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15/05/2012 | FRANCE | N°11-11753

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 15 mai 2012, 11-11753


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu les articles L. 1231-1 et L. 1232-1 du code du travail, ensemble l'article 1134 du code civil ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé le 1er janvier 1996 par la société Fimeco, société d'expertise comptable, en qualité d'expert comptable ; qu'invoquant notamment la réduction unilatérale de son salaire à partir de juillet 2008, il a saisi la juridiction prud'homale pour obtenir la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de l'employeur et le p

aiement de diverses sommes ;
Attendu que pour débouter le salarié de s...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu les articles L. 1231-1 et L. 1232-1 du code du travail, ensemble l'article 1134 du code civil ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé le 1er janvier 1996 par la société Fimeco, société d'expertise comptable, en qualité d'expert comptable ; qu'invoquant notamment la réduction unilatérale de son salaire à partir de juillet 2008, il a saisi la juridiction prud'homale pour obtenir la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de l'employeur et le paiement de diverses sommes ;
Attendu que pour débouter le salarié de ses demandes, l'arrêt retient que si l'employeur ne pouvait pas diminuer unilatéralement la rémunération du salarié pour la compenser avec les sommes que ce dernier réclamait devant la juridiction consulaire, et pour le contraindre à négocier en préparant son départ à la retraite au lieu de le licencier pour faute grave, le manquement commis par l'employeur n'est pas d'une gravité suffisante pour justifier la résiliation judiciaire du contrat de travail ;
Qu'en statuant ainsi, alors que la diminution du salaire qu'elle avait constatée constituait une modification unilatérale du contrat de travail dont elle devait déduire que la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l'employeur était justifiée et produisait les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute M. X... de ses demandes aux fins de résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de la société Fimeco et de paiement d'indemnité de préavis, d'indemnité de licenciement, d'indemnité pour licenciement abusif et d'indemnité en réparation de ses préjudices professionnel et moral, l'arrêt rendu le 14 décembre 2010, entre les parties, par la cour d'appel de Poitiers ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Limoges ;
Condamne la société Fimeco aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Fimeco à payer à M. X... la somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quinze mai deux mille douze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Célice, Blancpain et Soltner, avocat aux Conseils pour M. X....
Il est fait grief à l'arrêt attaqué, confirmant partiellement le jugement entrepris, d'AVOIR débouté Monsieur X... de ses demandes tendant au prononcé de la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de la société FIMECO et à la condamnation de cette dernière à lui verser diverses indemnités et notamment une indemnité de préavis (25. 740 €), une indemnité de licenciement (38. 133, 35 €), une indemnité pour licenciement abusif (956. 502 €) et une indemnité en réparation de ses préjudices professionnel et moral (50. 000 €) ;
AUX MOTIFS QUE « Monsieur X... fonde sa demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de l'employeur sur la réduction unilatérale de sa rémunération ; qu'il fait état de l'absence de versement de la prime de bilan depuis mars 2001, de la diminution de la prime de comité de direction en mars 2009 et de la réduction unilatérale de près du tiers de son salaire depuis juillet 2008 ; que toutefois étant rappelé que Monsieur X... était associé de la société FIMECO il apparaît que les modalités d'attribution de la prime de bilan, selon lesquelles elle est attribuée au vu des résultats individualisés des cabinets des associés ont été décidées par l'ensemble des associés et entérinées par une décision du conseil d'administration du 1er décembre 2001 ; que de même le temps consacré par chaque associé aux activités personnelles de commissaire aux comptes a été limité à 200 heures annuelles dans les mêmes conditions ; qu'un conseil d'administration du 10 avril 2007 renouvelait cette décision ; qu'il y a lieu de préciser que le contrat de travail de Monsieur X... ne comportait aucune clause sur le nombre d'heures consacrées à son activité personnelle et que seul le protocole de cession parts précisait le mode de facturation des prestations fournies au bénéfice de cette activité ; qu'il résulte de l'ensemble des pièces comptables remises par la société FIMECO que Monsieur X... développait son activité personnelle de commissaire aux comptes au sein de la société SAREC au détriment du cabinet de Rochefort de la société FIMECO qui accusait les plus mauvais résultant du groupe ; que c'est ainsi que dès l'exercice 2001-2002 le résultat de ce site était négatif (105. 000 €) et que le chiffre d'affaires réalisées entre l'exercice 2000-2001 et l'exercice 2007-2008 a progressé de 8 % seulement avec un déficit constant alors que le chiffre d'affaires de la société SAREC passait de 126. 921 € pour l'exercice 2001-2002 à 183. 325 € pour l'exercice 2008-2009 ; qu'alors que les temps de travail consacrés à cette activité peuvent être estimés à 370 heures pour l'exercice 2007-2008 Monsieur X... déclarait à la société FIMECO avoir consacré un temps de commissariat aux comptes personnel de 184 heures et pour l'exercice 2008-2009 de 150 heures, étant précisé que la société FIMECO produit des tableaux comparatifs sur l'ensemble de la période ; que par conséquent Monsieur X... a dissimulé à son employeur l'importance de son activité personnelle en enregistrant délibérément des temps de travail personnels très inférieurs à la réalité ; qu'il convient de rappeler que pour son activité personnelle, Monsieur X... utilisait les mêmes locaux moyennant un loyer dérisoire reversé à la société FIMECO ; que de plus contrairement aux obligations de son contrat de travail il avait l'insu de l'employeur fait inscrire la société SAREC à l'ordre des experts-comptables le 2 février 2007 pour une activité d'expertise comptable ; qu'il refusait par ailleurs de payer les factures de la SAREC ; que la décision de la société FIMECO de diminuer la rémunération de Monsieur X... a été prise, selon les termes de la lettre du 28 août 2008, pour lui « permettre de terminer les quatre ans » qui le séparaient de la retraite et de clôturer ainsi leur conflit ; qu'il résulte de ces éléments en premier lieu que la prime de bilan revendiquée n'est pas due compte tenu des résultats de son cabinet ; qu'en second lieu, il est vrai que la société FIMECO ne pouvait pas diminuer unilatéralement la rémunération de Monsieur X... pour la compenser avec les sommes, qu'elle réclame devant la juridiction consulaire et pour contraindre Monsieur X... à négocier en préparant son départ à la retraite au lieu de la licencier pour faute grave ; que pour autant, le manquement ainsi commis par l'employeur dans le contexte susvisé est directement consécutif à l'attitude gravement fautive du salarié et n'est pas d'une gravité suffisante pour justifier que soit prononcée la résiliation judiciaire du contrat de travail à ses torts ; qu'il y a lieu en conséquence de confirmer le jugement entrepris qui a débouté Monsieur X... de sa demande de résiliation judiciaire » ;
ET AUX MOTIFS DES PREMIERS JUGES, EN LES SUPPOSANT ADOPTES, QUE « Monsieur X... a dissimulé son nombre d'heures effectuées déclarant 184 heures, alors que ce nombre était de 370 heures ; que l'origine du différend entre les parties résulte du développement des activités personnelles de M. X... au-delà de ce qui était convenu par contrat de travail ; que de surcroît, la déclaration d'heures de travail réalisées au titre de ses activités personnelles de commissariat aux comptes, soit 184 heures en contradiction avec le relevé des heures fournies par le cabinet d'expertise comptable, soit 370 heures, dont le caractère objectif ne peut être remis en cause ; que cette déclaration fausse démontre la mauvaise foi de M. X... et sa volonté de minimiser le temps de travail qu'il consacre à ses activités personnelles au détriment du temps de travail effectif qu'il doit réaliser pour la Sté FIMECO dans le cadre de son contrat de travail » ;
ALORS, D'UNE PART, QUE l'employeur ne peut pas imposer au salarié une modification unilatérale de sa rémunération ; l'existence d'une telle modification, fût-elle motivée par le comportement du salarié, constitue une inexécution fautive du contrat de travail qui est de nature à justifier la résiliation de ce dernier aux torts de l'employeur ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que la société FIMECO avait réduit unilatéralement la rémunération de Monsieur X... pour contraindre le salarié à négocier son départ ; qu'en affirmant néanmoins que le contrat ne pouvait être rompu aux torts de l'employeur, au motif inopérant que celui-ci avait voulu lui permettre de terminer les quatre ans qui le séparaient de la retraite et de clôturer le conflit les opposant, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales qui s'évinçaient de ses propres constatations et a violé les articles 1134 et 1184 du Code civil, ensemble les articles L. 1221-1 et L. 1231-1 du Code du travail ;
ALORS, D'AUTRE PART, QUE constitue une sanction pécuniaire illicite le fait pour l'employeur de réduire la rémunération du salarié en raison d'une prétendue dissimulation d'activité personnelle extérieure à l'entreprise ; que le manquement à ce principe général du droit justifie nécessairement la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l'employeur ; qu'en constatant que la société FIMECO avait amputé le salaire de Monsieur X... à hauteur de la somme totale de 95. 810 € pour avoir prétendument « dissimulé à son employeur l'importance de son activité personnelle en enregistrant délibérément des temps de travail personnels très inférieurs à la réalité », la cour d'appel a caractérisé l'existence d'une sanction pécuniaire illicite ; qu'en refusant dès lors de prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail, la cour d'appel a violé les articles L. 1221-1, L. 1231-1 et L. 1331-2 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 11-11753
Date de la décision : 15/05/2012
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Poitiers, 14 décembre 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 15 mai. 2012, pourvoi n°11-11753


Composition du Tribunal
Président : M. Linden (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Célice, Blancpain et Soltner, SCP Lyon-Caen et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:11.11753
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