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04/04/2012 | FRANCE | N°10-27215

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 04 avril 2012, 10-27215


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 26 octobre 2009), que, le 5 mai 1997, Mme X... a été engagée en qualité d'employée de maison, pour une durée hebdomadaire de 27 heures, par Mme Y..., particulier employeur ; que la salariée a, le 22 juin 2006, saisi la juridiction prud'homale d'une demande en rappel de salaires correspondant à la différence, depuis l'an 2000, entre les salaires calculés sur la base du contrat initial et ceux réellement réglés et de résiliation judic

iaire du contrat de travail aux torts de l'employeur ;
Attendu que la sal...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 26 octobre 2009), que, le 5 mai 1997, Mme X... a été engagée en qualité d'employée de maison, pour une durée hebdomadaire de 27 heures, par Mme Y..., particulier employeur ; que la salariée a, le 22 juin 2006, saisi la juridiction prud'homale d'une demande en rappel de salaires correspondant à la différence, depuis l'an 2000, entre les salaires calculés sur la base du contrat initial et ceux réellement réglés et de résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l'employeur ;
Attendu que la salariée fait grief à l'arrêt de la débouter de sa demande en résiliation judiciaire et en paiement de rappels de salaire, alors, selon le moyen :
1°/ que la modification du contrat de travail ne peut intervenir sans l'accord du salarié, lequel ne peut être valablement donné qu'au terme d'un délai de réflexion lui permettant d'évaluer la modification proposée et de se prononcer en connaissance de cause ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que c'était parce qu'elle n'avait plus autant besoin d'assistance à domicile à la suite du décès de sa mère que Mme Z... avait proposé à la salariée de poursuivre la relation contractuelle en réduisant de 27 à 12 heures sa durée hebdomadaire de travail ; que pour débouter Mme X... de sa demande de rappel de salaire correspondant à ce différentiel d'heures, la cour d'appel a retenu que Mme Z... avait établi l'accord donné par Mme X... à cette modification de son contrat de travail par une attestation relatant une conversation qui se serait tenue au cimetière, le jour des obsèques de la mère de Mme Z..., et au cours de laquelle la salariée aurait accepté la modification proposée sans avoir disposé du moindre délai de réflexion lui permettant d'évaluer la portée de la modification proposée et de décider en connaissance de cause ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil ;
2°/ que la modification du contrat de travail ne peut intervenir sans l'accord du salarié, lequel ne peut se déduire de la poursuite du travail par ce dernier ; qu'en déduisant, en l'espèce, l'accord donné par Mme X... à la réduction du temps de travail unilatéralement décidée par Mme Z... du fait que Mme X... n'avait plus travaillé que 12 heures par semaine à compter du mois d'août 2000, la cour d'appel a derechef violé l'article 1134 du code civil ;
3°/ que le juge national saisi d'un litige dans une matière entrant dans le domaine d'application de la directive 91/533 CEE du Conseil du 14 octobre 1991 relative à l'obligation de l'employeur d'informer le travailleur des conditions applicables au contrat ou à la relation de travail est tenu d'interpréter son droit national à la lumière du texte et de la finalité de cette directive, en vue de faire obstacle à une modification du contrat de travail d'un salarié intervenue en méconnaissance de ses dispositions ; qu'il résulte des articles 2 et 5 de ladite directive, qui aurait dû être transposée en droit interne le 1er septembre 1993, qu'en cas de modification concernant notamment la durée de travail hebdomadaire du travailleur, l'employeur doit lui remettre dans les plus brefs délais et au plus tard un mois après la date de la prise d'effet de la modification concernée un document écrit qui porte à sa connaissance toutes les modifications de son contrat de travail ; qu'en retenant, pour dire opposable à Mme X..., la modification de sa durée de travail hebdomadaire unilatéralement décidée par Mme Z..., que les directives européennes ne sont pas d'application directe dans le droit national, la cour d'appel a violé l'article L. 1221-1 du code du travail ainsi que les articles 2 et 5 de la directive 91/533 CEE du Conseil du 14 octobre 1991 relative à l'obligation de l'employeur d'informer le travailleur des conditions applicables au contrat ou à la relation de travail ;
4°/ que lorsqu'un salarié travaille pour un employeur qui le rémunère en utilisant le chèque emploi-service plus de quatre semaines consécutives dans l'année ou plus de huit heures par semaine, l'existence d'un écrit constitue une condition de validité de la modification de son contrat de travail ; qu'en retenant le contraire pour débouter Mme X... de sa demande de rappel de salaires, la cour d'appel a violé les articles L. 129-2 et D. 129-1 à D. 129-6 du code du travail alors applicables ;
5°/ que lorsqu'un salarié travaille pour un employeur qui le rémunère en utilisant le chèque emploi-service plus de quatre semaines consécutives dans l'année ou plus de huit heures par semaine, l'existence d'un écrit constitue une condition de validité de la modification de son contrat de travail ; qu'en retenant le contraire pour débouter Mme X... de sa demande de rappel de salaires, la cour d'appel a également violé l'article 6 de l'accord paritaire du 13 octobre 1995 sur les chèques emploi-service figurant à l'annexe III de la convention collective nationale des salariés du particulier employeur ;
6°/ qu'il ne résulte ni des conclusions d'appel de Mme Z... ni des mentions de l'arrêt que Mme Z... -qui s'était contentée, d'une part, de conclure au rejet de l'appel limité du jugement du 26 février 2008 formé par Mme X... et, d'autre part, de solliciter le paiement d'une indemnité de préavis- aurait remis en cause la décision des premiers juges en ce qu'elle avait retenu l'existence d'une résiliation du contrat de travail aux torts de l'employeur ; qu'aussi, en décidant d'infirmer en son intégralité le jugement entrepris, la cour d'appel a violé l'article 4 du code de procédure civile ;
Mais attendu qu'il résulte de l'article L. 129-2, dans sa rédaction alors applicable, et de l'article L. 3123-14 du code du travail, qu'en cas d'utilisation de "chèque emploi-service" pour les emplois dont la durée de travail excède huit heures par semaine, le contrat de travail doit être établi par écrit et mentionner la durée hebdomadaire ou, le cas échéant, mensuelle prévue et la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois ; que l'absence d'écrit mentionnant la durée du travail et sa répartition fait présumer que l'emploi est à temps complet ; que l'employeur peut renverser cette présomption, à charge pour lui de rapporter la preuve, d'une part, de la durée exacte hebdomadaire ou mensuelle convenue, d'autre part, que le salarié n'était pas placé dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et qu'il n'avait pas à se tenir constamment à la disposition de l'employeur ;
Et attendu qu'examinant les éléments de fait et de preuve qui lui étaient soumis, la cour d'appel a retenu que les parties sont convenues verbalement de modifier le contrat de travail en réduisant la durée de travail à douze heures hebdomadaires ;
D'où il suit que le moyen, nouveau, mélangé de fait et de droit et irrecevable en sa première branche, inopérant en sa troisième branche, et qui manque en fait dans sa sixième branche, n'est pas fondé pour le surplus ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quatre avril deux mille douze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils pour Mme X....
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir débouté Madame X... de ses demandes tendant à voir Madame Z... condamnée, à la suite de la résiliation du contrat de travail intervenue à ses torts, à lui payer :- 2.145,90 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis ;- 214,59 € au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés sur préavis ;- 965,65 € à titre d'indemnité de licenciement,- 43.925 € nets à titre de rappel de salaire impayés à la suite de la modification unilatérale du contrat de travail,- 4.392 € nets à titre d'indemnité de congés payés ordonner la remise par Madame Paule Z... à Madame Lucette X... de l'attestation ASSEDIC rectifiée et du certificat de travail conformément à la présente décision, dans le délai de quinze jours à compter de la notification du présent jugement et, passé ce délai, sous astreinte de 20 € par jour de retard.
Aux motifs que « Sur les demandes de la salariée que Mme X... a été embauchée, au mois de mai 1997, pour une durée hebdomadaire de travail de 27 heures, soit une durée mensuelle de 117 heures ;Qu'à compter du mois d'août 2000, la durée hebdomadaire du travail de la salariée a été réduite à 12 heures et le montant de ses salaires calculé sur la base de ce nouvel horaire ;Que Mme X... fait observer qu'elle n'a accepté aucun avenant portant réduction de ses horaires; qu'elle en déduit, d'une part, que Mme Z... reste lui devoir la part non payée de ses salaires calculés sur la base des horaires stipulés au contrat initial et, d'autre part, que cette dernière a manqué à ses obligations contractuelles en matière de paiement des salaires ;Que Mme Z... répond qu'à la suite du décès de sa mère, qui vivait dans sa maison, au mois d'août 2000, la charge de travail de Mme X... s'est trouvée sensiblement diminuée ; qu'elle explique qu'elle a alors décidé de garder cette dernière à son service tout en réduisant ses horaires, ce qui a été accepté par l'intéressée ;Qu'elle verse au débat une attestation de Mme A... épouse B..., qui déclare :‘En ma présence, Mme Z... lui a dit à Mme X... très gentiment ce jour-là le jour des obsèques que, compte tenu du décès de sa maman, elle ne pourrait plus l'employer aux mêmes conditions qu'auparavant, qu'elle la garderait, mais en diminuant notablement ses horaires, compte tenu du nouveau contexte, ce qu'elle a acquiescé, en disant qu'elle chercherait quelques heures supplémentaires.'Qu'il résulte de ce témoignage comme du fait que Mme X... n'a plus travaillé que 12 heures par semaine à compter du mois d'août 2000, que la modification du contrat de travail a été acceptée par la salariée ;Que Mme X... objecte qu'en application de l'article 5 de la directive européenne n° 91-533 du 14 octobre 1991, l'employeur est tenu d'informer par écrit le travailleur salarié de toute modification portant sur un élément essentiel du contrat de travail, comme la durée de travail journalière ou hebdomadaire du salarié; qu'elle fait valoir que la réduction de ses horaires, pour lui être opposable, aurait dû faire l'objet d'un avenant écrit ; que, par ailleurs, elle verse au débat une lettre adressée à l'employeur le 6 mai 2003, par laquelle elle refusait cette modification du contrat ;Mais attendu que les directives européennes ne sont pas d'application directe dans le droit national ; qu'en l'état de l'accord intervenu entre les parties sur la modification du contrat initial, la rédaction d'un écrit, simple moyen de preuve de cet accord, ne constituait pas une condition de validité de celui-ci ; que la preuve de l'accord s'évince en l'espèce du témoignage de Mme B... ;Que, par ailleurs, dès lors que le nouvel horaire avait été accepté par Mme X..., il s'intégrait dans le corps du contrat pour devenir la loi des parties ; que la salariée ne pouvait en dénoncer ensuite le contenu de manière unilatérale, en prétendant revenir à l'économie du contrat initiai ;Qu'en rémunérant Mme X... sur la base de 12 heures de travail hebdomadaire, Mme Z... s'est pleinement acquittée de ses obligations salariales ;Que les demandes en rappel de salaires et en résiliation du contrat formées par la salariée sont dès lors sans fondement. »
1) Alors que la modification du contrat de travail ne peut intervenir sans l'accord du salarié lequel ne peut être valablement donné qu'au terme d'un délai de réflexion lui permettant d'évaluer la modification proposée et de se prononcer en connaissance de cause ; qu'en l'espèce, la Cour d'appel a constaté que c'était parce qu'elle n'avait plus autant besoin d'assistance à domicile à la suite du décès de sa mère que Madame Z... avait proposé à la salariée de poursuivre la relation contractuelle en réduisant de 27 à 12 heures sa durée hebdomadaire de travail ; que pour débouter Madame X... de sa demande de rappel de salaire correspondant à ce différentiel d'heures, la Cour d'appel a retenu que Madame Z... avait établi l'accord donné par Madame X... à cette modification de son contrat de travail par une attestation relatant une conversation qui se serait tenue au cimetière, le jour des obsèques de la mère de Madame Z... et au cours de laquelle la salariée aurait accepté la modification proposée sans avoir disposé du moindre délai de réflexion lui permettant d'évaluer la portée de la modification proposée et de décider en connaissance de cause ; qu'en statuant ainsi, la Cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil.
2) Alors que la modification du contrat de travail ne peut intervenir sans l'accord du salarié lequel ne peut se déduire de la poursuite du travail par ce dernier ; qu'en déduisant, en l'espèce, l'accord donné par Madame X... à la réductions du temps de travail unilatéralement décidée par Madame Z... du fait que Madame X... n'avait plus travaillé que 12 heures par semaine à compter du mois d'août 2000, la Cour d'appel a derechef violé l'article 1134 du code civil.
3) Alors que le juge national saisi d'un litige dans une matière entrant dans le domaine d'application de la directive 91/533 CEE du conseil du 14 octobre 1991 relative à l'obligation de l'employeur d'informer le travailleur des conditions applicables au contrat ou à la relation de travail est tenu d'interpréter son droit national à la lumière du texte et de la finalité de cette directive, en vue de faire obstacle à une modification du contrat de travail d'un salarié intervenue en méconnaissance de ses dispositions ; qu'il résulte des articles 2 et 5 de ladite directive, qui aurait dû être transposée en droit interne le 1er septembre 1993, qu'en cas de modification concernant notamment la durée de travail hebdomadaire du travailleur, l'employeur doit lui remettre dans les plus brefs délais et au plus tard un mois après la date de la prise d'effet de la modification concernée un document écrit qui porte à sa connaissance toutes les modifications de son contrat de travail ; qu'en retenant, pour dire opposable à Madame X... la modification de sa durée de travail hebdomadaire unilatéralement décidée par Madame Z..., que les directives européennes ne sont pas d'application directe dans le droit national, la Cour d'appel a violé l'article L. 1221-1 du code du travail ainsi que les articles 2 et 5 de la directive 91/533 CEE du conseil du 14 octobre 1991 relative à l'obligation de l'employeur d'informer le travailleur des conditions applicables au contrat ou à la relation de travail.
4) Alors que lorsqu'un salarié travaille pour un employeur qui le rémunère en utilisant le chèque emploi-service plus de quatre semaines consécutives dans l'année ou plus de huit heures par semaine, l'existence d'un écrit constitue une condition de validité de la modification de son contrat de travail ; qu'en retenant le contraire pour débouter Madame X... de sa demande de rappel de salaires la cour d'appel a violé les articles L. 129-2 et D. 129-1 à D. 129-6 du Code du travail alors applicables.
5) Alors que lorsqu'un salarié travaille pour un employeur qui le rémunère en utilisant le chèque emploi-service plus de quatre semaines consécutives dans l'année ou plus de huit heures par semaine, l'existence d'un écrit constitue une condition de validité de la modification de son contrat de travail ; qu'en retenant le contraire pour débouter Madame X... de sa demande de rappel de salaires la cour d'appel a également violé l'article 6 de l'accord paritaire du 13 octobre 1995 sur les chèques emploi-service figurant à l'annexe III de la Convention collective nationale des salariés du particulier employeur.
6) Alors qu'il ne résulte ni des conclusions d'appel de Madame Z... ni des mentions de l'arrêt que Madame Z... - qui s'était contentée, d'une part, de conclure au rejet de l'appel limité du jugement du 26 février 2008 formé par Madame X... et, d'autre part, de solliciter le paiement d'une indemnité de préavis - aurait remis en cause la décision des premiers juges en ce qu'elle avait retenu l'existence d'une résiliation du contrat de travail aux torts de l'employeur ; qu'aussi, en décidant d'infirmer en son intégralité le jugement entrepris, la Cour d'appel a violé l'article 4 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 10-27215
Date de la décision : 04/04/2012
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 26 octobre 2009


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 04 avr. 2012, pourvoi n°10-27215


Composition du Tribunal
Président : Mme Mazars (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Balat, SCP Lyon-Caen et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:10.27215
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