La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

07/03/2012 | FRANCE | N°10-20001

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 07 mars 2012, 10-20001


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu selon l'arrêt attaqué (Angers, 4 mai 2010), que M. X...a été engagé le 8 septembre 1999 en qualité de professeur de judo par l'association Es Craon judo jujitsu (l'association) ; qu'à la suite de la mise en cause du salarié quant à son comportement vis-à-vis d'une adhérente de l'association, M. X...a démissionné par courriers des 20 et 23 février 2008, puis a été convoqué par l'employeur le 27 du même mois à un entretien à l'issue duquel, par lettre datée du lend

emain, l'association a déclaré prendre acte de la démission du salarié ; qu'estim...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu selon l'arrêt attaqué (Angers, 4 mai 2010), que M. X...a été engagé le 8 septembre 1999 en qualité de professeur de judo par l'association Es Craon judo jujitsu (l'association) ; qu'à la suite de la mise en cause du salarié quant à son comportement vis-à-vis d'une adhérente de l'association, M. X...a démissionné par courriers des 20 et 23 février 2008, puis a été convoqué par l'employeur le 27 du même mois à un entretien à l'issue duquel, par lettre datée du lendemain, l'association a déclaré prendre acte de la démission du salarié ; qu'estimant que sa démission avait été donnée sous la contrainte, M. X...a, le 13 octobre 2008, saisi la juridiction prud'homale de demandes tendant à dire que la rupture s'analysait en un licenciement sans cause réelle et sérieuse et à obtenir paiement de diverses sommes à ce titre ;

Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de ses demandes, alors, selon le moyen :

1°/ que la démission est un acte unilatéral par lequel le salarié manifeste de façon claire et non équivoque sa volonté de rompre le contrat de travail ; qu'il appartient au juge de rechercher s'il résulte de circonstances antérieures ou contemporaines de la démission, qu'à la date où elle a été donnée, elle était équivoque pour l'analyser en une prise d'acte de la rupture qui produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ou d'une démission ; qu'en retenant, pour dire la démission de M. X...claire et non équivoque, qu'elle était intervenue à la suite de la découverte par M. Y...et Mme Z..., président et secrétaire de l'association qui l'employait, d'agissements " frauduleux " de sa part concernant ses relations avec la fille de Mme Z..., Marie-Camille, agissements qui étaient établis selon elle, et en déduisant de ce qu'elle jugeait les fait établis, le caractère non équivoque de la démission, sans caractériser que le salarié avait librement démissionné, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1231-1 et L. 1235-1 du code du travail ;

2°/ que le caractère successif des démissions ne saurait avoir pour conséquence d'interdire qu'elles puissent être équivoques ; qu'en s'abstenant de rechercher, comme elle y était invitée, si leur multiplication n'était pas précisément le résultat de la contrainte ou de la pression de l'employeur, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des dispositions de l'article L. 1231-1 et L. 1235-1 du code du travail ;

3°/ que le juge ne peut dénaturer les documents produits aux débats ; qu'en retenant dans la lettre du 20 février 2008 de M. X...qu'il avait " dépassé son rôle de professeur " de judo, sans prendre en considération les mentions selon lesquelles il avait indiqué " je me vois donc contraint à ce jour de vous déposer ma démission : laquelle fait suite à la demande de Mme Z... Brigitte... sans préavis comme me l'a demandé Mme Z... ", la cour d'appel a violé les dispositions de l'article 4 du code de procédure civile ;

4°/ qu'en retenant, pour dire la démission de M. X...claire et non équivoque, qu'elle était intervenue à la suite de la découverte par M. Y...et Mme Z..., président et secrétaire de l'association qui l'employait, d'agissements " frauduleux " de sa part concernant ses relations avec la fille de Mme Z..., Marie-Camille, et qu'elle résultait de deux lettres des 20 et 23 février 2008, et avait été réitérée durant l'entretien devant le bureau de l'association le 27 février 2008, sans rechercher comme elle y était invitée, s'il ne résultait pas des circonstances antérieures ou contemporaines de la date à laquelle elle avait été donnée que cette démission était équivoque, comme donnée sous la pression, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des dispositions de l'article L. 1231-1 et L. 1235-1 du code du travail ;

5°/ qu'en statuant par des motifs inopérants selon lesquels " abstraction faite de moyens de fait qui, en l'état des documents produits aux débats, restent à l'état de pures allégations ", et sans répondre à l'argumentation précise de M. X...qui soutenait qu'il résultait des propres lettres et déclarations de Mme Z... comme de la procédure pénale qu'il avait été à plusieurs reprise menacé, et soumis à des pressions, notamment par le bureau du club, auquel siégeaient les parents de la jeune fille et un autre membre de sa famille, ni rechercher si la démission de M. X...était claire et non équivoque, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des dispositions de l'article L. 1231-1 et L. 1235-1 du code du travail ;

Mais attendu que la cour d'appel, après avoir relevé que M. X...reconnaissait avoir eu un comportement inadéquat à l'égard d'une adhérente mineure de l'association, a, sans dénaturation, retenu que le salarié avait exprimé sa volonté de démissionner à trois reprises, le 20 février 2008 aux termes d'un courrier du même jour, dans lequel il reconnaissait avoir dépassé son rôle de professeur, trois jours plus tard par lettre dans laquelle il indiquait démissionner sans préavis, enfin le 27 février suivant après avoir été entendu par le bureau de l'association ; qu'elle a pu en déduire, procédant à la recherche prétendument omise, que le salarié avait manifesté une volonté claire et non équivoque de démissionner ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. X...aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du sept mars deux mille douze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Masse-Dessen et Thouvenin, avocat aux Conseils pour M. X...

Le moyen fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué D'AVOIR débouté Monsieur X...de sa demande de requalification de sa démission en licenciement sans cause réelle et sérieuse et de ses demandes d'indemnités à ce titre ;

AUX MOTIFS QUE la démission d'un salarié doit seulement être claire et non équivoque ; que le fait que cette démission intervienne à la suite de la découverte, par l'employeur, d'agissements frauduleux de ce salarié, n'est pas à soi seul de nature à remettre en cause le caractère univoque d'une telle démission ; or, que, tout d'abord, les faits reprochés à l'époque à Paul X...par l'association, à savoir plus précisément – et notamment – envois pluri-quotidiens et réitérés de messages adressés par Paul X...à la jeune Marie-Camille Z..., alors mineure, à compter du 21 mai 2007, « massages du cou et de la tête », en principe pour des raisons « sportives », et ce en dépit de l'opposition avérée de l'intéressée, demande faite par Paul X...à la même Marie-Camille Z... « d'allonger sa tête sur ses genoux », « caresses sur les cheveux et le visage », « compliments » adressés par Paul X...à Marie-Camille Z... « sur son physique », « compliments qui rendaient celle-ci « très mal à l'aise (en ce sens qu'elle) n'osait pas répondre », propositions de séjours communs en Allemagne ou à Paris, toujours en principe pour des raisons « sportives », reproches faits par Paul X..., par SMS, d'ailleurs déplorables en la forme, à Marie-Camille Z... de s'être finalement confiée à sa mère... sont à plus suffire établis, d'abord par l'enquête diligentée à l'époque par la compagnie de gendarmerie de Chateau-Gontier, peu important à cet égard que cette enquête ait été classée sans suite par le parquet compétent, ensuite par les propres aveux de l'époque de Paul X..., et enfin par les divers témoignages fournis à l'association par autant de témoins ; en second lieu, qu'il est constant que Paul X...a démissionné à trois reprises de l'association, soit plus précisément là encore :- le 20 février 2008 aux termes d'un courrier du même jour dans lequel il reconnaissait lui-même « avoir dépassé son rôle de professeur » ;- trois jours plus tard, et ce « sans préavis » ;- et enfin, le 27 février 2008, après avoir été entendu par le bureau de cette association « suite à une suspicion relative à la plainte d'un parent qui rend impossible la poursuite de nos relations dans l'association » ; que ces démissions successives interdisent là encore à elles seules à Paul X...de soutenir actuellement qu'elles auraient été en réalité équivoques, peu important là encore à cet égard que l'un ou l'autre des parents de Marie-Camille Z... aient été à l'époque président ou secrétaire de l'association ; qu'abstraction faite de moyens de fait qui, en l'état des documents produits aux débats, restent à l'état de pures allégations, il convient en conséquence d'infirmer la décision déférée ; enfin que si l'association n'apporte pas la preuve du caractère prétendument abusif de l'action engagée par Paul X..., il serait par contre inéquitable de laisser à sa charge tout ou partie des sommes exposées par elle et non comprises dans les dépens ; qu'il lui sera donc alloué celle qu'elle réclame ;

ALORS QUE la démission est un acte unilatéral par lequel le salarié manifeste de façon claire et non équivoque sa volonté de rompre le contrat de travail ; qu'il appartient au juge de rechercher s'il résulte de circonstances antérieures ou contemporaines de la démission, qu'à la date où elle a été donnée, elle était équivoque pour l'analyser en une prise d'acte de la rupture qui produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ou-d'une démission ; qu'en retenant, pour dire la démission de Monsieur X...claire et non équivoque, qu'elle était intervenue à la suite de la découverte par Monsieur Y...et Madame Z..., président et secrétaire de l'association qui l'employait, d'agissements « frauduleux » de sa part concernant ses relations avec la fille de Madame Z..., Marie-Camille, agissements qui étaient établis selon elle, et en déduisant de ce qu'elle jugeait les fait établis, le caractère non équivoque de la démission, sans caractériser que le salarié avait librement démissionné, la Cour d'appel ` a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1231-1 et L. 1235-1 du Code du travail ;

ALORS aussi QUE le caractère successif des démissions ne saurait avoir pour conséquence d'interdire qu'elles puissent être équivoques ; qu'en s'abstenant de rechercher, comme elle y était invitée, si leur multiplication n'était pas précisément le résultat de la contrainte ou de la pression de l'employeur, la Cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des dispositions de l'article L. 1231-1 et L. 1235-1 du Code du travail ;

ALORS encore QUE le juge ne peut dénaturer les documents produits aux débats ; qu'en retenant dans la lettre du 20 février 2008 de Monsieur X...qu'il avait « dépassé son rôle de professeur » de judo, sans prendre en considération les mentions selon lesquelles il avait indiqué « je me vois donc contraint à ce jour de vous déposer ma démission : laquelle fait suite à la demande de Mme Z...
A...... sans préavis comme me l'a demandée Mme Z...», la Cour d'appel a violé les dispositions de l'article 4 du Code de procédure civile ;

ALORS encore QUE qu'en retenant, pour dire la démission de Monsieur X...claire et non équivoque, qu'elle était intervenue à la suite de la découverte par Monsieur Y...et Madame Z..., président et secrétairè de l'association qui l'employait, d'agissements « frauduleux » de sa part concernant ses relations avec la fille de Madame Z..., Marie-Camille, et qu'elle résultait de deux lettres des 20 et 23 février 2008, et avait été réitérée durant l'entretien devant le bureau de l'association le 27 février 2008, sans rechercher comme elle y était invitée, s'il ne résultait pas des circonstances antérieures ou contemporaines-de la date à laquelle elle avait-été donnée que cette démission était équivoque, comme donnée sous la pression, la Cour d'appel n'a pas donné'de base légale à sa décision au regard des dispositions de l'article L. 1231-1 et L. 1235-1 du Code du travail ;

QU'en statuant par des motifs inopérants selon lesquels « abstraction faite de moyens de fait qui, en l'état des documents produits aux débats, restent à l'état de pures allégations », et sans répondre à l'argumentation précise de Monsieur X...qui soutenait qu'il résultait des propres lettres et déclarations de Mme Z... comme de la procédure pénale qu'il avait été à plusieurs reprise menacé, et soumis à des pressions, notamment par le bureau du club, auquel siégaient les parents de la jeune fille et un autre membre de sa famille, ni rechercher si la démission de Monsieur X...était claire et non équivoque, la Cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des dispositions de l'article L. 1231-1 et L. 1235-1 du Code du travail ;


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 10-20001
Date de la décision : 07/03/2012
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Angers, 04 mai 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 07 mar. 2012, pourvoi n°10-20001


Composition du Tribunal
Président : M. Linden (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Balat, SCP Masse-Dessen et Thouvenin

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:10.20001
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award