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05/04/2012 | FRANCE | N°11-11443

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 05 avril 2012, 11-11443


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Donne acte à M. X... de son désistement partiel au profit de MM. Y... et Z... ;
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 30 novembre 2010), que M. X... est salarié de la Compagnie nationale du Rhône en qualité d'éclusier ; qu'il effectuait à domicile des "veille radio" sur le canal VHF-12 ; que soutenant que ces périodes de "veille radio" devaient s'analyser en temps de travail effectif, il a saisi la juridiction prud'homale d'une demande en paiement d'heures supplémentaires

;
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de dire que les temps de ve...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Donne acte à M. X... de son désistement partiel au profit de MM. Y... et Z... ;
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 30 novembre 2010), que M. X... est salarié de la Compagnie nationale du Rhône en qualité d'éclusier ; qu'il effectuait à domicile des "veille radio" sur le canal VHF-12 ; que soutenant que ces périodes de "veille radio" devaient s'analyser en temps de travail effectif, il a saisi la juridiction prud'homale d'une demande en paiement d'heures supplémentaires ;
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de dire que les temps de veille radio accomplis par lui ne constituent pas du temps de travail effectif et de le débouter de sa demande de paiement d'heures supplémentaires alors, selon le moyen :
1°/ que la durée du travail effectif est le temps pendant lequel le salarié est à la disposition de l'employeur et se conforme à ses directives sans pouvoir vaquer librement à des occupations personnelles, tandis que l'astreinte est une période pendant laquelle le salarié, sans être à la disposition permanente et immédiate de l'employeur, a l'obligation de demeurer à son domicile ou à proximité afin d'être en mesure d'intervenir pour accomplir un travail au service de l'entreprise ; qu'en l'espèce, M. X... faisait valoir que pendant ses heures d'astreinte les week-ends et jours fériés, il devait écouter en permanence depuis son logement de fonction le canal 12 de la radio VHF qui couvrait toute la zone de la vigie des ports de Fos, de Sète et de Marseille afin de sélectionner les appels de bateliers concernant l'écluse de Port Saint-Louis, de sorte qu'il ne pouvait vaquer librement à ses occupations personnelles ; qu'il en concluait que les heures de veille radio constituaient en réalité un temps de travail effectif ; que la cour d'appel a constaté, par motifs propres et adoptés, que M. X... devait écouter le canal 12 de la radio VHF et que les pièces qu'il produisait démontraient le recours régulier, voire fréquent, des bateliers au canal 12 ; qu'en écartant néanmoins la qualification de temps de travail effectif pour retenir à tort celle d'astreinte, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations dont il ressortait que M. X... devait écouter en permanence le canal 12 afin de sélectionner les messages le concernant de sorte qu'il n'était pas libre de vaquer librement à ses occupations personnelles, et a violé les articles L. 3121-1 et L. 3121-5 du code du travail ;
2°/ que les juges du fond, avant d'écarter les prétentions d'une partie, se doivent d'examiner l'ensemble des pièces régulièrement produites aux débats et soumises à leur examen par cette partie à l'appui de sa prétention ; qu'en l'espèce, M. X... produisait les attestations de Messieurs Y... et Z... qui avaient été éclusiers à Port Saint-Louis et qui attestaient que lorsqu'ils assuraient une veille radio un week-end sur trois, ils devaient écouter sans arrêt la radio pour distinguer les appels des bateaux qui voulaient passer l'écluse et que cette veille était pénible, longue et répétitive car elle demandait une attention constante ; que la cour d'appel a néanmoins jugé que la juridiction prud'homale avait à juste titre constaté que M. X... ne versait pas au dossier les attestations ou éléments établissant qu'il était dans l'impossibilité, au sein de son domicile, de vaquer à des occupations personnelles ; qu'en statuant ainsi, sans avoir examiné les attestations de MM. Y... et Z..., la cour d'appel a violé les articles 455 du code de procédure civile, et 1353 du code civil ;
3°/ que les juges du fond, avant d'écarter les prétentions d'une partie, se doivent d'examiner l'ensemble des pièces régulièrement produites aux débats et soumises à leur examen par cette partie à l'appui de sa prétention ; que pour justifier en appel les prétentions qu'elles avaient soumises au premier juges les parties peuvent produire de nouvelles pièces ou proposer de nouvelles preuves, qu'il appartient a juge d'appel de prendre en considération ; qu'en l'espèce, à hauteur d'appel, M. X... produisait également l'attestation de M. A... qui avait aussi été assujetti à cette veille radio de 1982 à 1996 en tant qu'éclusier de Port Saint-Louis et qui confirmait qu'un week-end sur trois il devait écouter la radio sur le canal maritime de 5 heures 24 à 20 heures 36 sans discontinuer pour entendre les appels des bateaux désirant passer l'écluse ; que pour débouter l'exposant, la cour d'appel a énoncé que la juridiction prud'homale avait à juste titre constaté que M. X... ne versait pas au dossier les attestations ou éléments établissant qu'il était dans l'impossibilité, au sein de son domicile, de vaquer à des occupations personnelles ; qu'en statuant ainsi, sans avoir examiné l'attestation, produite pour la première fois en cause d'appel, de M. A..., la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile, ensemble l'article 1353 du code civil et 563 du code de procédure civile ;
Mais attendu qu'appréciant souverainement la valeur et la portée des documents et attestations produits par les parties et sans avoir à s'expliquer sur ceux qu'elle écarte, la cour d'appel a retenu, par motifs propres et adoptés, qu'il n'était pas établi que la nécessité pour le salarié d'écouter le canal VHF-12 le mettait dans l'impossibilité, au sein de son domicile, de vaquer à des occupations personnelles ; qu'elle en a exactement déduit que les temps de veille radio constituait des astreintes ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... et le syndicat CGT et UFIC-CGT des énergies Rhône Durance Grand Avignon aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du cinq avril deux mille douze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat de M. X..., du syndicat CGT et UFIC-CGT des énergies Rhône Durance Grand Avignon.
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que les temps de veille radio accomplis par M. X... ne constituaient pas un temps de travail effectif mais correspondaient à des périodes d'astreinte et d'AVOIR en conséquence débouté M. X... de ses demandes tendant à ce que la CNR soit condamnée à lui verser les sommes de 15.022,95 euros au titre des heures supplémentaires, 2.000 euros à titre de dommages et intérêts et 1.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et de l'AVOIR enfin condamné à rembourser à la CNR la somme allouée à titre provisionnel par le bureau de conciliation du conseil de prud'hommes d'Arles,
AUX MOTIFS QUE les parties ne font que reprendre devant la Cour leurs prétentions et leurs moyens de première instance concernant le mode de règlement de l'astreinte – veille radio imposée à Hubert X... ; que le jugement contesté, qui a considéré que cette veille ne caractérisait pas un temps de travail effectif donnant droit à perception d'heures supplémentaires, repose sur des motifs exacts et pertinents ; que les juges, en effet, ont fait une juste application des dispositions du code du travail qui régissent la matière et notamment celles de l'ancien article L. 212-4 bis qui ont été reprises par l'article L. 3121-5 et qui stipulent qu'une période d'astreinte s'entend comme une période pendant laquelle le salarié, sans être à la disposition permanente et immédiate de l'employeur, a l'obligation de demeurer à son domicile ou à proximité afin d'être en mesure d'intervenir pour accomplir un travail au service de l'entreprise, seule la durée de cette intervention étant considérée comme un temps de travail effectué ; que le conseil de prud'hommes a relevé que l'éclusier accomplissait la veille radio à son domicile, que l'accomplissement de cette mission dans un logement imposé par la Compagnie Nationale du Rhône lui permettait de percevoir une indemnité spéciale dite de logement imposé ; que la juridiction prud'homale a également constaté fort justement qu'Hubert X... ne versait pas au dossier les attestations ou éléments établissant qu'il était dans l'impossibilité, au sein de son domicile, de vaquer à des occupations personnelles ; que la Cour note, par ailleurs, que : - la nature du logement imposé à Hubert X... était sans influence sur la nature qui doit être donnée à l'accomplissement d'une veille radio, - que en contrepartie des obligations imposées par l'astreinte, Hubert X... a perçu une indemnité horaire d'astreinte, une indemnité d'éclusage pour chaque intervention sur site et des heures supplémentaires majorées correspondant à des interventions et opérations d'éclusage et dont les montants étaient conformes à l'article 16 du statut national des industries électriques et gazières, - les cartes marines produites par Hubert X..., les pièces justifiant les obligations imposées aux plaisanciers, aux pêcheurs professionnels et aux bateaux de commerce d'utiliser le canal 12 VHF, les attestations de Claude B..., Philippe C... et Maurice D..., qui ont exercé leur fonction sur un bateau pousseur et qui ont tous confirmé le recours au canal 12 VHF pour appeler directement l'éclusier, restent insuffisantes pour démontrer qu'Hubert X... ne pouvait vaquer à des occupations personnelles durant son astreinte, les documents communiqués par le salarié ne démontrant pas autre chose que le recours régulier, voire fréquent au canal 12, - le salarié ne donne aucune précision détaillée chiffrée sur la répartition de son emploi du temps durant les périodes de veille ; que dans ces conditions, il convient de dire que l'obligation pour Hubert X... de se tenir en permanence à son domicile ou à proximité immédiate pour répondre sur le champ à des demandes d'interventions éventuelles ne l'a pas privé de la possibilité de vaquer à des occupations personnelles et n'a pas constitué un travail effectif mais une astreinte qui lui a été normalement payée ; que le jugement déféré sera confirmé sur ce premier point ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QU'il résulte des dispositions de l'article L. 212-4 bis ancien du code du travail que celles-ci définissent l'astreinte de la façon suivante : « Une période d'astreinte s'entend comme une période pendant laquelle le salarié, sans être à la disposition permanente et immédiate de l'employeur, a l'obligation de demeurer à son domicile ou à proximité afin d'être en mesure d'intervenir pour effectuer un travail au service de l'entreprise, la durée de cette intervention étant considérée comme un temps de travail effectif…. » ; que dès lors il résulte des propres déclarations des requérants que les veilles radios, dont ils sollicitent qu'elles soient qualifiées de période de temps de travail effectif, s'accomplissaient à leur domicile, même si le domicile en question correspond à des logements imposés par l'employeur et pour lesquels les salariés perçoivent une indemnité spéciale ; que les requérants ne versent au dossier, hormis leurs seules affirmations, aucune attestation ou élément établissant qu'ils sont en raison de la nécessité d'écouter le canal VHF, dans l'impossibilité au sein même de leur domicile de vaquer à leurs obligations personnelles ; que dès lors, il ressort de ces constatations que le temps de veille radio à domicile des requérants correspond, faute pour ces derniers de démontrer qu'ils ne peuvent vaquer à leurs obligations personnelles à domicile, ne correspond pas à un temps de travail effectif mais à une astreinte qui a été rémunérée comme telle par l'employeur, de sorte que les requérants seront déboutés de la totalité de leurs demandes, ainsi que par voie de conséquence le syndicat CGT ;
1°) ALORS QUE la durée du travail effectif est le temps pendant lequel le salarié est à la disposition de l'employeur et se conforme à ses directives sans pouvoir vaquer librement à des occupations personnelles, tandis que l'astreinte est une période pendant laquelle le salarié, sans être à la disposition permanente et immédiate de l'employeur, a l'obligation de demeurer à son domicile ou à proximité afin d'être en mesure d'intervenir pour accomplir un travail au service de l'entreprise ; qu'en l'espèce, M. X... faisait valoir que pendant ses heures d'astreinte les week-ends et jours fériés, il devait écouter en permanence depuis son logement de fonction le canal 12 de la radio VHF qui couvrait toute la zone de la vigie des ports de Fos, de Sète et de Marseille afin de sélectionner les appels de bateliers concernant l'écluse de Port Saint-Louis, de sorte qu'il ne pouvait vaquer librement à ses occupations personnelles ; qu'il en concluait que les heures de veille radio constituaient en réalité un temps de travail effectif ; que la cour d'appel a constaté, par motifs propres et adoptés, que M. X... devait écouter le canal 12 de la radio VHF et que les pièces qu'il produisait démontraient le recours régulier, voire fréquent, des bateliers au canal 12 ; qu'en écartant néanmoins la qualification de temps de travail effectif pour retenir à tort celle d'astreinte, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations dont il ressortait que M. X... devait écouter en permanence le canal 12 afin de sélectionner les messages le concernant de sorte qu'il n'était pas libre de vaquer librement à ses occupations personnelles, et a violé les articles L. 3121-1 et L. 3121-5 du code du travail ;
2°) ALORS QUE les juges du fond, avant d'écarter les prétentions d'une partie, se doivent d'examiner l'ensemble des pièces régulièrement produites aux débats et soumises à leur examen par cette partie à l'appui de sa prétention ; qu'en l'espèce, M. X... produisait les attestations de Messieurs Y... et Z... qui avaient été éclusiers à Port Saint-Louis et qui attestaient que lorsqu'ils assuraient une veille radio un week-end sur trois, ils devaient écouter sans arrêt la radio pour distinguer les appels des bateaux qui voulaient passer l'écluse et que cette veille était pénible, longue et répétitive car elle demandait une attention constante ; que la cour d'appel a néanmoins jugé que la juridiction prud'homale avait à juste titre constaté que M. X... ne versait pas au dossier les attestations ou éléments établissant qu'il était dans l'impossibilité, au sein de son domicile, de vaquer à des occupations personnelles ; qu'en statuant ainsi, sans avoir examiné les attestations de Messieurs Y... et Z..., la cour d'appel a violé les articles 455 du code de procédure civile, et 1353 du code civil ;
3°) ALORS QUE les juges du fond, avant d'écarter les prétentions d'une partie, se doivent d'examiner l'ensemble des pièces régulièrement produites aux débats et soumises à leur examen par cette partie à l'appui de sa prétention ; que pour justifier en appel les prétentions qu'elles avaient soumises au premier juges les parties peuvent produire de nouvelles pièces ou proposer de nouvelles preuves, qu'il appartient a juge d'appel de prendre en considération ; qu'en l'espèce, à hauteur d'appel, M. X... produisait également l'attestation de M. A... qui avait aussi été assujetti à cette veille radio de 1982 à 1996 en tant qu'éclusier de Port Saint-Louis et qui confirmait qu'un week-end sur trois il devait écouter la radio sur le canal maritime de 5h24 à 20h36 sans discontinuer pour entendre les appels des bateaux désirant passer l'écluse ; que pour débouter l'exposant, la cour d'appel a énoncé que la juridiction prud'homale avait à juste titre constaté que M. X... ne versait pas au dossier les attestations ou éléments établissant qu'il était dans l'impossibilité, au sein de son domicile, de vaquer à des occupations personnelles ; qu'en statuant ainsi, sans avoir examiné l'attestation, produite pour la première fois en cause d'appel, de M. A..., la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile, ensemble l'article 1353 du code civil et 563 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 11-11443
Date de la décision : 05/04/2012
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 30 novembre 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 05 avr. 2012, pourvoi n°11-11443


Composition du Tribunal
Président : M. Gosselin (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Gatineau et Fattaccini, SCP Rocheteau et Uzan-Sarano

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:11.11443
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