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25/01/2012 | FRANCE | N°09-72671

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 25 janvier 2012, 09-72671


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé par l'association Coloriage exploitant une station de radio, en tant que technicien d'antenne, par contrat d'accompagnement à l'emploi, à temps partiel, à compter du 20 septembre 2006 ; que soutenant que l'employeur avait exécuté de façon fautive son contrat et qu'il était créancier d'heures supplémentaires, M. X... a saisi la juridiction prud'homale ;
Sur le premier moyen :
Vu l'article L. 3171-4 du code du travail ;
Attendu qu'en cas de lit

ige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il app...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé par l'association Coloriage exploitant une station de radio, en tant que technicien d'antenne, par contrat d'accompagnement à l'emploi, à temps partiel, à compter du 20 septembre 2006 ; que soutenant que l'employeur avait exécuté de façon fautive son contrat et qu'il était créancier d'heures supplémentaires, M. X... a saisi la juridiction prud'homale ;
Sur le premier moyen :
Vu l'article L. 3171-4 du code du travail ;
Attendu qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié d'étayer sa demande par la production d'éléments suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés pour permettre à l'employeur de répondre en fournissant ses propres éléments ;
Attendu que pour rejeter la demande du salarié en paiement d'heures complémentaires, l'arrêt retient que M. X..., qui ne produisait pas de récapitulatif horaire pour les mois de novembre 2006 et mars 2007 et ne versait pour les autres mois que des feuilles de présence remplies par lui-même de façon non contradictoire et comportant des erreurs de calcul, ne fournissait pas d'éléments de nature à étayer sa demande de rappel de salaire ;
Qu'en statuant ainsi, alors que le salarié avait produit des feuilles de présence auxquelles l'employeur pouvait répondre, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Et sur le second moyen :
Vu les articles L. 4121-1, L. 4624-1, R. 4624-10 et R. 4624-19 du code du travail ;
Attendu que l'employeur qui conclut un contrat de travail avec un travailleur handicapé soumis à une surveillance médicale renforcée, est tenu de lui faire passer une visite médicale d'embauche qui doit avoir lieu préalablement à celle-ci ; que tenu d'une obligation de sécurité de résultat en matière de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs dans l'entreprise, il doit en assurer l'effectivité en prenant en considération les propositions de mesures individuelles telles que mutations ou transformations de postes, justifiées par des considérations relatives notamment à l'âge, à la résistance physique ou à l'état de santé physique et mental des travailleurs que le médecin du travail est habilité à faire ;
Attendu que pour débouter M. X... de sa demande de dommages-intérêts pour exécution fautive du contrat de travail, l'arrêt retient qu'aucun élément n'établit que l'employeur pourrait être tenu pour responsable du long délai s'étant écoulé entre la déclaration unique d'embauche du 20 septembre 2006 et la visite médicale d'embauche ayant eu lieu le 30 mars 2007, que d'éventuelles carences administratives ne sont pas imputables à l'association Coloriage, étant observé que cette dernière, par courriel du 15 mars 2007, a signalé au médecin du travail que ses suggestions étaient nécessaires pour aménager le poste de travail ; que par ailleurs, ce médecin a conclu à un aménagement souhaitable, sans retenir le caractère urgent de cette adaptation, qu'il ne peut donc être reproché à l'employeur de ne pas avoir pris les mesures adéquates avant le 13 avril 2007, date de l'arrêt de travail de M. X... ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté que l'employeur n'avait demandé au médecin du travail ses suggestions pour aménager le poste de travail que six mois après le commencement d'exécution du contrat de travail, caractérisant ainsi un manquement de l'employeur à son obligation de sécurité de résultat, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute M. X... de ses demandes de rappel de salaire pour heures complémentaires et d'indemnité pour exécution fautive du contrat de travail, l'arrêt rendu le 24 février 2009, entre les parties, par la cour d'appel de Dijon ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Besançon ;
Condamne l'association Coloriage aux dépens ;
Vu l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, condamne l'association Coloriage à verser à la SCP Monod et Colin, la somme de 1 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et signé par M. Chollet, conseiller le plus ancien en ayant délibéré, conformément aux dispositions de l'article 456 du code de procédure civile, en son audience publique du vingt-cinq janvier deux mille douze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Monod et Colin, avocat aux Conseils pour M. X....
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir débouté M. X... de sa demande en paiement d'heures supplémentaires ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE M. X... ne produit pas de récapitulatif d'horaires pour les mois de novembre 2006 et mars 2007 ; qu'en ce qui concerne les autres mois, il ne verse aux débats que des feuilles de présence mensuelle qu'il a lui-même remplies et non contradictoires ; que le décompte relatif au mois de février 2007 contient des erreurs de calcul puisque, selon ses feuilles de présence, l'intéressé aurait travaillé les 12 et 27 février pendant 4h45 et 7h et qu'il revendique une durée de travail de 6h45 et 9h ; que dans ces conditions, M. X... ne fournit pas d'éléments de nature à étayer sa réclamation ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE M. X... produit aux débats des feuilles de présence mensuelle pour les mois d'octobre 2006, décembre 2006, janvier et février 2007 faisant apparaître une présence supérieure au 113 heures de travail mensuelles inscrites dans son contrat de travail ; que les mois pour lesquels ils ne dispose pas de feuilles de présence, il demande de considérer qu'il a également effectué des heures complémentaires ; qu'il n'est cependant pas contesté que M. X... s'est vu retirer son permis de conduire et qu'il était donc tributaire de ses collègues de travail pour le conduire ou le raccompagner, que les feuilles de présence indiquant l'heure d'arrivée et l'heure de départ de la station ne sauraient constituer dans ces conditions un élément de preuve irréfutable permettant de qualifier le temps de travail effectif les inévitables décalages entre les heures de travail de M. X... et les horaires de ses collègues ; que le bureau de jugement a également constaté des erreurs de calculs dans les feuilles de présence versées aux débats ; que M. X... ne saurait sur la base de ces éléments exiger le paiement d'heures complémentaires sans qu'il soit nécessaire d'examiner les conditions dans lesquelles il exécutait sa mission et les reproches formulés par l'association COLORIAGE ;
ALORS QUE la preuve des heures de travail effectuée n'incombe spécialement à aucune partie ; que le juge ne peut, pour rejeter une demande de paiement d'heures complémentaires, se fonder sur l'insuffisance des preuves apportées par le salarié et qu'il doit examiner les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés et que l'employeur est tenu de lui fournir ; qu'en se bornant, pour débouter M. X... de sa demande de paiement des heures supplémentaires, à constater que celui-ci ne fournissait pas d'éléments suffisant à justifier ses demandes, la cour d'appel a violé l'article L.212-1-1 devenu L.3171-4 du code du travail.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir considéré que l'employeur n'avait pas commis de faute dans l'exécution de son contrat de travail et, en conséquence, d'avoir débouté le salarié de sa demande de dommages et intérêts ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE M. X... expose que l'association COLORIAGE n'a pas tenu compte de son handicap et de ses difficultés de santé dans l'exécution du contrat de travail ; qu'il est constant que l'intéressé a été reconnu travailleur handicapé et que le médecin du travail, le 30 mars 2007, a préconisé un aménagement du poste de travail (technicien d'antenne) avec :
- un appui masse pour l'avant-bras droit ;
- un siège ergonomique ;
- un tabouret assis-debout ;
Qu'aucun élément n'établit que l'employeur pourrait être tenu pour responsable du long délai s'étant écoulé entre la déclaration unique d'embauche du 20 septembre 2006 et la visite médicale d'embauche ayant eu lieu le 30 mars 2007 ; que d'éventuelles carences administratives ne sont pas imputables à l'association COLORIAGE, étant observé que cette dernière, par courriel du 15 mars 2007, a signalé au médecin du travail que ses suggestions étaient nécessaires pour aménager le poste de travail ; que par ailleurs, ce médecin a conclu à un aménagement souhaitable, sans retenir le caractère urgent de cette adaptation ; que cet avis a été émis le 30 mars 2007 ; qu'il ne peut, donc, être reproché à l'employeur de ne pas avoir pris les mesures adéquates avant le 13 avril 2007, date de l'arrêt de travail de M. X... ; qu'en conséquence, il ne peut être fait grief à l'association COLORIAGE de ne pas avoir pris en considération l'état de santé du salarié et d'avoir fait preuve de légèreté ou de négligence ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE la période d'essai de M. X... expirait le 19 octobre 2006 ; que la visite médicale d'embauche a été réalisée le 30 mars 2007 ; que lors de cette visite, le médecin du travail, après avoir conclu à l'aptitude du salarié à son poste de travail, a indiqué qu'un aménagement de poste serait souhaitable avec l'achat d'un siège ergonomique, d'un tabouret assis debout et d'un appui masse pour l'avant-bras droit ; que M. PECHON, président de l'association, a effectué dans les délais la déclaration unique d'embauche à l'URSSAF ; qu'une convocation du salarié à une visite médicale devait être automatiquement envoyée ; que l'absence de déclenchement de la visite n'est pas due à une attitude fautive de l'employeur ; qu'également dans l'hypothèse ou l'absence de visite médicale obligatoire est due à une faute de l'employeur, que cette absence a causé un préjudice au salarié et que peut être établie l'existence d'un lien de causalité entre cette faute et ce préjudice, la responsabilité de l'employeur se trouve engagée (CA Paris, 29 avril 1974) ; que l'employeur, cependant, ne peut être tenu de réparer que les conséquences de son retard et non le dommage total de la maladie non imputable en elle-même au travail (Cass. soc. 10 juin 1976) ; qu'enfin, l'absence de lien de causalité entre l'état de santé du salarié et l'absence de visite médicale du médecin du travail, imputable à l'employeur, la responsabilité de ce dernier ne saurait être engagée (Cass. soc., 13 février 1980) ; qu'en l'espèce, M. X... n'a pas sollicité de visite lors de l'embauche ; que ses arrêts de travail ne font pas état d'un arrêt d'origine professionnelle ; qu'aucune demande de reconnaissance de maladie professionnelle n'a été engagée ; qu'il en ressort pas de l'avis du médecin un caractère d'urgence pour l'aménagement du poste de travail ; que ces démarches ont été entreprises par l'association pour se procurer le matériel nécessaire ; que M. X... n'a pu bénéficier de l'aménagement de son poste puisqu'il a été en arrêt de travail pour maladie jusqu'au terme de son contrat de travail ; que les courriers échangés et la prétention que M. X... était démissionnaire ne constituent pas en eux-mêmes une faute ayant entraîné un préjudice, M. X... ayant continué à faire partie de l'effectif de l'association ;
ALORS, de première part, QU'en application des articles R.241-48 devenu les articles R.4624-10, R.4624-11 et R.4624-13 du code du travail, l'employeur qui conclut avec un travailleur handicapé un contrat de travail est tenu de lui faire passer une visite médicale d'embauche aux fins notamment de proposer éventuellement les adaptations du poste ou l'affectation à d'autres postes ; que l'employeur est également tenu, à l'égard de ses salariés, d'une obligation de sécurité de résultat en matière de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs dans l'entreprise et doit en assurer l'effectivité en prenant en considération les propositions de mesures individuelles telles que mutations ou transformations de postes, justifiées par des considérations relatives notamment à l'âge, à la résistance physique ou à l'état de santé physique et mentale des travailleurs que le médecin du travail est habilité à faire en application de l'article L.241-10-1 devenu l'article L.4624-1 du code du travail ; qu'en l'espèce, en constatant que l'employeur n'avait demandé au médecin du travail des suggestions d'adaptation du poste de travail à son salarié, reconnu handicapé lors de l'embauche, que six mois après le commencement d'exécution du contrat de travail et que la visite avait été réalisée seulement quinze jours après cette demande de l'employeur, ce dont il résultait que l'employeur aurait manifestement dû demander l'avis du médecin du travail en vue de l'aménagement de poste dès l'embauche du salarié et qu'à défaut, il avait commis un manquement à son obligation de sécurité de résultat, la cour d'appel n'a pas déduit les conséquences légales de ses constatations et ainsi méconnu les textes précités ;
ALORS, de deuxième part, QUE la circonstance que l'avis d'aptitude du médecin du travail soit assorti d'un simple souhait de voir proposer au salarié un aménagement de son poste de travail est inopérante à exclure l'engagement de responsabilité de l'employeur ; qu'en se fondant, pour débouter le salarié, sur la circonstance que le médecin du travail avait conclu à un aménagement souhaitable du poste de travail sans retenir le caractère urgent de cette adaptation, la cour d'appel s'est prononcée par des motifs inopérants à exclure la responsabilité de l'employeur et derechef méconnu les textes précités ;
ALORS, de troisième part, QU'en constatant que M. X... n'avait pu bénéficier de l'aménagement de son poste puisqu'il avait été mis en arrêt de travail pour maladie jusqu'au terme de son contrat de travail, la cour d'appel a caractérisé l'existence d'un manquement de l'employeur à son obligation de sécurité de résultat, un préjudice pour le salarié et un lien de causalité ; qu'en déboutant néanmoins le salarié de sa demande de dommages et intérêts pour inexécution fautive du contrat de travail par l'employeur, elle n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et ainsi méconnu les textes précités.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 09-72671
Date de la décision : 25/01/2012
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Dijon, 24 février 2009


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 25 jan. 2012, pourvoi n°09-72671


Composition du Tribunal
Président : M. Trédez (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Monod et Colin

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:09.72671
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