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21/03/2012 | FRANCE | N°10-30895

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 21 mars 2012, 10-30895


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Dijon, 12 janvier 2010), que Mme X..., engagée le 1er avril 2004 par la société Caves Maurin en qualité de responsable de caves, a été placée en arrêt de travail pour maladie du 4 octobre 2005 au 6 décembre 2006 ; qu'à l'issue de deux visites médicales des 11 décembre 2006 et 4 janvier 2007, le médecin du travail l'a déclarée inapte à son poste de caviste mais apte à occuper un poste de caissière ou de bureau ; que le 22 janvier 2007, elle a é

té licenciée pour inaptitude et impossibilité de reclassement ; qu'elle a sais...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Dijon, 12 janvier 2010), que Mme X..., engagée le 1er avril 2004 par la société Caves Maurin en qualité de responsable de caves, a été placée en arrêt de travail pour maladie du 4 octobre 2005 au 6 décembre 2006 ; qu'à l'issue de deux visites médicales des 11 décembre 2006 et 4 janvier 2007, le médecin du travail l'a déclarée inapte à son poste de caviste mais apte à occuper un poste de caissière ou de bureau ; que le 22 janvier 2007, elle a été licenciée pour inaptitude et impossibilité de reclassement ; qu'elle a saisi la juridiction prud'homale ;
Attendu que la salariée fait grief à l'arrêt de déclarer son licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse et de la débouter de ses demandes de dommages-intérêts, d'indemnité de préavis et d'indemnité conventionnelle de licenciement, alors, selon le moyen :
1°/ que l'avis d'inaptitude à tel ou tel emploi dans l'entreprise délivré par le médecin du travail ne dispense pas l'employeur, quelle que soit la position prise alors par le salarié, de rechercher les possibilités de reclassement de celui-ci au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations ou transformations de postes de travail ou d'aménagement du temps de travail ; que cette recherche doit être préalable à l'engagement d'une procédure de licenciement ; qu'il résulte des constatations de l'arrêt attaqué que Mme X..., engagée le 1er avril 2004 par la société Caves Maurin, a été mise, du 4 octobre 2005 au 6 décembre 2006, en arrêt de travail pour cause de maladie ; que le 15 décembre 2006, le médecin du travail a conclu que, pour éviter un nouvel accident du travail, une réorganisation de la présentation des produits de la cave devait être envisagée pour limiter les manutentions ; que le second avis médical du médecin du travail en date du 4 janvier 2007 a conclu à l'inaptitude de Mme X... au poste de caviste, tout en précisant que la salariée « peut occuper un poste de caissière ou de bureau » ; que, le jour même, soit le 4 janvier 2007, Mme X... a été convoquée à un entretien préalable à son licenciement fixé au 16 janvier 2007 et qu'elle a été licenciée le 22 janvier 2007 sans que l'employeur ait réellement procédé à une recherche de reclassement à compter de l'avis d'inaptitude du 4 janvier 2007, la lettre de licenciement se bornant à énoncer que « compte tenu des conclusions du médecin du travail, il m'est malheureusement impossible de vous reclasser dans l'entreprise dans un poste adapté à vos capacités actuelles » ; que, pour considérer « que l'employeur a recherché un reclassement de Mme X... avant et après le deuxième avis médical et qu'il s'est trouvé dans l'impossibilité de donner suite à l'avis du médecin du travail », l'arrêt attaqué relève que « le 19 janvier 2007, Philippe Y..., expert-comptable, a précisé à la société Caves Maurin qui l'avait interrogé sur la possibilité de créer un poste administratif, que les résultats de l'entreprise, l'organisation de chaque cave, la non-viabilité économique de l'expérience consistant à employer à la fois un caviste et une assistante dans une cave, le fait que le gérant traite la gestion administrative et l'externalisation de la fonction de secrétaire comptable nécessitant des compétences et des qualifications spécifiques rendaient inopportune la création d'un poste administratif supplémentaire » ; qu'en statuant alors qu'il ressortait de ces constatations que la procédure de licenciement avait été engagée le jour même du deuxième avis du médecin du travail et avant même que l'expert comptable ait indiqué que la création d'un poste administratif supplémentaire était ‘‘inopportune'', la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé l'article L. 1226-2 du code du travail ;
2°/ que le juge doit, à peine de nullité de la décision qu'il prononce, répondre à l'ensemble des moyens qui lui sont soumis ; que, dans ses écritures d'appel, Mme X... faisait précisément valoir que « les possibilités recensées par le médecin du travail sont restées lettre morte, l'employeur faisant savoir à Mme X..., par courrier de notification du licenciement, qu'il estimait ne pas pouvoir procéder à son reclassement sans autre explication. La lettre de licenciement révèle que les perspectives envisagées par le médecin du travail n'ont pas été exploitées, précision faite que la date de la convocation à l'entretien préalable (4 janvier 2007) coïncide avec celle du second avis d'inaptitude rendu par le médecin du travail ! » ; qu'en ne répondant pas au moyen péremptoire des écritures d'appel de Mme X..., la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu qu'après avoir rappelé que l'employeur doit proposer au salarié, déclaré inapte par le médecin du travail à reprendre son emploi, un autre emploi approprié à ses possibilités, cette proposition prenant en compte les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu'il formule sur l'aptitude du salarié à exercer l'une des tâches existantes dans l'entreprise et l'emploi proposé étant aussi comparable que possible à celui précédemment occupé, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de postes ou aménagement du temps de travail, la cour d'appel, qui devait tenir compte des recherches de reclassement postérieures au second avis du médecin du travail, lesquelles pouvaient être poursuivies jusqu'à la date du licenciement, a exactement retenu que l'employeur n'avait pas l'obligation de créer un nouveau poste ;
Et attendu qu'ayant constaté que l'employeur, avait, postérieurement au second avis du médecin du travail, tenté en vain, au vu des indications de ce médecin, de procéder à un tel reclassement, la cour d'appel, a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme X... aux dépens ;
Vu l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, rejette la demande de Me Carbonnier ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt et un mars deux mille douze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par de Me Carbonnier, avocat de Mme X...

MOYEN UNIQUE DE CASSATION
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR considéré que le licenciement de Madame Annie X... fondé sur son inaptitude physique et l'impossibilité de son reclassement était justifié par une cause réelle et sérieuse et débouté la salariée de ses demandes de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, au titre du préavis et de l'indemnité conventionnelle de licenciement, ainsi que de remise de documents rectifiés (bulletins de salaire, attestation Assedic, certificat de travail) ;
AUX MOTIFS QUE "selon l'article L. 1226-2 du code du travail, lorsque, à l'issue des périodes de suspension du contrat de travail consécutives à une maladie ou un accident non professionnel, le salarié est déclaré inapte par le médecin du travail à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités. Cette proposition prend en compte les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu'il formule sur l'aptitude du salarié à exercer l'une des taches existantes dans l'entreprise. L'emploi proposé est aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de postes ou aménagement du temps de travail. Dans une fiche médicale d'aptitude du 11 décembre 2006, le médecin du travail a précisé que dans l'attente de l'étude du poste de travail le 15 décembre et de renseignements complémentaires, Anne X... ne devait pas être affectée à un poste exigeant le port de charges supérieures à 10 kg, la manutention de ces charges en dessous de 80 centimètres de hauteur, des postures contraignantes pour sa colonne vertébrale (pas de flexion ni torsion). A l'issue de l'étude de poste, le médecin du travail a indiqué, dans un courrier adressé le 15 décembre 2006 à l'employeur, que le poste de travail d'Anne X... comprenait beaucoup de manutention, que les fûts livrés sur palettes, au maximum six par palette, pesaient 62 kg et devaient, théoriquement, être mis en place par le livreur, ce qui, semble-t-il, n'était pas le cas, qu'un fut vide pèse 12,5 kg, que les cartons de bouteilles pèsent 9 kg, que deux à trois palettes de cartons de bouteilles sont livrés par semaine, 30 cartons ou 30 fontaines à vin par palette, que les palettes sont tirées avec un tire-palettes à main, que les cartons sont rangés sur deux niveaux de profondeur, à dix centimètres du sol environ, ce qui oblige le salarié à prendre le canon à bout de bras en courbant le dos, que la charge ne peut pas être prise plus près du corps en pliant les jambes comme il est recommandé, que le salarié doit effectuer des gestes inadaptés à la colonne vertébrale. Le médecin du travail a conclu qu'une réorganisation de la présentation des produits était à envisager pour effectuer les manutentions de manière à prévenir les accidents du travail et les maladies professionnelles n° 98, l'ARACT pouvant apporter son concours à cet effet. Le 20 décembre 2006, l'employeur a demandé au médecin du travail de préciser s'il existait un poste adaptable pour Anne X... compte tenu de son état de santé. Le 4 janvier 2007, le médecin du travail a émis l'avis suivant : "après le 1er examen médical du 11-12-06, l'étude du poste de travail du 15-12-06, le 2ème examen médical ce jour, le port de charges de plus de 5 kg est contre indiqué, les manutentions au dessus de 80 cm de hauteur, les postures contraignantes pour la colonne vertébrale demeurent contre indiquées, inapte au poste de cariste, peut occuper un poste de caissière de bureau". Il suit de là que du fait de son inaptitude partielle, la salariée ne pouvait plus occuper qu'un poste de caissière ou de bureau. Par lettre remise à l'intéressée en mains propres le 4 janvier 2007, la SARL Caves Maurin a informé Anne X... de ce qu'il envisageait de procéder à son licenciement et l'a convoquée à un entretien préalable fixé au 16 janvier 2007. Le 19 janvier 2007, Philippe Y..., expert-comptable, a précisé à la Sarl Caves Maurin qui l'avait interrogé sur la possibilité de créer un poste administratif, que les résultats de l'entreprise, l'organisation de chaque cave, la non-viabilité économique de l'expérience consistant à employer à la fois un caviste et une assistante dans une cave, le fait que le gérant traite la gestion administrative et l'externalisation de la fonction de secrétaire comptable nécessitant des compétences et des qualifications spécifiques rendaient inopportune la création d'un poste administratif supplémentaire. Le 22 janvier 2007, la Sarl Caves Maurin a licencié Anne X.... La preuve est rapportée de ce que la Sarl Caves Maurin n'avait pas la possibilité de transformer un poste existant en poste administratif. L'aménagement de poste suggéré par le médecin du travail était destiné non pas à permettre à Anne X... de conserver son poste, le métier de caviste lui étant interdit, mais d'éviter des postures inadaptées. Si le poste de caviste comportait des tâches d'accueil, d'information, de conseil et de tenue de caisse, il exigeait aussi du titulaire qu'il soit en mesure de manipuler des cartons, des fûts et des fontaines. L'affectation d'Anne X... à un poste d'assistante ne comportant aucune de ces manipulations aurait nécessité la création d'un poste de caviste. Or, la loi n'impose pas une telle obligation à l'employeur, lequel démontre, au demeurant, qu'elle aurait été économiquement non viable. Il est suffisamment démontré que l'employeur a recherché un reclassement de l'intimée avant et après le deuxième avis médical et qu'il s'est trouvé dans l'impossibilité de donner suite à l'avis du médecin du travail. Le licenciement fondé sur l'inaptitude et l'impossibilité de reclassement d'Anne X... est justifiée par une cause réelle et le jugement doit être infirmé" (arrêt p. 4 à 6) ;
1°) ALORS QUE l'avis d'inaptitude à tel ou tel emploi dans l'entreprise délivré par le médecin du travail ne dispense pas l'employeur, quelle que soit la position prise alors par le salarié, de rechercher les possibilités de reclassement de celui-ci au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations ou transformations de postes de travail ou d'aménagement du temps de travail ; que cette recherche doit être préalable à l'engagement d'une procédure de licenciement ;
Qu'il résulte des constatations de l'arrêt attaqué que Madame Anne X..., engagée le 1er avril 2004 par la SARL Caves Maurin, a été mise, du 4 octobre 2005 au 6 décembre 2006, en arrêt de travail pour cause de maladie ; que le 15 décembre 2006, le médecin du travail a conclu que, pour éviter un nouvel accident du travail, une réorganisation de la présentation des produits de la cave devait être envisagée pour limiter les manutentions ; que le second avis médical du médecin du travail en date du 4 janvier 2007 a conclu à l'inaptitude de Madame Anne X... au poste de caviste, tout en précisant que la salariée « peut occuper un poste de caissière ou de bureau » ; que, le jour même, soit le 4 janvier 2007, Madame X... a été convoquée à un entretien préalable à son licenciement fixé au 16 janvier 2007 et qu'elle a été licenciée le 22 janvier 2007 sans que l'employeur ait réellement procédé à une recherche de reclassement à compter de l'avis d'inaptitude du 4 janvier 2007, la lettre de licenciement se bornant à énoncer que « compte tenu des conclusions du médecin du travail, il m'est malheureusement impossible de vous reclasser dans l'entreprise dans un poste adapté à vos capacités actuelles » ;
Que, pour considérer « que l'employeur a recherché un reclassement de Madame X... avant et après le deuxième avis médical et qu'il s'est trouvé dans l'impossibilité de donner suite à l'avis du médecin du travail », l'arrêt attaqué relève que « le 19 janvier 2007, Philippe Y..., expert-comptable, a précisé à la Sarl Caves Maurin qui l'avait interrogé sur la possibilité de créer un poste administratif, que les résultats de l'entreprise, l'organisation de chaque cave, la non-viabilité économique de l'expérience consistant à employer à la fois un caviste et une assistante dans une cave, le fait que le gérant traite la gestion administrative et l'externalisation de la fonction de secrétaire comptable nécessitant des compétences et des qualifications spécifiques rendaient inopportune la création d'un poste administratif supplémentaire » ;
Qu'en statuant alors qu'il ressortait de ces constatations que la procédure de licenciement avait été engagée le jour même du deuxième avis du médecin du travail et avant même que l'expert comptable ait indiqué que la création d'un poste administratif supplémentaire était ‘‘inopportune'', la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé l'article L. 1226-2 du code du travail ;
2°) ALORS QUE le juge doit, à peine de nullité de la décision qu'il prononce, répondre à l'ensemble des moyens qui lui sont soumis ;
Que, dans ses écritures d'appel (p. 6), Madame Anne X... faisait précisément valoir que « les possibilités recensées par le médecin du travail sont restées lettre morte, l'employeur faisant savoir à Madame X..., par courrier de notification du licenciement, qu'il estimait ne pas pouvoir procéder à son reclassement sans autre explication. La lettre de licenciement révèle que les perspectives envisagées par le médecin du travail n'ont pas été exploitées, précision faite que la date de la convocation à l'entretien préalable (4 janvier 2007) coïncide avec celle du second avis d'inaptitude rendu par le Médecin du travail ! » ;
Qu'en ne répondant pas au moyen péremptoire des écritures d'appel de Madame Anne X..., la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 10-30895
Date de la décision : 21/03/2012
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Dijon, 12 janvier 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 21 mar. 2012, pourvoi n°10-30895


Composition du Tribunal
Président : M. Chollet (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Carbonnier, SCP Potier de La Varde et Buk-Lament

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:10.30895
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