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14/02/2012 | FRANCE | N°11-15322

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 14 février 2012, 11-15322


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu l'article 1134 du code civil ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que par acte du 30 novembre 2007, Mme X... a promis de vendre à M. Y... son fonds de commerce au prix de 75 000 euros ; que cet acte était assorti de diverses conditions suspensives dont celle tenant à l'obtention d'un prêt bancaire par M. Y... avant le 20 février 2008 ; qu'il était stipulé que ce dernier devrait fournir au cédant la preuve du dépôt d'au moins deux dossiers avant le 7

janvier 2008 et celle d'un accord de principe d'une banque de son choi...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu l'article 1134 du code civil ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que par acte du 30 novembre 2007, Mme X... a promis de vendre à M. Y... son fonds de commerce au prix de 75 000 euros ; que cet acte était assorti de diverses conditions suspensives dont celle tenant à l'obtention d'un prêt bancaire par M. Y... avant le 20 février 2008 ; qu'il était stipulé que ce dernier devrait fournir au cédant la preuve du dépôt d'au moins deux dossiers avant le 7 janvier 2008 et celle d'un accord de principe d'une banque de son choix au plus tard le 21 janvier 2008, la non-- délivrance de cette attestation rendant automatiquement caduque la convention et le cédant reprenant toute liberté de céder le fonds de commerce ; que par lettre du 25 janvier 2008 adressée à M. Y..., Mme X..., constatant l'absence de remise de ces documents aux dates prévues, s'est prévalue de la caducité de la promesse ; que par lettre du 6 février 2008, M. Y... a informé Mme X... qu'il disposait d'une somme de 100 000 euros et lui a affirmé son intention d'acquérir le fonds de commerce ; que par acte du 19 février 2008, M. Y... et la société GPA, créée en vue de se substituer à celui-ci, ont assigné Mme X... en réalisation de la vente ;
Attendu que pour accueillir cette demande, l'arrêt retient qu'il n'est pas contesté que M. Y... disposait, avant " la date d'échéance du compromis ", de liquidités supérieures au prix de cession, que Mme X... aurait donc pu percevoir celui-ci à la date prévue dans la promesse, qu'elle n'invoque aucun préjudice résultant ou susceptible de résulter du fait que M. Y... n'ait pas contracté un prêt pour assurer le paiement du prix de cession et que la condition est devenue inutile dès lors que l'acquéreur est en mesure de payer le prix convenu ; qu'il en déduit qu'il s'avère inutile de rechercher si celui-ci avait ou non sollicité ou adressé les documents bancaires aux dates fixées dans la promesse ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors qu'à la date fixée pour la remise de l'attestation d'une banque ayant donné son accord de principe sur l'octroi d'un prêt, M. Y... n'avait pas fait parvenir au promettant cette attestation bancaire exigée par la convention des parties, ce dont il résultait que cette dernière était devenue caduque le 21 janvier 2008, la cour d'appel a méconnu la loi des parties et a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre grief :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 3 février 2011, entre les parties, par la cour d'appel de Nîmes ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Nîmes, autrement composée ;
Condamne M. Y... et la société GPA aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, les condamne à payer à Mme X... la somme globale de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze février deux mille douze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle et Hannotin, avocat aux Conseils pour Mme X...

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir condamné Madame X... épouse Z... à signer l'acte de cession du fonds de commerce ;
Aux motifs propres que « Madame Karima X... épouse Z... soutient que le compromis est caduc ; qu'à cette fin, elle fait valoir :
1° en ce qui concerne le prêt, qu'en admettant au profit de l'acquéreur une option lui permettant de renoncer à la condition suspensive d'obtention du prêt par un paiement comptant alors que les termes de la convention, dont les parties ont fait une condition impérative de la vente du fonds, sont clairs et précis et ne souffrent pas d'interprétation, le premier juge a dénaturé la portée de la clause contractuelle, qu'en ne remettant pas au vendeur les documents bancaires aux dates prévues par acte du 30 novembre 2007 et en ne justifiant pas de sa prétendue solvabilité, Alain Y... a manqué à ses obligations contractuelles, que conformément à l'accord des parties, le compromis est devenu caduc pour défaut de diligences concrètes, complètes et loyales de la part de l'acquéreur, que la clause relative à l'information du vendeur sur les démarches de l'acquéreur au titre du prêt aux dates du 7 et 21 janvier 2008 n'est pas en contradiction avec la clause selon laquelle l'acte définitif devait être signé avant le 20 février 2008 ;
2° en ce qui concerne l'obtention de l'agrément du cessionnaire par le bailleur, que le bailleur ne s'est jamais prononcé sur la vente du fonds avant le 20 février 2008, qu'en conséquence Alain Y... n'a jamais été agréé en qualité de cessionnaire ; que l'intimé répond que le compromis arrivait à terme le 20 février 2008 et qu'avant cette date, Karima X... épouse Z... a été informée du fait qu'il disposait des liquidités nécessaires pour acquérir le fonds de commerce sans solliciter de prêt ; que l'attitude de Karima X... épouse Z... ne saurait être admise ; mais attendu à titre préliminaire que, s'agissant de la vente d'un fonds de commerce, Karima X... épouse Z... invoque vainement les dispositions du Code de la consommation inapplicables en la matière, que les clauses du contrat relatives à l'obtention d'un prêt par Alain Y..., claires et précises, ne souffrent pas d'interprétation, mais que le litige ne porte pas sur ce point, que, tout d'abord, l'économie d'un acte de cession consiste dans le transfert de propriété à l'acquéreur par le vendeur qui contracte alors une obligation à paiement d'un prix, selon des modalités variables ; qu'en l'espèce, il n'est pas contesté qu'Alain Y... disposait, avant la date d'échéance du compromis, de liquidités supérieures au prix de cession puisqu'il avait bloqué sur son compte une somme de 100. 000 € alors que le solde du prix de cession était de 70. 000 € ; que Karima X... épouse Z... aurait donc pu percevoir, à la date prévue dans le compromis, le montant total de la somme due au titre de la vente ; qu'elle n'invoque aucun préjudice résultant/ susceptible de résulter du fait qu'Alain Y... n'a pas contracté un prêt pour assurer le paiement du prix de cession, la condition devenant inutile dès lors que l'acquéreur était en mesure de payer le prix convenu ; que dès lors, il s'avère inutile de rechercher si celui-ci a ou non sollicité/ adressé aux dates fixées dans le compromis ; que Karima X... épouse Z... ne prétend pas/ ne démontre pas que le compromis mettait à la charge de l'acquéreur l'obligation d'obtenir l'agrément du bailleur alors que la lecture attentive de cet acte révèle qu'y sont reprises quelques clauses du bail conclu entre le SCI 2 M aux droits de laquelle se trouve la SCI « GAULT ET AUTRES » et Karima X... épouse Z... de sorte que cette obligation ne peut ressortir que de la responsabilité du preneur, à savoir l'appelante ; qu'en tout état de cause, par courrier du 31 août 2009, le bailleur a donné son agrément à la cession, étant précisé que le bail a été renouvelé le 11 mars 2008 au profit de Karima X... épouse Z... ; qu'en l'état de ces éléments, Karima X... épouse Z... fait vainement valoir que le compromis est devenu caduc ; qu'en définitive, le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a condamné Karima X... épouse Z... à signer l'acte de cession du fonds de commerce » (arrêt, p. 7, in fine, 8 et 9) ;
Et aux motifs éventuellement adoptés des premiers juges que « le litige opposant les parties vient de l'interprétation des dates indiquées dans l'acte de cession du fonds de commerce ; que, d'une part, selon l'article 1168 du Code civil, une obligation conditionnelle dépend, notamment, d'un événement futur ; que l'obligation conditionnelle fixée par l'acte de cession du 30 novembre 2007 de produire des documents bancaires à peine de ne pouvoir conclure l'acte définitif de cession, n'a pu naître qu'à compter de cette date ; qu'il a été convenu entre les parties que cette obligation serait exécutée par l'acquéreur avant les 7 et 21 janvier 2007 ; que, par voie de conséquence, la date mentionnée dans l'acte du 30 novembre 2007 au terme de laquelle l'acte définitif était susceptible d'être conclu, n'est pas le 20 février 2007 mais le 20 février 2008 ; qu'aucun doute ne pouvait subsister dans l'esprit des parties du fait de cette erreur manifeste commise par le rédacteur de l'acte ; que, d'autre part, il ressort des pièces versées au dossier que M. Y... dispose de la somme nécessaire pour acquérir le fonds de commerce sans obtenir de prêt ; que dans cette mesure, exiger la fourniture de documents attestant une demande de prêt est dispensable ; qu'aux termes de l'article 1156 du Code civil, « on doit dans les conventions rechercher quelle a été la commune intention des parties contractantes, plutôt que de s'arrêter au sens littéral des termes » ; que dans la présente affaire, le tribunal considère que la commune intention des parties était de réaliser l'acte de vente définitif, le concours bancaire demeurant accessoire ; qu'il convient donc de condamner Madame X... épouse Z... à signer l'acte définitif de cession du fonds de commerce » (jugement, pp. 2 et 3) ;
1°) Alors que les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites ; que les stipulations contractuelles, dès lors qu'elles sont valables, doivent être appliquées par le juge ; que le juge ne saurait par conséquent écarter une clause dont la validité n'est pas en doute au seul motif qu'il la tiendrait pour inutile pour les parties ; qu'au cas présent, le compromis du 30 novembre 2007 prévoyait, parmi les condition suspensives, la nécessité de « l'obtention d'un prêt bancaire de 75. 000 € au taux annuel de 5, 5 % », que « le cessionnaire devrait fournir au cédant la preuve du dépôt d'au moins deux dossiers avant le 7 janvier 2008 et un accord de principe d'une banque de son choix au plus tard le 21 janvier 2008 » et que « la nondélivrance de ladite attestation rendra automatiquement caduc et sans effet les présentes » (compromis du 30 novembre 2007, p. 6) ; que M. Y... n'a fourni ni la preuve du dépôt d'au moins deux dossiers avant le 7 janvier 2008, ni un accord de principe d'une banque de son choix avant le 21 janvier 2008 ; qu'il en résultait donc, par application des stipulations précitées, que le compromis était devenu caduc et sans effet ; que pour écarter néanmoins l'application des stipulations contractuelles et condamner M. Z... à signer l'acte de cession, la cour d'appel a estimé que, dans la mesure où M. Y... bénéficiait d'un financement propre, les conditions suspensives stipulées par les parties étaient « inutiles » (p. 9, § 3) ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a méconnu la loi des parties, en violation de l'article 1134 du Code civil ;
2°) Alors qu'il n'est pas permis au juge, lorsque les termes d'une convention sont clairs et précis, sous prétexte d'interprétation, d'en dénaturer les termes ; qu'au cas présent, le contrat de cession sous condition suspensive du 30 novembre 2007 prévoyait, au titres des conditions suspensives, que « de conventions expresses entre les parties sans lesquelles ces dernières n'auraient pas contracté, la présente convention est dans son entier soumise aux conditions suspensives suivantes (…) : l'obtention d'un prêt bancaire de 75. 000 € au taux annuel de 5, 5 %, hors assurance remboursable sur 7 ans ; concernant la clause relative au prêt, le cessionnaire devrait fournir au cédant la preuve du dépôt d'au moins deux dossiers avant le 7 janvier 2008 et un accord de principe d'une banque de son choix au plus tard le 21 janvier 2008 ; La non-délivrance de ladite attestation rendra automatiquement caduc et sans effet les présentes sans qu'il y ait lieu à mettre en demeure l'acquéreur de s'exécuter, le cédant reprenant toute liberté de céder le fonds de commerce » (contrat de cession sous condition suspensive du 30 novembre 2007, p. 6) ; que la cour d'appel a, par motifs éventuellement adoptés des premiers juges, considéré que « aux termes de l'article 1156 du Code civil, on doit dans les conventions rechercher quelle a été la commune intention des parties contractantes, plutôt que de s'arrêter au sens littéral des termes ; que dans cette affaire, le tribunal considère que la commune intention des parties était de réaliser l'acte de vente définitif, le concours bancaire demeurant accessoire » (jugement entrepris, p. 4, § 4) ; qu'en écartant les conditions suspensives d'obtention de documents bancaires, au mépris des dispositions claires et précises du contrat qui faisaient de celle-ci des conditions expresses de l'engagement des parties, « sans lesquelles ces dernières n'auraient pas contracté », la cour d'appel a dénaturé le contrat de cession sous condition suspensive du 30 novembre 2007, en violation de l'article 1134 du Code civil.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 11-15322
Date de la décision : 14/02/2012
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Nîmes, 03 février 2011


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 14 fév. 2012, pourvoi n°11-15322


Composition du Tribunal
Président : Mme Favre (président)
Avocat(s) : SCP Nicolaý, de Lanouvelle et Hannotin

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:11.15322
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