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04/04/2012 | FRANCE | N°10-21114

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 04 avril 2012, 10-21114


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique du pourvoi principal :
Vu l'article 16 du code de procédure civile ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., joueur professionnel de rugby a saisi la juridiction prud'homale d'une demande à l'encontre de la société Béziers rugby en paiement de diverses sommes en soutenant que le document, daté du 1er avril 2008 et qualifié " de convention d'engagement réciproque d'un joueur professionnel de rugby " constituait un contrat de travail ;
Attendu que pour condamner la société au pa

iement d'une certaine somme à titre de dommages-intérêts pour rupture fa...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique du pourvoi principal :
Vu l'article 16 du code de procédure civile ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., joueur professionnel de rugby a saisi la juridiction prud'homale d'une demande à l'encontre de la société Béziers rugby en paiement de diverses sommes en soutenant que le document, daté du 1er avril 2008 et qualifié " de convention d'engagement réciproque d'un joueur professionnel de rugby " constituait un contrat de travail ;
Attendu que pour condamner la société au paiement d'une certaine somme à titre de dommages-intérêts pour rupture fautive de la " promesse d'embauche ", l'arrêt retient que le document daté du 1er avril 2008, intitulé " convention d'engagement réciproque d'un joueur professionnel de rugby ", s'analyse en une promesse d'embauche ;
Qu'en statuant ainsi, sans recueillir préalablement les observations des parties sur le moyen tiré de l'existence d'une promesse d'embauche qui n'était invoquée par aucune d'entre elles, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, sans qu'il soit nécessaire de statuer sur le moyen unique du pourvoi incident :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 19 mai 2010, entre les parties, par la cour d'appel de Montpellier ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Toulouse ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quatre avril deux mille douze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyen produit au pourvoi principal par la SCP Tiffreau, Corlay et Marlange, avocat aux Conseils pour la société Béziers rugby.
Le moyen reproche à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR condamné la SASP BEZIERS RUGBY à payer à Monsieur X... les sommes de 50. 000 € à titre de dommages et intérêts pour rupture fautive de la promesse d'embauche et 1. 500 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ;
AUX MOTIFS QUE « sur la convention d'engagement : Paul X... fait valoir que le document intitulé " convention d'engagement réciproque d'un joueur professionnel de rugby " constituerait, non une simple promesse d'embauche résultant de la seule volonté de l'employeur, mais un contrat de travail ; qu'à l'inverse, le club soutient qu'aucun contrat de travail à durée déterminée ne pourrait intervenir à défaut d'écrit et de toute homologation par la Ligue nationale de rugby ; que cependant, le salarié peut rapporter la preuve que le contrat de travail conclu verbalement est à durée déterminée ; que s'il résulte des règlements de la Ligue nationale de rugby que tout contrat et/ ou avenant conclu entre un joueur et un club professionnel, pour les joueurs sous contrat professionnel, doit impérativement être adressé à la Ligue dans un délai de huit jours à compter de sa signature, aucun texte ne prévoit que le non-respect de ces règles est sanctionné par la nullité du contrat ; que le document daté du 1er avril 2008, intitulé " convention d'engagement réciproque d'un joueur professionnel de rugby ", précise l'emploi occupé, la rémunération, la durée du contrat de travail et la date d'embauche ainsi que le temps de travail ; qu'en revanche, il appelait confirmation tant de la part de la Ligue nationale de rugby à l'homologation de laquelle il était soumis que celle du joueur, ce que confirme le fait :- que la lettre du 8 avril 2008 à laquelle il était annexé mentionne en objet : " information pré-contrat " ;- qu'une clause pénale était prévue si " l'une des parties n'honorait pas le présent engagement de contracter sous contrat LNR " ;- que dans son courrier électronique du 6 juin 2008, le représentant du joueur demande de lui faire parvenir " le contrat définitif avec le pré-contrat existant " ; qu'en outre, ni les déclarations du représentant du joueur, selon lesquelles celui-ci l'aurait " retournée signée depuis son domicile en Grande-Bretagne ; ni son déplacement à Béziers ne suffisent à établir une acceptation claire et sans équivoque de sa part ; qu'il en résulte que cette convention s'analyse en une promesse d'embauche ; sur les sommes dues : que, de manière fautive, la SASP BEZIERS RUGBY n'a pas donné suite à sa promesse d'embauche qu'elle avait rédigée aux prétextes d'un nouveau projet de jeu et de la politique sportive et financière souhaitée par l'équipe dirigeante ; qu'à défaut de preuve d'une acceptation claire et sans équivoque de la part du joueur, la clause pénale qui y est insérée ne s'applique pas ; que toutefois, la promesse d'embauche précisait que Paul X... percevrait une rémunération de 116. 820 € par saison, soit la somme de 233. 640 € pour les deux saisons prévues ; qu'à la suite de la rupture de la promesse d'embauche, il a été engagé par le club de Parme moyennant une rémunération nettement moindre de 85. 000 € pour les saisons 2008/ 2009 et 2009/ 2010 ; que pour pouvoir jouer à Béziers, il avait également été dans l'obligation de se libérer du contrat en cours avec le club gallois de Newport ; qu'il s'ensuit qu'au vu des éléments portés à son appréciation, la cour a les moyens de fixer à 50. 000 € le montant dû au joueur à titre de dommages et intérêts pour préjudice subi résultant de la rupture abusive de la promesse d'embauche ; qu'enfin l'équité commande de faire application de l'article 700 du code de procédure civile au cas d'espèce »
ALORS QUE 1°) l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties et le juge doit se prononcer sur tout ce qui est demandé et seulement sur ce qui est demandé ; qu'il résulte tant des conclusions d'appel des parties que des constatations de l'arrêt d'appel sur le contenu des prétentions présentées devant les juges du fond qu'il n'a été demandé par Monsieur X... qu'une seule reconnaissance de l'existence d'un contrat de travail à durée déterminée conclu avec la SASP BEZIERS RUGBY, précisant même expressément quant à la nature de la prétendue convention invoquée (p. 6 des conclusions d'appel dernier alinéa) « Il ne s'agit donc pas d'une simple promesse d'embauche résultant de la seule volonté de l'employeur, mais bien d'un contrat de travail dès l'origine dans lequel les parties s'engagent pour une durée déterminée de 2 ans avec prise d'effet au 1er juillet 2008 », constatation reprise à l'arrêt d'appel indiquant notamment que « Paul X... fait valoir que le document intitulé « convention d'engagement réciproque d'un joueur professionnel de rugby » constituerait, non une simple promesse d'embauche résultant de la seule volonté de l'employeur, mais un contrat de travail » (v. p. 3 de l'arrêt d'appel, alinéa 1) ; que, partant, Monsieur X... formait une demande en paiement de la somme de 233. 640 € représentant le montant de la rémunération qu'il aurait perçue jusqu'au terme du contrat, ce en application de l'article L. 1243-4 du Code du travail ou d'une réévaluation de la clause pénale stipulée à la convention invoquée ; qu'il résultait de l'ensemble de ces éléments que l'objet du litige ne portait nullement sur la reconnaissance d'une promesse d'embauche, expressément exclue par Monsieur X... lui-même, mais sur la seule revendication de l'existence d'un contrat de travail ; qu'en considérant (p. 3, alinéa 6) « que cette convention s'analyse en une promesse d'embauche » et (p. 4, alinéa 4) « (…) qu'au vu des éléments portés à son appréciation, la cour a les moyens de fixer à 50. 000 € le montant dû au joueur à titre de dommages et intérêts pour préjudice subi résultant de la rupture abusive de la promesse d'embauche », la Cour d'appel a violé les articles 4 et 5 du Code de procédure civile ;
ALORS QUE 2°) le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction, il ne peut fonder sa décision sur les moyens de droit qu'il a relevés d'office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations ; qu'il résulte tant des conclusions d'appel des parties que des constatations de l'arrêt d'appel que le fondement juridique des prétentions présentées devant les juges du fond n'a constitué de la part de Monsieur X... qu'à invoquer une seule demande en paiement de la somme de 233. 640 €, représentant le montant de la rémunération qu'il aurait perçue jusqu'au terme du contrat, ce en application de l'article L. 1243-4 du Code du travail ou d'une réévaluation de la clause pénale stipulée à la convention invoquée ; qu'il en résultait l'existence d'une demande formée à l'encontre de la SASP BEZIERS RUGBY qu'en sa seule qualité de prétendu employeur de Monsieur X... au titre du contrat de travail invoqué, à l'exclusion de tout autre fondement juridique ; qu'en décidant d'écarter la qualification juridique de contrat de travail à la convention litigieuse tout en retenant une responsabilité de nature quasi délictuelle de l'exposante pour (p. 4, alinéa 4) « (…) rupture fautive de la promesse d'embauche », ce sans inviter au préalable les parties à s'expliquer contradictoirement sur un tel fondement de responsabilité non invoqué au débat, la Cour d'appel a violé l'article 16 du Code de procédure civile ;
ALORS QUE 3°) une promesse unilatérale est un contrat par lequel une partie s'engage envers une autre, bénéficiaire, à conclure dans un délai convenu et raisonnable, un contrat dont les éléments essentiels sont déterminés et pour la formation duquel seul le consentement du bénéficiaire fait défaut ; qu'il appartient à celui qui se prévaut du bénéfice d'une promesse d'apporter la preuve de la volonté de s'engager du prétendu promettant ; que le document intitulé « convention d'engagement réciproque d'un joueur professionnel de rugby » invoqué par Monsieur X... ne comporte aucune signature de la part de la SASP BEZIERS RUGBY ; qu'il en résultait ainsi nécessairement l'absence d'engagement de quelque nature que ce soit conclu par la SASP BEZIERS RUGBY avec Monsieur X... ; qu'en considérant que le document litigieux s'analysait en « une promesse d'embauche », sans rechercher s'il ne s'inférait pas de l'absence de signature de ce document l'absence de volonté de s'engager de la par de la SASP BEZIERS RUGBY, la Cour d'appel a manqué de base légale au regard des articles 1108 et 1134 du Code civil.
Moyen produit au pourvoi incident par la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat aux Conseils pour M. X....
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR, après avoir refusé d'admettre l'existence d'un contrat de travail liant les parties, limité à la somme de 50. 000 euros les dommages-intérêts accordés pour rupture fautive de leurs accords par le club à M. X..., au lieu des 233. 640 euros réclamés par ce dernier,
AUX MOTIFS QUE le document daté du 1er avril 2008 intitulé « convention d'engagement réciproque d'un joueur professionnel de rugby » précise l'emploi occupé, la rémunération, la durée du contrat de travail et la date d'embauche ainsi que le temps de travail ; qu'en revanche, il appelait confirmation tant de la part de la LNR à l'homologation de laquelle il était soumis que de celle du joueur, ce que confirme le fait que la lettre du 8 avril 2008 à laquelle il était annexée mentionne en objet « information pré-contrat », qu'une clause pénale était prévue « si l'une des parties n'honorait pas le présent engagement de contracter sous contrat LNR, que dans son courrier électronique du 6 juin 2008, le représentant du joueur demande de lui faire parvenir le contrat définitif avec le pré-contrat existant ; qu'en outre, ni les déclarations du représentant du joueur, selon lesquelles celui-ci l'aurait retournée signée depuis son domicile en Grande-Bretagne, ni son déplacement à Béziers ne suffisent à établir une acceptation claire et sans équivoque de sa part ; qu'il en résulte que cette convention s'analyse en une promesse d'embauche ;
1°) ALORS QUE constitue une promesse d'embauche valant contrat de travail l'écrit qui précise l'emploi proposé et la date d'entrée en fonction ; que la rupture de l'engagement précisant au salarié son salaire, la nature de son emploi, ses conditions de travail et la date de sa prise de fonction, s'analyse donc comme la rupture d'un contrat de travail, avec toutes conséquences de droit, nonobstant l'absence de commencement d'exécution du contrat ; qu'en cas de rupture anticipée du contrat de travail à durée déterminée qui intervient à l'initiative de l'employeur, en dehors des cas de faute grave ou de force majeure, le salarié à droit à des dommages-intérêts d'un montant au moins égal aux rémunérations qu'il aurait perçues jusqu'à la fin du contrat ; que la cour d'appel a constaté que l'engagement en date du 1er avril 2008 adressé par le club au joueur précisait l'emploi occupé, la rémunération, la durée du contrat, la date d'embauche ainsi que la durée du travail ; qu'en considérant cependant que cette promesse d'embauche ne valait pas contrat de travail, pour refuser à M. X... l'indemnisation due en cas de rupture anticipée d'un contrat à durée déterminée, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé l'article 1134 du code civil, ensemble l'article L. 1243-4 du code du travail ;
2°) ALORS en tout état de cause QUE la cour d'appel a constaté que M. X..., pour venir jouer à Béziers, s'était effectivement libéré du contrat le liant avec le club de Newport ; qu'en ne recherchant pas si cette rupture effective de son contrat avec le club de Newport ne révélait pas qu'il avait accepté de manière certaine la promesse ferme d'embauche faite par le club de Béziers, ce qui emportait en tout état de cause formation du contrat de travail, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 10-21114
Date de la décision : 04/04/2012
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Montpellier, 19 mai 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 04 avr. 2012, pourvoi n°10-21114


Composition du Tribunal
Président : Mme Mazars (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, SCP Tiffreau, Corlay et Marlange

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:10.21114
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