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31/01/2012 | FRANCE | N°11-14154

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 31 janvier 2012, 11-14154


Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Reims, 13 décembre 2010), que M. X... a confié à la SARL Ecal Entreprise (la société), ayant M. A...
Y...pour gérant, des travaux de démolition et de maçonnerie dans un immeuble lui appartenant ; que des malfaçons ayant été constatées, M. X... a assigné M. A...
Y...en paiement de dommages-intérêts ;
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de l'avoir débouté de cette demande alors, selon le moyen :
1°/ qu'engage sa responsabilité personnelle le dirigeant qui commet intentionnellement une faute d'une

particulière gravité incompatible avec l'exercice normal des fonctions sociales ; que...

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Reims, 13 décembre 2010), que M. X... a confié à la SARL Ecal Entreprise (la société), ayant M. A...
Y...pour gérant, des travaux de démolition et de maçonnerie dans un immeuble lui appartenant ; que des malfaçons ayant été constatées, M. X... a assigné M. A...
Y...en paiement de dommages-intérêts ;
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de l'avoir débouté de cette demande alors, selon le moyen :
1°/ qu'engage sa responsabilité personnelle le dirigeant qui commet intentionnellement une faute d'une particulière gravité incompatible avec l'exercice normal des fonctions sociales ; que constitue une telle faute, la conclusion d'un contrat par le dirigeant social dont l'exécution par la société révèle l'inaptitude initiale de celle-ci à l'exécution de la mission contractuelle ; qu'il résulte des constatations de l'arrêt attaqué, reprises de l'expertise judiciaire, que l'exécution des travaux démontrait une absence de qualification, une non connaissance des normes en vigueur et un non-respect des règles de l'art, outre l'omission d'un recours à un bureau d'étude technique et sans disposer de plans d'exécution et de plans de détails ; qu'ainsi, l'inaptitude du débiteur contractuel à l'exécution de sa mission était établie ab initio, de sorte qu'en concluant un contrat dont il ne pouvait ignorer qu'il ne pouvait être exécuté par la société qu'il dirigeait, M. A...
Y...avait commis une faute détachable de ses fonctions et qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé l'article L. 223-22 du Code de commerce ;
2°/ qu'ainsi que le rappelait M. X... dans ses conclusions d'appel (p. 6), l'expert judiciaire avait également noté que (p. 15) « l'ensemble de l'intervention de l'entreprise démontre une absolue non connaissance des règles de l'art en général, une non connaissance des normes, une non connaissance de la réglementation en vigueur, particulièrement concernant les obligations acoustiques entre deux logements contigus ; qu'il est à rappeler que ces obligations s'appliquent à la construction de Monsieur X... puisqu'il y a eu un permis de construire » ; qu'il ajoutait : « connaissant parfaitement ces non conformités de sa prestation, l'entreprise a refusé de faire des sondages pour vérifier les fondations » ; qu'en n'examinant pas ces aspects caractérisant l'inaptitude manifeste du débiteur à l'exécution de sa mission contractuelle, ce que son dirigeant ne pouvait ignorer ou était manifestement en faute d'ignorer, la cour d'appel a entaché son arrêt d'une insuffisance de motifs et violé l'article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu que l'arrêt retient que M. X... n'établit pas que M. A...
Y...aurait commis intentionnellement une faute d'une particulière gravité incompatible avec l'exercice normal de ses fonctions ; qu'il ajoute que si les manquements aux règles de l'art constatés par l'expert judiciaire sont d'une gravité certaine, ils ne caractérisent cependant pas une faute séparable des fonctions de gérant au sens de l'article L. 223-22 du code de commerce ; qu'il relève encore que l'allégation selon laquelle M. A...
Y...savait, au cours de la construction, que les travaux n'étaient pas conformes aux règles de l'art et qu'il les avait poursuivis afin que son entreprise perçoive une rémunération ne repose sur aucun élément probant ; qu'en l'état de ces constatations et appréciations, la cour d'appel, qui a répondu aux conclusions invoquées, a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes.
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du trente et un janvier deux mille douze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par Me Blondel, avocat aux Conseils pour M. X...

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir infirmé le jugement du tribunal de grande instance de Reims du 8 juin 2010 en ce qu'il avait retenu la responsabilité de M. Antonio
A...

Y...et condamné ce dernier au payement de la somme de 108. 977, 01 euros à titre de dommages-intérêts du chef des travaux de reprise et des préjudices de jouissance, de celle de 3. 000 euros à titre de dommages-intérêts pour résistance abusive, ensemble celle de 5. 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et en ce qu'il l'a condamné aux dépens de première instance et, statuant à nouveau, d'avoir débouté Monsieur Ludovic X... des demandes formées contre M. Antonio
A...

Y...;
AUX MOTIFS QU'en l'espèce, M. X..., reprenant les motifs du jugement entrepris, soutient que l'importance des manquements constatés par l'expert judiciaire dans son rapport et par Me C..., huissier de justice associé, dans son procès-verbal de constat du 8 septembre 2000, caractérise une absence totale de maîtrise de son travail par M. A...
Y...et constitue une faute d'une gravité telle qu'elle présente un caractère intentionnel et qu'elle est incompatible avec l'exercice normal des fonctions de dirigeant de la société ; qu'il fait grief à l'appelant de s'être sciemment engagé dans ce contrat alors qu'il ne disposait pas des compétences pour réaliser les travaux ; que l'intimé estime, par ailleurs, que M. A...
Y...devait, dès la phase préècontractuelle l'informer sur les risques liées à l'édification d'un ouvrage sans avoir recours à un bureau d'études techniques et qu'il ne pouvait pas ignorer que ses travaux étaient réalisés en méconnaissance totale des règles de l'art, ce qui ne l'a pas empêché de les poursuivre ; que M. X... soutient que le fait pour M. A...
Y...d'avoir gardé le silence sur la qualité du travail effectué par l'entreprise dont il était le gérant constitue un dol, ce qui constitue une faute détachable de celle commise par la société ; que, dans son rapport, M. E...a relevé l'existence des malfaçons suivantes : courbe des linteaux contrés extérieurs ne correspondant pas aux menuiseries, absence de liaison d'une partie de la maçonnerie avec le mur de la façade au-dessus de l'entrée, insuffisance des fondations des murs réalisés par l'entreprise, absence de chaînage des murs, mise en oeuvre d'une poutre dans le salon sans plan béton laquelle présente des fissurations verticales, absence de désolidarisation avec l'habitation voisine (absence de coupure phonique), défaut de planimétrie des planchers et de verticalité de certains murs, mauvaise implantation et mauvaise réalisation des murs de la piscine ; que M. E...écrivait dans son rapport : " il est incontestable que l'ensemble des travaux exécutés par l'entreprise démontre une absence de qualification, une non-connaissance des normes en vigueur et un non-respect des règles de l'art " ; que l'entreprise avait travaillé sans faire appel à un bureau d'études techniques pour la réalisation des structures et des planchers et sans disposer de plans d'exécution et de plans de détails ; mais que la responsabilité personnelle du dirigeant social à l'égard des tiers à pour fondement les dispositions des articles 1382 et 1383 du code civil et sa mise en oeuvre exige que soit rapportée la preuve d'une faute extérieure à la conclusions ou à l'exécution du contrat – quand la responsabilité de la société est engagée sur un fondement contractuel – ou celle d'une faute séparable de ses fonctions et qui lui soit imputable personnellement quand la responsabilité de la société est recherchée en matière délictuelle ; qu'en l'espèce, M. X... ne rapporte pas cette preuve alors que les manquements invoqués et dont la gravité n'est pas contestable ne sont pas extérieurs à l'exécution du contrat conclu avec la Sarl Ecal Entreprise ; qu'en outre, M. X... n'établit pas davantage que M. A...
Y...aurait commis intentionnellement une faute d'une particulière gravité incompatible avec l'exercice normal de ses fonctions ; que si les manquements aux règles de l'art, tels qu'ils ont été rappelés ci-dessus, sont d'une gravité certaine, ils ne caractérisent cependant pas une faute séparable des fonctions de gérant au sens de l'article L. 223-22 du Code de commerce ; que la méconnaissance des règles de l'art relevée par l'expert judiciaire ne constitue pas, en effet, une faute intentionnelle de M. A...
Y...étrangère à l'exécution du contrat conclu avec la Sarl Ecal Entreprise et séparable de ses fonctions de gérant ; que les griefs que M. X... invoque à l'encontre de M. A...
Y...et que le tribunal a retenu concernent en fait la Sarl Ecal Entreprise à qui la réalisation des travaux avait été confiée (manquement aux prévisions contractuelles, aux règles de l'art et aux normes applicables) ; qu'il en est de même du reproche fait par M. X... quant à l'absence de recours à un bureau d'études techniques ; que l'allégation selon laquelle M. A...
Y...savait, au cours de la construction, que les travaux n'étaient pas conformes aux règles de l'art et qu'il les a poursuivis afin que son entreprise perçoive une rémunération, ne repose sur aucun élément probant ; que ce n'est en effet qu'après l'arrêt du chantier, à la fin du mois d'août 2000, que M. X... a fait constater par un huissier de justice l'état des travaux et l'existence de malfaçons ; qu'il n'est produit aucune pièce, émanant notamment d'un technicien du bâtiment, appelant l'attention de M. A...
Y...pendant l'exécution des travaux sur la non-conformité des ouvrages que la Sarl Ecal Entreprise était en train de réaliser ; que l'intimé ne peut donc pas soutenir que c'est en parfaite connaissance de cause et de manière intentionnelle que M. A...
Y...a fait poursuivre les travaux ;
ALORS QUE, D'UNE PART, engage sa responsabilité personnelle le dirigeant qui commet intentionnellement une faute d'une particulière gravité incompatible avec l'exercice normal des fonctions sociales ; que constitue une telle faute, la conclusion d'un contrat par le dirigeant social dont l'exécution par la société révèle l'inaptitude initiale de celle-ci à l'exécution de la mission contractuelle ; qu'il résulte des constatations de l'arrêt attaqué, reprises de l'expertise judiciaire, que l'exécution des travaux démontrait une absence de qualification ? une non connaissance des normes en vigueur et un non-respect des règles de l'art, outre l'omission d'un recours à un bureau d'étude technique et sans disposer de plans d'exécution et de plans de détails ; qu'ainsi, l'inaptitude du débiteur contractuel à l'exécution de sa mission était établie ab initio, de sorte qu'en concluant un contrat dont il ne pouvait ignorer qu'il ne pouvait être exécuté par la société qu'il dirigeait, M. A...
Y...avait commis une faute détachable de ses fonctions et qu'en décidant le contraire, la Cour d'appel a violé l'article L. 223-22 du code de commerce ;
ALORS QUE, D'AUTRE PART, ainsi que le rappelait M. X... dans ses conclusions d'appel (p. 6), l'expert judiciaire avait également noté que (p. 15) « l'ensemble de l'intervention de l'entreprise démontre une absolue non connaissance des règles de l'art en général, une non connaissance des normes, une non connaissance de la réglementation en vigueur, particulièrement concernant les obligations acoustiques entre deux logements contigus ; qu'il est à rappeler que ces obligations s'appliquent à la construction de Monsieur X... puisqu'il y a eu un permis de construire » ; qu'il ajoutait : « connaissant parfaitement ces non conformités de sa prestation, l'entreprise a refusé de faire des sondages pour vérifier les fondations » ; qu'en n'examinant pas ces aspects caractérisant l'inaptitude manifeste du débiteur à l'exécution de sa mission contractuelle, ce que son dirigeant ne pouvait ignorer ou était manifestement en faute d'ignorer, la cour d'appel a entaché son arrêt d'une insuffisance de motifs et violé l'article 455 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 11-14154
Date de la décision : 31/01/2012
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Reims, 13 décembre 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 31 jan. 2012, pourvoi n°11-14154


Composition du Tribunal
Président : Mme Favre (président)
Avocat(s) : Me Blondel, Me Le Prado

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:11.14154
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