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16/12/2011 | FRANCE | N°10-16782

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 16 décembre 2011, 10-16782


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt confirmatif attaqué (Nancy, 3 mars 2010), qu'à la suite d'un contrôle portant sur la période courant du 1er janvier 2002 au 31 décembre 2004, l'URSSAF des Vosges a notifié à la société X... bâtiment (la société) un redressement de cotisations portant sur une indemnité de grand déplacement versée à ses salariés ; que contestant cette décision, la société a saisi une juridiction de sécurité sociale ;
Attendu que l'URSSAF fait grief à l'arrêt

d'annuler ce redressement, alors, selon le moyen :
1°/ qu'il résulte des principe...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt confirmatif attaqué (Nancy, 3 mars 2010), qu'à la suite d'un contrôle portant sur la période courant du 1er janvier 2002 au 31 décembre 2004, l'URSSAF des Vosges a notifié à la société X... bâtiment (la société) un redressement de cotisations portant sur une indemnité de grand déplacement versée à ses salariés ; que contestant cette décision, la société a saisi une juridiction de sécurité sociale ;
Attendu que l'URSSAF fait grief à l'arrêt d'annuler ce redressement, alors, selon le moyen :
1°/ qu'il résulte des principes généraux du droit que nul ne peut se constituer un titre à soi-même ; qu'en estimant que la société X... bâtiment rapportait la preuve de ce que l'allocation journalière forfaitaire versée à ses salariés en grand déplacement avait été employée conformément à son objet, à savoir qu'elle avait servi à acheter des denrées alimentaires et des bouteilles d'eau, et en se fondant exclusivement à cet égard sur soixante et onze attestations émanant de ces mêmes salariés, qui se trouvent dans un lien de subordination vis-à-vis de leur employeur, la cour d'appel a autorisé la société X... bâtiment à se constituer une preuve à elle-même et a violé l'article 1315 du code civil ;
2°/ que toutes les sommes versées aux travailleurs à l'occasion ou en contrepartie du travail sont soumises à cotisations, sauf pour l'employeur à établir que ces sommes ont la nature de frais professionnels et qu'elles ont été effectivement utilisées conformément à leur objet ; qu'en annulant le redressement litigieux sans constater que la société X... bâtiment avait produit aux débats des factures ou des pièces justificatives établissant une utilisation conforme à leur objet des allocations journalières forfaitaires versées à ses salariés en grand déplacement, la cour d'appel a violé l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale et l'arrêté du 26 mai 1975 et du 20 décembre 2002 ;
Mais attendu que, par motifs propres et adoptés, l'arrêt retient que destinée à compenser les frais d'alimentation supplémentaires directement liés au grand déplacement des salariés, l'allocation forfaitaire qu'ils ont perçue a été utilisée conformément à son objet, ainsi qu'il a été justifié par la société et attesté par ses bénéficiaires ;
Que de ces énonciations, la cour d'appel, exerçant son pouvoir souverain d'appréciation de la valeur et la portée des éléments de fait et de preuve soumis à son examen, a pu déduire que l'employeur avait établi que les sommes litigieuses étaient allouées aux salariés pour les couvrir des charges de caractère spécial inhérentes à leur emploi, de sorte qu'elles n'entraient pas dans l'assiette des cotisations et que le redressement devait être annulé ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne l'URSSAF des Vosges aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de l'URSSAF des Vosges et la condamne à payer à la société X... bâtiment la somme de 2 500 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du seize décembre deux mille onze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par Me Balat, avocat aux Conseils pour l'URSSAF des Vosges
Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir annulé le redressement des comptes de la société X... Bâtiment opéré par l'URSSAF des Vosges au titre des indemnités de grand déplacement pour la période du 1er janvier 2002 au 31 décembre 2004, à hauteur de la somme de 50. 388 € en principal et 5. 038 € en majorations de retard ;
AUX MOTIFS QUE l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale dispose en son deuxième alinéa qu'« il ne peut être opéré sur la rémunération ou le gain des intéressés servant au calcul des cotisations des assurances sociales, des accidents du travail et des allocations familiales de déduction au titre des frais professionnels que dans les conditions et limites fixées par arrêté ministériel » ; que la déduction des frais professionnels de l'assiette des cotisations qui constitue une exception au principe de l'assujettissement des sommes et avantages versés en contrepartie ou à l'occasion du travail a été organisée successivement par les arrêtés ministériels des 26 mai 1975 et 20 décembre 2002 selon deux systèmes différents, le système au réel et le système au forfait ; que si l'employeur opte pour le premier système, il doit fournir les justificatifs des dépenses que ses salariés ont exposées à l'occasion de leurs fonctions ; que s'il opte pour le deuxième système, les allocations forfaitaires attribuées à ses salariés sont présumées utilisées conformément à leur objet dans la limite des montants fixés par les arrêtés ministériels ; que s'agissant plus particulièrement des indemnités de grand déplacement, l'employeur ne peut bénéficier de la présomption prévue par les textes que s'il établit, d'une part, que ses salariés auxquels il verse des indemnités forfaitaires sont dans l'impossibilité de regagner chaque jour leur résidence, ce qui suppose qu'ils exposent des frais supplémentaires, d'autre part, que ces indemnités n'excèdent pas les montants fixés par les arrêtés ministériels ; qu'en l'espèce, la société X... soutient qu'elle justifie de la situation de grand déplacement où se trouvent ses salariés de sorte que les indemnités forfaitaires de mission qu'elle leur verse, et qui n'excèdent pas les seuils d'exonération fixés par le pouvoir réglementaire, doivent être présumées utilisées conformément à leur objet ; que cependant, il résulte des déclarations mêmes de la société X... que pour le remboursement des frais professionnels exposés par ses salariés en déplacement, elle combine le système au réel et le système au forfait ; qu'en effet, elle reconnaît dans ses conclusions développées à l'audience qu'elle procède de la manière suivante : d'une part, paiement direct des frais de restauration et d'hôtel à l'hôtelier-restaurateur, d'autre part, versement d'une indemnité de grand déplacement d'un montant de 7, 62 € par jour destinée à compenser les frais de casse-croûte, de bouteille d'eau, et de supplément de chambre individuelle ; qu'ainsi que l'ont relevé les premiers juges, c'est exclusivement dans le cas où l'indemnisation des dépenses supplémentaires de nourriture et de logement consécutives au grand déplacement est effectuée en totalité sous la forme d'une allocation forfaitaire que celle-ci est réputée utilisée conformément à son objet dans la limite fixée par arrêté ministériel ; qu'il en résulte que la société X... ne peut se prévaloir de la présomption dont elle invoque le bénéfice et qu'elle doit établir l'utilisation conforme à leur objet des indemnités forfaitaires de grand déplacement versées à ses salariés ; que pour rapporter cette preuve, la société intimée produit soixante et onze attestations régulières en la forme aux termes desquelles ses salariés affirment que l'indemnité forfaitaire de 7, 62 € par jour qui leur était attribuée était utilisée par eux, lorsqu'ils partaient en grand déplacement, pour acheter des sandwichs, des gâteaux, des barres chocolatées et des bouteilles d'eau ; que tous, sauf M. Mario X... qui déclare l'avoir utilisée pour acquitter le supplément que représente la réservation d'une chambre individuelle, indiquent que cette indemnité était insuffisante pour faire face à cette dernière dépense ; que l'URSSAF soutient que mis à part le supplément pour chambre individuelle, les dépenses de nourriture dont font état les salariés ne peuvent être considérées comme nécessairement liées à une situation de grand déplacement dans la mesure où elles peuvent être exposées par des salariés soumis à une amplitude de travail importante, mais domiciliés à proximité de leur lieu de travail ; qu'elle ajoute que si le supplément pour chambre individuelle constitue une dépense liée au grand déplacement, la seule attestation de M. Mario X... ne permet pas de considérer l'allocation supplémentaire forfaitaire comme employée conformément à son objet ; que toutefois, alors qu'il n'est pas contesté que la société X... a justifié des frais d'hébergement en demi-pension par elle exposés durant la période litigieuse pour loger et nourrir ses salariés sur les lieux de ses chantiers situés dans des départements autres que la Meurthe-et-Moselle, ainsi que cela résulte par exemple des factures produites au titre du mois de décembre 2004, les salariés attestent unanimement qu'ils utilisaient l'allocation forfaitaire journalière qui leur était allouée pour acheter des denrées alimentaires et des bouteilles d'eau, ce qui était conforme à son objet, et que s'ils ne l'utilisaient pas pour financer un supplément pour chambre individuelle, c'est qu'elle était insuffisante pour le leur permettre ; qu'en conséquence, l'indemnité forfaitaire journalière allouée aux salariés durant la période litigieuse a été utilisée conformément à son objet ;
ALORS, D'UNE PART, QU'il résulte des principes généraux du droit que nul ne peut se constituer un titre à soi-même ; qu'en estimant que la société X... Bâtiment rapportait la preuve de ce que l'allocation journalière forfaitaire versée à ses salariés en grand déplacement avait été employée conformément à son objet, à savoir qu'elle avait servi à acheter des denrées alimentaires et des bouteilles d'eau, et en se fondant exclusivement à cet égard sur soixante et onze attestations émanant de ces mêmes salariés, qui se trouvent dans un lien de subordination vis-à-vis de leur employeur, la cour d'appel a autorisé la société X... Bâtiment à se constituer une preuve à elle-même et a violé l'article 1315 du code civil ;
ALORS, D'AUTRE PART, QUE toutes les sommes versées aux travailleurs à l'occasion ou en contrepartie du travail sont soumises à cotisations, sauf pour l'employeur à établir que ces sommes ont la nature de frais professionnels et qu'elles ont été effectivement utilisées conformément à leur objet ; qu'en annulant le redressement litigieux sans constater que la société X... Bâtiment avait produit aux débats des factures ou des pièces justificatives établissant une utilisation conforme à leur objet des allocations journalières forfaitaires versées à ses salariés en grand déplacement, la cour d'appel a violé l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale et l'arrêté du 26 mai 1975 et du 20 décembre 2002.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 10-16782
Date de la décision : 16/12/2011
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Nancy, 03 mars 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 16 déc. 2011, pourvoi n°10-16782


Composition du Tribunal
Président : M. Loriferne (président)
Avocat(s) : Me Balat, SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2011:10.16782
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