LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu l'article L. 1226-24 du code du travail, ensemble l'article 111- a du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991 organisant la profession d'avocat ;
Attendu, selon le premier de ces textes, que le commis commercial qui, par suite d'un accident dont il n'est pas fautif, est dans l'impossibilité d'exécuter son contrat de travail a droit à son salaire pour une durée maximale de six semaines, qu'est un commis commercial le salarié qui, employé par un commerçant au sens de l'article L. 121-1 du code de commerce, occupe des fonctions commerciales au service de la clientèle ; que, selon le second, la profession d'avocat est incompatible avec toutes les activités de caractère commercial, qu'elles soient exercées directement ou par personne interposée ;
Attendu, selon le jugement attaqué, rendu en dernier ressort, que Mme X..., employée en qualité de secrétaire à compter du 15 mai 2008 par M. Y..., avocat, a été en arrêt de travail pour maladie du 6 janvier au 23 mars 2009 ; qu'elle a saisi la juridiction prud'homale pour obtenir, notamment, le maintien de son salaire ;
Attendu que pour accueillir cette demande, le jugement retient que la salariée était en contact téléphonique ou physique avec la clientèle du cabinet et que dès lors, l'article L. 1226-24 du code du travail s'applique ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses constatations que l'employeur était avocat, ce qui était incompatible avec la qualité de commerçant, le conseil de prud'hommes a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne M. Y... à payer à Mme X... une somme au titre du maintien du salaire, le jugement rendu le 28 juin 2010, entre les parties, par le conseil de prud'hommes de Saverne ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit jugement et, pour être fait droit, les renvoie devant le conseil de prud'hommes de Strasbourg ;
Condamne Mme X... aux dépens ;
Vu l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, rejette la demande de la SCP Masse-Dessen et Thouvenin ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept juin deux mille douze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par Me Blondel, avocat aux Conseils, pour M. Patrick Y....
Il est reproché au jugement attaqué d'avoir condamné un employeur à payer la somme de 540, 86 euros à sa salariée au titre du maintien de salaire, conformément au droit local et une somme au titre des frais irrépétibles ;
AUX MOTIFS QUE Madame X...- Z... travaillait en qualité de secrétaire dans le cabinet d'avocat de Maître Y... ; que s'il n'est qu'elle effectuait des travaux de dactylographie, le Conseil pense qu'elle était, contrairement aux affirmations de la défenderesse, également en contact téléphonique ou physique avec la clientèle du Cabinet ; que dès lors, l'article 1226-24 du Code du travail relatif au maintien du salaire s'applique, si bien qu'il sera fait droit à la somme de 540, 86 euros réclamée à ce titre ;
ALORS QUE, D'UNE PART, toute juridiction doit se prononcer à partir de certitudes, et non de simples conjectures ; qu'en faisant droit à la demande principale de la salariée au motif qu'il « pense » que cette dernière était, contrairement aux affirmations de l'employeur, également en contact téléphonique ou physique avec la clientèle du Cabinet, le Conseil de prud'hommes statue à partir d'une motivation hypothétique fondée, de surcroît, sur aucun élément objectif si ce n'est une supputation, d'où une méconnaissance des exigences de l'article 455 du Code de procédure civile ;
ALORS QUE, D'AUTRE PART ET EN TOUTE HYPOTHESE, pour que l'article L 1226-24 du Code du travail puisse recevoir application, encore faut-il que la salariée soit employée par un commerçant au sens de l'article L. 121-1 du Code de commerce ; que l'employeur, avocat de son état, faisait état dans ses écritures (cf. p. 3) qu'il n'avait pas la qualité de commerçant, qu'il exerçait une profession libérale et n'était pas inscrit au registre du commerce ; qu'en ne répondant pas à ce moyen central qui gouvernait l'éventuelle mise en oeuvre de l'article L 1226-24 du Code du travail dans sa rédaction applicable à la cause, le Conseil de prud'hommes méconnaît de plus fort les dispositions de l'article 455 du Code de procédure civile ;
ET ALORS QUE, DE TROISIEME PART ET EN TOUTE HYPOTHESE, les prestations de conseil et d'assistance qui sont le propre de l'avocat ne peuvent en aucun cas constituer « des actes de commerce » au sens de l'article L 121-1 du Code de commerce ; qu'en jugeant nécessairement le contraire en statuant sur le fondement de l'article 1226-24 du Code du travail, le Conseil de prud'hommes viole ledit article par fausse application, ensemble l'article 121-1 du Code de commerce également par fausse application et méconnaît son office au regard de l'article 12 du Code de procédure civile.