LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Poitiers, 3 novembre 2009), que M. X... a été engagé le 3 novembre 2003 par la société Adret en qualité de directeur d'activités aéronautiques ; que le tribunal de commerce de Marennes a ouvert par jugement du 6 mai 2005 une procédure simplifiée de redressement judiciaire à l'encontre de la société et nommé Mme Y... en qualité de représentant des créanciers, puis, après avoir accepté un plan de redressement par continuation, a prononcé par jugement du 20 avril 2007 la liquidation judiciaire de la société ; qu'à partir du mois d'octobre 2005, M. X..., comme les autres salariés de l'entreprise, n'a plus reçu de salaire ; qu'il a quitté l'entreprise le 17 février 2006 et saisi la juridiction prud'homale, par requête du même jour reçue le 21 février 2006, pour demander, d'abord, la résiliation judiciaire de son contrat de travail et obtenir le paiement de diverses sommes, notamment des salaires échus, ensuite, en cause d'appel, la reconnaissance de la prise d'acte de la rupture de son contrat de travail afin de lui faire produire les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande, alors, selon le moyen :
1°/ que le juge ne peut dénaturer les conclusions des parties ; que M. X... avait expressément soutenu, dans ses conclusions d'appel reprises oralement que la prise d'acte de la rupture de son contrat de travail résultait de son départ de l'entreprise et de la saisine concomitante de la juridiction prud'homale, le 17 février 2006 ; qu'en affirmant, néanmoins, que celui-ci avait prétendu qu'il a pris acte de la rupture de son contrat de travail aux torts de son employeur le 17 février 2006 préalablement à la saisine de la juridiction prud'homale, la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis des conclusions du salarié, en violation de l'article 4 du code de procédure civile ;
2°/ que la prise d'acte par un salarié de la rupture de son contrat de travail aux torts de son employeur n'est soumise à aucun formalisme ; qu'en se fondant sur le constat selon lequel M. X... n'avait adressé à l'employeur aucune lettre prenant acte de la rupture du contrat de travail pour le débouter de ses demandes sur le fondement juridique d'une prise d'acte de la rupture du contrat de travail, la cour d'appel a statué par la voie d'un motif inopérant, impropre à écarter l'existence d'une prise d'acte de la rupture de son contrat de travail par le salarié, et a ainsi privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1231-1 du code du travail ;
3°/ qu'en ayant rejeté la demande de M. X... sur le fondement juridique d'une prise d'acte de la rupture du contrat de travail, alors que le fait pour ce dernier d'avoir cessé son activité en raison de manquements imputables à son employeur et de saisir concomitamment la juridiction prud'homale en vue d'obtenir la résiliation de son contrat de travail traduisait manifestement sa volonté de rompre le contrat de travail aux torts de son employeur de sorte qu'une telle rupture devait s'analyser en une prise d'acte, la cour d'appel, à qui il incombait, après avoir restitué leur exacte qualification aux faits litigieux, de rechercher si la rupture litigieuse produisait les effets, soit d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiait, soit dans le cas contraire, d'une démission, a méconnu son office en violation de l'article L. 1231-1 du code du travail ensemble l'article 12 du code de procédure civile ;
4°/ que subsidiairement, l'employeur, qui ne verse pas les rémunérations dues à leur échéance, provoque la rupture du contrat de travail laquelle s'analyse en un licenciement ; que la cour d'appel a constaté, par motif adopté, que "l'employeur, face à d'importantes difficultés de trésorerie, a cessé de rémunérer ses salariés à partir du mois d'octobre 2005", faisant ainsi ressortir un manquement de l'employeur à son obligation de verser les rémunérations dues à échéance à M. X... ; qu'en le déboutant, néanmoins de sa demande tendant à voir juger que la rupture de son contrat de travail devait produire les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, la cour d'appel, devant laquelle il était soutenu que la défaillance de l'employeur dans le règlement des salaires constituait un manquement d'une gravité telle qu'elle justifiait que la rupture lui soit imputable, n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé les articles L. 1231-1 et L. 1235-1 du code du travail ;
Mais attendu qu'ayant constaté que le salarié avait saisi, le 17 février 2006, le conseil de prud'hommes d'une demande en résiliation judiciaire de son contrat de travail, la cour d'appel en a exactement déduit qu'il n'avait pas pris acte de la rupture dudit contrat ; que le moyen, qui critique par ailleurs un motif surabondant, n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du sept février deux mille douze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
.Moyen produit par la SCP Ortscheidt, avocat aux Conseils, pour M. X....
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté M. X... de ses demandes tendant à voir dire et juger que la prise d'acte de la rupture de son contrat de travail devait produire les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE M. X... ne demande plus la résolution judiciaire de son contrat de travail aux torts de l'employeur ; qu'il prétend qu'il avait pris acte de la rupture du contrat de travail aux torts de l'employeur le 17 février 2006 préalablement à la saisine de la juridiction prud'homale ; qu'il reconnaît néanmoins qu'il a quitté à cette date son poste mais qu'il n'a adressé à l'employeur aucune lettre prenant acte de la rupture du contrat de travail ni formulé aucun grief jusqu'à la saisine de la juridiction prud'homale aux fins de résiliation judiciaire du contrat de travail ; qu'en conséquence, sa demande ne peut pas prospérer ;
1°) ALORS QUE le juge ne peut dénaturer les conclusions des parties ; que M. X... avait expressément soutenu, dans ses conclusions d'appel reprises oralement (conclusions d'appel p. 4 § 8), que la prise d'acte de la rupture de son contrat de travail résultait de son départ de l'entreprise et de la saisine concomitante de la juridiction prud'homale, le 17 février 2006 ; qu'en affirmant, néanmoins, que celui-ci avait prétendu qu'il a pris acte de la rupture de son contrat de travail aux torts de son employeur le 17 février 2006 préalablement à la saisine de la juridiction prud'homale, la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis des conclusions du salarié, en violation de l'article 4 du code de procédure civile ;
2°) ALORS QUE la prise d'acte par un salarié de la rupture de son contrat de travail aux torts de son employeur n'est soumise à aucun formalisme ; qu'en se fondant sur le constat selon lequel M. X... n'avait adressé à l'employeur aucune lettre prenant acte de la rupture du contrat de travail pour le débouter de ses demandes sur le fondement juridique d'une prise d'acte de la rupture du contrat de travail, la cour d'appel a statué par la voie d'un motif inopérant, impropre à écarter l'existence d'une prise d'acte de la rupture de son contrat de travail par le salarié, et a ainsi privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1231-1 du code du travail ;
3°) ALORS, EN TOUTE HYPOTHESE, QU'en ayant rejeté la demande de M. X... sur le fondement juridique d'une prise d'acte de la rupture du contrat de travail, alors que le fait pour ce dernier d'avoir cesser son activité en raison de manquements imputables à son employeur et de saisir concomitamment la juridiction prud'homale en vue d'obtenir la résiliation de son contrat de travail traduisait manifestement sa volonté de rompre le contrat de travail aux torts de son employeur de sorte qu'une telle rupture devait s'analyser en une prise d'acte, la cour d'appel, à qui il incombait, après avoir restitué leur exacte qualification aux faits litigieux, de rechercher si la rupture litigieuse produisait les effets, soit d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiait, soit dans le cas contraire, d'une démission, a méconnu son office en violation de l'article L. 1231-1 du code du travail ensemble l'article 12 du code de procédure civile ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QU'en l'espèce, il convient de constater qu'effectivement l'employeur, face à d'importantes difficultés de trésorerie, a cessé de rémunérer ses salariés à partir du mois d'Octobre 2005 ;
4°) ALORS, ENFIN, SUBSIDIAIREMENT, QUE l'employeur, qui ne verse pas les rémunérations dues à leur échéance, provoque la rupture du contrat de travail laquelle s'analyse en un licenciement ; que la cour d'appel a constaté, par motif adopté, que « l'employeur, face à d'importantes difficultés de trésorerie, a cessé de rémunérer ses salariés à partir du mois d'octobre 2005 », faisant ainsi ressortir un manquement de l'employeur à son obligation de verser les rémunérations dues à échéance à M. X... ; qu'en le déboutant, néanmoins de sa demande tendant à voir juger que la rupture de son contrat de travail devait produire les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, la cour d'appel, devant laquelle il était soutenu que la défaillance de l'employeur dans le règlement des salaires constituait un manquement d'une gravité telle qu'elle justifiait que la rupture lui soit imputable, n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé L 1231-1 et L 1235-1 du code du travail.