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19/01/2012 | FRANCE | N°09-72019

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 19 janvier 2012, 09-72019


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Grenoble, 14 octobre 2009), que Mme X... a été engagée le 4 février 1993 en qualité de serveuse par la société MG ; que son contrat de travail a été transféré à la société La brasserie de la piscine, laquelle bénéficiait, pour pouvoir exercer son activité, d'une convention d'occupation temporaire d'une portion du domaine public qui a pris fin le 30 septembre 2005 ; que la société La brasserie de la piscine a fait l'objet d'une liquidation

judiciaire le 18 novembre 2005, M. Y... étant nommé mandataire-liquidateur ; que...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Grenoble, 14 octobre 2009), que Mme X... a été engagée le 4 février 1993 en qualité de serveuse par la société MG ; que son contrat de travail a été transféré à la société La brasserie de la piscine, laquelle bénéficiait, pour pouvoir exercer son activité, d'une convention d'occupation temporaire d'une portion du domaine public qui a pris fin le 30 septembre 2005 ; que la société La brasserie de la piscine a fait l'objet d'une liquidation judiciaire le 18 novembre 2005, M. Y... étant nommé mandataire-liquidateur ; que la salariée a saisi la juridiction prud'homale d'une demande en résiliation de son contrat de travail et en paiement d'un rappel de salaires et des congés payés afférents pour la période allant du 1er octobre 2005 au 31 juillet 2007 ;

Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt de faire droit à ces demandes alors, selon le moyen,

1°/ que si le juge a la possibilité de résilier le contrat de travail du salarié aux torts de l'employeur lorsque ce dernier s'est abstenu de fournir du travail au salarié et a cessé de lui verser son salaire, aucune disposition n'autorise le juge à allouer à ce salarié des rappels de salaires correspondant à des périodes pendant lesquelles il n'a fourni aucune prestation de travail et n'a pas été contraint de se tenir à la disposition de son employeur ; que dès lors en allouant à Mme X... des salaires pour la période comprise entre le 1er octobre 2005 et le 31 juillet 2007 ainsi que des congés payés y afférents, sans constater, ainsi que l'y invitait pourtant M. Y... dans ses conclusions, que Mme X... n'avait pu travailler durant cette période puisque La brasserie de la piscine n'avait plus d'autorisation d'exercer, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1221-1, L. 1231-1 du code du travail et 1134 du code civil ;

2°/ que la date de la résiliation judiciaire du contrat ne peut être fixée postérieurement au jour où le salarié a cessé d'être au service de son employeur ; qu'en l'espèce, ayant constaté que Mme X... avait cessé de travailler le 30 septembre 2005, la cour d'appel ne pouvait pas fixer la date de la rupture du contrat de travail au 31 juillet 2007 ; qu'en le faisant néanmoins, la cour d'appel a violé les articles L. 1221-1, L. 1231-1 du code du travail et 1134 du code civil ;

Mais, attendu d'une part, que le salarié qui, au cours de l'exécution du contrat de travail, se tient à la disposition de son employeur a droit à son salaire, peu important que ce dernier ne lui fournisse pas de travail ;

Attendu, d'autre part, qu'en matière de résiliation judiciaire du contrat de travail, sa prise d'effet ne peut être fixée qu'à la date de la décision judiciaire la prononçant, dès lors qu'à cette date le salarié est toujours au service de son employeur ; qu'il en est ainsi même si ce dernier ne dispose plus de l'autorisation lui permettant d'exercer son activité, dès lors qu'il n'a pas procédé au licenciement du salarié continuant de se tenir à sa disposition ;

Et attendu que la cour d'appel ayant relevé que la salariée s'était tenue à la disposition de son employeur jusqu'au 31 juillet 2007, et n'avait pas fait l'objet d'un licenciement pour motif économique à l'issue de la période de concession d'occupation à titre précaire d'une portion du domaine public consentie à la société La brasserie de la piscine, de sorte qu'elle était restée dans les liens de son contrat de travail avec cette société, n'encourt pas les griefs du moyen ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. Y..., ès qualité de mandataire-liquidateur de la société La brasserie de la piscine, aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne M. Y..., ès qualité de mandataire-liquidateur de la société La brasserie de la piscine, à payer à Mme X... et à l'université Joseph Fourier, la somme globale de 2 500 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf janvier deux mille douze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat aux Conseils pour M. Y....

Le pourvoi fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que la créance de rappel de salaires, à inscrire sur le relevé des créances au bénéfice de Madame Corinne X... comprendrait les sommes de 28.664,90 € à titre de rappel de salaires et de 3.210,51 € au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés dus pour la période du 1er octobre 2005 au 31 juillet 2007 ;

AUX MOTIFS QU' « en s'abstenant de confier du travail à Corinne X... après le 30 septembre 2005 et ne lui payant plus aucun salaire, la SARL LA BRASSERIE DE LA PISCINE a commis des manquements suffisamment graves pour justifier la résolution de ce contrat de travail ; que la résiliation judiciaire du dit contrat ne saurait être fixée 30 septembre 2005 ni au 18 novembre 2005, date de la liquidation judiciaire, ainsi que le sollicite Me Y..., la prise d'effet de la résiliation ne pouvant être fixée qu'à la date de la décision judiciaire la prononçant, dès lors qu'à cette date la salariée était toujours au service de son employeur ; qu'en revanche, Me Y... fait valoir que l'intimée ne verse aux débats aucune pièce sur sa situation professionnelle et ses revenus à partir du 1er octobre 2005 ; qu'à l'audience, Corinne X... précise qu'elle a exercé une activité professionnelle après juillet 2007 sous le régime d'un contrat à durée déterminée, puis ensuite sous le régime d'un contrat à durée indéterminée ; qu'elle ne produit aucun justificatif à propos de ces activités, du temps qu'elle y consacrait et des salaires perçus en contre-partie ; qu'elle n'a pas chiffré de demande de rappel pour la période postérieure à juillet 2007 ; que le jugement sera donc infirmé en ce qu'il a inclus, dans la créance, des salaires à percevoir depuis le 1er août 2007 jusqu'au 13 octobre 2008 » ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE : « Madame X... est réputée être restée dans les liens de son contrat de travail avec la société BRASSERIE DE LA PISCINE jusqu'au jour du prononcé de la présente décision puisqu'aucun licenciement n'est jamais intervenu ; que l'employeur est tenu de deux obligations principales, à savoir celle de procurer du travail à ses employés et de les payer ; que nonobstant la perte de l'exploitation de l'activité de restauration et la fermeture de l'établissement, la société BRASSERIE DE LA PISCINE est restée débitrice des salaires et autres avantages indues à ses salariés, puisqu'elle n'a jamais mis fin à leurs contrats, sans que ces derniers n'aient été repris ; qu'il s'ensuit qu'elle doit payer à Madame X... ses salaires et autres avantages dus jusqu'à la date du présent jugement, et en outre supporter les conséquences de la résiliation du contrat de travail en raison de l'inexécution de ses obligations contractuelles liée à la disparition de l'activité qui constitue un motif économique, résiliation qu'il appartient au conseil de prud'hommes de prononcer, puisqu'il ne lui appartient pas d'enjoindre Maître Y... de procéder au licenciement des salariés, aucune disposition du code de commerce ne le permettant, puisqu'un tel licenciement ne peut qu'intervenir dans les quinze jours au plus tard suivant la décision de liquider l'entreprise ; qu'ainsi les créances de Madame X... seront fixées aux sommes suivantes, venant au passif de la société BRASSERIE DE LA PISCINE, puisque le conseil de prud'hommes ne peut prononcer de condamnation directe à l'encontre de la liquidation judiciaire, mais ne peut que fixer le principe des créances salariales, le conseil de prud'hommes trouvant dans les pièces de Madame X... les éléments suffisants pour estimer que ses demandes sont bien fondées dans leur quantum : 28.664,90 € à titre de rappel de salaires dus pour la période du 1er octobre 2005 au 31 juillet 2007, outre les salaires à percevoir depuis le 1er août 2007 jusqu'au jour du prononcé de la présente décision » ;

ALORS, 1°) QUE si le juge a la possibilité de résilier le contrat de travail du salarié aux torts de l'employeur lorsque ce dernier s'est abstenu de fournir du travail au salarié et a cessé de lui verser son salaire, aucune disposition n'autorise le juge à allouer à ce salarié des rappels de salaires correspondant à des périodes pendant lesquelles il n'a fourni aucune prestation de travail et n'a pas été contraint de se tenir à la disposition de son employeur ; que dès lors en allouant à Madame X... des salaires pour la période comprise entre le 1er octobre 2005 et le 31 juillet 2007 ainsi que des congés payés y afférents, sans constater, ainsi que l'y invitait pourtant Me Y... dans ses conclusions (pp. 8-9), que Madame X... n'avait pu travailler durant cette période puisque la BRASSERIE DE LA PISCINE n'avait plus d'autorisation d'exercer, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1221-1, L. 1231-1 du Code du travail et 1134 du Code civil ;

ALORS, 2°) QUE la date de la résiliation judiciaire du contrat ne peut être fixée postérieurement au jour où le salarié a cessé d'être au service de son employeur ; qu'en l'espèce, ayant constaté que Madame X... avait cessé de travailler le 30 septembre 2005, la cour d'appel ne pouvait pas fixer la date de la rupture du contrat de travail au 31 juillet 2007 ; qu'en le faisant néanmoins, la cour d'appel a violé les articles L. 1221-1, L.1231-1 du Code du travail et 1134 du Code civil.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 09-72019
Date de la décision : 19/01/2012
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Grenoble, 14 octobre 2009


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 19 jan. 2012, pourvoi n°09-72019


Composition du Tribunal
Président : M. Blatman (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Lyon-Caen et Thiriez, SCP Thouin-Palat et Boucard, SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:09.72019
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