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27/06/2012 | FRANCE | N°11-15402

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 27 juin 2012, 11-15402


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé par M. Y... en 1979 comme cloueur ; que son contrat a été transféré à la société Allembal le salarié devenant alors conducteur de machines ; qu'il a été déclaré inapte à tout poste suivant un avis du médecin du travail du 30 septembre 2005, et, après un nouvel avis du médecin du travail le 16 juin 2006, reclassé à compter de septembre 2006 dans un emploi à temps partiel, sans que cette modification ait fait l'objet d'un avenant ; que le 20 j

uillet 2007, il a fait l'objet d ‘ une mise à pied conservatoire et a été conv...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé par M. Y... en 1979 comme cloueur ; que son contrat a été transféré à la société Allembal le salarié devenant alors conducteur de machines ; qu'il a été déclaré inapte à tout poste suivant un avis du médecin du travail du 30 septembre 2005, et, après un nouvel avis du médecin du travail le 16 juin 2006, reclassé à compter de septembre 2006 dans un emploi à temps partiel, sans que cette modification ait fait l'objet d'un avenant ; que le 20 juillet 2007, il a fait l'objet d ‘ une mise à pied conservatoire et a été convoqué en vue d'un licenciement pour faute, sans qu'aucune mesure disciplinaire n'ait été prise à l'issue de l'entretien du 7 août ; que par jugement du 18 décembre 2007, la société Allembal, ayant été placée en liquidation judiciaire, M. Z..., désigné comme mandataire liquidateur, n'a pas licencié le salarié qui a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes liées à l'exécution du contrat et aux fins de résiliation judiciaire de celui-ci ;
Sur le premier moyen :
Vu l'article 4 du code de procédure civile ;
Attendu que pour refuser la demande du salarié tendant à ce que soit reconnue sa créance de salaire pour la période du 1er novembre 2005 au 30 août 2006 fondée sur l'article L. 1226-4 du code du travail, la cour d'appel énonce que deux questions lui sont soumises la résiliation judiciaire du contrat de travail du salarié et la requalification de son contrat de travail, laquelle est susceptible d'entraîner des incidences sur les sommes réclamées ;
Qu'en statuant ainsi, alors que le salarié demandait le paiement du salaire pour la période de novembre 2005 à août 2006 antérieure à la date de rupture du contrat de travail fixée dans l'arrêt au 21 janvier 2008, la cour d'appel a méconnu l'objet du litige et violé l'article susvisé ;
Sur le quatrième moyen qui est préalable aux deuxième et troisième moyens :
Vu l'article 1134 du code civil ;
Attendu que pour dire que la rupture du contrat de travail à l'initiative du salarié constituait une prise d'acte entraînant les effets d'une démission l'arrêt retient qu'après avoir été jugé apte à reprendre un travail strictement administratif, selon un avis du médecin du travail du 13 juin 2006, et que l'employeur s'est efforcé d'affecter le salarié à un emploi conforme à ses capacités physiques réduites sans qu'un avenant écrit ait été établi par l'employeur pour définir les modalités de travail confiées au salarié à partir du mois de septembre 2006, ce qui entraîne la présomption d'un contrat de travail à temps complet et alors que le salarié indique en outre qu'il a dû " déplorer une réduction importante de son volume horaire passant d'un temps complet à 10 ou 8 h de travail mensuel " ;
Qu'en statuant ainsi alors qu'elle avait constaté l'absence d'avenant écrit et le défaut d'accord du salarié à la diminution de ses horaires de travail constituant une modification unilatérale de son contrat de travail par l'employeur, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences de ses propres constatations, a violé les textes susvisés ;
Sur le troisième moyen :
Attendu que la cassation sur le quatrième moyen emporte la cassation par voie de conséquence sur les dispositions de l'arrêt infirmant le jugement en ce qu'il a fixé la créance du salarié au titre d'un rappel de salaire pour la période du 1er septembre 2006 au 20 juillet 2007 ;
Sur le deuxième moyen :
Attendu que la cassation sur le troisième moyen rend ce moyen sans portée ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 10 février 2011, entre les parties, par la cour d'appel de Colmar ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Nancy ;

Condamne l'AGS-CGEA de Nancy et M. Z..., ès qualités aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne l'AGS-CGEA de Nancy et M. Z..., ès qualités, à payer à M. X... la somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept juin deux mille douze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par Me de Nervo, avocat aux Conseils, pour M. X...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Le moyen reproche à la cour d'appel d'avoir débouté le salarié de sa demande au titre de sa demande de rappels de salaires pour la période du 1er novembre 2005 au 30 août 2006
Aux motifs que deux questions sont soumises à la cour, la résiliation judiciaire du contrat de travail de Monsieur X... et la requalification de son contrat de travail, laquelle est susceptible d'entraîner des incidences sur les sommes réclamées ;
Alors que l'objet du litige est déterminé par les conclusions des parties et en matière de procédure orale les conclusions écrites d'une partie reprises oralement à l'audience saisissent valablement le juge qui est tenu de répondre à l'ensemble des demandes qui y sont contenues ; que dans ses conclusions d'appel et récapitulatives n° 2 datées du 6 janvier 2011, (p 4 et 5 et p 15 5 §)) Monsieur X... a demandé un rappel de salaire pour la période du 1er novembre 2005 au 30 août 2006, les congés payés y afférents et des dommages intérêts en raison de cette faute de l'employeur qui avait manqué à son obligation de payer le salaire ; qu'en énonçant que les contestations ne portaient que sur la résiliation judiciaire du contrat de travail et la requalification de son contrat de travail, la cour d'appel a dénaturé les conclusions d'appel et violé l'article 4 du code de procédure civile.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Monsieur X... de sa demande en requalification de son contrat à temps complet
Aux motifs que Monsieur X... demande que son contrat de travail appliqué à temps partiel à compter du mois de septembre 2006 soit requalifié en un contrat de travail à temps complet ; il est constant qu'il travaillait antérieurement à ses arrêts maladie, à temps complet, et qu'il a repris une activité à temps partiel à l'issue de ces arrêts, en se voyant attribuer une pension d'invalidité en 2ème catégorie à partir du 1er septembre 2005, les restrictions apportées par le médecin du travail lors des visites de reprise, notamment l'avis du 30 septembre 2005, imposaient une modification des taches du salarié ; il a été en effet déclaré inapte à tout poste nécessitant la station debout ou nécessitant la station prolongée assise : doit s'aider de sa canne lors de la mise en situation debout et à la marche ; apte à des tâches assis dans les conditions prescrites précédemment et ne nécessitant pas de déplacement » ; selon un avis ultérieur du médecin du travail, du 13 juin 2006, il a été jugé apte à reprendre un travail strictement administratif, ce qu'il a pu faire à compter du mois de septembre 2006 selon ses propres écrits dans le cadre d'un reclassement ; il a été retenu par les premiers juges que l'employeur s'était efforcé d'affecter Monsieur X... à un emploi conforme à ses capacités physiques réduites ; il est aussi constant et reconnu qu'un avenant écrit n'a pas été établi par l'employeur pour définir les modalités de travail confiées au salarié à partir du mois de septembre 2006, date à laquelle le salarié sollicite la requalification du contrat ; cette carence de l'employeur entraîne la présomption d'un contrat de travail à temps complet ; l'employeur a cependant combattu utilement cette présomption par plusieurs éléments de preuve qu'il produit aux débats ; en tant que travailleur handicapé 2ème catégorie, Monsieur X... ne pouvait plus travailler à temps complet mais uniquement selon les prescriptions du médecin du travail qui s'imposaient à l'employeur ; les bulletins de paie établis au nom de Monsieur X... et dont l'exactitude n'est pas discutée, mentionnent un horaire de travail réduit : 12 heures en septembre 2006 13 heures en octobre et novembre 2006, 11 heures en décembre 2006 et janvier 2007 12 heures en février 2007 14 heures en mars 2007 11 heures en avril 2007 10 heures en mai 2007, 13 heures en juin 2007 8 en juillet 2007 et en août 2007 ; le 25 avril 2006, l'employeur avait proposé au médecin du travail d'affecter Monsieur X... à un emploi administratif à raison d'une heure par jour les après-midi ; selon le compte-rendu manuscrit établi à l'issue de l'entretien préalable à un licenciement, et qui émane apparemment du conseiller extérieur qui avait assisté le salarié, son auteur mentionne les faits reprochés au salarié et les points de désaccord en notant qu'à compter du 1er septembre 2006, Monsieur X... avait finalement repris le travail à raison de 3 heures par semaine ; de plus ce compte rendu mentionne un différend sur un manque de 68 centimes sur salaire de mai ce qui a contrario démontre l'exactitude des bulletins de paie sur les heures de travail effectuées ; enfin le conseil du salarié lui-même a formulé toutes réserves sur les salaires dans ces termes : « Monsieur X... entend réserver ses droits au titre de toutes créances salariales ou indemnitaires notamment au titre de la résiliation de son contrat de travail », sans remettre en cause l'exactitude des bulletins de paie du moins en ce qui concerne les heures travaillées ni réclamer des rappels de salaire pour des heures qui n'auraient pas été rémunérées ; la réalité et l'amplitude des horaires de travail effectuées par le salarié avec leur répartition par semaine apparaissent donc suffisamment établies ; le salarié indique en outre qu'il a du déplorer une réduction importante de son volume horaire passant d'un temps complet de 10 ou 8 heures de travail mensuel sans soutenir qu'il aurait contesté les modalités de travail mises en place dans le cadre de son reclassement ; l'amplitude des horaires de travail effectués démontre enfin par elle-même que le salarié ne se tenait pas à la disposition de son employeur dans des conditions pouvant justifier une demande de requalification ; en conséquence, le salarié n'est pas fondé à réclamer la requalification de son contrat en contrat à temps complet ni le paiement d'heures sur la base d'un tel contrat contrairement à la réalité que le liquidateur et l'AGS ont démontrée ; pour les mêmes raisons il ne peut prétendre à des dommages intérêts de ce fait le préjudice allégué, n'étant pas caractérisé ; les premiers juges ont donc à tort déduit de l'absence d'un avenant écrit que le contrat antérieur continuait à produire ses effets et imputé la rupture du contrat de travail à la défaillance de l'employeur ;
1° Alors que l'absence d'écrit mentionnant la durée du travail et sa répartition fait présumer un emploi à temps complet et il incombe au juge de s'assurer d'une part si l'employeur justifie la durée exacte journalière, hebdomadaire ou mensuelle convenue, d'autre part que le salarié n'était pas placé dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et s'il n'avait pas à se tenir à constamment à la disposition de l'employeur ; que la cour d'appel qui a constaté que la durée de travail du salarié avait varié d'un mois à l'autre et qui n'a pas vérifié si l'employeur justifiait la répartition du travail entre les jours de la semaine, et si le salarié pouvait prévoir à l'avance à quel rythme il devait travailler, ce dont il pouvait se déduire que le salarié se trouvait en permanence à la disposition de l'employeur, n'a pas justifié sa décision au regard de l'article L 3123- 14du code du travail
2° Alors que l'absence de réclamation du salarié pendant l'exécution du contrat de travail ne permet pas d'en déduire que le contrat était exécuté dans des conditions d'un travail à temps partiel ; qu'en énonçant qu'en l'absence de contestation des bulletins de salaires sur l'exactitude des heures travaillées, ni des modalités de travail mises en place dans le cadre de son reclassement, l'amplitude des horaires effectués était établie et que cette amplitude démontrait que le salarié ne se tenait pas à la disposition de son employeur dans des conditions pouvant justifier une demande de requalification, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision au regard de l'article L 3123-14 du contrat de travail.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
(subisdiaire)
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Monsieur X..., salarié de sa demande subsidiaire tendant à voir fixer sa créance à la somme de 18. 839 € augmentée de celle de 118, 39 € au titre de dommages intérêts pour la perte de salaires pendant la période du 1er septembre 2006 au 20 juillet 2007
Aux motifs que Monsieur X... demande que son contrat de travail appliqué à temps partiel à compter du mois de septembre 2006 soit requalifié en un contrat de travail à temps complet ; il est constant qu'il travaillait antérieurement à ses arrêts maladie, à temps complet, et qu'il a repris une activité à temps partiel à l'issue de ces arrêts, en se voyant attribuer une pension d'invalidité en 2ème catégorie à partir du 1er septembre 2005, les restrictions apportées par le médecin du travail lors des visites de reprise, notamment l'avis du 30 septembre 2005, imposaient une modification des taches du salarié ; il a été en effet déclaré « inapte à tout poste nécessitant la station debout ou nécessitant la station prolongée assise : doit s'aider de sa canne lors de la mise en situation debout et à la marche ; apte à des tâches assis dans les conditions prescrites précédemment et ne nécessitant pas de déplacement » ; selon un avis ultérieur du médecin du travail, du 13 juin 2006, il a été jugé apte à reprendre un travail strictement administratif, ce qu'il a pu faire à compter du mois de septembre 2006 selon ses propres écrits dans le cadre d'un reclassement ; il a été retenu par les premiers juges que l'employeur s'était efforcé d'affecter Monsieur X... à un emploi conforme à ses capacités physiques réduites ; il est aussi constant et reconnu qu'un avenant écrit n'a pas été établi par l'employeur pour définir les modalités de travail confiées au salarié à partir du mois de septembre 2006, date à laquelle le salarié sollicite la requalification du contrat ; cette carence de l'employeur entraîne la présomption d'un contrat de travail à temps complet ; l'employeur a cependant combattu utilement cette présomption par plusieurs éléments de preuve qu'il produit aux débats ; en tant que travailleur handicapé 2ème catégorie, Monsieur X... ne pouvait plus travailler à temps complet mais uniquement selon les prescriptions du médecin du travail qui s'imposaient à l'employeur ; les bulletins de paie établis au nom de Monsieur X... et dont l'exactitude n'est pas discutée, mentionnent un horaire de travail réduit : 12 heures en septembre 2006 13 heures en octobre et novembre 2006, 11 heures en décembre 2006 et janvier 2007 12 heures en février 2007 14 heures en mars 2007 11 heures en avril 2007 10 heures en mai 2007, 13 heures en juin 2007 8 en juillet 2007 et en août 2007 ; le 25 avril 2006, l'employeur avait proposé au médecin du travail d'affecter Monsieur X... à un emploi administratif à raison d'une heure par jour les après-midi ; selon le compte-rendu manuscrit établi à l'issue de l'entretien préalable à un licenciement, et qui émane apparemment du conseiller extérieur qui avait assisté le salarié, son auteur mentionne les faits reprochés au salarié et les points de désaccord en notant qu'à compter du 1er septembre 2006, Monsieur X... avait finalement repris le travail à raison de 3 heures par semaine ; de plus ce compte rendu mentionne un différend sur un manque de 68 centimes sur salaire de mai ce qui a contrario démontre l'exactitude des bulletins de paie sur les heures de travail effectuées ; enfin le conseil du salarié lui-même a formulé toutes réserves sur les salaires dans ces termes : « Monsieur X... entend réserver ses droits au titre de toutes créances salariales ou indemnitaires notamment au titre de la résiliation de son contrat de travail », sans remettre en cause l'exactitude des bulletins de paie du moins en ce qui concerne les heures travaillées ni réclamer des rappels de salaire pour des heures qui n'auraient pas été rémunérées ; la réalité et l'amplitude des horaires de travail effectuées par le salarié avec leur répartition par semaine apparaissent donc suffisamment établies ; le salarié indique en outre qu'il a dû déplorer une réduction importante de son volume horaire passant d'un temps complet de 10 ou 8 heures de travail mensuel sans soutenir qu'il aurait contesté les modalités de travail mises en place dans le cadre de son reclassement ; l'amplitude des horaires de travail effectués démontre enfin par elle-même que le salarié ne se tenait pas à la disposition de son employeur dans des conditions pouvant justifier une demande de requalification ; en conséquence, le salarié n'est pas fondé à réclamer la requalification de son contrat en contrat à temps complet ni le paiement d'heures sur la base d'un tel contrat contrairement à la réalité que le liquidateur et l'AGS ont démontrée ; pour les mêmes raisons il ne peut prétendre à des dommages intérêts de ce fait le préjudice allégué, n'étant pas caractérisé ; les premiers juges ont donc à tort déduit de l'absence d'un avenant écrit que le contrat antérieur continuait à produire ses effets et imputé la rupture du contrat de travail à la défaillance de l'employeur Alors que le changement de la durée du travail et la diminution du salaire en découlant constituent une modification du contrat de travail qui doit être acceptée par le salarié ; qu'à défaut d'accord du salarié d'une modification unilatérale du contrat de travail proposé à titre de reclassement, l'employeur doit rechercher une nouvelle proposition de reclassement ou procéder au licenciement du salarié, à défaut il doit continuer à régler le salaire aux conditions initiales ; qu'en rejetant la demande de dommages intérêts formée par le salarié en raison du comportement déloyal de l'employeur qui avait unilatéralement réduit son salaire sans son accord au motif que le salarié n'avait pas contesté ses fiches de paie ni les modalités du contrat de travail, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision au regard de l'article 1134 du code civil.
QUATRIEME MOYEN DE CASSATION :

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir dit et jugé que la rupture du contrat de travail à l'initiative du salarié constituait une prise d'acte entraînant les effets d'une démission Aux motifs que la résiliation d'un contrat de travail peut être prononcée aux torts de l'employeur en cas de manquement grave de celui-ci dans l'exécution de ses obligations envers son salarié ; en l'espèce, deux reproches sont formulés à l'égard de l'employeur : l'absence de mesure de licenciement à la suite de l'entretien préalable auquel il avait été convoqué ainsi que le maintien d'une mesure de mise à pied ; il ne reprend pas devant la Cour d'autres griefs tel que celui retenu par les premiers juges consistant à n'avoir pas établi d'avenant écrit au moment de son reclassement dans une tâche à temps partiel ; la sanction envisagée par l'employeur à l'encontre d'un salarié doit être prise après un entretien préalable dans le délai d'un mois après le jour fixé pour cet entretien, cette règle s'appliquant également au licenciement d'un salarié fautif ; un licenciement pris ultérieurement se trouverait privé naturellement de cause réelle et sérieuse ; Monsieur X... a été convoqué par une lettre du 20 juillet 2007 à un entretien préalable fixé le 7 août 2007 en vue d'une sanction disciplinaire, la lettre de convocation envisageant un licenciement pour faute lourde avec mise à pied conservatoire ; il est constant qu'aucune mesure n'a été prise à l'issue de l'entretien ni dans le mois suivant contre Monsieur X... qui n'a été ni sanctionné ni licencié ; l'employeur a été mis en liquidation judiciaire le 18 décembre 2007 ; par lettre du 21 janvier 2008 le salarié a fait écrire au liquidateur par son avocat : « à titre conservatoire, Monsieur X... entend réserver ses droits au titre de toutes créances salariales ou indemnitaires et notamment au titre de la résiliation de son contrat de travail et ce aux torts de son employeur, à effet au 27 août 2007 en annonçant une déclaration de créance » il en résulte que le salarié a considéré son contrat comme rompu à la date du 27 août 2007, toutefois aucune initiative formelle de sa part pouvant être qualifiée de prise d'acte de rupture mettant fin au contrat n'a précédé la lettre de son avocat du 21 janvier 2008 ; il est également constant que depuis le 20 juillet 2007, il a fait l'objet d'une mise à pied conservatoire et qu'il indique qu'il n'aurait plus été payé à partir de cette date ; le salarié a modifié ses prétentions dans l'instance prud'homale en demandant à la juridiction que la résiliation de son contrat soit prononcée à la date du 8 septembre qu'il considère comme le délai de notification d'une sanction disciplinaire ou d'un licenciement ; ainsi il apparaît que l'employeur n'a pris aucune sanction contre son salarié à l'issue de l'entretien du 7 août 2007 ni le mois suivant ; par ailleurs le salarié soutient que la mise à pied est demeurée en vigueur et que son salaire n'a plus été payé après le 21 juillet 2007, mais cette affirmation est contredite par les éléments produits par le salarié lui-même ; en premier lieu, il n'a pas fait état de cette carence dans la lettre adressée par son conseil au liquidateur par son conseil au liquidateur le 21 janvier 2008 à laquelle il a joint au contraire le bulletin de paie du mois d'août 2007 ; les bulletins de paie des mois précédant et suivant la mise à pied ne mentionnent aucune modification significative de la rémunération de Monsieur X... pour les quelques heures de travail accomplies : en avril 2007, salaire de base 97, 42 € (non payé en raison d'un trop perçu) en mai 2007, salaire de base 89, 15 € (solde inférieur en raison d'un trop perçu), en juin 2007, salaire de base 113, 96 € (payé net 87, 45 €) en juillet 2007 salaire de base 71, 91 € (payé net 55, 25 €) en août 2007, salarie de base 71, 91 € (payé net 55, 25 €) ; les bulletins de paie ne valent pas preuve du paiement mais le salarié n'allègue pas dans ses conclusions ni lors des débats que les sommes figurant sur ces bulletins n'auraient pas été payées ; il n'indique pas non plus quelles sommes auraient été déduites à ce titre sinon en se référant au salarie à temps complet auquel il prétend ; enfin le salarié ne soutient pas qu'il se serait présenté à son entreprise au terme de l'entretien préalable du 7 août 2007 ni après ; il y a lieu d'admettre le contraire au vu de la lettre de son avocat du 21 janvier 2008 qui considérait le contrat rompu avec effet au 27 août 2007 ; dès lors la retenue opérée sur le salaire dû au salarié qui aurait été faite pendant la durée de mise à pied n'est pas établie ; le fait d'invoquer un défaut de paiement du salaire pendant la période de mise à pied et après n'est donc pas caractérisé ; ainsi il ne peut être soutenu que l'employeur aurait manqué à ses obligations en ne reprenant pas le paiement du salaire un mois après l'entretien préalable, d'une part parce que la preuve d'une interruption du salaire n'est pas établie, d'autre part parce que le conseil du salarié a lui-même considéré le contrat comme rompu à compter du 27 août 2007 ; le seul grief est ainsi l'absence de toute sanction disciplinaire ou de licenciement contre Monsieur X... ; comme les premiers juges l'ont considéré l'absence de sanction ne saurait être qualifié de manquement grave de l'employeur à ses obligations, la demande de résiliation judiciaire ne peut donc être accueillie ; en conséquence, le contrat de travail du salarié s'est poursuivi normalement ; mais par la lettre de son avocat du 21 janvier 2008, le salarié a exprimé de manière non équivoque qu'il considérait le contrat comme rompu, cette initiative s'analyse en une prise d'acte de la rupture qui met un terme au contrat avec effet immédiat à sa date ; en l'absence de grief caractérisant un manquement grave de l'employeur à cette date, cette prise d'acte ne peut produire que les effets d'une démission privant le salarié des droits qui s'attachent à une rupture prise à l'initiative de l'employeur ou imputable à celui-ci ;
1° Alors que l'objet du litige est déterminé par les conclusions des parties et en matière de procédure orale les conclusions écrites d'une partie reprises oralement à l'audience saisissent valablement le juge qui est tenu de répondre à l'ensemble des demandes qui y sont contenues ; qu'en retenant que le salarié qui avait développé ses conclusions oralement, n'avait formulé que deux reproches à l'égard de l'employeur à savoir l'absence de mesure de licenciement à la suite de l'entretien préalable et le maintien de la mesure de mise à pied alors qu'il était également reproché à l'employeur de ne pas avoir reclassé le salarié, repris le paiement du salaire après le délai d'un mois ayant suivi le second avis d'inaptitude du médecin du travail et d'avoir imposé par la suite au salarié un reclassement impliquant une diminution importante de ses heures de travail sans signature d'un avenant et sans aucun accord du salarié la cour d'appel a dénaturé les conclusions d'appel et a violé l'article 4 du code de procédure civile
2° Alors que la rupture du contrat de travail résultant du manquement de l'employeur de fournir du travail au salarié, s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse ; que l'employeur doit démontrer qu'il a fourni au salarié les moyens d'exercer son emploi ; qu'en décidant que l'employeur qui n'avait pris aucune initiative à la suite de l'entretien préalable et qui n'avait pas levé la mise à pied, n'avait pas commis de faute dès lors que le salarié ne justifiait pas qu'il s'était présenté à l'entreprise au terme de l'entretien préalable ni après,, alors qu'il appartenait à l'employeur de justifier qu'il avait fourni au salarié les moyens d'accomplir sa prestation, la cour d'appel a violé l'article 1315 du code civil, l'article L1231-1 et l'article L 1222-1 du code du travail
3° Alors que le salarié qui a fait l'objet d'une mise à pied conservatoire a droit à rémunération pendant la période de mise à pied dès lors qu'il n'est pas suivi d'un licenciement pour faute grave, et ce jusqu'au terme du contrat de travail ; que la cour d'appel a constaté que des bulletins de salaires avaient été délivrés jusqu'en août 2007 et a énoncé que faute de mesure de licenciement à la suite de l'entretien préalable du 7 août 2007 accompagné d'une mesure de mise à pied, le contrat avait pris fin le 21 janvier 2008 à l'initiative du salarié ; qu'en énonçant qu'il ne pouvait être soutenu que l'employeur avait manqué à ses obligations de payer le salaire pendant et après la mise à pied en visant les feuilles de paie, au motif que le salarié avait écrit qu'il considérait son contrat comme rompu à compter du 27 août, la cour d'appel qui a cependant retenu que le contrat s'était poursuivi jusqu'au 28 janvier 2008 n'a pas tiré les conséquences de ses constatations et a violé l'article L1231-1 L 1235-1 et L 1235-1 du code du travail.
4° Alors qu'en cas de modification unilatérale du contrat de travail du salarié sans son accord, ce dernier est fondé à réclamer l'exécution de son contrat aux conditions initiales ; que la cour d'appel qui a relevé que le salarié n'indiquait pas quelles sommes auraient été déduites de son salaire, sinon en se référant à un salaire au temps complet, sans rechercher l'existence d'un accord du salarié sur la réduction de son horaire et de sa rémunération au moment de la modification de son contrat de travail, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision au regard de l'article L 1231-1 et L 12221. 1 du code du travail
5° Alors qu'il appartient à l'employeur débiteur du paiement du salaire de prouver qu'il s'est libéré de sa dette ; qu'en énonçant que la preuve de l'interruption du salaire n'était pas établie, la cour d'appel, qui a fait peser la charge de la preuve sur le salarié, a violé l'article 1315 du code civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 11-15402
Date de la décision : 27/06/2012
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Colmar, 10 février 2011


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 27 jui. 2012, pourvoi n°11-15402


Composition du Tribunal
Président : M. Gosselin (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me de Nervo

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:11.15402
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