La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

27/06/2012 | FRANCE | N°11-17983

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 27 juin 2012, 11-17983


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé par la société Sogebat, en qualité de manoeuvre, à compter du 11 octobre 2005, suivant un contrat de chantier pour l'édification d'une caserne de gendarmerie ; que cette société a fait l'objet d'une décision de liquidation judiciaire le 9 janvier 2007, M. Y... étant désigné liquidateur judiciaire ; qu'alléguant avoir travaillé jusqu'à la fin du mois de mars 2006 et que l'employeur ne lui avait pas notifié l'expiration de son contrat, il a saisi

la juridiction prud'homale pour voir prononcer la résiliation judiciaire d...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé par la société Sogebat, en qualité de manoeuvre, à compter du 11 octobre 2005, suivant un contrat de chantier pour l'édification d'une caserne de gendarmerie ; que cette société a fait l'objet d'une décision de liquidation judiciaire le 9 janvier 2007, M. Y... étant désigné liquidateur judiciaire ; qu'alléguant avoir travaillé jusqu'à la fin du mois de mars 2006 et que l'employeur ne lui avait pas notifié l'expiration de son contrat, il a saisi la juridiction prud'homale pour voir prononcer la résiliation judiciaire de son contrat de travail et obtenir paiement de diverses sommes au titre de l'exécution et de la rupture du contrat de travail ;
Sur le troisième moyen :
Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes au titre de l'indemnité pour procédure irrégulière, alors, selon le moyen :
1°/ qu'un salarié ayant moins de deux ans d'ancienneté dans l'entreprise, peut prétendre, à titre de dommages-intérêts, à une somme pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et à une autre somme pour non respect de la procédure de licenciement ; que, dès lors, la cour d'appel qui a constaté qu'aucune lettre de licenciement n'a été notifiée à M. X..., ce dont se déduit que la procédure de licenciement n'avait pas été respectée, ne pouvait rejeter la demande de dommages et intérêts formulée à ce titre et n'accorder qu'une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse sans violer les article L. 1232-1 et suivants, L. 1235-14, et L. 1236-8 du code du travail ;
2°/ que subsidiairement, M. X... faisait valoir que, la procédure de licenciement étant irrégulière, faute de notification d'une lettre de licenciement, il était fondé à obtenir des dommages-intérêts à ce titre ; que la cour d'appel qui n'a pas répondu à ce chef pertinent des écritures d'appel de l'exposant a par là-même entaché son arrêt d'un défaut de réponse à conclusions et l'a privé de motifs, en violation de l'article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu qu'ayant relevé que l'employeur n'avait pas respecté la procédure de licenciement, la cour d'appel a, par une appréciation souveraine, fixé la réparation du préjudice subi par le salarié résultant aussi bien de l'irrégularité du licenciement pour vice de forme que de fond ; que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le premier moyen :
Vu l'article 1315 du code civil ;
Attendu que pour débouter le salarié de sa demande au titre des salaires de février et mars 2006, l'arrêt retient que pendant dix-huit mois, soit de mars 2006 au mois de septembre 2007, date de saisine de la juridiction prud'homale, aucune réclamation n'a été formulée et que le salarié a attendu plus de dix mois après le prononcé de la liquidation judiciaire pour saisir la juridiction ; que ce comportement attentiste démontre qu'il apparaît bien que ce salaire avait été payé et que le retard, toujours inexpliqué aujourd'hui, mis à saisir le juge, a compromis irrémédiablement la recherche des documents comptables par l'AGS ;
Attendu, cependant, que la charge de la preuve du paiement du salaire incombe à l'employeur qui se prétend libéré de son obligation et que la renonciation à un droit ne se présume pas ;
Qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Et sur le deuxième moyen :
Vu l'article L. 3171-4 du code du travail ;
Attendu qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié d'étayer sa demande par la production d'éléments suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés pour permettre à l'employeur de répondre en fournissant ses propres éléments ;
Attendu que pour rejeter en partie les demandes du salarié au titre des heures supplémentaires, l'arrêt après avoir énoncé que le salarié se tenait à la disposition de l'employeur qui le transportait tous les jours travaillés d'Avignon à Saint-Jean de Vedas, lieu du chantier et qu'il ne pouvait vaquer à ses occupations, retient qu'il convient d'allouer la somme de 2. 409 euros d'heures supplémentaires engendrées par le temps de trajet car il n'est pas établi que le salarié travaillait le samedi comme il le prétend et la durée alléguée du déplacement quotidien de 3 heures doit être réduite à 2 heures ; que ne sont pas justifiées les heures supplémentaires au-delà de ce qui a été accordé précédemment ;
Qu'en statuant ainsi, alors que la demande du salarié était étayée par des attestations suffisamment précises pour permettre à l'employeur d'y répondre, la cour d'appel, qui a fait peser la charge de la preuve des heures effectivement réalisées sur le seul salarié, a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il rejette les demandes du salarié au titre des salaires de février et mars 2002, fixe à la somme de 2 409 euros la créance du salarié au titre des heures supplémentaires engendrées par le temps de trajet, l'arrêt rendu le 7 septembre 2010, entre les parties, par la cour d'appel de Nîmes ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;
Condamne M. Y..., ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Sogebat, et l'AGS-CGEA de Marseille aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de M. X..., mais, au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, condamne M. Y..., ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Sogebat et l'AGS-CGEA de Marseille à payer à la SCP Roger et Sevaux la somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept juin deux mille douze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Roger et Sevaux, avocat aux Conseils, pour M. X...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté la demande formulée par Monsieur X... au titre des salaires de février et mars 2006 ;
Aux motifs que si l'appelant prétend que les salaires des mois de février et mars 2006 n'ont pas été payés, il convient d'observer que, d'abord, pendant 18 mois soit de mars 2006 au mois de septembre 2007, date de saisine du Conseil des prud'hommes, aucune réclamation n'a été formulée, ensuite, que le salarié a attendu plus de dix mois après le prononcé de la liquidation judiciaire pour saisir la juridiction ; qu'en effet, d'une part, ce comportement attentiste démontre qu'il apparaît bien que ce salaire avait été payé, d'autre part que le retard, toujoursninexpliqué aujourd'hui, mis à saisir le juge a compromis irrémédiablement la recherche des documents comptables par l'AGS ;
Alors, d'une part, qu'il appartient à l'employeur d'apporter la preuve qu'il a payé le salaire ; qu'en se contentant d'invoquer l'attentisme inexpliqué de Monsieur X... pour rejeter ses demandes de paiement des salaires de février et mars 2006, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve et a, par voie de conséquence, violé les articles 1315 du Code civil et L. 3243-3 du Code du travail ;
Alors, d'autre part, que pour rejeter la demande de rappel de salaire, la cour d'appel a retenu que, d'une part, le comportement attentiste de Monsieur X... démontre que ce salaire avait été payé et que le retard, toujours inexpliqué aujourd'hui, mis à saisir le juge a compromis irrémédiablement la recherche des documents comptables par l'AGS ; qu'en statuant ainsi, alors que l'action en paiement du salaire se prescrit par cinq ans, la cour d'appel a fondé sa solution sur des motifs inopérants et l'a ainsi privé de base légale au regard des articles 1347 du Code civil, L. 3243-3 et L. 3245-1 du Code du travail ;
DEUXIÈ
ME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté partiellement la demande formulée par Monsieur X... au titre du paiement d'heures supplémentaires ;
Aux motifs qu'en application de l'article L. 212-4 devenu L. 3121-1 du Code du travail et des dispositions conventionnelles, l'indemnité de trajet prévue par la Convention collective, ayant un caractère forfaitaire et ayant pour objet d'indemniser une sujétion pour le salarié obligé chaque jour de se rendre sur le chantier et d'en revenir, est due indépendamment de la rémunération par l'employeur du temps de trajet inclus dans l'horaire de travail et du moyen de transport utilisé ; qu'il convient d'allouer la somme de 2. 409 euros d'heures supplémentaires engendrées par le temps de trajet car il n'est pas établi que le salarié travaillait le samedi comme il le prétend et la durée alléguée du déplacement quotidien de 3 heures doit être réduite à 2 heures et que ne sont pas justifiées des heures supplémentaires alléguées au-delà de ce qui a été accordé ;
Alors, de première part, que la simple affirmation équivaut au défaut de motifs ; qu'en se contentant d'affirmer que la durée alléguée du déplacement quotidien de 3 heures doit être réduite à 2 heures, sans expliquer la raison de cette réduction, la cour d'appel s'est prononcée par voie d'affirmation, privant sa décision de motifs en violation de l'article 455 du code de procédure civile ;
Alors, de deuxième part, qu'en se contentant d'affirmer qu'il n'était pas établi que le salarié travaillait le samedi comme il le prétendait, sans s'expliquer sur les autres jours de la semaine, comme elle y était invitée par Monsieur X..., la cour d'appel a encore une fois privé sa décision de motifs et a violé l'article 455 du Code de procédure civile ;
Alors, enfin, que s'il résulte de l'article L. 3171-4 du Code du travail que la preuve des heures de travail effectuées n'incombe spécialement à aucune des parties et que l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, il appartient cependant à ce dernier de fournir préalablement au juge des éléments de nature à étayer sa demande ; que toutefois le juge ne peut rejeter une demande en paiement d'heures supplémentaires aux seuls motifs que les éléments produits par le salarié ne prouvent pas le bien-fondé de sa demande ; qu'au cas présent, la cour d'appel ne pouvait rejeter les demandes de l'exposant aux motifs propres que ne sont pas justifiées des heures supplémentaires alléguées au-delà de ce qui a été accordé ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel, qui a fait peser sur le seul salarié la charge de la preuve des heures supplémentaires, a violé le texte susvisé ;
TROISIÈ
ME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté la demande formulée par Monsieur X... au titre de l'indemnité pour procédure irrégulière ;
Aux motifs que le contrat de chantier est, selon une jurisprudence constante, un contrat à durée indéterminée comportant une cause de rupture prédéterminée à savoir la fin du chantier et si elle est l'objet du contrat, la fin de chantier constitue une cause réelle et sérieuse de licenciement ; que, dès lors, une lettre de licenciement devait être notifiée au salarié ; que si l'employeur n'a pas en l'espèce notifié l'expiration du contrat par achèvement de l'immeuble, ni fourni du travail, il n'en demeure pas moins qu'il n'est pas établi que le salarié a continué à travailler ; que le jugement déféré qui a prononcé une résiliation du contrat à la date de la liquidation judiciaire, plusieurs mois après, ne s'est fondé sur aucun élément de nature objective pouvant laisser penser à la poursuite d'une relation de travail alors que les parties s'étaient engagées pour la brève durée d'un chantier, selon les usages de la profession, et n'ont plus eu de relations de quelque nature que ce soit par la suite ; que dans ces conditions, même si la rupture est irrégulière il n'en demeure pas moins que le contrat a expiré à la fin du mois de mars 2006 ; qu'il n'y a donc pas lieu de prononcer une résiliation du contrat qui avait été rompu à cette date ; que le jugement doit être infirmé ; qu'il convient d'allouer une somme de 1. 000 euros à titre de dommages intérêts pour le préjudice subi, étant observé qu'aucun élément ne vient corroborer un refus des Assedic comme il est prétendu ;
Alors, d'une part, qu'un salarié ayant moins de deux ans d'ancienneté dans l'entreprise, peut prétendre, à titre de dommages intérêts, à une somme pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et à une autre somme pour non respect de la procédure de licenciement ; que, dès lors, la cour d'appel qui a constaté qu'aucune lettre de licenciement n'a été notifiée à Monsieur X..., ce dont se déduit que la procédure de licenciement n'avait pas été respectée, ne pouvait rejeter la demande de dommages et intérêts formulée à ce titre et n'accorder qu'une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse sans violer les article L. 1232-1 et suivants, L. 1235-14, et L. 1236-8 du Code du travail ;
Alors, subsidiairement, d'autre part, que Monsieur X... faisait valoir que, la procédure de licenciement étant irrégulière, faute de notification d'une lettre de licenciement, il était fondé à obtenir des dommages et intérêts à ce titre ; que la cour d'appel qui n'a pas répondu à ce chef pertinent des écritures d'appel de l'exposant a par là-même entaché son arrêt d'un défaut de réponse à conclusions et l'a privé de motifs, en violation de l'article 455 du Code de procédure civile ;


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 11-17983
Date de la décision : 27/06/2012
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Nîmes, 07 septembre 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 27 jui. 2012, pourvoi n°11-17983


Composition du Tribunal
Président : M. Gosselin (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Roger et Sevaux

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:11.17983
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award