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27/06/2012 | FRANCE | N°10-27706

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 27 juin 2012, 10-27706


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Vu l'article 1315 du code civil ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X... a été engagée le 25 mars 2002 en qualité de serveuse par la société S3 R, qui gère un restaurant en partenariat avec la société SWT, laquelle exploite un centre de thalassothérapie, et la société SHLD qui exploite un hôtel à Tréboul ; qu'elle est devenue chef de rang ; que par lettre du 12 janvier 2007, la salariée a pris acte de la rupture du contrat de travail en invoquant une dégradation de ses

conditions de travail depuis le 10 mars 2006 et en reprochant notamment à son ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Vu l'article 1315 du code civil ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X... a été engagée le 25 mars 2002 en qualité de serveuse par la société S3 R, qui gère un restaurant en partenariat avec la société SWT, laquelle exploite un centre de thalassothérapie, et la société SHLD qui exploite un hôtel à Tréboul ; qu'elle est devenue chef de rang ; que par lettre du 12 janvier 2007, la salariée a pris acte de la rupture du contrat de travail en invoquant une dégradation de ses conditions de travail depuis le 10 mars 2006 et en reprochant notamment à son employeur le défaut de respect des délais de prévenance quant à la fixation des dates de congés, la modification constante de ses plannings de travail et une absence d'informations ; qu'elle a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes ;
Attendu que pour dire que la rupture produit les effets d'une démission l'arrêt retient que rien ne permet d'établir que les plannings produits par la société n'aient pas été affichés en temps et en heure et portés à la connaissance des salariés dans les délais requis que ce soit au niveau des congés ou des horaires de travail ;
Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel, qui a inversé la charge de la preuve, a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 25 février 2010, entre les parties, par la cour d'appel de Rennes ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Angers ;
Condamne la société S3R aux dépens ;
Vu l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, condamne la société S3R à payer à Me Jacoupy la somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept juin deux mille douze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par Me Jacoupy, avocat aux Conseils, pour Mme X...

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir dit que la prise d'acte de la rupture du contrat de travail devait produire les effets d'une démission et d'avoir débouté Madame X... de l'ensemble de ses demandes,
AUX MOTIFS QUE
« Considérant que, par lettre du 12 janvier 2007, Madame Valérie X... a pris acte de la rupture de son contrat de travail en invoquant une dégradation de ses conditions de travail depuis son retour de congé maternité le 10 mars 2006.
Qu'elle cite à titre d'exemples :
- le non respect des délais de prévenance en matière de fixation des congés payés,
- la modification de ses plannings de travail l'amenant à exercer son activité dans le cadre d'un horaire variable, ce qui n 'était pas le cas auparavant,
- l'absence d'informations nécessaires à l'exécution normale de ses fonctions,
- le fait que sa supérieure hiérarchique lui ait intimé l'ordre, le 31 décembre 2006 au soir, de changer de tenue car elle portait un chemisier blanc cassé au lieu d'un chemisier blanc,
- le fait que cette supérieure lui ait donné l'ordre de rentrer chez elle ce soir-là et que, depuis cette date, elle n'a plus eu aucune information sur les conséquences qu'il convenait d'en tirer.
Considérant qu 'il convient de rappeler que, lorsqu 'un salarié prend acte de la rupture de son contrat de travail en raison de faits qu'il reproche à son employeur, cette rupture produit les effets, soit d'un licenciement sans cause et réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiaient, soit dans le cas contraire d'une démission.
Considérant, en premier lieu, que rien ne permet d'établir que les plannings produits par la société n'aient pas été affichés en temps et en heure et portés à la connaissance dans les délais requis, que ce soit au niveau des congés que des horaires de travail, ni que Madame X... ait été délibérément placée en congés payés en juillet 2006 au lieu du mois de septembre 2006, étant précisé :
- que la société a expliqué que les anomalies relevées sur les plannings (mention du nom de certains salariés ne travaillant pas encore dans l'établissement) résultaient uniquement de la date d'édition de ces documents destinés à être communiqués dans le cadre de la procédure et du système informatique,
- qu'aucune demande émanant de Madame X... concernant la date de ses congés n 'est produite ni aucune lettre de réclamation,
- que le mois de juillet est une période de forte affluence et qu'il est pour le moins paradoxal que l'employeur ait entendu imposer de telles dates de congés.
Considérant, par ailleurs, que la société n'a nullement contesté avoir demandé aux salariés de reprendre leur travail le 9 décembre 2006 au lieu du 10 décembre, mais a justifié cette démarche par l'arrivée d'un groupe de clients important avec 24 heures d'avance.
Que cette demande, adressée à l'ensemble du personnel, était ponctuelle et résultait d'un événement exceptionnel et ne peut être constitutive d'une faute.
Considérant, en second lieu, que selon le contrat de travail les horaires de Madame X... devaient être ceux correspondant aux exigences de sa fonction sur la base légale de 41 heures par semaine.
Considérant que l'examen des plannings fait apparaître que la salariée ne travaillait pas selon des horaires fixes, mais dans le cadre d'horaires variables et discontinus, assurant le service du déjeuner de 11 h environ à 14 h 30, 15 h voire même 16 h ou 18 h, et celui du dîner de 18 h ou 18 h 30 à 22 h - 23 h, minuit et même parfois plus tard, cette variabilité des horaires étant d'ailleurs inhérente à l'activité de restaurant de la société, intégré de surcroît dans un complexe de thalassothérapie et hôtelier fonctionnant en période d'ouverture 7 jours sur 7.
Que, s'il est exact qu'à partir du mois de mars 2006, elle a été amenée à plusieurs reprises à assurer le service du petit-déjeuner à partir de 6 h 45 ou 7 h en raison du départ d'une employée, cette situation ne s'est produite qu'une vingtaine de fois en dix mois et qu'à ces occasions elle assurait dans la foulée, après les pauses, le service du déjeuner, finissant vers 14 h 30 - 15 h, ce qui lui permettait de ne pas multiplier les déplacements, de ne pas avoir à revenir le soir et de terminer sa journée de travail à une heure des plus correctes.
Considérant enfin qu'en ce qui concerne le changement des jours de repos, celui-ci n'est nullement intervenu à partir de mars 2006, mais uniquement en novembre 2006, alors que le restaurant fermait le 26 novembre 2006, que Madame X... a toujours conservé son lundi, bénéficiant de deux journées continues, et que les autres salariés ont également connu des modifications sur ce point, certains ayant leurs journées de congés en pleine semaine aussi.
Considérant que ces quelques changements opérés qui ne s 'appliquaient pas uniquement à Madame X..., qui rentraient dans le cadre de la nécessité des besoins du service et relevaient et relevaient du pouvoir d'organisation et de gestion de I 'employeur, qui ne contrevenaient pas aux dispositions contractuelles, n'étaient pas de nature à entraîner une dégradation importante des conditions de travail et à caractériser un manquement particulièrement grave de l'employeur.
Considérant en dernier lieu que, sans entrer dans la polémique concernant la tenue portée par la salariée le 31 décembre au soir qualifiée par certains de ses collègues d'indécente et de provocante (chemisier transparent ou non d'une couleur non conforme), il est constant que Madame X... n'a pas repris son activité à l'issue de ses congés le 10 janvier 2007.
Qu'elle ne peut se prévaloir d'une absence de fourniture de travail alors que, contrairement à ce qu'elle soutient, il lui incombait de se présenter à son poste au besoin, si elle avait omis de consulter les plannings avant son départ précipité le 31 décembre, en se renseignant sur ses horaires de travail le jour de la reprise.
Considérant qu'il s'ensuit que les reproches invoqués à l'encontre de l'employeur ne sont pas suffisamment caractérisés et constitutifs de manquements suffisamment graves pour justifier la prise d'acte par la salariée de la rupture de son contrat de travail, laquelle doit produire les effets d'une démission »,
ALORS, D'UNE PART, QUE
En retenant « que rien ne permet d'établir que les plannings produits par la société n'aient pas été affichés en temps et en heure et portés à la connaissance des salariés dans les délais requis », la Cour d'Appel a renversé le fardeau de la preuve et violé l'article 1351 du Code Civil,
ALORS, D'AUTRE PART, QUE
Dans ses conclusions d'appel (p. 8), la salariée faisait valoir notamment que l'employeur avait modifié le contrat de travail en lui imposant à partir de la fin du mois d'octobre 2006 de prendre son repos hebdomadaire le lundi et le mardi au lieu du dimanche et du lundi ; qu'ainsi, en se bornant à répondre que la salariée avait continué à bénéficier de deux jours consécutifs de repos hebdomadaire, la Cour d'Appel a violé les dispositions de l'article L 3132-12 du Code du Travail dont il résulte que si, dans la restauration, il peut être de droit dérogé à la règle du repos dominical, celui-ci doit alors être attribué par roulement.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 10-27706
Date de la décision : 27/06/2012
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Rennes, 25 février 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 27 jui. 2012, pourvoi n°10-27706


Composition du Tribunal
Président : M. Blatman (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Foussard, Me Jacoupy

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:10.27706
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