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21/06/2012 | FRANCE | N°11-19257

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 21 juin 2012, 11-19257


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Chambéry, 12 avril 2011), que la caisse primaire d'assurance maladie de l'Isère (la caisse) a, par décision du 22 mai 2001, pris en charge, au titre du tableau 57 A des maladies professionnelles, l'affection présentée par Mme X..., salariée de la société d'exploitation Provencia (l'employeur) ; que l'employeur a saisi une juridiction de sécurité sociale d'une demande tendant à ce que cette décision lui soit déclarée inopposable ;
Attendu

que l'employeur fait grief à l'arrêt de dire que la caisse a accompli son de...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Chambéry, 12 avril 2011), que la caisse primaire d'assurance maladie de l'Isère (la caisse) a, par décision du 22 mai 2001, pris en charge, au titre du tableau 57 A des maladies professionnelles, l'affection présentée par Mme X..., salariée de la société d'exploitation Provencia (l'employeur) ; que l'employeur a saisi une juridiction de sécurité sociale d'une demande tendant à ce que cette décision lui soit déclarée inopposable ;
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de dire que la caisse a accompli son devoir d'information, de lui déclarer opposable la décision du 22 mai 2001 de prise en charge de la maladie professionnelle déclarée par Mme X... et de le débouter de ses demandes alors, selon le moyen :
1°/ que celui qui est légalement tenu d'une obligation particulière d'information doit rapporter la preuve de l'exécution de son obligation ; qu'en l'espèce, pour juger que la caisse primaire d'assurance maladie avait respecté son devoir d'information, la cour d'appel a affirmé que la date de réception alléguée par l'employeur ne reposait que sur le tampon d'arrivée apposé par son service interne de traitement du courrier, au terme d'un délai qui excédait largement le délai normal d'acheminement d'un pli postal et ne pouvait être valablement opposé à l'expéditeur ; qu'en faisant ainsi reposer la charge de la preuve sur l'employeur, quand il appartenait à la caisse de justifier de la date à laquelle l'employeur avait réceptionné le courrier l'informant de la possibilité de consulter le dossier de l'assurée, la cour d'appel a violé l'article 1315 du code civil ;
2°/ que, préalablement à sa décision se prononçant sur le caractère professionnel de l'accident ou de la maladie professionnelle, la caisse doit informer l'employeur de la fin de la procédure d'instruction, des éléments susceptibles de lui faire grief, de la possibilité de consulter le dossier pendant un certain délai et de la date à laquelle elle prévoit de prendre sa décision ; qu'en l'espèce, la cour d'appel ne pouvait juger que la caisse avait satisfait à son obligation d'information en se bornant à affirmer qu'elle avait adressé le 10 mai 2001 une lettre avisant l'employeur qu'il disposait d'un délai de dix jours pour consulter le dossier et que la date à laquelle l'employeur soutenait avoir réceptionné ce courrier d'information ne reposait que sur le tampon d'arrivée apposé par son service interne au terme d'un délai excédant largement le délai normal d'acheminement d'un pli postal ; qu'en statuant par un motif général et inopérant tiré de la durée normale d'acheminement du courrier, la cour d'appel, qui n'a pas constaté que la caisse justifiait du dépôt postal de sa lettre datée du 10 mai 2001 et qui n'a pas vérifié si, comme le faisait valoir l'employeur, la date de réception du courrier au 16 mai 2001 n'était pas contestée par la caisse, a privé sa décision de base légale au regard de l'article R. 441-11 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction alors applicable ;
3°/ que le juge ne peut dénaturer les pièces versées aux débats ; qu'en l'espèce, pour juger que la caisse primaire d'assurance maladie avait respecté son devoir d'information, la cour d'appel a énoncé qu'elle justifiait avoir adressé le 10 mai 2001 une lettre d'information avisant l'employeur qu'il disposait d'un délai de dix jours à compter de cette date pour venir consulter les pièces constitutives du dossier ; qu'en statuant ainsi, quand aucune pièce versée aux débats n'établissait la date de dépôt du courrier aux services postaux, que la date du 10 mai 2001 indiquée sur ce courrier était seulement celle de son établissement et que sa date de réception au 16 mai 2001 n'était pas contestée, la cour d'appel a violé le principe susvisé et l'article 4 du code de procédure civile ;
4°/ qu'avant de se prononcer sur le caractère professionnel de la maladie d'un assuré, la caisse primaire d'assurance maladie doit informer l'employeur de la fin de la procédure d'instruction, des éléments recueillis susceptibles de lui faire grief, de la possibilité de consulter le dossier et de la date à laquelle elle prévoit de prendre sa décision ; qu'en l'espèce, pour déclarer opposable à l'employeur la décision de prise en charge de la maladie professionnelle de l'assurée, la cour d'appel a énoncé que l'employeur avait déjà connaissance des éléments de fait ayant conduit à la décision de prise en charge puisqu'il avait reconnu au cours de l'enquête administrative diligentée dans ses services l'exposition de l'assurée aux risques à l'origine de sa maladie ; qu'en statuant par un motif impropre à dispenser la caisse de l'exécution de son obligation d'informer l'employeur dans un délai suffisant avant la décision de prise en charge, la cour d'appel a violé l'article R. 441-11 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction alors applicable ;
5°/ que la caisse primaire d'assurance maladie assure l'information de l'employeur préalablement à sa décision sur la procédure d'instruction et sur les points susceptibles de lui faire grief et elle doit attendre l'expiration du délai qu'elle impartit à l'employeur avant de prendre sa décision sur le caractère professionnel de la maladie déclarée par l'assuré ; qu'en l'espèce, en se bornant à relever que l'employeur avait déjà connaissance, depuis l'enquête administrative, des éléments de fait ayant conduit à la décision de prise en charge, sans rechercher, comme elle y était invitée par l'exposante, si la caisse n'avait pas en réalité pris sa décision dès le 10 mai 2001 en sollicitant de l'employeur la communication des éléments de salaire de l'assurée afin de lui permettre de procéder au règlement des indemnités journalières qui lui étaient dues en raison de sa maladie professionnelle, sans attendre l'expiration du délai de dix jours imparti à l'employeur pour consulter le dossier, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'ancien article R. 441-11 du code de la sécurité sociale ;
Mais attendu que l'arrêt retient que, justifiant avoir adressé, le 10 mai 2001, une lettre d'information à l'employeur, en l'avisant qu'il disposait d'un délai de dix jours à compter de cette date pour venir consulter les pièces constitutives du dossier, la caisse, qui a effectivement statué sur la demande de prise en charge le mardi 22 mai suivant, a satisfait à son obligation d'information dans la mesure où la date à laquelle cette dernière a déclaré avoir réceptionné ce courrier, soit le mercredi16 mai, ne repose que sur le tampon d'arrivée apposé par son service interne de traitement du courrier, aux termes d'un délai qui excède largement le délai normal d'acheminement d'un pli postal et ne saurait donc être valablement opposé à l'expéditeur ;
Qu'en l'état de ces constatations et énonciations relevant de son pouvoir souverain d'appréciation des éléments de fait et de preuve soumis à son examen, la cour d'appel, sans dénaturation ni inversion de la charge de la preuve, a pu, sans avoir à procéder à une recherche que ses constatations rendaient inutile, juger que la caisse ayant respecté son obligation d'information, sa décision de prise en charge était opposable à l'employeur ;
D'où il suit que le moyen, inopérant en sa quatrième branche qui vise un motif surabondant, n'est pas fondé pour le surplus ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société d'exploitation Provencia - Provencia shop.com aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société d'exploitation Provencia - Provencia shop.com ; la condamne à payer à la caisse primaire d'assurance maladie de l'Isère la somme de 2 500 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt et un juin deux mille douze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Coutard et Munier-Apaire, avocat aux Conseils, pour la société d'exploitation Provencia - Provencia Shop.com
Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué D'AVOIR dit que la CPAM de l'Isère avait accompli son devoir d'information, D'AVOIR déclaré opposable à la société Provencia la décision datée du 22 mai 2001 de prise en charge de la maladie professionnelle déclarée par Madame Véronique X... ET D'AVOIR débouté la société Provencia ses demandes ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE «afin de respecter le principe du contradictoire, l'article R. 441-11 du code de la sécurité sociale impose à la caisse primaire d'assurance maladie, avant de se prononcer sur le caractère professionnel d'un accident ou d'une maladie, d'informer l'employeur de la fin de la procédure d'instruction, des éléments recueillis susceptibles de lui faire grief, de la possibilité de consulter le dossier et de la date à laquelle elle prévoit de prendre une décision ; que justifiant avoir adressé le jeudi 10 mai 2001 cette lettre d'information à l'employeur, en l'avisant qu'il disposait de dix jours à compter de cette date pour venir consulter les pièces constitutives du dossier, la caisse, qui a effectivement statué sur la demande de prise en charge le mardi 22 mai suivant, sans que la société PROVENCIA se soit manifesté auprès d'elle, a satisfait à son obligation dans la mesure où la date à laquelle cette dernière a déclaré avoir réceptionné ce courrier, soit le mercredi 16 mai, ne repose que sur le tampon d'arrivée apposé par son service interne de traitement du courrier, aux termes d'un délai qui excède largement le délai normal d'acheminement d'un pli postal et ne saurait donc être valablement opposé à l'expéditeur ; qu'en tout état de cause, ayant reconnu au cours de l'enquête diligentée dans ses services l'exposition de sa salariée aux risques à l'origine de la maladie qu'elle a contractée, elle avait déjà connaissance des éléments de fait ayant conduit la caisse à prendre celle-ci au titre de la législation professionnelle, ce qui explique qu'elle n'ait pas usé de la possibilité qui lui est faite de venir consulter les pièces du dossier ; que c'est donc à juste titre que le premier juge l'a déboutée de son recours » (arrêt, p. 2-3) ;
AUX MOTIFS ADOPTES QUE «sur le non respect du contradictoire, … la Société PROVENCIA fait valoir que la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de l'Isère l'a invitée à venir consulter le dossier de sa salariée, le jeudi 10 mai 2001 ; qu'elle a réceptionné ce courrier, le mercredi 16 mai 2001 ; que la Caisse a pris sa décision, le mardi 22 mai 2001, ce qui n'a laissé à l'employeur de Mme X... que quatre jours ouvrés maximum pour prendre connaissance du dossier et faire valoir ses observations ; … que l'Organisme en avisant l'employeur le 10 mai et en attendant jusqu'au 22 mai pour prendre sa décision de prise en charge a largement laissé à la Société PROVENCIA le temps de venir consulter le dossier de sa salariée ; que le Tribunal estime donc qu'il a donc rempli son devoir d'information et que sa décision du 22 mai 2001 est parfaitement opposable à l'employeur de Mme X... » (jugement, p. 2) ;
1./ ALORS, D'UNE PART, QUE celui qui est légalement tenu d'une obligation particulière d'information doit rapporter la preuve de l'exécution de son obligation ; qu'en l'espèce, pour juger que la Caisse Primaire d'Assurance Maladie avait respecté son devoir d'information, la Cour d'appel a affirmé que la date de réception alléguée par l'employeur ne reposait que sur le tampon d'arrivée apposé par son service interne de traitement du courrier, au terme d'un délai qui excédait largement le délai normal d'acheminement d'un pli postal et ne pouvait être valablement opposé à l'expéditeur ; qu'en faisant ainsi reposer la charge de la preuve sur l'employeur, quand il appartenait à la Caisse de justifier de la date à laquelle l'employeur avait réceptionné le courrier l'informant de la possibilité de consulter le dossier de l'assurée, la Cour d'appel a violé l'article 1315 du Code civil ;
2./ ALORS, D'AUTRE PART, QUE préalablement à sa décision se prononçant sur le caractère professionnel de l'accident ou de la maladie professionnelle, la Caisse doit informer l'employeur de la fin de la procédure d'instruction, des éléments susceptibles de lui faire grief, de la possibilité de consulter le dossier pendant un certain délai et de la date à laquelle elle prévoit de prendre sa décision ; qu'en l'espèce, la Cour d'appel ne pouvait juger que la Caisse avait satisfait à son obligation d'information en se bornant à affirmer qu'elle avait adressé le 10 mai 2001 une lettre avisant l'employeur qu'il disposait d'un délai de dix jours pour consulter le dossier et que la date à laquelle l'employeur soutenait avoir réceptionné ce courrier d'information ne reposait que sur le tampon d'arrivée apposé par son service interne au terme d'un délai excédant largement le délai normal d'acheminement d'un pli postal ; qu'en statuant par un motif général et inopérant tiré de la durée normale d'acheminement du courrier, la Cour d'appel, qui n'a pas constaté que la Caisse justifiait du dépôt postal de sa lettre datée du 10 mai 2001 et qui n'a pas vérifié si, comme le faisait valoir l'employeur, la date de réception du courrier au 16 mai 2001 n'était pas contestée par la Caisse, a privé sa décision de base légale au regard de l'article R. 441-11 du Code de la sécurité sociale, dans sa rédaction alors applicable ;
3./ ALORS, ENSUITE, QUE le juge ne peut dénaturer les pièces versées aux débats ; qu'en l'espèce, pour juger que la Caisse Primaire d'Assurance Maladie avait respecté son devoir d'information, la Cour d'appel a énoncé qu'elle justifiait avoir adressé le 10 mai 2001 une lettre d'information avisant l'employeur qu'il disposait d'un délai de dix jours à compter de cette date pour venir consulter les pièces constitutives du dossier ; qu'en statuant ainsi, quand aucune pièce versée aux débats n'établissait la date de dépôt du courrier aux services postaux, que la date du 10 mai 2001 indiquée sur ce courrier était seulement celle de son établissement et que sa date de réception au 16 mai 2001 n'était pas contestée, la Cour d'appel a violé le principe susvisé et l'article 4 du Code de procédure civile ;
4./ ALORS, EGALEMENT, QU'avant de se prononcer sur le caractère professionnel de la maladie d'un assuré, la Caisse Primaire d'Assurance Maladie doit informer l'employeur de la fin de la procédure d'instruction, des éléments recueillis susceptibles de lui faire grief, de la possibilité de consulter le dossier et de la date à laquelle elle prévoit de prendre sa décision ; qu'en l'espèce, pour déclarer opposable à l'employeur la décision de prise en charge de la maladie professionnelle de l'assurée, la Cour d'appel a énoncé que l'employeur avait déjà connaissance des éléments de fait ayant conduit à la décision de prise en charge puisqu'il avait reconnu au cours de l'enquête administrative diligentée dans ses services l'exposition de l'assurée aux risques à l'origine de sa maladie ; qu'en statuant par un motif impropre à dispenser la Caisse de l'exécution de son obligation d'informer l'employeur dans un délai suffisant avant la décision de prise en charge, la Cour d'appel a violé l'article R. 441-11 du Code de la sécurité sociale, dans sa rédaction alors applicable ;
5./ ALORS, EN TOUT ETAT DE CAUSE, QUE la Caisse Primaire d'Assurance Maladie assure l'information de l'employeur préalablement à sa décision sur la procédure d'instruction et sur les points susceptibles de lui faire grief et elle doit attendre l'expiration du délai qu'elle impartit à l'employeur avant de prendre sa décision sur le caractère professionnel de la maladie déclarée par l'assuré ; qu'en l'espèce, en se bornant à relever que l'employeur avait déjà connaissance, depuis l'enquête administrative, des éléments de fait ayant conduit à la décision de prise en charge, sans rechercher, comme elle y était invitée par l'exposante (conclusions, p.7), si la Caisse n'avait pas en réalité pris sa décision dès le 10 mai 2001 en sollicitant de l'employeur la communication des éléments de salaire de l'assurée afin de lui permettre de procéder au règlement des indemnités journalières qui lui étaient dues en raison de sa maladie professionnelle, sans attendre l'expiration du délai de dix jours imparti à l'employeur pour consulter le dossier, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'ancien article R. 441-11 du Code de la sécurité sociale.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 11-19257
Date de la décision : 21/06/2012
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Chambéry, 12 avril 2011


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 21 jui. 2012, pourvoi n°11-19257


Composition du Tribunal
Président : M. Héderer (conseiller le plus ancien non empêché, faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Boutet, SCP Coutard et Munier-Apaire

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:11.19257
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