La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

23/05/2012 | FRANCE | N°10-27265

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 23 mai 2012, 10-27265


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique du pourvoi principal de la société A tout'âge Sologne :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Orléans, 12 octobre 2010), que le syndicat des copropriétaires des Résidences de Touraine, qui gère une résidence pour personnes âgées, auxquelles il assurait un service d'assistance médico-sociale, a externalisé ce service, à compter du 1er mars 2007, auprès de l'Association de service à domicile du Loir-et-Cher (ADMR 41) ; que cette association a repris les contrats de travail de sept salariées,

Mmes X..., Y..., Z..., E..., F..., G... et H..., et en a engagé deux au...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique du pourvoi principal de la société A tout'âge Sologne :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Orléans, 12 octobre 2010), que le syndicat des copropriétaires des Résidences de Touraine, qui gère une résidence pour personnes âgées, auxquelles il assurait un service d'assistance médico-sociale, a externalisé ce service, à compter du 1er mars 2007, auprès de l'Association de service à domicile du Loir-et-Cher (ADMR 41) ; que cette association a repris les contrats de travail de sept salariées, Mmes X..., Y..., Z..., E..., F..., G... et H..., et en a engagé deux autres, Mmes A... et B... ; qu'elle a dénoncé la convention la liant aux Résidences de Touraine à compter du 1er janvier 2009 et informé les salariées du transfert de leurs contrats de travail à la société A tout'âge Sologne exerçant son activité sous l'enseigne ADHAP services ; que cette dernière ayant refusé de reprendre leurs contrats de travail, les salariées ont saisi la juridiction prud'homale de demandes tendant à la condamnation de l'ADMR 41, de la société A tout'âge Sologne et des Résidences de Touraine, à leur verser, notamment, des dommages-intérêts pour rupture abusive de leurs contrats de travail et des indemnités pour non respect de la procédure de licenciement et de préavis, les congés payés afférents, et des indemnités kilométriques ;
Attendu que la société A tout'âge Sologne fait grief à l'arrêt de juger que l'entité médico-sociale au sein des Résidences de Touraine lui avait été transférée en application de l'article L. 1224-1 du code du travail et de la condamner, en conséquence, à verser aux salariés diverses sommes à ce titre alors, selon le moyen :
1°/ que l'article L. 1224-1 du code du travail n'a vocation à s'appliquer à l'exécution d'un marché de prestation de services par un nouveau titulaire, qu'à la condition qu'il s'accompagne du transfert d'une entité économique autonome constituée d'un ensemble de personnes et d'éléments corporels ou incorporels permettant l'exercice d'une activité économique qui poursuit un objectif propre et dont l'identité est maintenue ; qu'en imposant, en l'espèce, à la société ADHAP la reprise des neufs salariés de l'ADMR affectés à l'activité médico-sociale au sein des Résidences de Touraine, sans avoir recherché si les éléments caractérisant l'entité économique autonome, telle qu'elle l'avait définie, avaient été transférés au nouveau prestataire de sorte que l'entité économique avait conservé son identité, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1224-1 du code du travail ;
2°/ qu'il résulte de l'article L. 1224-1 du code du travail interprété au regard de la directive 2001/ 23/ CE du 12 mars 2001, que les contrats de travail en cours sont maintenus entre le nouvel employeur et le personnel de l'entreprise en cas de transfert d'une entité économique autonome dès lors qu'elle conserve son identité, et dont l'activité est poursuivie ou reprise ; qu'en décidant que les contrats de travail des salariés de l'ADMR 41, affectés à l'activité médico-sociale des Résidences de Touraine, devaient se poursuivre avec la société A tout'âge Sologne exerçant sous l'enseigne ADHAP après avoir pourtant constaté que l'activité en cause était assurée désormais par plusieurs entreprises prestataires entre lesquelles elle avait été répartie, ce dont il résultait qu'elle avait perdu son identité, la cour d'appel a violé l'article L. 1224-1 du code du travail ;
3°/ que ne dispose pas d'une autonomie suffisante le service d'une entreprise auquel sont affectés des salariées qui ne disposent pas de compétences spécifiques à l'activité en cause ; qu'en l'espèce, la cour d'appel qui n'a pas répondu au moyen des conclusions de la société A tout'âge Sologne tiré de ce que les salariées attachées à l'activité médico-sociale en cause étaient, à l'exception de la coordonnatrice, Mme C..., laquelle travaillait pour plusieurs sociétés, polyvalents, ce dont il résultait que l'activité de la société ADMR au profit de la société Résidences de Touraine n'était en rien spécifique ou détachable de ses autres activités de prestations de service, a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
4°/ qu'en tout état de cause, est frauduleux le comportement du prestataire de service qui provoque la rupture du contrat de prestation de service afin de supprimer les emplois y étant attachés sans appliquer la procédure impérative de licenciement ; qu'en ne recherchant pas si la société ADMR n'avait pas dénoncé les conventions conclues avec les résidents des Résidences de Touraine concernant les prestations les plus contraignantes effectuées de nuit, dans le seul but de se défaire de neuf salariées attachées à cette activité et d'imposer leur reprise par l'entreprise A tout'âge Sologne, en évitant, ainsi, la mise en oeuvre d'une procédure de licenciement, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1224-1 du code du travail ;
Mais attendu que la cour d'appel, qui a caractérisé l'existence d'un service médico-social disposant, dans la résidence, de moyens propres en personnel et matériel et jouissant d'une autonomie, et qui a fait ressortir que ce service avait été repris par le nouveau prestataire, avec les mêmes moyens nécessaires à la poursuite de son activité, a pu en déduire, sans avoir à effectuer la recherche visée à la dernière branche du moyen que ses constatations rendaient inutile, que l'entité économique autonome que constituait ce service avait été transférée à son nouvel exploitant, tenu à ce titre de conserver le personnel qui y était attaché ; que le moyen n'est pas fondé ;
Et attendu que le rejet du pourvoi principal rend sans objet le pourvoi provoqué éventuel ;
PAR CES MOTIFS :
Dit n'y avoir lieu à statuer sur le pourvoi provoqué ;
REJETTE le pourvoi principal ;
Condamne la société A tout'âge Sologne aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois mai deux mille douze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit au pourvoi principal par la SCP Fabiani et Luc-Thaler, avocat aux Conseils pour la société A tout'âge Sologne.
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR jugé que l'activité médico-sociale au sein des RESIDENCES DE TOURAINE avait été transférée à la société A TOUT AGE SOLOGNE en application de l'article L. 1224-1 du Code du travail et de l'AVOIR condamnée, en conséquence, à verser aux salariés diverses sommes à ce titre ;
AUX MOTIFS QUE « sur l'existence d'une entité économique autonome : l'application de l'article L. 1224-1 du Code du travail doit intervenir en cas de succession de prestataires de services des lors que cette succession entre deux sociétés concernées s'accompagne, dans le même temps, d'un transfert des moyens d'exploitation matériels (locaux, terrain, équipements), permettant de conclure à la poursuite de l'entreprise considérée dans ses caractéristiques essentielles ; que déjà, cet article avait pu jouer entre les RÉSIDENCES DE TOURAINE et l'ADMR 41 en janvier 2007 puisque la première avait externalisé l'activité médico-sociale auprès de la seconde et que sept salariées étaient ainsi transférées ; qu'il s'agissait d'un personnel spécialement affecté avec les moyens propres à l'exercice du service médico-légal, s'agissant de locaux dédiés indispensables à son exécution, de jour comme de nuit, pour l'ensemble des bénéficiaires de la prestation répartie sur plusieurs immeubles, au sein d'un parc de 9 hectares ; qu'à cela s'ajoute un système de surveillance intégré à chaque domicile des bénéficiaires mis en relation avec un central téléphonique interne permettant de prévenir les salariées du service médicosocial ; qu'à cet égard existaient un bureau pour les gardes de nuit avec une imprimante, un cahier pour les transmissions, des trousseaux de clés pour aller d'un bâtiment à un autre et un système de surveillance gestion alarme de nuit ; que seuls pouvaient, bénéficier du service médico-légal les clients, résidents des RÉSIDENCES TOURAINE, qui n'avaient pas d'autre choix que le prestataire imposé par les RÉSIDENCES DE TOURAINE ; que cette clientèle restait donc très captive puisqu'elle avait adhéré aux suggestions de Monsieur D... pour la résiliation des contrats ADMR au profit d'ADHAP, le 25 novembre 2008 ; qu'ainsi s'agissait-il d'un ensemble de moyens humains et matériels en vue de l'exercice d'une activité poursuivant un objectif propre » ;
ET AUX MOTIFS QUE : « sur le maintien de l'identité et de l'activité de l'entité transférée : c'est l'une des raisons d'être des RÉSIDENCES TOURAINE que d'offrir ce service à ses résidents ; que depuis le 1er janvier 2009, 1'ADMR 41 n'a plus d'activité médico-sociale pour les résidents des RÉSIDENCES DE TOURAINE qui ont tous résilié, le 25 novembre précédent, leur contrat, démontrant la volonté des RÉSIDENCES DE TOURAINE de transférer l'activité considérée à L'ADHAP, même si celle-ci aujourd'hui n'a pas réussi à retrouver la confiance de tous les anciens bénéficiaires ; que cette dernière association convient qu'elle utilise des forfaits mensuels avec ses clients et des prestations à la carte même si les tarifs sont différents de son prédécesseur et si son organisation n'est pas la même pour la distribution des médicaments ; qu'elle admet disposer d'un coordinateur et d'une infirmière référente, joignables 24 heures sur 24, sept jours sur sept, en sorte que si les modalités ont un peu changé entre les deux intervenants, l'essence même de leur action s'avère identique : le domaine médico-social auprès des résidents de la RÉSIDENCE DE TOURAINE ; que tous les éléments sont réunis pour l'application à la cause des dispositions de l'article L. 1224-1 du Code du travail, qui sont d'ordre public ; qu'il est bien évident que ces dispositions-là ne peuvent fonctionner entre l'ADMR et les RÉSIDENCES DE TOURAINE qui n'avait pu obtenir leur agrément pour s'occuper du domaine médico-social ; qu'en revanche, l'ADHAP a repris, dans le temps, en continuation exacte de la tâche confiée précédemment à l'ADMR 41, cette activité spécifique ; que le jeu de cet article devra donc intervenir entre ces deux sociétés » ;
1°) ALORS QUE l'article L. 1224-1 du Code du travail n'a vocation à s'appliquer à l'exécution d'un marché de prestation de services par un nouveau titulaire, qu'à la condition qu'il s'accompagne du transfert d'une entité économique autonome constituée d'un ensemble de personnes et d'éléments corporels ou incorporels permettant l'exercice d'une activité économique qui poursuit un objectif propre et dont l'identité est maintenue ; qu'en imposant, en l'espèce, à la société ADHAP la reprise des neufs salariés de l'ADMR affectés à l'activité médico-sociale au sein des RESIDENCES DE TOURAINE, sans avoir recherché si les éléments caractérisant l'entité économique autonome, telle qu'elle l'avait définie, avaient été transférés au nouveau prestataire de sorte que l'entité économique avait conservé son identité, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1224-1 du Code du travail ;
2°) ALORS QU'il résulte de l'article L. 1224-1 du Code du travail interprété au regard de la directive 2001/ 23/ CE du 12 mars 2001, que les contrats de travail en cours sont maintenus entre le nouvel employeur et le personnel de l'entreprise en cas de transfert d'une entité économique autonome dès lors qu'elle conserve son identité, et dont l'activité est poursuivie ou reprise ; qu'en décidant que les contrats de travail des salariés de l'ADMR 41, affectés à l'activité médico-sociale des RESIDENCES DE TOURAINE, devaient se poursuivre avec la société A TOUT AGE SOLOGNE exerçant sous l'enseigne ADHAP après avoir pourtant constaté que l'activité en cause était assurée désormais par plusieurs entreprises prestataires entre lesquelles elle avait été répartie, ce dont il résultait qu'elle avait perdu son identité, la Cour d'appel a violé l'article L. 1224-1 du Code du travail ;
3°) ALORS QUE ne dispose pas d'une autonomie suffisante le service d'une entreprise auquel sont affectés des salariées qui ne disposent pas de compétences spécifiques à l'activité en cause ; qu'en l'espèce, la Cour d'appel qui n'a pas répondu au moyen des conclusions de la société A TOUT AGE SOLOGNE tiré de ce que les salariées attachées à l'activité médico-sociale en cause étaient, à l'exception de la coordonnatrice, Madame C..., laquelle travaillait pour plusieurs sociétés, polyvalents, ce dont il résultait que l'activité de la société ADMR au profit de la société RESIDENCES DE TOURAINE n'était en rien spécifique ou détachable de ses autres activités de prestations de service, a violé l'article 455 du Code de procédure civile
4°) ALORS, en tout état de cause, QU'est frauduleux le comportement du prestataire de service qui provoque la rupture du contrat de prestation de service afin de supprimer les emplois y étant attachés sans appliquer la procédure impérative de licenciement ; qu'en ne recherchant pas si la société ADMR n'avait pas dénoncé les conventions conclues avec les résidents des RESIDENCES DE TOURAINE concernant les prestations les plus contraignantes effectuées de nuit, dans le seul but de se défaire de neuf salariées attachées à cette activité et d'imposer leur reprise par l'entreprise A TOUT AGE SOLOGNE, en évitant, ainsi, la mise en oeuvre d'une procédure de licenciement, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1224-1 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 10-27265
Date de la décision : 23/05/2012
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Orléans, 12 octobre 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 23 mai. 2012, pourvoi n°10-27265


Composition du Tribunal
Président : M. Lacabarats (président)
Avocat(s) : SCP Baraduc et Duhamel, SCP Boré et Salve de Bruneton, SCP Fabiani et Luc-Thaler, SCP Masse-Dessen et Thouvenin

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:10.27265
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award