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08/03/2012 | FRANCE | N°10-26753

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 08 mars 2012, 10-26753


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Poitiers, 21 septembre 2010), que neuf salariés des sociétés Fleury Michon charcuterie et Fleury Michon traiteur ont saisi en avril 2007 la juridiction prud'homale afin de se voir appliquer les majorations de 40 % prévues par l'article 50 de la convention collective nationale de l'industrie de la salaison, charcuterie en gros et conserves de viandes du 29 mars 1972 en cas d'heures de nuit effectuées de manière exceptionnelle, au titre des heures qu'ils avaient

accomplies entre 21 heures et 22 heures, et attribuer, en con...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Poitiers, 21 septembre 2010), que neuf salariés des sociétés Fleury Michon charcuterie et Fleury Michon traiteur ont saisi en avril 2007 la juridiction prud'homale afin de se voir appliquer les majorations de 40 % prévues par l'article 50 de la convention collective nationale de l'industrie de la salaison, charcuterie en gros et conserves de viandes du 29 mars 1972 en cas d'heures de nuit effectuées de manière exceptionnelle, au titre des heures qu'ils avaient accomplies entre 21 heures et 22 heures, et attribuer, en conséquence, des rappels de salaire à compter du mois de juin 2002 ; que le syndicat CGT Fleury Michon (le syndicat) est intervenu à l'instance, sollicitant des dommages-intérêts en réparation du préjudice causé par la non-application des dispositions de la convention collective ;
Attendu que les salariés et le syndicat font grief à l'arrêt de les débouter de leurs demandes, alors, selon le moyen :
1°/ qu'est considéré comme travailleur de nuit, selon la convention collective des industries charcutières, tout salarié qui, au cours de la plage horaire définie par l'article L. 213-1-1 du code du travail, soit accomplit au moins deux fois par semaine travaillée, selon son horaire de travail habituel, au moins trois heures de son temps de travail quotidien, soit accomplit au moins 300 heures de travail effectif au cours d'une période de 12 mois consécutifs ; qu'en considérant que les salariés effectuaient habituellement des heures de travail de nuit, après avoir relevé que ces salariés ne pouvaient être qualifiés de travailleurs de nuit, ce dont il résultait qu'ils effectuaient des heures de nuit à titre exceptionnel, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les articles 50 de la convention collective des industries charcutières et 1134 du code civil ;
2°/ qu'il appartient aux juges du fond, saisis d'une demande de rappel de salaire au titre d'heures effectuées exceptionnellement la nuit, de rechercher si l'intéressé a effectivement accompli de manière exceptionnelle des heures de travail la nuit ; qu'en l'espèce, les salariés faisaient valoir que les heures de nuit étaient effectuées non pas selon leurs horaires de travail habituels, mais selon les besoins ponctuels de la direction en lien avec des contraintes de production variables en début et fin de journée, que les heures de travail effectif de nuit étaient réparties de manière totalement aléatoire sur l'année et ne répondaient à aucun critère de régularité, que l'accord d'entreprise prévoit une modulation des horaires de fin de journée de moins 1 heure à + ¼ d'heure et que les plannings d'horaires étaient réadaptés par l'employeur le plus souvent la veille pour le lendemain ; que, dès lors, en se fondant, pour écarter la majoration pour travail exceptionnel la nuit, sur la seule circonstance que les salariés appartenaient à des équipes qui travaillaient une semaine le matin de 6 heures à 14 heures et la suivante de 14 heures à 22 heures, sans rechercher, comme elle y était invitait, si ces salariés accomplissaient effectivement des heures de nuit de manière habituelle, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 50 de la convention collective des industries charcutières et 1134 du code civil ;
Mais attendu, d'abord, que selon l'article 50 de la convention collective nationale de l'industrie de la salaison, charcuterie en gros et conserves de viandes du 29 mars 1972, modifié par l'avenant du 29 avril 2002, " a) Tout salarié effectuant de manière habituelle des heures de travail de nuit (tout ou partie de la période nocturne) bénéficie à ce titre d'une compensation salariale égale à 20 % de son taux horaire pour chaque heure de travail située entre 21 heures et 6 heures. b) En outre, est considéré comme « travailleur de nuit » tout salarié qui, au cours de la plage horaire définie par l'article L 213-1-1 du code du travail :- soit accomplit au moins 2 fois par semaine travaillée, selon son horaire de travail quotidien, au moins 3 heures de son temps de travail quotidien ;- soit accomplit au moins 300 heures de travail effectif au cours d'une période de 12 mois consécutifs définie par accord d'entreprise ou dans le cadre des dispositions internes relatives à l'annualisation du temps de travail. (...) " ; c) En cas d'heures de nuit effectuées de manière exceptionnelle, le salarié bénéficie à ce titre d'une compensation salariale égale à 40 % de son taux horaire pour chaque heure de travail située entre 21 heures et 6 heures " ; qu'il résulte de ce texte qu'un salarié qui n'est pas travailleur de nuit au sens de la convention collective peut, soit effectuer des heures de travail de nuit de manière habituelle si les heures de nuit sont incluses dans son horaire de travail, soit accomplir des heures de nuit de façon exceptionnelle si tel n'est pas le cas ;
Attendu, ensuite, que la cour d'appel, effectuant la recherche prétendument omise, a retenu que les salariés accomplissaient effectivement des heures de nuit de manière habituelle, l'heure de travail de 21 heures à 22 heures étant incluse dans l'horaire de travail de l'après-midi pratiqué une semaine sur deux ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne le syndicat CGT Fleury Michon et les salariés aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande du syndicat CGT Fleury Michon et des salariés ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du huit mars deux mille douze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par Me Haas, avocat aux Conseils pour le syndicat CGT Fleury Michon, MM. Z..., A..., Mme C..., M.
D...
, Mme E..., MM. F...,
G...
, B...et H...

Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR débouté les salariés de leurs demandes de rappels de salaires au titre des majorations de nuit et de congés payés y afférents et D'AVOIR débouté le syndicat CGT de sa demande de dommages-intérêts ;
AUX MOTIFS QU'il n'est pas contesté que les heures de nuit accomplies par Mmes E...et C...et MM. Z..., A..., D..., F..., G... et H...ont donné lieu à majoration de 20 % mentionnée sur les bulletins de salaire ; que les dispositions de l'article 50 de la convention collective, qui distingue les salariés effectuant de manière habituelle des heures de travail de nuit qui bénéficient d'une compensation égale à 20 % du taux horaire pour chaque heure de travail située entre 21 heures et 6 heures, les « travailleurs de nuit », c'est-à-dire les salariés qui, au cours de la plage horaire de nuit, soit accomplissent au moins deux fois par semaine travaillée, selon leur horaire de travail habituel, au moins trois heures de leur temps de travail quotidien, soit accomplissent au moins 300 heures de travail effectif au cours d'une période de 12 mois consécutifs définie par accord d'entreprise qui bénéficient de repos compensateurs, les salariés effectuant des heures de nuit de manière exceptionnelle qui bénéficient d'une compensation égale à 40 % du taux horaire pour chaque heure de travail située entre heures et 6 heures ; qu'en l'espèce, il est indéniable que Mmes E...et C...et MM. Z..., A..., D..., F..., G... et H...ne peuvent être considérés comme travailleurs de nuit, mais qu'au regard des dispositions conventionnelles ci-dessus, le premier juge ne pouvait en déduire que les heures de nuit qu'ils ont effectuées avaient nécessairement un caractère exceptionnel sans avoir préalablement recherché si elles n'avaient pas un caractère habituel ; qu'il résulte des éléments produits par les parties que, dans les postes occupés par les salariés, le travail se fait en équipe et qu'ils appartiennent à des équipes qui travaillent une semaine le matin de 6 heures à 14 heures et la suivante de 14 heures à 22 heures ; que c'est le cas pour Mme E...dans ses fonctions successives d'opératrice, de conductrice de ligne ou d'approvisionneur, pour Mme C...et M. A...à leurs postes de conducteurs d'installation, pour M. Z...à celui de fabricant mélanges plats, pour M.
D...
à celui de gestionnaire de flux, pour M. F...à celui de conducteur de ligne, pour M.
G...
à celui d'opérateur transfert matière et pour M. H...à celui d'opérateur conditionnement et suremballage ; qu'il n'apparaît pas que les demandes des salariés portent sur d'autres heures que celles effectuées entre 21 heures et 22 heures, preuve en est que M. H..., au sujet duquel la société Fleury Michon Traiteur indique qu'à une époque, il a exercé des fonctions dans le cadre d'un horaire différent, ne revendique strictement aucune heure de nuit sur cette période, soit du mois de novembre 2007 au mois de mars 2010 ; que le caractère habituel de l'accomplissement d'heures de nuit par les salariés soumis régulièrement à l'horaire 14 h/ 22 h avait conduit l'inspecteur du travail, dans un courrier du 27 novembre 2006, en réponse à une demande du syndicat CGT Fleury Michon, à ne préconiser la majoration que pour les heures éventuellement accomplies après 22 heures pour les équipes 14 h/ 22 h ; qu'effectivement, le travail de nuit n'est exceptionnel que lorsqu'il n'est pas inclus dans l'horaire habituel de travail comme en l'espèce ;
ALORS, 1°), QU'est considéré comme travailleur de nuit, selon la convention collective des industries charcutières, tout salarié qui, au cours de la plage horaire définie par l'article L. 213-1-1 du code du travail, soit accomplit au moins deux fois par semaine travaillée, selon son horaire de travail habituel, au moins trois heures de son temps de travail quotidien, soit accomplit au moins 300 heures de travail effectif au cours d'une période de 12 mois consécutifs ; qu'en considérant que les salariés effectuaient habituellement des heures de travail de nuit, après avoir relevé que ces salariés ne pouvaient être qualifiés de travailleurs de nuit, ce dont il résultait qu'ils effectuaient des heures de nuit à titre exceptionnel, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les articles 50 de la convention collective des industries charcutières et 1134 du code civil ;
ALORS, 2°), QU'il appartient aux juges du fond, saisis d'une demande de rappel de salaire au titre d'heures effectuées exceptionnellement la nuit, de rechercher si l'intéressé a effectivement accompli de manière exceptionnelle des heures de travail la nuit ; qu'en l'espèce, les salariés faisaient valoir que les heures de nuit étaient effectuées non pas selon leurs horaires de travail habituels, mais selon les besoins ponctuels de la direction en lien avec des contraintes de production variables en début et fin de journée, que les heures de travail effectif de nuit étaient réparties de manière totalement aléatoire sur l'année et ne répondaient à aucun critère de régularité, que l'accord d'entreprise prévoit une modulation des horaires de fin de journée de moins 1 heure à + ¼ d'heure et que les plannings d'horaires étaient réadaptés par l'employeur le plus souvent la veille pour le lendemain ; que, dès lors, en se fondant, pour écarter la majoration pour travail exceptionnel la nuit, sur la seule circonstance que les salariés appartenaient à des équipes qui travaillaient une semaine le matin de 6 heures à 14 heures et la suivante de 14 heures à 22 heures, sans rechercher, comme elle y était invitait, si ces salariés accomplissaient effectivement des heures de nuit de manière habituelle, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 50 de la convention collective des industries charcutières et 1134 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 10-26753
Date de la décision : 08/03/2012
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Poitiers, 21 septembre 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 08 mar. 2012, pourvoi n°10-26753


Composition du Tribunal
Président : M. Gosselin (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Haas, SCP Delaporte, Briard et Trichet

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:10.26753
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