La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

29/02/2012 | FRANCE | N°10-20459

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 29 février 2012, 10-20459


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Colmar, 11 mai 2010), qu'engagée le 29 octobre 1997 par la société Adis en qualité d'employée administrative, Mme X... a été licenciée pour faute grave le 11 août 2006 pour " mauvais coaching de ses collègues et non-respect de leurs personnes " ;
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de le condamner au paiement des indemnités légales et conventionnelle de rupture, jugeant le licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse ne constitua

nt pas une faute grave, alors, selon le moyen :
1°/ que la faute grave est ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Colmar, 11 mai 2010), qu'engagée le 29 octobre 1997 par la société Adis en qualité d'employée administrative, Mme X... a été licenciée pour faute grave le 11 août 2006 pour " mauvais coaching de ses collègues et non-respect de leurs personnes " ;
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de le condamner au paiement des indemnités légales et conventionnelle de rupture, jugeant le licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse ne constituant pas une faute grave, alors, selon le moyen :
1°/ que la faute grave est celle qui, par son importance, rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise ; qu'en l'état d'un licenciement prononcé pour faute grave, il appartient aux juges du fond de qualifier, au regard des constatations de fait auxquelles ils ont procédé, le comportement reproché au salarié ; qu'ils doivent, pour cela, décider si ce comportement rendait son maintien impossible dans l'entreprise pendant la durée limitée du préavis et constituait, de ce fait, une faute grave ; que dès lors, la cour d'appel qui constatait que les agissements de Mme Y... caractérisaient un comportement inacceptable, ne pouvait, pour écarter l'existence d'une faute grave, se borner à relever que l'employeur n'établissait pas les risques que le maintien de ladite salariée pendant les deux mois de préavis aurait pu faire courir à l'entreprise ; qu'en statuant ainsi, sans procéder elle-même à cette recherche qui lui incombait, la cour d'appel a violé les articles L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9 du code du travail ensemble l'article 1315 du code civil ;
2°/ que constitue une faute grave le fait pour une salariée de tenir envers ses collègues de manière répétée des propos inacceptables, de créer une ambiance malsaine, de répartir inéquitablement le travail, et de faire preuve de manque de solidarité, et ce de manière répétée malgré les avertissements reçus ; qu'en jugeant le contraire la cour d'appel n'a pas tiré de ses constatations les conséquences qui s'en déduisaient au regard des articles L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9 du code du travail ainsi violés ;
Mais attendu qu'ayant fait ressortir que la salariée, employée administrative, à laquelle avait été confiée, sans formation particulière, la charge d'accompagner professionnellement ses collègues et de répartir le travail entre certains d'entre eux, ce qui l'avait placée face à des difficultés connues de l'employeur dès 2004, la cour d'appel a pu décider que ses propos inacceptables à l'égard de ses collègues et la répartition inéquitable du travail à l'origine d'une ambiance tendue et malsaine n'étaient pas de nature à rendre impossible son maintien dans l'entreprise et ne constituaient pas une faute grave ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne l'association Adis aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de l'association Adis et la condamne à payer à Mme X... la somme de 2 500 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-neuf février deux mille douze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Masse-Dessen et Thouvenin, avocat aux Conseils pour l'association Adis
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir dit que le licenciement de Madame Y... reposait sur une cause réelle et sérieuse et non sur une faute grave et d'avoir, en conséquence, condamné la société ADIS, son employeur, à lui payer la somme de 3. 507, 10 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, outre les congés payés afférents et celle de 4. 383, 88 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement.
AUX MOTIFS QUE Madame X... a été licenciée pour faute grave par une lettre du 11 août 2006 faisant état de plusieurs griefs ; deux séries de griefs sont formulées : le reproche d'un « mauvais coaching des collègues partageant votre activité », reproche suivi de faits précis et nombreux qu'énumère la lettre « explications insuffisantes ou erronées à propos de la réalisation du travail, réponses aux questions sur le travail inadéquates, données de manière vexatoire voire humiliante (…), répartition du travail et des dossiers sur des critères personnels, à savoir entente ou animosité personnelle avec les rédacteurs (…) » ; un second reproche de « non respect des personnes dans leur vie personnelle et professionnelle », suivi également de faits précis et nombreux : « écoute volontaire des conversations personnelles qui ne vous sont pas destinées, critiques incessantes des collaborateurs de l'entreprise concernant leurs tenues vestimentaires, leurs manières de travailler et leur vie privée, exercice d'une surveillance malsaine de vos collègues exerçant la même activité que vous » ; qu'à la suite de cette énumération, l'employeur reproche à la salariée une attitude qui « suscite une ambiance déplorable dans votre service, des ragots et la zizanie volontairement créée entre ses collègues » ; que se référant à des mises en gardes précédentes des 18 juillet 2005 et 25 novembre 2005 et à un avertissement du 17 janvier 2006, l'employeur invoque aussi le harcèlement moral de la salariée à l'encontre d'un de ses collaborateurs, Mademoiselle Z...et de ses autres collègues, et conclut par la nécessité de la licencier pour mes motifs ainsi résumés « mauvais coaching de ses collègues et le non respect des personnes en leur vie personnelle et professionnelle, révélant des agissements constitutifs d'une forme de harcèlement moral » ; qu'en ce qui concerne les antécédents reprochés ils ont été établis ; qu'un premier avertissement remis en mains propres le 17 septembre 2002 et contresigné par 2 collègues visait un comportement de bavadarges et des appels téléphoniques personnels ; qu'ensuite, un entretien d'évaluation du 5 mai 2004 mentionnait que Madame X... devait améliorer l'esprit d'équipe, le respect et la confiance ; qu'enfin un avertissement du 17 janvier 2005 a formulé des reproches à l'encontre de Madame X... relatifs à la répartition partiale et inéquitable du courrier entrant, à des commentaires acerbes sur ses collègues et à un comportement critique envers une collègue Madame Z..., comportement qui avait poissé celle-ci à bout de nerfs et entraîné son affectation dans un autre service ; qu'en ce qui concerne les faits relatés au soutien du licenciement, un avertissement ultérieur du 17 janvier 2006 a porté sur un incident ayant opposé Madame X... et sa collègue de travail, Madame Z..., concernant des faits qui seront rappelés dans la lettre de licenciement : Madame Z...qui avait souffert de la cohabitation avec la salariée a dit craindre des représailles de sa part selon une attestation de Madame A..., relatant des propos tenus le 8 août 2006 ; qu'il a été aussi établi que la salariée avait injurié un autre de ses collègues de travail, Monsieur B..., en le traitant de « con », « pourtant tu n'es pas blond », d'« incapable » et qu'elle ne l'avait pas formé au service auquel il était affecté ; qu'elle le rabaissait devant ses collègues et faisait des petites remarques innocentes qui blessent, y compris sur la vie privée des collègues devant témoins (attestation de Madame C...), qu'elle traitait un autre salarié d'incompétent (lettre de Monsieur B...à la DRH du 24 juillet 2006) ; qu'il a été aussi établi par ces deux mêmes témoins qu'elle traitait ses collègues de « connes comme des pieds », « pauvres filles » et qu'elle créait une ambiance tendue et malsaine ; que ses propos ont été qualifiés par un autre salarié de « critiques désobligeantes » et de « cruauté mentale » et de « mauvais coaching » (attestation de Mademoiselle D...) ; que cette salariée mentionne également qu'elle surveillait ses collègues et tenait des propos sur leur vie privée ; que cette collègue a aussi indiqué dans son attestation qu'elle qualifiait le travail de ses collègues de « travail de merde » et qu'elle critiquait jusqu'à la tenue de ses collègues ; que la salariée Madame Z...ayant eu des incidents avec Madame X... a établi une attestation dans le même sens ; que plusieurs salariés ont attesté de ce que Madame X... faisait un partage inéquitable du travail et insultait ses collègues en cas d'erreurs, qu'elle ne les avait pas formés et tenait des propos injurieux (attestation de M. E...et de Madame F...) ; qu'en outre un courrier électronique du 24 juillet 2006 émanant de la salariée avait été adressé à une collègue en ces termes : « ne fais pas ta maligne ou je t'en mets une » ; qu'enfin, il a été relevé à son égard, un manque de solidarité vis-à-vis de ses collègues, le fait de ne pas signaler des erreurs affectant certains dossiers et de donner des indications erronées dans ses explications indications à sa collègue Madame C...(attestation de Madame G...) ; que ces agissements caractérisent un comportement inacceptable qui justifiait le licenciement de leur auteur ; que le fait que certains griefs aient été déjà visés par les avertissements et qu'ils soient pour certains antérieurs à plus de deux mois à l'engagement de la procédure de licenciement ne permet pas de les écarter, car ils dénotent un comportement qui s'est répété y compris après le retour de la salariée de son congé de maternité et jusqu'à l'engagement de la procédure de licenciement elle-même ; que l'ancienneté de certains faits ne conduit pas non plus à les considérer comme prescrits compte te nu du comportement permanent de Madame X... jusqu'au mois de juillet 2006 ; que ces faits n'ont pas été sérieusement contredits par la salariée qui se borne à qualifier les attestations de mensongères et d'imprécises, sans s'expliquer sur les faits objectifs qui y sont relatés de manière circonstanciées par ses anciens collègues de travail ; que leur découverte antérieure au congé de maternité de la salariée a été corroborée par la suite par les propos et les révélations de ses collègues de travail, soulagées de son absence, ce qui dénote de surcroît la peur qu'elle pouvait susciter autour d'elle ; que e fait qu'elle aurait été chargée comme elle l'indique de surveiller ses collègues ne saurait venir atténuer le caractère inacceptable des propos tenus envers ses collègues ; que ces agissements ne caractérisent pas pour autant une faute grave nécessitant la rupture immédiate du contrat de travail de la salariée, faute par l'employeur d'établir les risques que son maintien pendant les 2 mois de préavis aurait pu faire courrier à l'entreprise ;
ALORS QUE la faute grave est celle qui, par son importance, rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise ; qu'en l'état d'un licenciement prononcé pour faute grave, il appartient aux juges du fond de qualifier, au regard des constatations de fait auxquelles ils ont procédé, le comportement reproché au salarié ; qu'ils doivent, pour cela, décider si ce comportement rendait son maintien impossible dans l'entreprise pendant la durée limitée du préavis et constituait, de ce fait, une faute grave ; que dès lors, la Cour d'appel qui constatait que les agissements de Madame Y... caractérisaient un comportement inacceptable, ne pouvait, pour écarter l'existence d'une faute grave, se borner à relever que l'employeur n'établissait pas les risques que le maintien de ladite salariée pendant les deux mois de préavis aurait pu faire courir à l'entreprise ; qu'en statuant ainsi, sans procéder elle-même à cette recherche qui lui incombait, la Cour d'appel a violé les articles L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9 du code du travail ensemble l'article 1315 du Code civil.
ET ALORS QUE constitue une faute grave le fait pour une salariée de tenir envers ses collègues de manière répétée des propos inacceptables, de créer une ambiance malsaine, de répartir inéquitablement le travail, et de faire preuve de manque de solidarité, et ce de manière répétée malgré les avertissements reçus ; qu'en jugeant le contraire la Cour d'appel n'a pas tiré de ses constatations les conséquences qui s'en déduisaient au regard des articles L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9 du code du travail ainsi violés.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 10-20459
Date de la décision : 29/02/2012
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Colmar, 11 mai 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 29 fév. 2012, pourvoi n°10-20459


Composition du Tribunal
Président : M. Frouin (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Masse-Dessen et Thouvenin, SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:10.20459
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award