La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

21/06/2012 | FRANCE | N°11-19087

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 21 juin 2012, 11-19087


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nancy, 6 avril 2011), que Roland X..., ayant travaillé dans des mines de fer, de 1941 à 1976, est décédé le 6 octobre 2006 ; que le 21 novembre 2006, sa veuve a établi une déclaration de maladie professionnelle pour une sidérose, sollicitant l'attribution d'une rente de conjoint survivant ; que l'union régionale des sociétés de secours minières de l'Est, devenue la caisse autonome régionale de la sécurité sociale dans les mines dite

CARMI de l'Est (la caisse) a reconnu l'existence d'une sidérose professionnell...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nancy, 6 avril 2011), que Roland X..., ayant travaillé dans des mines de fer, de 1941 à 1976, est décédé le 6 octobre 2006 ; que le 21 novembre 2006, sa veuve a établi une déclaration de maladie professionnelle pour une sidérose, sollicitant l'attribution d'une rente de conjoint survivant ; que l'union régionale des sociétés de secours minières de l'Est, devenue la caisse autonome régionale de la sécurité sociale dans les mines dite CARMI de l'Est (la caisse) a reconnu l'existence d'une sidérose professionnelle mais a refusé à Mme X... le bénéfice de la rente de conjoint survivant au motif que le décès n'était pas imputable à la maladie ; que l'intéressée a saisi une juridiction de sécurité sociale d'un recours ;

Attendu que Mme X... fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande, alors, selon le moyen :

1°/ que la présomption d'imputabilité au travail des lésions apparues à la suite d'un accident du travail s'étend pendant toute la durée de l'incapacité de travail précédant, soit la guérison complète, soit la consolidation de l'état de la victime ; qu'en écartant cette présomption en l'espèce, tout en constatant que le décès était survenu avant toute guérison ou consolidation de la sidérose professionnelle qui venait seulement d'être découverte, de sorte qu'il y avait une continuité d'arrêt de travail et de soins entre cette maladie professionnelle, assimilée à un accident, et le décès, et que les expertises réalisées n'excluaient pas toute relation entre cet accident et le décès, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations au regard de l'article L. 411-1 du code de la sécurité sociale, qu'elle a violé par fausse application, ensemble les articles L. 443-1, L. 461-1 et R. 434-7 du même code ;

2°/ que lorsque le décès du salarié bénéficie de la présomption d'imputabilité au travail, il appartient à la caisse ou à l'employeur de détruire cette présomption en rapportant la preuve de ce que ce décès a eu une cause totalement étrangère au travail ; qu'en s'abstenant, dans ces conditions, de rechercher si la caisse avait dûment rapporté la preuve d'une cause de ce décès totalement étrangère au travail, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 411-1 du code de la sécurité sociale ;

3°/ qu'en l'absence de présomption de causalité, il appartient au conjoint survivant de la victime, pour prétendre à l'attribution de la rente de conjoint survivant, d'établir que le décès de la victime a eu, non pas pour cause unique sa maladie professionnelle, mais seulement un lien direct avec celle-ci ; qu'à supposer même que le décès de Roland X... n'aurait pas bénéficié de la présomption d'imputabilité, les juges d'appel ne pouvaient pour autant écarter la preuve du simple lien de causalité nécessaire entre la sidérose professionnelle et le décès tout en constatant que cette sidérose avait pu "aggraver le tableau", et "contribuer", même "probablement de façon mineure" au décès, de sorte qu'en se déterminant comme ils l'ont fait, ils n'ont pas tiré à nouveau les conséquences légales de leurs propres constatations au regard de l'article L. 411-1 du code de la sécurité sociale, qu'ils ont donc encore violé par fausse application ainsi que les articles L. 443-1, L. 461-1 et R. 434-7 du même code ;

Mais attendu que la présomption d'imputabilité du décès à la maladie professionnelle a été écartée par une décision du 7 avril 2010 de la même cour d'appel, devenue irrévocable ;

Et attendu qu'après avoir analysé les documents médicaux et les rapports d'autopsie et d'expertise soumis aux débats, l'arrêt retient qu'il n'est pas démontré que l'état pulmonaire de Roland X... ait participé à son décès, quand bien même il est établi que l'intervention chirurgicale envisagée a été différée de quelques jours, compte tenu des complications survenues lors de l'angiographie et de l'état de comorbidité du patient lié à son âge et à sa pathologie respiratoire ;

Que de ces constatations et énonciations, la cour d'appel, appréciant souverainement les éléments de fait et de preuve qui lui étaient soumis, a pu déduire que la preuve du lien de causalité entre la maladie professionnelle et le décès de la victime n'était pas établie ;

D'où il suit que le moyen, irrecevable en ses deux premières branches, n'est pas fondé pour le surplus ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne Mme X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt et un juin deux mille douze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Peignot, Garreau et Bauer-Violas, avocat aux Conseils, pour Mme X...

Le moyen reproche à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir dit que le décès de Monsieur X... n'était pas lié à la sidérose professionnelle dont il était atteint et débouté en conséquence Madame X... de sa demande en paiement de la rente de conjoint survivant,

AUX MOTIFS QUE Madame X... réclame l'attribution d'une rente de conjoint survivant en estimant qu'il existe une relation de cause à effet entre la carrière minière de son époux et son décès ; que pour que soit attribuée au conjoint survivant la rente prévue par l'article L.434-8 du Code de la sécurité sociale, il appartient à ce dernier de prouver que le décès est imputable à la maladie professionnelle ; que Madame X... produit, à l'appui de sa demande, le certificat médical établi par le Docteur Y..., médecin généraliste, le 20 octobre 2006, mentionnant que Monsieur X... est décédé le 6 octobre 2006, suite à des complications cardio-respiratoires, et que son état pulmonaire a participé au décès ; que le rapport d'autopsie médico-légale du Docteur Z..., médecin légiste, expert près de la Cour d'appel de Metz, daté du 19 février 2007, mentionne que les constatations médico-légales per-autopsiques, effectuées le 19 décembre 2006, permettent d'authentifier une sévère artériosclérose vasculaire pluri-focale en particulier de localisation aortique et coronarienne responsable en particulier au niveau cardiaque de multiples zones de sténose coronarienne ; qu'il indique qu'il n'existe aucune relation certaine, directe et exclusive entre la survenue brutale de l'accident cardiaque sur coronaropathie chronique artérioscléreuse et la sidérose pulmonaire d'origine professionnelle dont était atteint Monsieur X... ; que le Docteur Z... conclut de la manière suivante : « Compte tenu des données anamnestiques et des constatations autopsiques puis histologiques, il ressort que le décès de Monsieur Roland X... fut consécutif à des troubles paroxystiques du rythme survenus sur une sévère coronaropathie chronique sténosante. Le décès survenu dans un contexte d'antécédents de sidérose pulmonaire n'est pas imputable à l'évolution de la pneumoconiose professionnelle » ; que par certificat médical établi le 2 avril 2008, le Docteur A... atteste que Monsieur X... a été admis dans le service de cardiologie du centre hospitalier régional de Metz Thionville, le 2 octobre 2006, pour une coronarographie diagnostiquée dans le cadre d'un bilan préopératoire d'un rétrécissement aortique serré calcifié ; qu'il indique que la coronarographie a révélé un athérome coronaire tritronculaire menaçant, extrêmement sévère ; qu'un bas débit circulatoire transitoire est survenu, lors de la procédure, nécessitant la mise en place d'une contre pulsion par ballonnet aortique qui a permis de récupérer un état circulatoire stable ; que l'état de Monsieur X... a fait l'objet d'une discussion médicochirurgicale ; qu'il précise que, compte tenu de la comorbidité importante du patient liée essentiellement à son âge et surtout sa pathologie respiratoire (sidérose professionnelle), l'intervention a été différée de quelques jours sous couvert de la contre pulsion par ballonnet intraaortique ; que malheureusement, Monsieur X... est décédé, le 6 octobre 2006, d'un choc cardiogénique réfractaire ; que dans ses écrits, Madame X... admet que la sévérité de l'atteinte cardiaque de Monsieur X... pouvait provoquer le décès, qu'il souffrait d'une pathologie cardiaque qui n'a été ni provoquée, ni même aggravée par la sidérose et pouvant à elle seule provoquer la mort mais elle soutient, en s'appuyant sur le certificat médical établi par le Docteur A..., le 2 avril 2008, et sur celui du Docteur Y..., le 20 octobre 2006, que Monsieur X... a, du fait de l'existence de la maladie professionnelle, perdu une chance d'être opéré en urgence, tel que cela était projeté ; que dans son rapport d'autopsie du corps de Monsieur X..., le Docteur Z... souligne la présence d'importantes lésions d'artériosclérose avec sténose coronariennes droite et gauche qui fut responsable d'un trouble paroxystique du rythme cardiaque aboutissant rapidement au décès ; qu'il rappelle que, selon les données anamnestiques fournies par le service de cardiologie du CRH de Metz dans un courrier adressé au Docteur B..., il apparaît que Monsieur X... avait été hospitalisé, le 2 octobre, pour un bilan d'un rétrécissement aortique calcifié, serré, symptomatique ; que l'angiographie s'est compliquée d'une fibrillation ventriculaire récupérée après choc électrique externe et d'un infarctus du myocarde dans le territoire antérieur ; que la situation alarmante a amené la mise en place d'un ballonnet de contre pulsion intra aortique et la prévision d'une chirurgie semi urgente avec remplacement de la valve et pontage artro coronarien ; que Monsieur X... est décédé le 6 octobre 2006 ; qu'il résulte de ce rapport, contrairement à ce qu'affirme le Docteur Y..., que le décès brutal de Monsieur X... était sans lien avec la maladie professionnelle ; que suite aux contestations de Madame X.... la Cour a, par arrêt du 7 avril 2010, ordonné une mesure d'expertise médicale sur pièces qui a été confiée au Professeur C... avec mission : - de dire si l'état cardio-vasculaire du patient a pu être aggravé du fait de sa pathologie pulmonaire, - de décrire les soins qui auraient pu lui être prodigués s'il n'avait pas été atteint de sidérose pulmonaire, - de dire si ces soins, en l'absence de sidérose pulmonaire, auraient pu permettre d'améliorer son état de santé ou de différer son décès, - plus généralement, de dire si la maladie professionnelle dont il était affecté a pu contribuer, et dans l'affirmative dans quelle mesure, a provoqué ou a précipité son décès ; que la Cour a précisé que l'expert devrait mener ses opérations dans le respect du contradictoire, adresser un pré rapport aux parties avant la rédaction du rapport final et leur laisser un délai suffisant pour présenter leurs observations ; que le professeur C... a déposé son rapport sans établir préalablement un pré rapport ; que Madame X... soutient que le principe du contradictoire n'a pas été respecté ; que par application des dispositions de l'article 16 du Code de procédure civile, le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe du contradictoire ; qu'il ne peut retenir, dans sa décision, les moyens, les explications, et les documents invoqués ou produits par les parties, que si celles-ci ont été à même d'en débattre contradictoirement ; que le Professeur D... a effectué une expertise médicale sur pièces, son rapport a été régulièrement communiqué aux parties qui ont été à même d'en débattre de sorte que le principe du contradictoire a été respecté, même en l'absence de dépôt d'un pré rapport ; que l'expert mentionne dans son rapport que les lésions cardio-vasculaires de Monsieur X... sont sans rapport avec la pathologie pulmonaire en ajoutant que, d'un autre côté, sa situation, lors de la complication rencontrée pendant l'acte coronarographie, a pu être aggravée par son insuffisance respiratoire même si la gravité de la situation cardio-vasculaire peut expliquer à elle seule l'issue finale ; qu'il indique quant aux soins qui auraient pu être prodigués à Monsieur X... s'il n'avait pas été atteint de sidérose pulmonaire, que le seul doute qui persiste à la lecture du dossier est la prise de décision d'une chirurgie en urgence lors de la complication de la coronarographie ; qu'il relève faussement à cet égard que le décès est survenu le jour même de la coronarographie, tout en précisant qu'il n'est pas certain que l'issue finale en ait été changée compte tenu de la gravité du tableau clinique ; qu'il précise que si la sidérose pulmonaire a pu, par l'insuffisance respiratoire qu'elle générait, aggraver le tableau lors du choc cardiogénique, la situation artérielle coronaire, le rétrécissement serré et l'âge du patient peuvent à eux seuls expliquer très facilement le tableau ; qu'il conclut enfin de manière générale en indiquant que la maladie professionnelle dont a été affecté Monsieur X... n'a pas provoqué son décès, qu'elle a pu éventuellement y contribuer mais probablement de façon mineure compte tenu de la sévérité du reste du tableau valvulaire et coronaire ; qu'il est donc établi, contrairement à ce qu'affirme Madame X..., que le Professeur C... a répondu à toutes les questions qui lui ont été posées par la Cour ; qu'il indique clairement, comme le Docteur Z... dans son rapport d'autopsie, et ce, même s'il a faussement indiqué que le décès était survenu le même jour que la coronarographie, que la maladie professionnelle de Monsieur X... n'a pas provoqué son décès, que si elle avait pu éventuellement y contribuer, ce n'était probablement que de manière mineure ; que la Cour dispose d'éléments suffisants pour statuer, il n'y a pas lieu d'ordonner un complément d'expertise ; qu'il n'est, au vu des rapports du Docteur Z... et du Professeur C..., pas démontré que l'état pulmonaire de Monsieur X... ait participé à son décès, quand bien même il est établi que l'intervention chirurgicale envisagée a été différée de quelques jours, compte tenu des complications survenues lors de l'angiographie et de l'état de comorbidité du patient lié à son âge et à sa pathologie respiratoire ; que la demande de Madame X... n'est pas fondée et doit être rejetée ;

ALORS, D'UNE PART, QUE la présomption d'imputabilité au travail des lésions apparues à la suite d'un accident du travail s'étend pendant toute la durée de l'incapacité de travail précédant, soit la guérison complète, soit la consolidation de l'état de la victime ; qu'en écartant cette présomption en l'espèce, tout en constatant que le décès était survenu avant toute guérison ou consolidation de la sidérose professionnelle qui venait seulement d'être découverte, de sorte qu'il y avait une continuité d'arrêt de travail et de soins entre cette maladie professionnelle, assimilée à un accident, et le décès, et que les expertises réalisées n'excluaient pas toute relation entre cet accident et le décès, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations au regard de l'article L.411-1 du code de la sécurité sociale, qu'elle a violé par fausse application, ensemble les articles L 443-1, L 461-1 et R 434-7 du même code ;

ALORS, D'AUTRE PART, QUE lorsque le décès du salarié bénéficie de la présomption d'imputabilité au travail, il appartient à la caisse ou à l'employeur de détruire cette présomption en rapportant la preuve de ce que ce décès a eu une cause totalement étrangère au travail ; qu'en s'abstenant, dans ces conditions, de rechercher si la caisse avait dûment rapporté la preuve d'une cause de ce décès totalement étrangère au travail, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L 411-1 du code de la sécurité sociale,

ALORS, EN TOUT ETAT DE CAUSE, QU'en l'absence de présomption de causalité, il appartient au conjoint survivant de la victime, pour prétendre à l'attribution de la rente de conjoint survivant, d'établir que le décès de la victime a eu, non pas pour cause unique sa maladie professionnelle, mais seulement un lien direct avec celle-ci ; qu'à à supposer même que le décès de Monsieur X... n'aurait pas bénéficié de la présomption d'imputabilité, les juges d'appel ne pouvaient pour autant écarter la preuve du simple lien de causalité nécessaire entre la sidérose professionnelle et le décès tout en constatant que cette sidérose avait pu « aggraver le tableau », et « contribuer », même « probablement de façon mineure » au décès, de sorte qu'en se déterminant comme ils l'ont fait, ils n'ont pas tiré à nouveau les conséquences légales de leurs propres constatations au regard de l'article L 411-1 du code de la sécurité sociale, qu'ils ont donc encore violé par fausse application ainsi que les articles L443-1, L 461-1 et R 434-7 du même code.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 11-19087
Date de la décision : 21/06/2012
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Nancy, 06 avril 2011


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 21 jui. 2012, pourvoi n°11-19087


Composition du Tribunal
Président : M. Loriferne (président)
Avocat(s) : SCP Boutet, SCP Célice, Blancpain et Soltner, SCP Peignot, Garreau et Bauer-Violas

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:11.19087
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award