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18/01/2012 | FRANCE | N°10-20853

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 18 janvier 2012, 10-20853


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Vu l'article L. 1221 du code du travail ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé par la société Texaco LDT, de droit américain, par une lettre d'embauche du 1er septembre 2000 reçue le 7 septembre 2000, pour un poste de directeur financier en Guadeloupe par mise à disposition auprès de la Société antillaise des pétroles Texaco ; qu'il a accepté l'offre le 15 septembre 2000 ; que du 13 novembre 2000 au 30 janvier 2001, il a été formé en République Dominica

ine avant d'exercer ses fonctions en Guadeloupe ; que le 24 janvier 2003, il a ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Vu l'article L. 1221 du code du travail ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé par la société Texaco LDT, de droit américain, par une lettre d'embauche du 1er septembre 2000 reçue le 7 septembre 2000, pour un poste de directeur financier en Guadeloupe par mise à disposition auprès de la Société antillaise des pétroles Texaco ; qu'il a accepté l'offre le 15 septembre 2000 ; que du 13 novembre 2000 au 30 janvier 2001, il a été formé en République Dominicaine avant d'exercer ses fonctions en Guadeloupe ; que le 24 janvier 2003, il a été convoqué par la société Texaco LTD qui l'a informé de son licenciement immédiat avec remise d'une lettre en mains propres ; qu'estimant avoir été salarié de la Société antillaise des pétroles Texaco, et contestant le bien-fondé et les modalités de son licenciement, M. X... a saisi la juridiction prud'homale ;
Attendu que pour déclarer irrecevables les demandes formulées par M. X... à l'encontre de la Société antillaise des pétroles Texaco, l'arrêt retient qu'il est constant que M. X..., citoyen canadien, a conclu un contrat de travail avec la société de droit américain Texaco international LDT à compter du 13 novembre 2000, son recrutement ayant eu lieu au Canada ; que le contrat de travail a été signé à la suite d'une offre d'emploi en date du 7 septembre 2000 faite par M. Y..., vice-président de Texaco international LDT ; qu'il lui était proposé un poste de directeur financier en Guadeloupe " à la disposition de la Société antillaise de pétrole Texaco " ; que la gestion de la paie doit se faire aux Bermudes en dollars US ; que le traitement des " expatriés " est envisagé sur une " base mondiale " intégrant les distorsions des régimes fiscaux entre les pays concernés, l'employeur prenant en compte l'imposition locale ; que de nombreuses dispositions contractuelles dont une prime de vie chère s'inscrivent nettement dans le cadre d'un détachement dans un pays tiers ; que le licenciement prononcé par la société Texaco international LDT repose expressément sur une motivation économique en l'inscrivant dans le cadre du groupe à la tête duquel elle se place ; que l'employeur y insiste sur l'appartenance de M. X... à la catégorie des " expatriés " et invoque un plan de ressources humaines visant à supprimer des postes dans ce domaine, dont le sien ; que l'employeur, depuis le siège des États-Unis, met ainsi fin à la fois à ce qui s'analyse en un détachement mais aussi au contrat de travail qui le liait à M. X..., ce qui ne saurait être considéré comme antinomique ; que ces dispositions ne constituent pas un détournement des règles du droit français, quand bien même le contrat de travail liant les parties ne prévoirait pas expressément le caractère temporaire du détachement, cette notion étant apparemment remplacée par le statut de salarié expatrié dans le cadre de l'activité internationale du groupe Texaco ; que pour parfaire l'analyse contractuelle de la situation d'emploi de M. X... dans le cadre transnational de détachement avec une attache conservée avec la société mère américaine signataire du contrat de travail pour une période effectivement limitée dans le temps, il convient de se référer à l'attestation en date du 16 novembre 2000 versée aux débats ; que ce document, contemporain de la conclusion du contrat de travail, est établi par la filiale antillaise de la société mère en ces termes : " nous attestons, dans le cadre de l'assistance que nous recevons au sein du groupe international Texaco pour le développement de ses techniques de pointe et la formation professionnelle de notre personnel, que la société Texaco international LTD a, pour son compte et sous son autorité, détaché en Guadeloupe : M. X..., de nationalité canadienne, né le 30 octobre 1961 à Montréal au Canada, que notre société accueillera dans son établissement sis Morne-Bernard/ Destrellan 97122 Baie-Mahault où il fournira ses services en tant que cadre, directeur du service comptable financier pour une période minimum de trois ans à compter du 1er décembre 2000 " ; que sont ainsi définies les conditions dans lesquelles il allait accomplir, après avoir signé son engagement avec Texaco international LDT en septembre 2000 et exercé son activité aux États-Unis puis en République dominicaine, sa mission en tant qu'expatrié détaché auprès de la société antillaise Texaco en Guadeloupe afin notamment de former le personnel à un mode de gestion à l'américaine ; que c'est à bon droit que le premier juge a considéré que M. X... était et est demeuré le salarié de la société Texaco international LDT, détaché auprès de la Société antillaise des pétroles Texaco devenue Chevron, de droit français, filiale de son employeur et que, de ce seul fait, la demande de l'appelant, en ce qu'elle est présentée à l'encontre de la seule Société antillaise des pétroles Texaco-Chevron ne saurait prospérer ;
Qu'en se déterminant ainsi sans rechercher, comme il le lui était demandé, si M. X... ne se trouvait pas, en fait, dans un lien de subordination avec cette dernière société au sein de laquelle il exerçait son activité en Guadeloupe, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;

PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 19 avril 2010, entre les parties, par la cour d'appel de Basse-Terre ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Basse-Terre, autrement composée ;
Condamne la Société antillaise des pétroles Chevron aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la Société antillaise des pétroles Chevron à payer à M. X... la somme de 2 500 euros ;.
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit janvier deux mille douze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Potier de La Varde et Buk-Lament, avocat aux Conseils pour M. X...

M. X... fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir déclaré irrecevables ses demandes formulées à l'encontre de la société Antillaise de Pétrole Texaco ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE il est constatant que M. X..., citoyen canadien, a conclu un contrat de travail avec la société de droit américain Texaco International Ldt à compter du 13 novembre 2000, son recrutement ayant eu lieu au Canada ; (…) ; que le contrat de travail a été signé à la suite d'une offre d'emploi en date du 7 septembre 2000 faite par M. Y..., vice-président de Texaco International Ldt, (….) ; qu'il lui était proposé un poste de directeur financier en Guadeloupe " à la disposition de la société Antillaise de Pétrole Texaco " ; que la gestion de la paie doit se faire aux Bermudes en dollars US ; que le traitement des " expatriés " est envisagé sur une " base mondiale " intégrant les distorsions des régimes fiscaux entre les pays concernés, l'employeur prenant en compte l'imposition locale ; que de nombreuses dispositions contractuelles dont une prime de vie chère s'inscrivent nettement dans le cadre d'un détachement dans un pays tiers ; que la cour relève que le licenciement prononcé par la société Texaco International Ldt repose expressément sur une motivation économique en l'inscrivant dans le cadre du groupe à la tête duquel elle se place ; que l'employeur y insiste sur l'appartenance de M. X... à la catégorie des " expatriés " et invoque un plan de ressources humaines visant à supprimer des postes dans ce domaine, dont le sien ; que l'employeur, depuis le siège des États-Unis, met ainsi fin à la fois à ce qui s'analyse en un détachement mais aussi au contrat de travail qui le liait à M. X..., ce qui ne saurait être considéré comme antinomique ; que ces dispositions ne constituent pas un détournement des règles du droit français, quand bien même le contrat de travail liant les parties ne prévoirait pas expressément le caractère temporaire du détachement, cette notion étant apparemment remplacée par le statut de salarié expatrié dans le cadre de l'activité internationale du groupe Texaco ; que pour parfaire l'analyse contractuelle de la situation d'emploi de M. X... dans le cadre transnational de détachement avec une attache conservée avec la société mère américaine signataire du contrat de travail pour une période effectivement limitée dans le temps, il convient de se référer à l'attestation en date du 16 novembre 2000 versée aux débats ; que ce document, contemporain de la conclusion du contrat de travail, est établi par la filiale antillaise de la société mère en ces termes : " nous attestons, dans le cadre de l'assistance que nous recevons au sein du groupe international Texaco pour le développement de ses techniques de pointe et la formation professionnelle de notre personnel, la société Texaco International Ltd a, pour son compte et sous son autorité, détaché en Guadeloupe : M. X..., de nationalité canadienne, né le 30 octobre 1961 à Montréal au Canada, que notre société accueillera dans son établissement sis Morne-Bernard/ Destrellan 97122 Baie-Mahault où il fournira ses services en tant que cadre, directeur du service comptable financier pour une période minimum de trois ans à compter du 1er décembre 2000 " ; que sont ainsi définies les conditions dans lesquelles il allait accomplir, après avoir signé son engagement avec Texaco International Ldt en septembre 2000 et exercé son activité aux États-Unis puis en République dominicaine, sa mission en tant qu'expatrié détaché auprès de la société Antillaise Texaco en Guadeloupe afin notamment de former le personnel à un mode de gestion à l'américaine ; qu'il résulte de ce qui procède que c'est à bon que le premier juge a considéré que M. X... était et est demeuré le salarié de la société Texaco International Ldt, détaché auprès de la SAP Texaco devenue Chevron, de droit français, filiale de son employeur et que, de ce seul fait, la demande de l'appelant, en ce qu'elle est présentée à l'encontre de la seule société Antillaise de Pétrole Texaco – Chevron ne saurait prospérer ;
AUX MOTIFS ADOPTES QUE un contrat de travail est dit international, chaque fois qu'étant conclu dans un pays, il est exécuté dans un autre ; (…) ; qu'au regard du lieu principal d'exécution du contrat, il convient d'appliquer le droit français ;
1°) ALORS QUE dans ses écritures d'appel (p. 13, § 5), M. X... soutenait qu'en lui faisant conclure un contrat de travail avec une société de droit américain pour aussitôt l'affecter auprès de sa filiale de droit de français, la société de droit américain Texaco International Ldt et la société Antillaise de Pétrole Texaco avaient en réalité cherché à éluder l'application des dispositions protectrices du droit français qu'elles pensaient rendre ainsi inapplicables, ce qui, au demeurant, était corroboré par le fait qu'elles s'étaient abstenues, en violation du droit du travail français, de régulariser sa situation de salarié étranger en France en se gardant de demander, à son égard, une autorisation préalable de travail sur le territoire français et de l'inscrire auprès de la caisse de sécurité sociale de la Guadeloupe ; qu'en se bornant à énoncer que tant l'offre d'emploi du 7 septembre 2000 à la suite de laquelle le salarié avait signé son contrat de travail avec la société américaine que le licenciement du 31 janvier 2003 de ce salarié ne constituaient pas un détournement des règles du droit français dont elle constatait par ailleurs qu'elles étaient applicables au présent litige, la cour d'appel n'a ainsi pas répondu aux conclusions précitées et a donc violé l'article 455 du code de procédure civile ;
2°) ALORS QU'il appartient au juge de déterminer, au-delà des apparences et, donc, des indications pouvant figurer sur le contrat de travail, le véritable employeur du salarié, c'est-à-dire l'entreprise qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et d'en sanctionner les manquements ; qu'en se bornant, pour dire que la société Texaco International Ltd était l'employeur de M. X..., à se fonder sur les termes de l'offre d'emploi du 7 septembre 2000, précédant la signature par ce dernier de son contrat de travail du 13 novembre 2000 avec la société mère américaine, et sur ceux d'une attestation établie le 16 novembre 2000 par la société Antillaise de Pétrole Texaco au moment de la conclusion du contrat de travail, sans rechercher, comme elle y était invitée, si M. X... qui avait, de manière permanente, exclusivement travaillé au profit de la société Antillaise de Pétrole Texaco n'avait pas, pendant toute la durée des relations contractuelles, exécuté concrètement sa prestation de travail sous l'autorité de cette société, ce dont il résultait qu'elle était son véritable employeur, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1221-1 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 10-20853
Date de la décision : 18/01/2012
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Basse-Terre, 19 avril 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 18 jan. 2012, pourvoi n°10-20853


Composition du Tribunal
Président : M. Lacabarats (président)
Avocat(s) : SCP Monod et Colin, SCP Potier de La Varde et Buk-Lament

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:10.20853
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