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19/01/2012 | FRANCE | N°10-24014

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 19 janvier 2012, 10-24014


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé le 1er octobre 2002 en qualité d'ouvrier très qualifié par M. Y..., aux droits duquel vient la société Y... et filles, par contrat de travail à durée indéterminée à temps partiel de 32 heures minimum par mois selon les travaux de la vigne ; que le salarié a reçu le 15 mars 2006 une lettre qui évoque une attitude justifiant un licenciement pour faute grave et le convoquant à un nouvel entretien ; que par lettre du 29 mars 2006, ce dernier a été conv

oqué à un entretien préalable fixé au 7 avril 2006 et mis à pied à titre...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé le 1er octobre 2002 en qualité d'ouvrier très qualifié par M. Y..., aux droits duquel vient la société Y... et filles, par contrat de travail à durée indéterminée à temps partiel de 32 heures minimum par mois selon les travaux de la vigne ; que le salarié a reçu le 15 mars 2006 une lettre qui évoque une attitude justifiant un licenciement pour faute grave et le convoquant à un nouvel entretien ; que par lettre du 29 mars 2006, ce dernier a été convoqué à un entretien préalable fixé au 7 avril 2006 et mis à pied à titre conservatoire ; que par lettre du 12 avril 2006, il a été licencié pour faute grave ; que le salarié a saisi la juridiction prud'homale pour obtenir la requalification de son contrat de travail en contrat à temps complet, voir dire que son licenciement est sans cause réelle et sérieuse et obtenir le paiement de diverses sommes ;
Sur le moyen unique du pourvoi incident de l'employeur :
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande en paiement au titre des sommes indûment perçues par le salarié, alors, selon le moyen :
1°/ qu'il n'est interdit au juge de retenir les documents produits par les parties que si elles n'ont pas été à même d'en débattre contradictoirement ; qu'il ne peut refuser d'examiner le rapport d'un expert qui a été soumis à la discussion contradictoire des parties au motif que ce rapport n'a pas lui-même été établi contradictoirement ; qu'en relevant que le rapport d'expertise de M. Z... n'était pas contradictoire pour refuser d'en examiner le contenu et la force probante, la cour d'appel a violé, par fausse application, les dispositions de l'article 16 du code de procédure civile ;
2°/ que la qualification d'un salarié se détermine selon les fonctions réellement exercées ; que la société Y... et filles avait soutenu dans ses conclusions d'appel que M. X... utilisait le tracteur de l'entreprise pour travailler dans ses propres vignes et qu'il se faisait payer par l'employeur le temps passé, ce qui était démontré par le nombre d'heures de travail anormalement élevé tel que déclarées par le salarié, par rapport aux heures réellement effectuées telles que révélées par le rapport d'expertise ; qu'en écartant ces conclusions aux seuls motifs que le salarié contestait avoir eu des fonctions de tractoriste au sein de l'entreprise, et que les mentions du contrat de travail et des fiches de paie n'indiquaient pas la qualification de tractoriste, peu important qu'il ait aussi exercé cette fonction, la cour d'appel, qui a refusé de vérifier quelles étaient les fonctions réellement exercées par M. X... a violé, par refus d'application, les dispositions de l'article 1134 du code du travail, ensemble l'article L. 1221-1 du code du travail ;
3°/ que les juges peuvent condamner un salarié à restituer les sommes soustraites irrégulièrement à son employeur sans avoir à retenir la faute lourde, le salarié devant exécuter son obligation contractuelle de restitution ; qu'en s'abstenant de vérifier, comme l'y invitaient les conclusions d'appel de la société Y... et filles, si le salarié n'avait pas perçu des rémunérations de l'employeur à l'insu de celui-ci au titre de travaux effectués à son domicile, avec le tracteur de l'entreprise, au motif inopérant qu'il n'avait pas la qualification de tractoriste au sein de l'entreprise, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article 1147 du code civil ;
Mais attendu que sous le couvert de manque de base légale et de violation de la loi, le moyen ne tend qu'à remettre en cause l'appréciation souveraine des éléments de faits produits devant la cour d'appel qui a estimé que l'employeur ne rapportait pas la preuve du caractère indu des salaires versés à son salarié ; que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le premier moyen du pourvoi principal du salarié :
Vu l'article L. 3123-14 du code du travail ;
Attendu, selon ce texte, que le contrat écrit du salarié à temps partiel doit mentionner la durée hebdomadaire ou, le cas échéant, mensuelle prévue et, sauf pour les salariés des associations et entreprises d'aide à domicile, la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois ; qu'il en résulte que l'absence d'écrit mentionnant la durée du travail et sa répartition fait présumer que l'emploi est à temps complet et qu'il incombe à l'employeur qui conteste cette présomption de rapporter la preuve, d'une part, de la durée exacte hebdomadaire ou mensuelle convenue, d'autre part, que le salarié n'était pas placé dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et qu'il n'avait pas à se tenir constamment à la disposition de l'employeur ;
Attendu que pour débouter le salarié de sa demande en requalification de son contrat de travail à temps partiel en contrat à temps complet, l'arrêt retient que les travaux de la vigne sont soumis à des modifications selon les saisons ; que le salarié qui n'a pas contesté les heures effectuées, reconnaît qu'il n'a travaillé que certains mois dans l'année ; qu'il a refusé de travailler certaines périodes ce qui implique qu'il n'était pas dans l'attente des instructions de l'employeur ou qu'il n'a pas dû travailler selon des horaires dont il n'avait pas eu préalablement connaissance ; que les horaires effectués n'ont jamais eu pour effet de porter la durée du travail effectuée au niveau de la durée légale du travail ;
Qu'en statuant ainsi, par des motifs inopérants en l'état d'un contrat de travail prévoyant une durée minimale de 32 heures par mois selon les travaux de la vigne, sans que l'employeur ne justifie de la durée exacte du travail convenu, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Et sur le deuxième moyen du pourvoi principal du salarié :
Vu l'article 1134 du code civil ;
Attendu que pour dire bien fondé le licenciement pour faute grave du salarié et le débouter de ses demandes à ce titre, l'arrêt retient que la lettre du 15 mars 2006, si elle est mal rédigée car elle évoque une attitude qui justifie un licenciement pour faute grave et dans le même temps un nouvel entretien avec la possibilité de se faire assister par un conseiller, ne fait toutefois état d'aucun licenciement ; que cette lettre a été suivie d'un autre courrier daté du 29 mars 2006, convoquant le salarié à un entretien préalable ; que le licenciement n'est intervenu qu'à l'issue de cet entretien, qu'il n'y a pas de double sanction ; que la procédure a été respectée ;
Qu'en statuant ainsi, alors que la lettre du 16 mars 2006 énonçait que l'attitude du salarié justifiait un licenciement pour faute grave et que ce dernier était dispensé de son préavis de travail, la cour d'appel en a dénaturé les termes clairs et précis ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a débouté M. X... de sa demande en requalification de son contrat de travail en contrat à temps plein et en paiement de rappels de salaires, dit que le licenciement pour faute grave est fondé et débouté M. X... de ses demandes au titre du licenciement, l'arrêt rendu le 30 juin 2010, entre les parties, par la cour d'appel de Reims ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Dijon ;
Condamne la société Y... et filles aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Y... et filles et la condamne à payer à M. X... la somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf janvier deux mille douze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat aux Conseils pour M. X..., demandeur au pourvoi principal
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté M. Olivier X... de ses demandes tendant à ce que son contrat de travail à temps partiel soit requalifié en un contrat à temps complet et que la société Y... et Filles soit condamnée à lui verser diverses sommes à ce titre,
AUX MOTIFS QU'il ressort d'un courrier de l'employeur adressé au salarié en recommandé le 12 décembre 2002 que les horaires de l'entreprise ont été fixés du lundi au vendredi de 8 heures à 12 heures et de 13 heures 30 à 16 heures 30 ; que le contrat de travail écrit mentionne un nombre d'heures déterminé fixé à 32 heures par mois ; que la circonstance que le contrat écrit ne comporte pas certaines mentions et notamment la répartition hebdomadaire ou mensuelle mais seulement l'indication du nombre d'heures mensuelles n'a pour seule conséquence que de faire présumer l'existence d'un contrat de travail à temps plein ; que la faculté pour l'employeur de faire varier la répartition du travail sans qu'il y soit autorisé par un accord d'entreprise ne peut que le priver de la possibilité de licencier un salarié qui s'y opposerait ; que cependant les travaux de la vigne sont soumis à des modifications selon les saisons ; qu'entre 2002 et 2006, ni le salarié, ni l'employeur n'ont contesté les heures effectuées mentionnées par M. X... et le paiement de celles-ci par l'Earl Y... et Filles ; que M. X... reconnaît lui-même qu'il n'a travaillé que certains mois dans l'année (cinq mois) et il ressort des attestations versées qu'il avait une passion pour la chasse et ses propres terres dont il s'occupait et que ses liens d'amitié avec l'employeur entraînaient des échanges de matériel ; que M. X... commet d'ailleurs des erreurs notamment en affirmant qu'il n'a pas travaillé en mai 2003, alors que l'employeur produit la fiche de paye correspondante ; qu'il ressort des éléments du dossier qu'il a refusé de travailler certaines périodes ce qui implique qu'il n'était pas dans l'attente des instructions de son employeur ou qu'il n'a pas dû travailler selon des horaires dont il n'avait pas eu préalablement connaissance ; que les horaires effectués par mois n'ont jamais eu pour effet de porter la durée du travail effectuée par le salarié au niveau de la durée légale du travail ; qu'enfin la demande de M. X... au titre de l'horaire moyen effectué est infondée ; qu'il ressort des pièces produites que le salarié a été payé de toutes les heures travaillées qu'il a indiqué à l'employeur, y compris en heures supplémentaires ; que M. X... sera débouté de sa demande au titre de la requalification du contrat de travail et des rappels de salaire et congés payés afférents ;
ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE le contrat signé entre M. Olivier X... et M. Y... porte sur une durée minimale de 32 heures mensuelle selon les travaux de la vigne en application de la convention collective du travail relative aux exploitations viticoles de la Champagne délimitée ; qu'il convient de dire que M. X... effectuait comme tâche principale, celle de tractoriste, ces tâches étant effectuées entre les mois de mars à août de la même année ; que cette organisation convenait parfaitement à M. X... qui de son côté ne se montrait pas plus coopératif ; qu'à partir de l'année 2003, M. X... refusait de travailler pendant la période de vendange ainsi que la période de chasse, comme en témoignent les bulletins de paye manquants au dossier ;

1°) ALORS QU'il résulte de l'article L. 3123-14 du code du travail que le contrat de travail du salarié à temps partiel doit mentionner la durée hebdomadaire, ou le cas échéant, mensuelle prévue et la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois ; que l'absence d'écrit mentionnant la durée du travail et sa répartition fait présumer que l'emploi est à temps complet et que l'employeur qui conteste cette présomption doit rapporter la preuve, d'une part, de la durée exacte hebdomadaire ou mensuelle convenue, et d'autre part, de ce que le salarié n'était pas placé dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et qu'il n'avait pas à se tenir constamment à la disposition de l'employeur ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que le contrat de travail à temps partiel de M. X... mentionnait une durée de travail de « 32 heures par mois minimum » (arrêt p. 2) ; qu'elle a également relevé que les travaux de la vigne étaient soumis à des modifications selon les saisons (arrêt p. 4) ; qu'elle a enfin constaté que M. X... ne travaillait que cinq mois dans l'année (arrêt p. 4) ; qu'en déboutant M. X... de sa demande de requalification de son contrat à temps partiel en un contrat à temps plein, quand il ressortait de ses constatations que le contrat de travail ne précisait pas une durée exacte de travail convenue mais une durée minimum, la durée exacte étant donc sujette à variation, et que, dans la pratique, la durée de travail du salarié connaissait effectivement chaque mois de grandes variations au point que certains mois le salarié ne travaillait pas, ce dont il s'évinçait que l'employeur ne rapportait pas la preuve de la durée exacte de travail convenue, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'article L. 3123-14 du code du travail ;
2°) ALORS QU'en l'absence de contrat à temps partiel écrit mentionnant la durée du travail prévue et la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois, l'employeur qui conteste la présomption de contrat à temps plein doit rapporter la preuve, d'une part, de la durée exacte hebdomadaire ou mensuelle convenue, et d'autre part, de ce que le salarié n'était pas placé dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et qu'il n'avait pas à se tenir constamment à la disposition de l'employeur ; que, ni l'autonomie dont il dispose, ni en particulier le fait que le salarié ait pu refuser de travailler à certaines périodes, ne suffit à démontrer la connaissance qu'il avait de son rythme de travail ; qu'en l'espèce, pour débouter M. X... de sa demande de requalification de son contrat à temps partiel en un contrat à temps plein, la cour d'appel a retenu qu'il ressortait des éléments du dossier que le salarié avait refusé de travailler certaines périodes ce qui impliquait qu'il n'était pas dans l'attente des instructions de l'employeur ou qu'il n'avait pas dû travailler selon des horaires dont il n'avait pas eu préalablement connaissance ; qu'en statuant par un tel motif, inopérant pour caractériser la connaissance qu'avait le salarié de son rythme de travail, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 3123-14 du code du travail ;
3°) ALORS QUE, en outre, pour débouter M. X... de sa demande de requalification de son contrat à temps partiel en un contrat à temps plein, la cour d'appel a retenu que les horaires effectués par mois n'ont jamais eu pour effet de porter la durée du travail effectuée par le salarié au niveau de la durée légale du travail ; qu'en statuant par un tel motif, inopérant pour démontrer en quoi l'employeur rapportait la preuve, d'une part, de la durée exacte hebdomadaire ou mensuelle convenue, et d'autre part, de ce que le salarié n'était pas placé dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et qu'il n'avait pas à se tenir constamment à la disposition de l'employeur, la cour d'appel a derechef privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 3123-14 du code du travail ;
4°) ALORS QUE la renonciation tacite à un droit ne peut se déduire de la seule inaction ou du silence de son titulaire mais doit résulter d'un acte manifestant de façon non équivoque sa volonté de renoncer ; qu'en se fondant, pour débouter M. X... de sa demande de requalification de son contrat à temps partiel en un contrat à temps plein, sur la circonstance inopérante que le salarié n'avait pas contesté entre 2002 et 2006 les heures effectuées et le paiement de celles-ci, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 3123-14 du code du travail, ensemble le principe selon lequel la renonciation à un droit ne peut résulter que d'actes manifestant, sans équivoque, la volonté de renoncer.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué, infirmatif de ce chef, d'AVOIR débouté M. Olivier X... de ses demandes tendant à ce qu'il soit jugé que le licenciement pour faute grave qui lui avait été notifié par la société Y... et Filles était sans cause réelle et sérieuse et que la société Y... et Filles soit, en conséquence, condamnée à lui verser diverses sommes,
AUX MOTIFS QUE l'employeur évoque une faute grave voire lourde et bien qu'indiquant que le conseil de prud'hommes a cerné la personnalité de M. X..., il demande à ce que la faute grave soit reconnue et le salarié débouté de ses demandes ; qu'il ajoute que le salarié tente de déplacer la contestation sur le terrain procédural alors que l'Earl Y... et Filles a scrupuleusement respecté la procédure ; que le salarié soutient qu'il a été licencié verbalement pour faute grave le 15 mars 2006 sans avoir été convoqué à un entretien préalable, puis a reçu une convocation le 29 mars 2006 à un entretien préalable fixé au 7 avril 2006 accompagnée d'une mise à pied à titre conservatoire ; qu'il a donc été licencié une seconde fois pour faute grave et sans respect de la procédure ; que cependant, la lettre du 15 mars 2006, si elle est mal rédigée car elle évoque une attitude qui justifie un licenciement pour faute grave et dans le même temps un nouvel entretien avec la possibilité de se faire assister par un conseiller, ne fait toutefois état d'aucun licenciement ; que cette lettre a été suivie d'un autre courrier datée du 29 mars 2006, convoquant le salarié à un entretien préalable ; que le licenciement n'est intervenu qu'à l'issue de cet entretien, qu'il n'y a pas de double sanction ; que la procédure a été respectée et M. X... sera débouté de la demande formée au titre du nonrespect de la procédure ;
1°) ALORS QUE dans l'hypothèse où le salarié fait l'objet d'un licenciement verbal sans avoir été préalablement convoqué à un entretien préalable de licenciement en méconnaissance de l'article L. 1232-2 du code du travail, l'employeur ne peut régulariser le licenciement par l'envoi postérieur d'une lettre de rupture et le licenciement est alors nécessairement sans cause réelle et sérieuse ; qu'en l'espèce, M. X... faisait valoir qu'il avait été licencié verbalement le 15 mars 2006 ; que cela ressortait manifestement de la lettre recommandée que l'employeur lui avait adressée le même jour lui confirmant, à la suite de leur entretien, que son attitude justifiait un licenciement pour faute grave, qu'il avait le droit de demander à un conseiller de son choix d'assister à un nouvel entretien s'il désirait un nouvel entretien, que dans la mesure où le salarié avait demandé une lettre de licenciement, elle lui serait envoyée deux jours ouvrables après le nouvel entretien ou dans sept jours avec sa fiche de paie et que le salarié était dispensé de son préavis de travail de un mois ; que M. X... faisait valoir que cette lettre ne pouvait régulariser le licenciement verbal dont il avait fait l'objet le 15 mars 2006 ; que pour décider cependant que le licenciement n'était intervenu que le 12 avril 2006, que la procédure avait été respectée et qu'il n'y avait pas eu double sanction, la cour d'appel a affirmé que la lettre du 15 mars 2006 ne faisait état d'aucun licenciement ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a dénaturé les termes de la lettre du 15 mars 2006 en violation de l'article 1134 du code civil et du principe interdisant au juge de dénaturer les documents de la cause ;
2°) ALORS en tout état de cause QUE la faute grave est celle qui empêche tout maintien, même temporaire, du salarié dans l'entreprise ; que si une attitude ou un geste violent peut certes caractériser une faute grave, cela n'est pas en soi nécessairement le cas, en particulier lorsque le geste violent a été causé par une provocation ; qu'en l'espèce, M. X... faisait valoir que, le 10 mars 2006, après qu'il avait eu constaté l'alcoolisation de Messieurs A... et B... sur le lieu de travail, il avait appelé M. Y... pour qu'il constate par lui-même l'état de ses salariés et que M. A... avait alors pointé son sécateur sur M. X... en le menaçant ; que M. X... contestait donc être à l'origine de l'altercation avec les deux salariés ; que pour juger que le licenciement pour faute grave du salarié était néanmoins fondé, la cour d'appel a relevé que le salarié tentait d'échapper à la sanction en prétendant que c'était lui qui avait été agressé par M. A... sans qu'il explique les raisons pour lesquelles il se trouvait sur les terres de son employeur ; qu'en se fondant ainsi sur des motifs inopérants, pour juger justifiée la qualification de faute grave, sans nullement avoir caractérisé quelles avaient été l'origine de l'altercation et les responsabilités respectives des salariés dans cette altercation, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1235-1 du code du travail.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
(SUBSIDIAIRE)
Il est fait grief à l'arrêt attaqué, infirmatif de ce chef, d'AVOIR débouté M. Olivier X... de sa demande tendant à ce que la société Y... et Filles soit condamnée à lui verser une indemnité pour irrégularité de la procédure de licenciement,
AUX MOTIFS QUE l'employeur évoque une faute grave voire lourde et bien qu'indiquant que le conseil de prud'hommes a cerné la personnalité de M. X..., il demande à ce que la faute grave soit reconnue et le salarié débouté de ses demandes ; qu'il ajoute que le salarié tente de déplacer la contestation sur le terrain procédural alors que l'Earl Y... et Filles a scrupuleusement respecté la procédure ; que le salarié soutient qu'il a été licencié verbalement pour faute grave le 15 mars 2006 sans avoir été convoqué à un entretien préalable, puis a reçu une convocation le 29 mars 2006 à un entretien préalable fixé au 7 avril 2006 accompagnée d'une mise à pied à titre conservatoire ; qu'il a donc été licencié une seconde fois pour faute grave et sans respect de la procédure ; que cependant, la lettre du 15 mars 2006, si elle est mal rédigée car elle évoque une attitude qui justifie un licenciement pour faute grave et dans le même temps un nouvel entretien avec la possibilité de se faire assister par un conseiller, ne fait toutefois état d'aucun licenciement ; que cette lettre a été suivie d'un autre courrier datée du 29 mars 2006, convoquant le salarié à un entretien préalable ; que le licenciement n'est intervenu qu'à l'issue de cet entretien, qu'il n'y a pas de double sanction ; que la procédure a été respectée et M. X... sera débouté de la demande formée au titre du non-respect de la procédure ;
ALORS QU'une décision de licenciement prise avant l'entretien préalable constitue une irrégularité de procédure qui, si elle ne rend pas le licenciement sans cause réelle et sérieuse, doit cependant être indemnisée ;
qu'en l'espèce, M. X... produisait l'attestation du conseiller qui l'avait assisté le 7 avril 2006 lors de son entretien avec son employeur et qui attestait que l'employeur avait refusé toute discussion, arguant que sa décision de licencier le salarié pour faute grave était déjà prise et définitive ; que M. X... sollicitait à ce titre une indemnité pour irrégularité de procédure ; qu'en déboutant le salarié de sa demande d'indemnité pour irrégularité de la procédure de licenciement en se dispensant de prendre en compte et d'analyser, serait-ce sommairement, cet élément de preuve versé aux débats par M. X... qui démontrait que l'employeur avait arrêté sa décision de licenciement avant l'entretien préalable, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.
Moyen produit par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils pour la société Y... et filles, demanderesse au pourvoi incident
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir débouté l'E. A. R. L. Y... ET FILLES (employeur) de sa demande tendant à ce que Monsieur X... (salarié) soit condamné à lui verser la somme de 12 327, 02 euros au titre des sommes indûment perçues par lui à l'insu de son employeur ;
AUX MOTIFS QUE l'E. A. R. L. Y... ET FILLES sera déboutée de sa demande au titre des heures qui auraient été réglées en trop à son insu, le rapport d'expertise de Monsieur Z... n'étant pas contradictoire et Monsieur X... contestant n'effectuer que des travaux de tractoriste, fonction qui au surplus n'est indiquée ni dans le contrat de travail, ni sur les fiches de paye, peu important qu'il l'ait aussi effectuée ;
ALORS, D'UNE PART, QU'il n'est interdit au juge de retenir les documents produits par les parties que si elles n'ont pas été à même d'en débattre contradictoirement ; qu'il ne peut refuser d'examiner le rapport d'un expert qui a été soumis à la discussion contradictoire des parties au motif que ce rapport n'a pas lui-même été établi contradictoirement ; qu'en relevant que le rapport d'expertise de Monsieur Z... n'était pas contradictoire pour refuser d'en examiner le contenu et la force probante, la Cour d'appel a violé, par fausse application, les dispositions de l'article 16 du Code de procédure civile ;
ALORS, D'AUTRE PART, QUE la qualification d'un salarié se détermine selon les fonctions réellement exercées ; que l'E. A. R. L. Y... ET FILLES avait soutenu dans ses conclusions d'appel que Monsieur X... utilisait le tracteur de l'entreprise pour travailler dans ses propres vignes et qu'il se faisait payer par l'employeur le temps passé, ce qui était démontré par le nombre d'heures de travail anormalement élevé tel que déclarées par le salarié, par rapport aux heures réellement effectuées telles que révélées par le rapport d'expertise ; qu'en écartant ces conclusions aux seuls motifs que le salarié contestait avoir eu des fonctions de tractoriste au sein de l'entreprise, et que les mentions du contrat de travail et des fiches de paie n'indiquaient pas la qualification de tractoriste, peu important qu'il ait aussi exercé cette fonction, la Cour d'appel, qui a refusé de vérifier quelles étaient les fonctions réellement exercées par Monsieur X... a violé, par refus d'application, les dispositions de l'article 1134 du Code du travail, ensemble l'article L. 1221-1 du Code du travail ;
ET ALORS, EN TOUTE HYPOTHESE, QUE les juges peuvent condamner un salarié à restituer les sommes soustraites irrégulièrement à son employeur sans avoir à retenir la faute lourde, le salarié devant exécuter son obligation contractuelle de restitution ; qu'en s'abstenant de vérifier, comme l'y invitaient les conclusions d'appel de l'E. A. R. L. Y... ET FILLES, si le salarié n'avait pas perçu des rémunérations de l'employeur à l'insu de celui-ci au titre de travaux effectués à son domicile, avec le tracteur de l'entreprise, au motif inopérant qu'il n'avait pas la qualification de tractoriste au sein de l'entreprise, la Cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article 1147 du Code civil.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 10-24014
Date de la décision : 19/01/2012
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Reims, 30 juin 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 19 jan. 2012, pourvoi n°10-24014


Composition du Tribunal
Président : M. Blatman (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Lyon-Caen et Thiriez, SCP Rocheteau et Uzan-Sarano

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:10.24014
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