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31/01/2012 | FRANCE | N°10-28408

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 31 janvier 2012, 10-28408


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'en janvier 1993, la SCI Le Clos Mermoz (la SCI) a vendu à M. X... un appartement en l'état futur d'achèvement ; que la SCI a été mise en redressement puis liquidation judiciaires les 3 septembre 1993 et 18 mars 1994, Mme Y... étant désignée liquidateur (le liquidateur) ; que celui-ci a réclamé à M. X... le paiement du solde du prix de vente ; que, se prévalant de ce que les travaux n'étaient pas achevés et qu'il subissait un préjudice, ce dernier a formé une demand

e reconventionnelle en paiement de dommages-intérêts ;

Sur le second m...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'en janvier 1993, la SCI Le Clos Mermoz (la SCI) a vendu à M. X... un appartement en l'état futur d'achèvement ; que la SCI a été mise en redressement puis liquidation judiciaires les 3 septembre 1993 et 18 mars 1994, Mme Y... étant désignée liquidateur (le liquidateur) ; que celui-ci a réclamé à M. X... le paiement du solde du prix de vente ; que, se prévalant de ce que les travaux n'étaient pas achevés et qu'il subissait un préjudice, ce dernier a formé une demande reconventionnelle en paiement de dommages-intérêts ;

Sur le second moyen :

Attendu que le liquidateur fait grief à l'arrêt de l'avoir condamné à payer à M. X... une provision de 30 000 euros à valoir sur son préjudice, alors, selon le moyen, que la créance de dommages et intérêts résultant de l'inexécution d'un contrat doit être déclarée au passif de la procédure collective lorsque cette inexécution est antérieure au jugement d'ouverture ; qu'en statuant comme elle l'a fait, tandis que le fait générateur de la créance de dommages-intérêts alléguée par M. X... résidait dans l'inexécution des travaux d'achèvement de l'appartement qui était antérieure à l'ouverture de la procédure collective, puisque cet appartement devait être livré au plus tard en septembre 1993, soit au moment où le redressement judiciaire de la SCI avait été ouvert, la cour d'appel a violé les articles 40, 50 et 53 de la loi du 25 janvier 1985 ;

Mais attendu que l'arrêt constate, par des motifs non critiqués que le liquidateur a manifesté sa décision de poursuivre le contrat de vente en l'état futur d'achèvement ; que dès lors que l'exécution d'un contrat conclu avant la mise en redressement judiciaire a été poursuivie par l'administrateur judiciaire, les dommages-intérêts dus à raison du retard apporté par le débiteur à l'achèvement des prestations à sa charge constituent des créances de l'article 40 de la loi du 25 janvier 1985 ; que le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur le premier moyen, pris en sa première branche :

Vu les articles 1601-3 du code civil et R. 261-14 du code de la construction et de l'habitation ;

Attendu que pour rejeter la demande du liquidateur en paiement de la somme de 88 274, 29 euros, outre intérêts légaux, dire n'y avoir lieu à fixer le solde du prix de vente à un montant différent de celui résultant de l'acte de vente et préciser que ce prix serait exigible au jour de la livraison du bien vendu, l'arrêt, après avoir rappelé que l'acte de vente stipulait l'échelonnement du prix en fonction de l'état d'achèvement des travaux et que le constat d'huissier dressé les 18 et 31 octobre 2000 démontraient que le bien vendu n'était ni achevé ni habité, retient que la demande en paiement de Mme Y... ne peut être admise puisqu'elle ne justifie pas des formalités prévues par le contrat pour l'achèvement des travaux qui seuls engendrent, en l'absence de volonté de l'acquéreur de prendre livraison du bien en l'état, l'obligation de payer le solde du prix ;

Attendu qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher quelles étaient les sommes dues au regard de l'état d'avancement des travaux, quand seuls 6 % du prix étaient subordonnés à l'achèvement et la remise des clés, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le dernier grief :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a rejeté l'ensemble des demandes de Mme Y..., ès qualités, dit n'y avoir lieu à fixer le solde du prix de vente à un montant différent de celui résultant de l'acte de vente et précisé que ce prix serait exigible au jour de la livraison du bien vendu, l'arrêt rendu le 7 octobre 2010, entre les parties, par la cour d'appel de Rennes ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Rennes, autrement composée ;

Condamne M. X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du trente et un janvier deux mille douze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Baraduc et Duhamel, avocat aux Conseils pour Mme Y...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :
:

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir débouté maître Y..., ès qualités de liquidateur judiciaire de la SCI Le Clos Mermoz, de sa demandes en paiement de la somme de 88. 274, 29 €, outre intérêts légaux, d'avoir dit n'y avoir lieu à fixer le solde du prix de vente à un montant différent de celui résultant de l'acte de vente et d'avoir précisé que ce prix serait exigible au jour de la livraison du bien vendu ;

AUX MOTIFS QUE bien qu'aucun décompte ne soit produit par maître Y..., les parties s'accordent sur le solde restant dû par monsieur X..., soit la somme de 98. 939, 41 € (649. 000 francs) ; que le constat d'huissier qu'a fait dresser maître Y... les 18 et 31 octobre 2000 démontre sans contestation possible que le bien vendu n'était ni achevé (« l'appartement est inachevé ne comportant pas d'installation électrique (interrupteur, prises, chauffage), absence de tout revêtement dans l'ensemble de l'appartement et de sanitaires sauf présence de deux baignoires »), ni habité (« des voisins de palier m'ont déclaré n'avoir vu cet appartement habité depuis quatre ans »), qu'il ne peut sérieusement être soutenu qu'il y ait eu prise de possession ce d'autant qu'aucune notification du certificat constatant par le maître d'oeuvre l'achèvement et aucun procès-verbal de livraison et de remise de clefs, formalités pourtant prévues par l'acte de vente en page 19, ne sont produits, peu important le témoignage de l'huissier Z... qui relate, dans son constat, une conversation téléphonique invérifiable ; que si maître Y... fait valoir à bon droit que le liquidateur d'une société ayant vendu des biens en l'état futur d'achèvement ne peut être contraint à poursuivre l'exécution des contrats en cours et que l'inachèvement se résout alors en dommages et intérêts, monsieur X... soutient qu'en l'espèce et ce faisant, le mandataire à la liquidation de la SCI Le Clos Mermoz a pris la décision de poursuivre le contrat de vente avec toutes les conséquences de droit qui s'attachent à cette décision ; que le contrat de vente d'un immeuble en l'état futur d'achèvement constitue un contrat en cours au sens des dispositions de l'article 37 de la loi du 25 janvier 1985 alors applicables, dès lors, d'une part, que le prix de vente n'était, au jour du jugement d'ouverture de la procédure collective, comme en l'espèce, que partiellement réglé et que, d'autre part, les travaux n'étaient pas (et ne sont toujours pas) achevés au sens de l'article R 261-1 du Code de la construction et de l'habitation ; que la décision de poursuivre un contrat en cours peut être expresse ou tacite dès lors qu'il ressort clairement des circonstances de l'espèce que le mandataire a manifesté son intention d'exercer cette option ; que la cour d'appel relève au présent cas que maître Y... a imposé, dans le cadre des opérations de liquidation, à la société Résidence du Steir, cessionnaire des biens à la SCI Le Clos Mermoz, d'achever les travaux de l'appartement vendu à monsieur X... et s'est réservée le droit de recouvrer le solde du prix de vente (alors même que le cessionnaire pressenti avait, dans son offre du 9 mars 1994, proposé d'en faire son affaire personnelle une fois les travaux réceptionnés), qu'elle a, d'ailleurs, engagé diverses actions en ce sens, considérant qu'elle pouvait recouvrer l'intégralité du prix de vente de l'appartement et non simplement le solde du prix déduction faite de la valeur des travaux restant à exécuter alors même qu'elle connaissait parfaitement l'état du bien ; que ces différents éléments caractérisent à l'évidence sa décision de poursuivre le contrat de vente en l'état futur d'achèvement conclu avec monsieur X... ; qu'elle est, dès lors tenue ès qualités des obligations qui en découlent et donc d'achever ou de faire achever les travaux ; qu'enfin si maître Y... soutient que l'inachèvement est imputable à l'acquéreur qui se serait opposé à la réalisation des travaux (admettant ainsi que ceux-ci lui incombaient), elle n'en rapporte nullement la preuve, ne produisant quant à ce point ni constat ni attestation des entreprises qui en auraient été chargées ; qu'au regard de ces différents éléments, la demande en paiement de maître Y... ne peut être admise puisqu'elle ne justifie pas davantage que précédemment de l'accomplissement des formalités prévues par le contrat pour l'achèvement des travaux, formalités qui seules engendrent, en l'absence de volonté de l'acquéreur de prendre livraison du bien en l'état, l'obligation de payer le solde du prix, ce que la cour d'appel a déjà rappelé dans l'arrêt devenu définitif du 18 septembre 2001 ; qu'il convient à cet égard, de préciser que la cession des biens de la SCI Le Clos Mermoz par son liquidateur ne les libère évidemment pas de leurs obligations à l'égard des acquéreurs et plus particulièrement de monsieur X..., qu'il leur appartenait en effet, en cas de défaillance du cessionnaire, de prendre les mesures qui s'imposaient pour y satisfaire ; que maître Y... ayant fait le choix de poursuivre le contrat, le solde du prix qui sera dû par l'acquéreur au jour de la livraison, ne pourra être que celui résultant de l'acte (98. 939, 41 € compte tenu de l'acompte payé), étant rappelé qu'il appartient au liquidateur d'achever les travaux conformément aux prescriptions contractuelles ; qu'il n'y a, dès lors, pas lieu de fixer ce solde à une somme différente de celle librement convenue par les parties ;

1°) ALORS QUE le contrat de vente en l'état futur d'achèvement est un contrat à exécution successive payable au fur et à mesure de l'avancement des travaux ; qu'en l'espèce le prix de vente était exigible en fonction des travaux exécutés, la cour d'appel ayant constaté que seuls 6 % du prix de vente restaient exigibles à la date d'achèvement et de remise des clés ; qu'en déboutant néanmoins maître Y... de sa demande de condamnation de monsieur X... au paiement du solde du prix de vente, déduction faite des travaux non exécutés, tandis que, peu important la continuation du contrat de vente en l'état futur d'achèvement, monsieur X... était nécessairement tenu au paiement de la part du prix de vente correspondant aux travaux exécutés, sans que l'exigibilité de ces sommes puisse être reportée à la livraison du bien, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé les articles 1134 et 1601-3 du Code civil et R 261-14 du Code de la construction et de l'habitation ;

2°) ALORS, en tout état de cause, QUE le liquidateur judiciaire du vendeur d'un bien en état futur d'achèvement ne peut être contraint de poursuivre le contrat en cours et d'achever les travaux ; qu'en statuant comme elle l'a fait, tandis que, du fait de la cession du bien immobilier par le liquidateur judiciaire de la SCI Le Clos Mermoz à la société Résidence du Steir, la débitrice, dont l'activité avait cessé, était dans l'impossibilité de poursuivre l'exécution du contrat de vente en l'état futur d'achèvement d'un bien qui ne lui appartenait plus, peu important que le liquidateur judiciaire ait demandé au cessionnaire d'achever les travaux et ait entendu recouvrer le solde du prix auprès de monsieur X..., la cour d'appel a violé les articles 37 et 153 de la loi du 25 janvier 1985 (anc. art. L 621-28 et L 622-12 C. com.).

SECOND MOYEN DE CASSATION :
:

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir condamné maître Y..., ès qualités de liquidateur judiciaire de la SCI Le Clos Mermoz, à payer à monsieur X... une provision de 30. 000 € à valoir sur son préjudice ;

AUX MOTIFS QUE monsieur X... sollicite à titre reconventionnel paiement de diverses sommes tendant tant à la réparation du préjudice locatif qu'il subit qu'au remboursement des sommes qu'il a exposées ; que si ce dernier n'a effectué aucune déclaration à ce titre, sa créance n'est toutefois éteinte que pour la période antérieure à la décision du liquidateur de poursuivre le contrat, les conséquences dommageables liées à la défaillance de la liquidation dans l'exécution de ses obligations ne pouvant être affectées par l'absence de déclaration ; que le bien vendu n'ayant toujours pas été livré, le préjudice de monsieur X... ne peut être définitivement liquidé ; qu'au regard des sommes qu'il a exposées depuis la décision de maître Y... (taxes foncières et charges de copropriété) et du préjudice incontestablement subi, une provision de 30. 000 € lui sera allouée ;

ALORS QUE la créance de dommages et intérêts résultant de l'inexécution d'un contrat doit être déclarée au passif de la procédure collective lorsque cette inexécution est antérieure au jugement d'ouverture ; qu'en statuant comme elle l'a fait, tandis que le fait générateur de la créance de dommages et intérêts alléguée par monsieur X... résidait dans l'inexécution des travaux d'achèvement de l'appartement qui était antérieure à l'ouverture de la procédure collective, puisque cet appartement devait être livré au plus tard en septembre 1993, soit au moment où le redressement judiciaire de la SCI Le Clos Mermoz avait été ouvert, la cour d'appel a violé les articles 40, 50 et 53 de la loi du 25 janvier 1985 (anc. art. L 621-32, L 621-43 et L 621-46 C. com.).


Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Rennes, 07 octobre 2010


Publications
Proposition de citation: Cass. Com., 31 jan. 2012, pourvoi n°10-28408

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Composition du Tribunal
Président : Mme Favre (président)
Avocat(s) : SCP Baraduc et Duhamel, SCP Lyon-Caen et Thiriez

Origine de la décision
Formation : Chambre commerciale
Date de la décision : 31/01/2012
Date de l'import : 15/09/2022

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 10-28408
Numéro NOR : JURITEXT000025291014 ?
Numéro d'affaire : 10-28408
Numéro de décision : 41200075
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.cassation;arret;2012-01-31;10.28408 ?
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