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04/04/2012 | FRANCE | N°10-21118

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 04 avril 2012, 10-21118


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé par la société Caldic Est par contrat à durée déterminée du 1er juin 2004 au 30 juillet 2004, prolongé jusqu'au 30 novembre 2004, en qualité de manutentionnaire cariste ; que les parties ont conclu un contrat à durée indéterminée le 1er décembre 2004, le salarié occupant en dernier lieu les fonctions de chef d'équipe magasin ; qu'à compter du 19 novembre 2007, l'intéressé a été placé en arrêt de travail pour maladie ; qu'il a été licenc

ié le 30 juin 2008 au motif de son "absence de longue durée pour maladie, rendant n...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé par la société Caldic Est par contrat à durée déterminée du 1er juin 2004 au 30 juillet 2004, prolongé jusqu'au 30 novembre 2004, en qualité de manutentionnaire cariste ; que les parties ont conclu un contrat à durée indéterminée le 1er décembre 2004, le salarié occupant en dernier lieu les fonctions de chef d'équipe magasin ; qu'à compter du 19 novembre 2007, l'intéressé a été placé en arrêt de travail pour maladie ; qu'il a été licencié le 30 juin 2008 au motif de son "absence de longue durée pour maladie, rendant nécessaire son remplacement pour assurer le bon fonctionnement de l'entreprise" ;
Sur le premier moyen :
Vu les articles L. 1242-1 et L. 1242-2 du code du travail ;
Attendu que pour débouter le salarié de sa demande de requalification des contrats à durée déterminée en contrat à durée indéterminée l'arrêt retient, par motifs propres et adoptés, que la seule mention "accroissement temporaire d'activité" dans le contrat de travail est suffisante pour justifier le recours à un contrat à durée déterminée et que l'entreprise devait faire face à un surcroît d'activité à Reims, à la suite de la fermeture du dépôt de Paris ;
Qu'en se déterminant ainsi, sans vérifier, comme elle y était invitée, si la fermeture du dépôt de Paris générait un accroissement d'activité à caractère temporaire et étranger à l'activité normale et permanente de l'entreprise, de nature à autoriser le recours à un contrat à durée déterminée, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;
Et sur le deuxième moyen :
Vu l'article L. 1154-1du code du travail ;
Attendu, selon ce texte, que la charge de la preuve du harcèlement moral ne pèse pas sur le salarié ;
Attendu que pour débouter le salarié de ses demandes d'annulation de son licenciement et de paiement de dommages-intérêts pour harcèlement moral, l'arrêt retient, par motifs propres et adoptés, que le harcèlement dont il se prévaut n'est pas établi et qu'il n'en apporte pas les preuves irréfutables ;
Qu'en statuant ainsi, en faisant peser sur le salarié la charge de la preuve du harcèlement, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il soit nécessaire de statuer sur le troisième moyen :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute M. X... de ses demandes de requalification des contrats à durée déterminée en contrat à durée indéterminée, d'annulation du licenciement et de paiement de dommages-intérêts, l'arrêt rendu le 26 mai 2010, entre les parties, par la cour d'appel de Reims ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris ;
Condamne la société Caldic Est aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Caldic Est à payer à M. X... la somme de 2 500 euros ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quatre avril deux mille douze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par Me Balat, avocat aux Conseils pour M. X....
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir débouté M. X... de sa demande tendant à la requalification des contrats à durée déterminée en contrat à durée indéterminée et tendant au paiement à ce titre d'une indemnité de 1.892,50 € ;
AUX MOTIFS PROPRES QU' à l'appui de sa demande, M. X... soutient que les contrats de travail à durée déterminée qu'il a signés ne répondraient pas aux exigences légales, visant la seule mention « accroissement temporaire d'activité » alors qu'il a occupé un poste permanent et durable dans l'entreprise, et n'ont pas fait l'objet du délai de carence entre deux contrats, légalement prescrit ; que contrairement aux allégations de l'appelant, la seule mention « accroissement temporaire d'activité » mentionnée sur le contrat de travail est suffisante pour justifier le recours à un contrat à durée déterminée ; qu'aux termes des dispositions de l'article L.1243-13 du code du travail, le contrat à durée déterminée peut être renouvelé une fois ; qu'ainsi, avant l'issue du premier contrat à durée déterminée prévue au 31 juillet 2004, l'employeur a pu soumettre à son salarié un avenant au contrat de travail, renouvelant celui-ci jusqu'au 1er décembre 2004 ; que M. X... ne peut donc utilement invoquer l'absence de délai de carence entre le premier contrat et son avenant ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE le premier contrat conclu sous forme d'un contrat à durée déterminée du 1er juin 2004 au 30 juillet 2004 et motivé par « un accroissement temporaire d'activité » est conforme aux dispositions de l'article L.1242-2 du code du travail qui précise « sous réserve des dispositions de l'article L.1242-3 un contrat à durée déterminée ne peut être conclu que pour l'exécution d'une tâche précise et temporaire, et seulement dans les cas suivants : - remplacement d'un salarié, - accroissement temporaire de l'activité dans l'entreprise » ; qu'en l'espèce, le contrat à durée déterminée du 1er juin 2004 précise qu'il s'agit d'un accroissement temporaire d'activité ; qu'en effet, l'entreprise devant faire face à un accroissement d'activité sur Reims, suite à la fermeture du dépôt de Paris ; que la lettre avenant faisant suite au contrat à durée déterminée initial adressée le 27 juillet 2004 à M. X... est en conformité avec les dispositions de l'article L.1243-13 du code du travail qui stipule que le contrat à durée déterminée est renouvelable une fois pour une durée déterminée et soumis au salarié avant le terme initialement prévu ; qu'en l'espèce, le 27 juillet 2004, M. X... donnait son accord pour la poursuite de son contrat à durée déterminée ; que le conseil constate que l'avenant a bien été soumis à M. X... avant le terme de son contrat fixé au 30 juillet 2004 et aux conditions du contrat initial, qu'il s'agit bien d'un renouvellement ;
ALORS, D'UNE PART, QU' un contrat de travail à durée déterminée, qui ne peut avoir ni pour objet ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise, ne peut être conclu que pour l'exécution d'une tâche précise et temporaire, notamment en cas d'accroissement temporaire d'activité ; qu'en estimant que le recours à un contrat de travail à durée déterminée se trouvait justifié par « un accroissement d'activité sur Reims, suite à la fermeture du dépôt de Paris » (motifs adoptés du jugement entrepris, p. 3 § 3), sans caractériser en quoi cette circonstance avait un caractère temporaire, étranger à l'activité normale et permanente de l'entreprise, autorisant le recours au contrat de travail à durée déterminée, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard des articles L.1242-1 et L.1242-2 du code du travail ;
ALORS, D'AUTRE PART, QUE lorsqu'un contrat à durée déterminée conclu pour « accroissement temporaire d'activité » est renouvelé pour une durée déterminée, le motif du recours au contrat de travail à durée déterminée s'apprécie à la date du renouvellement et non à la date de conclusion de celui-ci ; qu'en estimant que la société Caldic Est avait pu renouveler le contrat de travail à durée déterminée conclu le 1er juin 2004, sans rechercher si le motif initialement invoqué par l'employeur, tiré de « l'accroissement d'activité sur Reims, suite à la fermeture du dépôt de Paris », subsistait à la date du renouvellement, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L.1243-13 du code du travail ;
ALORS, ENFIN, QU' en affirmant que « la seule mention "accroissement temporaire d'activité" mentionnée sur le contrat de travail est suffisante pour justifier le recours à un contrat à durée déterminée » (arrêt attaqué, p. 3 § 6), cependant qu'il appartient à l'employeur de justifier la réalité du motif invoqué, la cour d'appel a violé les articles L.1242-1, L.1242-2, L.1242-12 et L.1243-13 du code du travail.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir débouté M. X... de sa demande tendant à ce que soit prononcée l'annulation de son licenciement et que lui soit alloué la somme de 43.530,48 € à titre de dommages et intérêts ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE M. X... soutient que son arrêt-maladie est lié au harcèlement moral dont il aurait fait l'objet de la part d'un collègue de travail mais ne produit à l'appui de sa demande aucun élément sérieux permettant d'établir la virulence verbale ou physique qu'il impute à ce collègue, ni même d'éléments caractérisant une dégradation de ses conditions de travail ; que le harcèlement moral dont se prévaut M. X... n'est pas établi et que celui-ci ne peut donc utilement soutenir que le licenciement dont il a fait l'objet est nul ;
ET AUX MOTIFS ADOTES QUE pour établir la réalité des faits permettant de présumer l'existence d'un harcèlement, M. X... ne rapporte pas d'éléments probants, sauf à produire les éléments suivants : attestation de M. Z... qui n'a pu être témoin d'agissements dirigés contre M. X..., puisqu'il avait quitté la société au moment des faits reprochés à M. A... ; courriers de M. X... des 23 octobre 2007 et 17 novembre 2007 adressés à l'inspection du travail faisant état d'une agression sur son lieu de travail et mettant en cause M. A... ; que l'examen attentif des pièces produites par les parties démontre que la société Caldic Est a été à l'écoute de son salarié, qu'elle a mené son enquête suite à l'intervention de l'inspection du travail au cours d'une réunion du CHSCT qui s'est tenue le 20 décembre 2007, et que l'inspection du travail a confirmé à la société Caldic Est, par courrier du 26 décembre 2007, « la nécessité de mener une réflexion relative aux mesures de prévention des situations conflictuelles et/ou liées aux mesures organisationnelles récemment prises dans l'entreprise, afin de préserver la santé et assurer la sécurité du personnel, notamment dans le cadre du document unique d'évaluation des risques » ; que la société Caldic Est précise que M. A... et M. X... ne travaillaient pas dans le même service, et qu'après enquête le comportement de M. A... vis-à-vis de ses collègues ne justifiait pas une procédure judiciaire à son encontre ; que le conseil constate que M. X... était en maladie depuis le 19 novembre 2007, qu'il n'a jamais repris son poste de travail, qu'il n'est donc pas possible de juger ici de la portée des suites données à l'enquête menée par son employeur ; qu'il apparaît ainsi que les faits établis par M. X... ne permettent pas de présumer l'existence d'un harcèlement, M. X... n'apportant pas au conseil les preuves irréfutables d'un harcèlement ; que dans ces conditions, M. X... ne peut imputer sa dépression aux manquements de l'employeur à ses obligations ;
ALORS, D'UNE PART, QUE lorsqu'un salarié se plaint d'agissements constitutifs de harcèlement moral, il établit des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral et, au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ; que la charge de la preuve ne pèse pas sur le salarié ; qu'en déboutant M. X... de sa demande tendant à l'annulation du licenciement, au motif que « le harcèlement moral dont se prévaut M. X... n'est pas établi » (arrêt attaqué, p. 4 § 5) et que le salarié n'apportait pas « les preuves irréfutables d'un harcèlement » (motifs adoptés du jugement entrepris, p. 4 § 10), les juges du fond ont fait peser sur le salarié la charge de la preuve du harcèlement moral et, partant, violé l'article L.1154-1 du code du travail ;
ALORS, D'AUTRE PART, QUE l'employeur, tenu d'une obligation de résultat en matière de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs, manque à cette obligation lorsqu'un salarié est victime sur le lieu de travail d'agissements de harcèlement moral ou sexuel exercés par l'un ou l'autre de ses salariés, quand bien même il aurait pris les mesures en vue de faire cesser ces agissements ; qu'en déboutant M. X... de sa demande au motif qu'il n'établissait pas la preuve des faits qu'il invoquait, tout en constatant que l'inspection du travail avait informé la société Caldic Est de la nécessité de mener une réflexion sur les mesures de prévention des situations conflictuelles dans l'entreprise (motifs adoptés du jugement entrepris, p. 4 § 7), ce dont il s'évinçait nécessairement que le salarié avait rapporté la preuve de faits laissant présumer l'existence d'un harcèlement moral, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé les articles L.1152-1 et L.1154-1 du code du travail.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
(subsidiaire)
Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir débouté M. X... de sa demande tendant à ce qu'il soit jugé que son licenciement était sans cause réelle et sérieuse et tendant à ce que lui soit versé à ce titre la somme de 43.530,48 € à titre de dommages et intérêts ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE si la maladie n'est pas en soi une cause légitime de rupture du contrat de travail, l'absence prolongée ou les absences répétées d'un salarié peuvent constituer un motif réel et sérieux de rupture en raison de la situation objective de l'entreprise dont le fonctionnement serait perturbé, obligeant l'employeur à pourvoir au remplacement définitif du salarié absent ; que l'employeur verse aux débats les contrats de mission conclus pour permettre, par glissement de postes en interne, d'assurer le bon fonctionnement de l'entreprise ; qu'il justifie de même qu'à compter de juillet 2008, il a concrétisé la modification du poste de Nicolas B... ainsi que sa rémunération, en raison de ses responsabilités depuis novembre 2007 ; que la situation ne pouvait se pérenniser en raison du classement de l'entreprise dans la catégorie des établissements SEVESO ; que l'employeur, contrairement aux allégations de M. X..., justifie de la situation objective de la perturbation de l'entreprise liée aux absences prolongées du salarié nécessitant son remplacement définitif ; qu'il est surplus établi par la production aux débats d'un certificat médical daté du 7 juillet 2008 que l'absence de M. X... s'est poursuivie ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE le licenciement de M. X... repose bien sur une cause réelle et sérieuse au motif de son absence prolongée désorganisant le bon fonctionnement de l'entreprise ;
ALORS, D'UNE PART, QUE la nécessité du remplacement définitif du salarié licencié en raison d'absences ayant désorganisé le fonctionnement de l'entreprise n'est pas caractérisée lorsqu'aucun remplaçant n'a, à la date du licenciement, été embauché par contrat de travail à durée indéterminée ; qu'en se bornant à relever que l'employeur justifiait « qu'à compter de juillet 2008, il a concrétisé la modification du poste de Nicolas B... ainsi que sa rémunération, en raison de ses responsabilités depuis novembre 2007 » (arrêt attaqué, p. 5 § 1), la cour d'appel, qui n'a pas constaté que M. B... avait été embauché dans le cadre d'un contrat à durée indéterminée pour occuper à titre définitif le poste de M. X..., a privé sa décision de base légale au regard des articles L.1235-1 et L.1235-3 du code du travail ;
ALORS, D'AUTRE PART, QU' en estimant que le licenciement de M. X... se trouvait justifié par la perturbation que son absence apportait dans l'entreprise, tout en constatant que le salarié avait été remplacé lors de son absence « par glissement de postes en interne » (arrêt attaqué, p. 5 § 1), de sorte que la nécessité de son remplacement définitif n'était pas établie, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé l'article L.1132-1 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 10-21118
Date de la décision : 04/04/2012
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Reims, 26 mai 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 04 avr. 2012, pourvoi n°10-21118


Composition du Tribunal
Président : M. Linden (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Balat

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:10.21118
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