérarchique en ce qu'elles remonteraient à plus de trois ans, alors qu'il n'était pas contesté que ces faits n'avaient pas été frappés de sanction en leur temps, la cour d'appel a violé l'article L. 1332-5 du code du travail ;
3°/ que, subsidiairement, aucun fait connu par l'employeur plus de trois ans à compter de l'engagement des poursuites disciplinaires ne peut être invoqué à l'appui d'une nouvelle sanction ; que cette prescription est déterminée à compter de l'engagement de la procédure de licenciement ; que la cour d'appel a relevé que des erreurs de la salariée avait été constatées en avril 2004 et que la procédure de licenciement avait été engagée le 9 octobre 2006 ; qu'il résultait donc de ces énonciations que ces faits s'étaient déroulés moins de trois ans avant l'engagement de la procédure de licenciement ; qu'en jugeant cependant que la salariée était fondée à invoquer la prescription de ces faits en ce qu'ils remonteraient à plus de trois ans, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé l'article L. 1332-5 du code du travail ;
4°/ que l'article L. 1332-4 du code du travail ne s'oppose pas à ce que soit pris en considération un fait antérieur à deux mois dans la mesure où le comportement du salarié s'est poursuivi ou répété dans ce délai ; que la cour d'appel a relevé que des erreurs de la salariée avaient été constatées en 1996, 1999, et en avril 2004 et que la fiche de non-conformité du 27 septembre 2006 mentionnait trois erreurs dont deux de saisie ; qu'en s'abstenant de rechercher, comme elle y était invitée, si la répétition de ces erreurs professionnelles de la salariée depuis plusieurs années ne constituait pas une cause réelle et sérieuse de licenciement, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1232-1 et L. 1235-3 du code du travail ;
5°/ que la loi ne subordonne pas la qualification de faute simple à son caractère volontaire ; qu'en énonçant, pour juger que le licenciement de la salariée était dénué de cause réelle et sérieuse, que l'employeur n'établissait pas le caractère volontaire des erreurs de saisie qui lui étaient imputables et qui résultaient de la fiche de non-conformité du 27 septembre 2006, la cour d'appel a ajouté une condition à la loi et a ainsi violé les articles L. 1232-1 et L. 1235-3 du code du travail ;
6°/ que le jugement du conseil de prud'hommes n'énonçait pas que le licenciement visé par la lettre de licenciement serait un licenciement pour faute grave mais se bornait à mentionner que les fautes qui y étaient énumérées étaient graves et justifiaient en conséquence un licenciement pour cause réelle et sérieuse ; qu'en jugeant néanmoins que « par erreur, les premiers juges ont retenu que dans la lettre de licenciement, l'employeur avait retenu une faute grave, alors qu'il a notifié un licenciement pour cause réelle et sérieuse avec dispense d'effectuer le préavis », la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis du jugement du conseil de prud'hommes du 13 mars 2009 et a ainsi violé l'article 1134 du code civil.
Mais attendu qu'abstraction faite des première, deuxième, troisième et sixième branches du moyen, qui critiquent des motifs surabondants, la cour d'appel, qui a fait ressortir que les erreurs commises par la salariée le 27 septembre 2006 ne caractérisaient pas, en l'absence de volonté délibérée de sa part, un comportement fautif, a par ce seul motif, légalement justifié sa décision ;

PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Otto Bock aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Otto Bock à payer à Mme X..., la somme de 2 500 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quatre juillet deux mille douze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par Me Le Prado, avocat aux Conseils, pour la société Otto Bock
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué :
D'AVOIR dit que le licenciement de Madame X... était sans cause réelle et sérieuse et d'avoir condamné en conséquence la société OTTO BOCK à lui payer la somme de 19.000 € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
AUX MOTIFS QUE « par erreur les premiers juges ont retenu que dans la lettre de licenciement, l'employeur avait retenu une faute grave, alors qu'il a notifié un licenciement pour cause réelle et sérieuse avec dispense d'effectuer le préavis (« aussi, nous vous notifions par la présente votre licenciement pour cause réelle et sérieuse. Nous vous dispensons d'effectuer votre préavis de 2 mois qui vous sera néanmoins payés ») ; que la qualification de "faute grave" n'apparaît pas dans la lettre de licenciement ; la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige, lie les parties et le juge, est libellée comme suit : « nous avons décidé de procéder à votre licenciement pour fautes professionnelles répétées portant préjudice à l'entreprise. Vous êtes responsable en tant que facturière depuis plus de 10 ans de la saisie des commandes à l'édition des bons de livraison de gants. Or, le 27 septembre 2006, nous avons de nouveau relevé 3 écarts de non-conformité, négligences répétées qui fait suite à de nombreux rappels à l'ordre au cours des derniers mois. Malgré les nombreux avertissements antérieurs et tous les mails de rappel de votre supérieur hiérarchique, vous continuez et répétez exactement les mêmes erreurs de saisie, sans effectuer les contrôles nécessaires. Ces erreurs répétées dont vous êtes responsable entraînent : des écarts dans le stock, inexplicables, de la production inutile, des écarts sur les bordereaux de livraison, des livraisons erronées à notre client final et donc des coûts supplémentaires (et suit les rappels d'erreurs signalées par un client le 14 octobre 1996, de la plainte d'un nouveau client le 12 mai 1999 puis se poursuit par) en avril 2004 votre supérieur vous rappelle que vous devez faire attention et vérifier votre travail car trop d'erreurs s'accumulent (rappel des avertissements du 11 mai 2006 et du 13 septembre 2006) Nous nous étonnons que compte tenu de votre ancienneté sur la fonction vous continuez à délibérément faire des erreurs qui déstabilisent l'organisation du service logistique et la chaîne qui suit. C'est dans ce contexte que votre supérieur hiérarchique vous a demandé une nouvelle fois de vous ressaisir et de vous concentrer afin d'obtenir compte tenu de votre ancienneté aucune erreur. Malgré tout, le 27 septembre 2006, d'autres erreurs apparaissent similaires aux erreurs passées aussi devant ces fautes professionnelles répétées et volontaires et la désorganisation que cela entraîne pour l'entreprise vous comprendrez que nous ne pouvons continuer à travailler avec vous ; Madame X... est fondée à invoquer la prescription des faits remontant à plus de trois ans à savoir une lettre d'un client du 14 octobre 1996, les plaintes d'un client du 12 mai 1999, les erreurs constatées en avril 2004 par son supérieur ; que les avertissements étant annulés, l'employeur ne peut plus les invoquer pour justifier du bien fondé du licenciement prononcé ; que la fiche de non conformité du 27 septembre 2006 mentionne trois erreurs dont deux de saisie (« erreur rentrée à la place») : qu'en tout état de cause, de telles erreurs ne constituent pas, faute par l'employeur d'établir leur caractère répété et volontaire invoqué pour justifier le licenciement, une cause réelle et sérieuse ; qu'en conséquence, par infirmation du jugement déféré le licenciement de Madame X... sera déclaré sans cause réelle et sérieuse » ;
1°) ALORS QUE dans ses dernières conclusions d'appel, reprises oralement à l'audience, Madame X... se bornait à faire valoir la prescription de deux mois de l'article L.1332-4 et non pas la prescription triennale de l'article L.1332-5 du Code du travail ; qu'en énonçant que « Madame X... est fondée à invoquer la prescription des faits remontant à plus de trois ans, à savoir une lettre d'un client du 14 octobre 1996, les plaintes d'un client du 12 mai 1999, les erreurs constatées en avril 2004 par son supérieur », lors même que la salariée n'invoquait pas cette prescription triennale, la Cour d'appel a modifié l'objet du litige dont elle était saisie et a ainsi violé l'article 4 du Code de procédure civile ;
2°) ALORS QUE la prescription triennale de l'article L.1332-5 du Code du travail ne s'applique qu'aux faits qui ont été frappés de sanction en leur temps ; qu'en déclarant prescrites les erreurs de la salariée énoncées dans une lettre d'un client le 14 octobre 1996, résultant des plaintes d'un client du 12 mai 1999 et constatées en avril 2004 par son supérieur hiérarchique en ce qu'elles remonteraient à plus de trois ans, alors qu'il n'était pas contesté que ces faits n'avaient pas été frappés de sanction en leur temps, la Cour d'appel a violé l'article L.1332-5 du Code du travail ;
3°) ALORS QUE, SUBSIDIAIREMENT, aucun fait connu par l'employeur plus de trois ans à compter de l'engagement des poursuites disciplinaires ne peut être invoqué à l'appui d'une nouvelle sanction ; que cette prescription est déterminée à compter de l'engagement de la procédure de licenciement ; que la Cour d'appel a relevé que des erreurs de la salariée avait été constatées en avril 2004 et que la procédure de licenciement avait été engagée le 9 octobre 2006 ; qu'il résultait donc de ces énonciations que ces faits s'étaient déroulés moins de trois ans avant l'engagement de la procédure de licenciement ; qu'en jugeant cependant que Madame X... était fondée à invoquer la prescription de ces faits en ce qu'ils remonteraient à plus de trois ans, la Cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé l'article L.1332-5 du Code du travail ;
4°) ALORS QUE, EN TOUT ÉTAT DE CAUSE, l'article L.1332-4 du Code du travail ne s'oppose pas à ce que soit pris en considération un fait antérieur à deux mois dans la mesure où le comportement du salarié s'est poursuivi ou répété dans ce délai ; que la Cour d'appel a relevé que des erreurs de la salariée avaient été constatées en 1996, 1999, et en avril 2004 et que la fiche de non-conformité du 27 septembre 2006 mentionnait trois erreurs dont deux de saisie ; qu'en s'abstenant de rechercher, comme elle y était invitée, si la répétition de ces erreurs professionnelles de la salariée depuis plusieurs années ne constituait pas une cause réelle et sérieuse de licenciement, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L.1232-1 et L.1235-3 du Code du travail ;
5°) ALORS QUE, EN TOUT ÉTAT DE CAUSE, la loi ne subordonne pas la qualification de faute simple à son caractère volontaire ; qu'en énonçant, pour juger que le licenciement de Madame X... était dénué de cause réelle et sérieuse, que l'employeur n'établissait pas le caractère volontaire des erreurs de saisie qui lui étaient imputables et qui résultaient de la fiche de non-conformité du 27 septembre 2006, la Cour d'appel a ajouté une condition à la loi et a ainsi violé les articles L.1232-1 et L.1235-3 du Code du travail ;
6°) ALORS QUE, EN TOUT ETAT DE CAUSE, le jugement du Conseil de prud'hommes n'énonçait pas que le licenciement visé par la lettre de licenciement serait un licenciement pour faute grave mais se bornait à mentionner que les fautes qui y étaient énumérées étaient graves et justifiaient en conséquence un licenciement pour cause réelle et sérieuse ; qu'en jugeant néanmoins que « par erreur, les premiers juges ont retenu que dans la lettre de licenciement, l'employeur avait retenu une faute grave, alors qu'il a notifié un licenciement pour cause réelle et sérieuse avec dispense d'effectuer le préavis » (arrêt, p. 4), la Cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis du jugement du Conseil de prud'hommes du 13 mars 2009 et a ainsi violé l'article 1134 du Code civil.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 11-13199
Date de la décision : 04/07/2012
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 06 janvier 2011


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 04 jui. 2012, pourvoi n°11-13199


Composition du Tribunal
Président : M. Frouin (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Le Prado, SCP Didier et Pinet

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:11.13199
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