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17/01/2012 | FRANCE | N°10-27562

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 17 janvier 2012, 10-27562


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X... et M. Philippe X..., associés minoritaires de la société par actions simplifiée les Tamarins (la SAS), qui détient majoritairement le capital de la société civile agricole la ferme du Piton Doret et de la société clinique

X...

, ont demandé la désignation, sur le fondement de l'article L. 225-231 du code de commerce, d'un expert de gestion, aux fins notamment d'étudier les apports en compte courant consentis par la SAS à la société la ferme

du Piton Doret et d'examiner les modalités de la mise à disposition auprès de cette...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X... et M. Philippe X..., associés minoritaires de la société par actions simplifiée les Tamarins (la SAS), qui détient majoritairement le capital de la société civile agricole la ferme du Piton Doret et de la société clinique

X...

, ont demandé la désignation, sur le fondement de l'article L. 225-231 du code de commerce, d'un expert de gestion, aux fins notamment d'étudier les apports en compte courant consentis par la SAS à la société la ferme du Piton Doret et d'examiner les modalités de la mise à disposition auprès de cette société ainsi que de la société clinique Durieux et de M. Maurice X... de treize salariés de la SAS ;
Sur le premier moyen :
Attendu que la SAS fait grief à l'arrêt d'avoir accueilli la demande d'expertise de gestion de Mme X... et de M. Philippe X... et désigné un expert pour étudier les apports en compte courant consentis par elle à La Ferme du Piton Doret, alors, selon le moyen :
1°/ qu'un ou plusieurs actionnaires représentant au moins 5 % du capital ne peuvent, à défaut de communication d'éléments de réponse satisfaisants, demander en référé la désignation d'un ou plusieurs experts chargés de présenter un rapport sur une ou plusieurs opérations de gestion, qu'après avoir posé par écrit au président du conseil d'administration ou du directoire de la société anonyme des questions demeurées sans réponse ou sans réponse satisfaisante ; que pour déclarer justifiée la demande d'expertise visant le montant et les apports effectués par la SAS Les Tamarins à la SCA La Ferme du Piton Doret, ses avantages et ses inconvénients, la cour d'appel a énoncé que l'apport en compte courant consenti par la SAS Les Tamarins à La Ferme du Piton Doret pouvait porter atteinte à l'intérêt social ; qu'en statuant ainsi, sans rechercher, même d'office, si Mme X... avait interrogé préalablement M. Georges X... sur cet apport en compte courant, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard de l'article L. 225-231 du code de commerce ;
2°/ subsidiairement, qu'un ou plusieurs actionnaires représentant au moins 5 % du capital ne peuvent, à défaut de communication d'éléments de réponse satisfaisants, demander en référé la désignation d'un ou plusieurs experts chargés de présenter un rapport sur une ou plusieurs opérations de gestion que si les opérations en cause présentent un risque d'atteinte à l'intérêt social et un caractère suspect ; que la cour d'appel a uniquement observé que l'apport en compte courant consenti par la SAS Les Tamarins à La Ferme du Piton Doret peut porter atteinte à l'intérêt social ; qu'en se prononçant par des motifs quasi-dubitatifs et en tout cas insusceptibles d'établir, faute de considérations circonstanciées, que cet apport présentait un risque réel d'atteinte à l'intérêt social, première des deux conditions cumulatives, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard de l'article L. 225-231 du code de commerce ;
3°/ très subsidiairement, qu'un ou plusieurs actionnaires représentant au moins 5 % du capital ne peuvent, à défaut de communication d'éléments de réponse satisfaisants, demander en référé la désignation d'un ou plusieurs experts chargés de présenter un rapport sur une ou plusieurs opérations de gestion que si les opérations en cause présentent un caractère suspect et présentent un risque d'atteinte à l'intérêt social, double condition cumulative et non alternative ; qu'en s'abstenant de constater le caractère suspect de cet apport en compte courant, la cour d'appel qui n'a pas constaté l'accomplissement de la seconde condition, n'a pas légalement justifié son arrêt au regard de l'article L. 225-231 du code de commerce ;
Mais attendu, en premier lieu, que dans ses conclusions d'appel la SAS a reconnu que Mme X... l'avait interrogée sur la question des comptes courants d'associés ; qu'elle n'est donc pas recevable à présenter devant la Cour de cassation un moyen contraire à ses écritures ;
Et attendu, en second lieu, qu'ayant relevé que l'apport en compte courant consenti par la SAS à la société la ferme du Piton Doret pouvait porter atteinte à l'intérêt social dès lors que cette dernière cumulait depuis des années des pertes importantes comblées par la SAS, la cour d'appel, qui a ainsi fait ressortir le risque d'atteinte à l'intérêt social, et qui n'était pas tenue de caractériser en outre le caractère suspect de cet apport a, par ce seul motif, légalement justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le second moyen, pris en sa seconde branche :
Vu l'article L. 225-231 du code de commerce ;
Attendu que, pour accueillir la demande d'expertise portant sur les modalités de la mise à disposition de personnel auprès de la société la ferme du Piton Doret par la SAS, l'arrêt se borne à retenir que la finalité et les modalités de ces opérations méritent d'être éclaircies par une expertise ;
Attendu qu'en se déterminant ainsi, sans caractériser en quoi cette mise à disposition était susceptible de porter atteinte à l'intérêt social, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre grief :
CASSE ET ANNULE, en ses seules dispositions ayant fait droit à la demande d'expertise de gestion de Caroline et Philippe X... et désigné un expert pour étudier les apports en compte courant consentis par la SAS Les Tamarins à La Ferme du Piton Doret, l'arrêt rendu le 19 juillet 2010, entre les parties, par la cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion autrement composée ;
Condamne Mme Caroline X... et M. Philippe X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, les condamne à payer à la société Les Tamarins la somme globale de 2 500 euros et rejette leur demande ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept janvier deux mille douze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par Me Brouchot, avocat aux Conseils, pour la société Les Tamarins
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR fait droit à la demande d'expertise de gestion de Caroline et Philippe X... et désigné un expert pour étudier les apports en compte courant consentis par la SAS Les Tamarins à La Ferme du Piton Doret ;
AUX MOTIFS QU'aux termes de l'article L. 225-31 du code de commerce, un ou plusieurs actionnaires représentant au moins 5 % du capital peuvent, à défaut de communication d'éléments de réponse satisfaisants, demander en référé la désignation d'un ou plusieurs experts chargés de présenter un rapport sur une ou plusieurs opérations de gestion ; que ces opérations doivent présenter un caractère suspect et présenter un risque d'atteinte à l'intérêt social ; que l'apport en compte courant consenti par la SAS Les Tamarins à La Ferme du Piton Doret peut porter atteinte à l'intérêt social ; qu'en effet, il est constant que La Ferme du Piton Doret cumule depuis des années des pertes importantes qui sont comblées par la SAS Les Tamarins ; qu'une expertise visant à déterminer précisément le montant et les modalités des apports effectués par la SAS, ses avantages, ses inconvénients se justifie ;
ALORS, D'UNE PART, QU'un ou plusieurs actionnaires représentant au moins 5 % du capital ne peuvent, à défaut de communication d'éléments de réponse satisfaisants, demander en référé la désignation d'un ou plusieurs experts chargés de présenter un rapport sur une ou plusieurs opérations de gestion, qu'après avoir posé par écrit au président du conseil d'administration ou du directoire de la société anonyme des questions demeurées sans réponse ou sans réponse satisfaisante ; que pour déclarer justifiée la demande d'expertise visant le montant et les apports effectués par la SAS Les Tamarins à la SCA La Ferme du Piton Doret, ses avantages et ses inconvénients, la cour d'appel a énoncé que l'apport en compte courant consenti par la SAS Les Tamarins à La Ferme du Piton Doret pouvait porter atteinte à l'intérêt social ; qu'en statuant ainsi, sans rechercher, même d'office, si Mlle X... avait interrogé préalablement M. Georges X... sur cet apport en compte courant, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard de l'article L. 225-231 du code de commerce ;
ALORS, D'AUTRE PART, QUE, subsidiairement, un ou plusieurs actionnaires représentant au moins 5 % du capital ne peuvent, à défaut de communication d'éléments de réponse satisfaisants, demander en référé la désignation d'un ou plusieurs experts chargés de présenter un rapport sur une ou plusieurs opérations de gestion que si les opérations en cause présentent un risque d'atteinte à l'intérêt social et un caractère suspect ; que la cour d'appel a uniquement observé que l'apport en compte courant consenti par la SAS Les Tamarins à La Ferme du Piton Doret peut porter atteinte à l'intérêt social ; qu'en se prononçant par des motifs quasi-dubitatifs et en tout cas insusceptibles d'établir, faute de considérations circonstanciées, que cet apport présentait un risque réel d'atteinte à l'intérêt social, première des deux conditions cumulatives, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard de l'article L. 225-231 du code de commerce ;
ALORS, ENFIN, QUE, très subsidiairement, un ou plusieurs actionnaires représentant au moins 5 % du capital ne peuvent, à défaut de communication d'éléments de réponse satisfaisants, demander en référé la désignation d'un ou plusieurs experts chargés de présenter un rapport sur une ou plusieurs opérations de gestion que si les opérations en cause présentent un caractère suspect et présentent un risque d'atteinte à l'intérêt social, double condition cumulative et non alternative ; qu'en s'abstenant de constater le caractère suspect de cet apport en compte courant, la cour d'appel qui n'a pas constaté l'accomplissement de la seconde condition, n'a pas légalement justifié son arrêt au regard de l'article L. 225-231 du code de commerce.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR fait droit à la demande d'expertise de gestion de Caroline et Philippe X... et désigné un expert pour examiner les modalités de la mise de 13 des salariés de la SAS Les Tamarins à disposition de la SCA La Ferme du Piton Doret, de la Clinique X... et de M. Maurice X... ;
AUX MOTIFS QUE la SAS Les Tamarins a admis la mise à disposition de 13 de ses salariés à la disposition de deux de ses filiales ou de l'un de ses actionnaires ; que 3 salariés sont affectés à la SCA Piton Doret, 9 sont affectés à la Clinique X... et un est mis à la disposition de M. Maurice X... ; que la finalité et les modalités de ces mises à disposition méritent d'être éclaircies par une expertise ;
ALORS, D'UNE PART, QU'un ou plusieurs actionnaires représentant au moins 5 % du capital ne peuvent, à défaut de communication d'éléments de réponse satisfaisants, demander en référé la désignation d'un ou plusieurs experts chargés de présenter un rapport sur une ou plusieurs opérations de gestion, qu'après avoir posé par écrit au président du conseil d'administration ou du directoire de la société anonyme des questions demeurées sans réponse ou sans réponse satisfaisante ; que pour déclarer justifiée la demande d'expertise visant à déterminer la finalité et les modalités de l'affectation du personnel de la SAS Les Tamarins à deux de ses filiales ou l'un de ses actionnaires, la cour d'appel a uniquement énoncé que la finalité et les modalités de ces mises à disposition méritaient d'être éclaircies par une expertise ; qu'en statuant ainsi, sans rechercher, même d'office, si Mlle X... avait interrogé préalablement M. Georges X... sur l'affectation de ces personnel, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard de l'article L. 225-231 du code de commerce ;
ALORS, D'AUTRE PART, QU'un ou plusieurs actionnaires représentant au moins 5 % du capital ne peuvent, à défaut de communication d'éléments de réponse satisfaisants, demander en référé la désignation d'un ou plusieurs experts chargés de présenter un rapport sur une ou plusieurs opérations de gestion que si les opérations en cause présentent un caractère suspect et un risque d'atteinte à l'intérêt social ; qu'en s'abstenant de constater l'accomplissement de cette double condition cumulative et non alternative, la cour d'appel qui s'est ainsi bornée, par un motif inopérant, à faire état des éclaircissements qu'apporterait une telle expertise, n'a pas légalement justifié son arrêt au regard de l'article L. 225-231 du code de commerce.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 10-27562
Date de la décision : 17/01/2012
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion, 19 juillet 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 17 jan. 2012, pourvoi n°10-27562


Composition du Tribunal
Président : Mme Favre (président)
Avocat(s) : Me Brouchot, SCP Lyon-Caen et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2012:10.27562
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