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10/05/2012 | FRANCE | N°11-10915

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 10 mai 2012, 11-10915


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé par la société Scierie Camille Jacquemin (la société Jacquemin) à compter du 24 octobre 1972 en qualité d'ouvrier de scierie ; qu'il a été victime d'un accident du travail le 3 août 2005, puis placé en arrêt de travail du 22 novembre 2005 au 1er janvier 2006 ; qu'à l'issue de son arrêt de travail, il s'est vu confier des tâches d'empilage et contestant cette affectation, il a saisi l'inspecteur du travail ; que le 31 janvier 2006, il a été soumis Ã

  une visite médicale au terme de laquelle le médecin du travail a contre...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé par la société Scierie Camille Jacquemin (la société Jacquemin) à compter du 24 octobre 1972 en qualité d'ouvrier de scierie ; qu'il a été victime d'un accident du travail le 3 août 2005, puis placé en arrêt de travail du 22 novembre 2005 au 1er janvier 2006 ; qu'à l'issue de son arrêt de travail, il s'est vu confier des tâches d'empilage et contestant cette affectation, il a saisi l'inspecteur du travail ; que le 31 janvier 2006, il a été soumis à une visite médicale au terme de laquelle le médecin du travail a contre-indiqué la manutention de charges et le travail d'empilage et a préconisé le travail à la grue avec nettoyage occasionnel ; que l'inspecteur du travail a, le 22 février 2006, enjoint la société de réintégrer le salarié à son poste de grutier ; que le 10 février 2006, l'intéressé a été de nouveau placé en arrêt de travail jusqu'au 24 novembre 2006 ; que le 15 février 2006, le médecin du travail, après avoir réalisé une étude de poste, a conclu à l'aptitude de l'intéressé à un travail sur grue avec nettoyage occasionnel et à un travail de fabrication de fagots sans effort de soulèvement ; que cet avis a été contesté devant l'inspecteur du travail, qui, par décision du 15 mai 2006, a reconnu l'aptitude du salarié à occuper le poste de confection de bottes de liteaux avec l'aide d'un appui fessier au besoin en aménageant le poste, mais a retenu son inaptitude au poste de grutier et d'empilage des planches ; qu'à l'issue de son arrêt de travail, M. X... a subi deux nouvelles visites de reprise en date des 29 novembre et 15 décembre 2006 au terme desquelles le médecin du travail a conclu à son aptitude au poste de liage de fagots mais avec une série de réserves ; que cet avis a été contesté devant l'inspecteur du travail qui, après enquête, a, par décision du 12 mars 2007, déclaré le salarié inapte à occuper le poste de confection de fagots de lattes ; qu'après consultation des délégués du personnel, la société Jacquemin a proposé à M. X... un reclassement qui a été refusé ; que le salarié a été licencié pour inaptitude et impossibilité de reclassement par lettre du 11 mai 2007 ;
Sur le premier moyen :
Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande de dommages-intérêts pour irrégularité de la procédure de licenciement, alors, selon le moyen, qu'au cours de l'entretien préalable à un éventuel licenciement, l'employeur est tenu d'indiquer le ou les motifs de la décision envisagée et de recueillir les explications du salarié ; que le licenciement ne peut ainsi être décidé en considération de faits postérieurs à l'entretien préalable ; que le licenciement de M. X... a été notifié consécutivement au refus par celui-ci d'une offre de reclassement dont la lettre de licenciement précisait qu'elle portait « sur un poste adapté compte tenu des préconisations après avis de l'inspecteur du travail sur votre aptitude à occuper ce poste » ; que l'arrêt ayant constaté que le salarié avait refusé l'offre de reclassement les 24 et 30 avril 2007 et que l'inspecteur du travail avait décidé le 2 mai 2007 seulement que le poste proposé était compatible avec l'état de santé du salarié, de sorte que tant le refus du salarié que l'avis d'aptitude étaient postérieurs à l'entretien préalable du 23 avril 2007, la cour d'appel, qui a néanmoins jugé le licenciement régulier, a violé l'article L. 1232-2 du code du travail ;
Mais attendu qu'ayant constaté que la lettre de licenciement du 11 mai 2007 visait le motif tiré de l'inaptitude et de l'impossibilité de reclassement du salarié, la cour d'appel, qui n'a pas statué sur un autre motif postérieur à celui envisagé à la date de l'entretien préalable, n'a pas violé les dispositions de l'article L. 1232-2 du code du travail en appréciant la réalité et le sérieux du seul motif invoqué par l'employeur qui pouvait poursuivre sa recherche de reclassement postérieurement à cet entretien ; que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le deuxième moyen :
Vu les articles L. 1226-10, L. 1226-12 et L. 1226-15 du code du travail ;
Attendu que pour débouter le salarié de ses demandes indemnitaires au titre d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, l'arrêt retient que la proposition de reclassement faite par la société Jacquemin n'induisait aucune modification du contrat de travail et n'affectait ni sa qualification initiale, ni sa rémunération, ni la durée du travail, de sorte que le refus du salarié était abusif et le licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse ;
Qu'en statuant ainsi, alors que le refus par le salarié d'un poste proposé par l'employeur dans le cadre de son obligation de reclassement n'implique pas à lui seul le respect par celui-ci de son obligation et qu'il lui appartient d'établir qu'il dispose d'aucun autre poste compatible avec l'aptitude du salarié, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Et sur le troisième moyen :
Vu l'article L. 4624-1 du code du travail ;
Attendu que pour débouter le salarié de sa demande en condamnation de l'employeur au paiement d'une somme à titre de dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail en violation de son obligation de sécurité, l'arrêt, après avoir relevé qu'à l'issue de son arrêt de travail, le 4 janvier 2006, M. X... a été affecté par son employeur dans un premier temps à l'empilage puis à la confection de fagots, que ces affectations successives ne modifiaient pas le contrat de travail du salarié, que les pièces versées aux débats démontraient que l'incompatibilité des tâches d'empilage avec l'état de santé de l'intéressé n'avait été établie que lors de la visite de reprise du 31 janvier 2006 et qu'à l'issue de son nouvel arrêt de travail, le 24 novembre 2006, la société avait affecté M. X... à la confection de fagots de lattes en procédant à des adaptations du poste, retient que les griefs formulés ne sont pas établis ;
Attendu, cependant, que l'employeur, tenu d'une obligation de sécurité de résultat en matière de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs dans l'entreprise, doit en assurer l'effectivité en prenant en considération les propositions de mesures individuelles telles que mutations ou transformations de postes, justifiées par des considérations relatives à l'âge, à la résistance physique ou à l'état de santé physique et mentale des travailleurs que le médecin du travail est habilité à faire en application de l'article L. 4624-1 du code du travail ; que le chef d'entreprise est, en cas de refus, tenu de faire connaître les motifs qui s'opposent à ce qu'il y soit donné suite ;
Qu'en statuant comme elle l'a fait, alors qu'elle constatait, d'une part, que le médecin du travail, dans son avis du 31 janvier 2006, avait fait état de contre-indications à la manutention de charges et au travail d'empilage et de lattes et avait préconisé le travail à la grue, d'autre part, que le salarié n'avait pas réintégré ses précédentes fonctions de grutier mais s'était vu confier des tâches d'empilage jusqu'à son nouvel arrêt de travail du 10 février 2006, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a débouté M. X... de ses demandes indemnitaires au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse, de l'exécution déloyale du contrat de travail et de la violation de l'obligation de sécurité, l'arrêt rendu le 9 novembre 2010, entre les parties, par la cour d'appel de Besançon ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Dijon ;
Condamne la société Scierie Camille Jacquemin aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Scierie Camille Jacquemin à verser à M. X... la somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix mai deux mille douze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Barthélemy, Matuchansky et Vexliard, avocat aux Conseils pour M. X....
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR débouté monsieur X..., salarié, de sa demande de dommages-intérêts pour irrégularité de la procédure de licenciement ;
AUX MOTIFS PROPRES QU'après avoir consulté le 12 avril 2007 les délégués du personnel sur le reclassement de monsieur X... l'employeur a proposé le 23 avril 2007 à monsieur X... de le reclasser dans le poste dont le descriptif était le suivant : « Monsieur Z... doit effectuer les tâches décrites ci-dessous et uniquement celles-ci, toujours à l'aide de son siège assis-debout : rapprochement de la prise en main des liteaux, évitant ainsi que vous vous penchiez (le poste avait été étudié pour une personne de grande taille, M. X... étant de taille moyenne, il doit plus se pencher pour prendre les liteaux) ; le bouton des commandes de l'automatisme sera mis à votre hauteur, évitant que vous ayez besoin de vous baisser ; la botte de liteaux une fois confectionnée sera automatiquement poussée contre le guide par des vérins pneumatiques, ce qui évitera tout mouvement musculaire ; les mouvements de lancés sont strictement interdits ; afin d'évacuer les mauvais liteaux, vous devez les poser à votre droite au lieu que nous avons toujours prévu à cet effet ; manipulation des lattes au pont roulant, ce qui ne demande pas d'effort musculaire ; l'ensemble des tâches devra être effectué dans le respect des préconisations du médecin du travail et de l'inspection du travail ; votre rémunération, vos horaires de travail, ainsi que l'ensemble des éléments de votre contrat de travail restent inchangés » ; qu'au vu de ce descriptif, l'inspecteur du travail a estimé dans une correspondance adressée à la SA Jacquemin le 12 (sic) mai 2007 que le poste proposé à monsieur X... tenait compte des avis médicaux et était donc compatible avec son état de santé ; que monsieur X... ne saurait dès lors soutenir, comme il le fait dans ses conclusions, que le poste proposé était strictement identique à celui qui avait été formellement déconseillé par le médecin inspecteur (arrêt, pp. 6-7) ; que par décision du 12 mars 2007, l'inspecteur du travail a déclaré monsieur X... inapte à son poste de confection de fagots de lattes (arrêt, p. 8) ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE monsieur X... sera convoqué à un entretien préalable fixé au 23 avril 2007 et sera licencié le 11 mai 2007 (jugement, p. 3) ; que le 12 mars 2007 l'inspection du travail reconnaîtra monsieur X... inapte au poste de confection de fagots ; que l'employeur a procédé à l'aménagement du poste de confection des fagots de lattes en tenant compte des préconisations du médecin du travail ; que monsieur X... a, par deux fois, refusé ce poste de reclassement les 24 avril et 30 avril 2007 (jugement, p. 8) ;
ALORS QU'au cours de l'entretien préalable à un éventuel licenciement l'employeur est tenu d'indiquer le ou les motifs de la décision envisagée et de recueillir les explications du salarié ; que le licenciement ne peut ainsi être décidé en considération de faits postérieurs à l'entretien préalable ; que le licenciement de monsieur X... a été notifié consécutivement au refus par celui-ci d'une offre de reclassement dont la lettre de licenciement précisait qu'elle portait « sur un poste adapté compte tenu des préconisations après avis de l'inspecteur du travail sur votre aptitude à occuper ce poste » ; que l'arrêt ayant constaté que le salarié avait refusé l'offre de reclassement les 24 et 30 avril 2007 et que l'inspecteur du travail avait décidé le 2 mai 2007 seulement que le poste proposé était compatible avec l'état de santé du salarié, de sorte que tant le refus du salarié que l'avis d'aptitude étaient postérieurs à l'entretien préalable du 23 avril 2007, la cour d'appel, qui a néanmoins jugé le licenciement régulier, a violé l'article L. 1232-2 du code du travail.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR dit que le licenciement de monsieur X..., salarié, pour inaptitude était pourvu d'une cause réelle et sérieuse et, en conséquence, d'AVOIR débouté celui-ci de ses demandes indemnitaires ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE dans son certificat de reprise établi le 31 janvier 2006 le médecin du travail a formulé la réserve suivante : « contre-indication à la manutention de charge, pas de travail à l'empilage, ni aux lattes, possibilité de travail à la grue avec nettoyage occasionnel » ; que dans une étude de poste réalisée le 15 février 2006 le même médecin du travail a suggéré à l'employeur deux possibilités adaptées à l'état de santé de monsieur X... : soit le travail sur grue avec nettoyage occasionnel uniquement, soit la fabrication de fagots de lattes sans effort de soulèvement, avec des adaptations matérielles des postes considérés ; que l'inspection du travail a déclaré le 15 mai 2006 monsieur X... inapte aux postes de grutier et d'empilage de planches au 31 janvier 2006 ; que l'incompatibilité des postes de conducteur grutier et d'empileur avec l'aptitude médicale de monsieur X... a été confirmée par le médecin du travail dans une étude de poste réalisée le 29 novembre 2006 en raison des mouvements de torsion que requéraient ces tâches ; qu'ensuite, dans une étude de poste réalisée le 29 novembre 2006, le médecin du travail a estimé que seul le poste de confection de fagots était compatible avec l'état de santé du salarié sous réserve des adaptations suivantes : la mise à disposition d'un siège assis-debout, l'absence de port de charges et de mouvements de torsion, avec possibilité pour le salarié de prendre des lattes « déchets » pour les recouper et de donner un coup de balai pour enlever la sciure ; que le 26 février 2007 le médecin inspecteur régional s'est rendu dans l'entreprise à la demande de l'inspecteur du travail pour y effectuer une enquête ; qu'à la suite de l'exécution de cette mesure il a émis un avis le 26 février 2007 dans lequel il considérait que les tâches réalisées par monsieur X... telles qu'il avait pu les constater n'étaient pas compatibles avec l'état de santé du salarié dès lors qu'elles ne correspondaient pas aux préconisations du médecin du travail dans son étude de poste ; qu'il en est résulté une déclaration d'inaptitude de monsieur X... au poste de confection de fagots de lattes ; que cependant dans son avis du 26 février 2007 le médecin inspecteur régional a également précisé que l'état de santé de monsieur X... était compatible avec le poste de confection de fagots dans les conditions posées par le médecin du travail dans son étude de poste réalisée le 29 novembre 2006 ; qu'il a invité dans ses conclusions l'employeur à décrire précisément les tâches du poste de reclassement proposé à monsieur X... ; qu'après avoir consulté le 12 avril 2007 les délégués du personnel sur le reclassement de monsieur X... l'employeur a proposé le 23 avril 2007 à monsieur X... de le reclasser dans le poste dont le descriptif était le suivant : « Monsieur Z... doit effectuer les tâches décrites ci-dessous et uniquement celles-ci, toujours à l'aide de son siège assis-debout : rapprochement de la prise en main des liteaux, évitant ainsi que vous vous penchiez (le poste avait été étudié pour une personne de grande taille, M. X... étant de taille moyenne, il doit plus se pencher pour prendre les liteaux) ; le bouton des commandes de l'automatisme sera mis à votre hauteur, évitant que vous ayez besoin de vous baisser ; la botte de liteaux une fois confectionnée sera automatiquement poussée contre le guide par des vérins pneumatiques, ce qui évitera tout mouvement musculaire ; les mouvements de lancés sont strictement interdits ; afin d'évacuer les mauvais liteaux, vous devez les poser à votre droite au lieu que nous avons toujours prévu à cet effet ; manipulation des lattes au pont roulant, ce qui ne demande pas d'effort musculaire ; l'ensemble des tâches devra être effectué dans le respect des préconisations du médecin du travail et de l'inspection du travail ; votre rémunération, vos horaires de travail, ainsi que l'ensemble des éléments de votre contrat de travail restent inchangés » ; qu'au vu de ce descriptif, l'inspecteur du travail a estimé dans une correspondance adressée à la SA Jacquemin le 12 (sic) mai 2007 que le poste proposé à monsieur X... tenait compte des avis médicaux et était donc compatible avec son état de santé ; que monsieur X... ne saurait dès lors soutenir, comme il le fait dans ses conclusions, que le poste proposé était strictement identique à celui qui avait été formellement déconseillé par le médecin inspecteur ; qu'il y a lieu de juger que les multiples contestations formulées par monsieur X... à l'encontre des divers avis du médecin du travail ne visaient qu'à obtenir sa réintégration sur le poste de grutier pour lequel il avait été déclaré inapte ; que les éléments versés aux débats par monsieur X... ne permettent pas de caractériser une quelconque intention de l'employeur de l'évincer de l'entreprise en raison de ses problèmes de santé ; qu'il échet encore de préciser que la proposition de reclassement proposée par la SA Jacquemin n'induisait aucune modification du contrat de travail du salarié ; qu'elle n'affectait en effet ni sa qualification initiale (ouvrier de scierie) ni sa rémunération, ni la durée du travail ; qu'en conclusion, il convient de juger abusif le refus de monsieur X... d'accepter la proposition de reclassement formulée par la SA Jacquemin et de dire que le licenciement du salarié pour inaptitude est pourvu d'une cause réelle et sérieuse ; qu'il y a lieu dès lors de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a rejeté les prétentions formulées par monsieur X... à ce titre (arrêt, pp. 6-7) ; que par décision du 12 mars 2007, l'inspecteur du travail a déclaré monsieur X... inapte à son poste de confection de fagots de lattes (arrêt, p. 8) ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE par le courrier de l'inspection du travail en date du 15 mai 2006, il est clairement établi que monsieur X... est inapte au poste de grutier ainsi qu'au poste d'empilage des planches ; que monsieur X... en arrêt maladie du 10 février 2006 jusqu'à novembre 2006 a néanmoins contesté, le 20 mars 2006, l'avis rendu par le docteur Koch le 27 février 2006 suite à une étude de poste de travail ; que suite à une nouvelle étude de poste en date du 29 novembre 2006, le médecin du travail a déclaré monsieur X... apte au poste de liage de fagots sous réserve, en date du 15 décembre 2006 ; que cette aptitude est une nouvelle fois contestée par monsieur X... par un courrier du 14 janvier 2007 ; que le 12 mars 2007 l'inspection du travail reconnaîtra monsieur X... inapte au poste de confection de fagots ; que l'employeur dit ne disposer d'aucun poste de bureau vacant, ce que monsieur X... ne conteste pas ; que l'employeur a procédé à l'aménagement du poste de confection des fagots de lattes en tenant compte des préconisations du médecin du travail ; que monsieur X... a, par deux fois, refusé ce poste de reclassement les 24 avril et 30 avril 2007 ; que la teneur de ces courriers interpelle quant à la réelle volonté d'être reclassé ; qu'il ne saurait être soutenu que l'employeur n'a pas respecté son obligation de reclassement ; que le licenciement pour inaptitude devra être validé et que monsieur X... devra être débouté de ses demandes en dommages-intérêts pour licenciement abusif (jugement, p. 8) ;
ALORS, EN PREMIER LIEU, QUE la constatation de l'aptitude, ou de l'inaptitude, du salarié au poste de reclassement relève de la compétence exclusive du médecin du travail ou, sur recours, de l'inspecteur du travail et il n'appartient ni à l'employeur ni au juge de s'y substituer ; que l'arrêt ayant retenu, par motifs propres et adoptés, que l'inspecteur du travail avait, le 12 mars 2007, reconnu le salarié inapte sans réserves au poste de confection de fagots et que l'employeur avait néanmoins proposé le 23 avril 2007 de reclasser le salarié à ce poste matériellement aménagé, proposition que l'intéressé avait refusée les 24 et 30 avril 2007, la cour d'appel qui, pour apprécier le caractère prétendument abusif de ce refus, s'est fondée sur une correspondance ultérieure de l'inspecteur du travail en date du 2 mai 2007 reconnaissant en dernier lieu la compatibilité du poste aménagé avec l'état de santé du salarié, ce dont ni l'employeur ni le salarié n'étaient informés à la date de leur proposition et de leur refus respectif, a violé les articles L. 1226-10 et L. 4624-1 du code du travail ;
ALORS, EN SECOND LIEU ET EN TOUT ETAT DE CAUSE, QUE ne constitue pas en soi une cause réelle et sérieuse de licenciement le refus par le salarié du poste de reclassement proposé par l'employeur lorsque l'offre de reclassement emporte une modification des conditions de travail ; que l'arrêt ayant constaté que le poste de reclassement proposé par l'employeur emportait une modification des tâches et, ainsi, des conditions de travail du salarié, la cour d'appel, qui a néanmoins retenu l'existence d'une cause réelle et sérieuse de licenciement par la considération inopérante que ce poste de reclassement ne modifiait pas le contrat de travail du salarié, a violé l'article L. 1226-2 du code du travail.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR débouté monsieur X..., salarié, de sa demande de dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail ;
AUX MOTIFS QUE monsieur X... a été embauché par la SA Jacquemin à compter du 24 octobre 1972 suivant contrat verbal en qualité d'ouvrier de scierie ; que le 3 août 2005 il a été victime d'un accident du travail alors qu'il était affecté au poste de grutier de l'entreprise ; qu'il a été placé en arrêt de travail du 22 novembre 2005 au 1er janvier 2006 (arrêt, p. 2) ; que dans son certificat de reprise établi le 31 janvier 2006 le médecin du travail a formulé la réserve suivante : « contre-indication à la manutention de charge, pas de travail à l'empilage, ni aux lattes, possibilité de travail à la grue avec nettoyage occasionnel » (arrêt, p. 6) ; qu'à l'issue de son arrêt de travail, le 4 janvier 2006, monsieur X... a été affecté par son employeur dans un premier temps à l'empilage, puis à la confection de fagots ; que ces affectations successives ne sauraient s'analyser, eu égard à la qualification d'ouvrier de scierie du salarié, en une modification de son contrat de travail, les autres éléments substantiels dudit contrat (rémunération, durée du travail) n'ayant pas été par ailleurs modifiés ; qu'ensuite, les pièces versées aux débats démontrent que l'incompatibilité des tâches d'empilage avec l'état de santé du salarié n'a été établie que lors de la visite de reprise effectuée du 31 janvier 2006 ; qu'il ne peut donc être fait le reproche à l'employeur d'avoir confié cette tâche à monsieur X... à l'issue de son arrêt de travail, le 4 janvier 2006 (arrêt, p. 7) ;
ALORS QUE l'employeur est tenu de prendre en considération les propositions du médecin du travail et l'avis de l'inspecteur du travail sur le recours dont il a été saisi ; qu'il en résulte que lorsque la décision administrative conclut à l'aptitude du salarié à son poste de travail, l'employeur, qui l'avait affecté à un autre emploi, doit le réintégrer dans ses précédentes fonctions ; que l'arrêt ayant constaté que le médecin du travail avait, le 31 janvier 2006, déclaré le salarié apte à son ancien poste de grutier et que celui-ci n'avait toutefois pas été réintégré dans ses précédentes fonctions avant d'être placé en arrêt de travail le 10 février 2006, la cour d'appel, qui a pourtant jugé que l'employeur avait exécuté loyalement le contrat de travail, a violé l'article L. 4624-1 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 11-10915
Date de la décision : 10/05/2012
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Besançon, 09 novembre 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 10 mai. 2012, pourvoi n°11-10915


Composition du Tribunal
Président : M. Chollet (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Barthélemy, Matuchansky et Vexliard, SCP Gatineau et Fattaccini

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:11.10915
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