La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

15/12/2011 | FRANCE | N°10-25714

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 15 décembre 2011, 10-25714


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en sa première branche, qui est recevable :
Vu l'article 4 de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985 ;
Attendu que lorsque plusieurs véhicules sont impliqués dans un accident de la circulation, chaque conducteur a droit à l'indemnisation des dommages qu'il a subis, sauf s'il a commis une faute ayant contribué à la réalisation de son préjudice ; qu'il appartient alors au juge d'apprécier souverainement si cette faute a pour effet de limiter l'indemnisation ou de l'exclure ;


Attendu, selon l'arrêt attaqué, rendu sur renvoi après cassation (2e ...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en sa première branche, qui est recevable :
Vu l'article 4 de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985 ;
Attendu que lorsque plusieurs véhicules sont impliqués dans un accident de la circulation, chaque conducteur a droit à l'indemnisation des dommages qu'il a subis, sauf s'il a commis une faute ayant contribué à la réalisation de son préjudice ; qu'il appartient alors au juge d'apprécier souverainement si cette faute a pour effet de limiter l'indemnisation ou de l'exclure ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, rendu sur renvoi après cassation (2e Civ., 10 juillet 2008, pourvoi n° 07-16. 608), que, le 24 février 2003, ont été impliquées dans un accident de la circulation la motocyclette pilotée par Christian X... et la voiture conduite par Mme Y... ; que les ayants droit du premier, décédé, MM. Bertrand, Alain et Laurent X..., Mme Colette X... et Mme Dominique X..., agissant alors tant en son nom personnel qu'en qualité de représentante légale de ses enfants mineurs, Iris et Arnaud (les consorts X...) ont assigné en réparation de leurs préjudices Mme Y..., son assureur, la société Groupama Océan Indien et Pacifique (l'assureur), en présence de l'agent judiciaire du Trésor (l'AJT) et des organismes sociaux, la MGEN et la CGSS de La Réunion ;
Attendu que, pour dire Mme Y... et son assureur tenus de réparer le préjudice subi par les consorts X... du fait du décès de Christian X... et les condamner au paiement de diverses sommes au profit de ceux-ci et de l'AJT, l'arrêt énonce que la manoeuvre de cette automobiliste, en raison de son caractère perturbateur et donc dangereux, nécessitait qu'elle s'assurât au préalable de ce qu'elle pouvait l'effectuer sans danger, non seulement pour les usagers qui la suivaient mais aussi et surtout pour ceux qui arrivaient en sens inverse ; que la réalisation de l'accident prouve qu'au moins cette obligation n'a pas été respectée ;
Qu'en se déterminant ainsi, la cour d'appel, qui devait statuer en faisant abstraction du comportement de l'autre conducteur impliqué, a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du moyen :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 21 mai 2010, entre les parties, par la cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris ;
Condamne les consorts X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne les consorts X... à payer à Mme Y... et à la société Groupama Océan Indien et Pacifique la somme globale de 2 500 euros ; rejette les autres demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quinze décembre deux mille onze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Didier et Pinet, avocat aux Conseils pour Mme A... et la société Groupama Océan Indien et Pacifique
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR dit qu'Isabelle A... épouse Y... et son assureur, la société Groupama océan indien et pacifique, doivent être tenus de réparer le préjudice subi par les consorts X... du fait du décès de Christian X... à la suite de l'accident survenu le 24 février 2003, et de les avoir condamnés in solidum à payer diverses sommes aux consorts X... à titre de dommages-intérêts, et la somme principale de 284. 325, 78 € à l'agent judiciaire du trésor au titre de ses débours ;
AUX MOTIFS QUE le 24 février 2003, au Tampon, Isabelle A... qui circulait au volant de son véhicule automobile de marque Volkswagen, sur la route nationale 3, a effectué une manoeuvre pour tourner à gauche et emprunter le chemin Fontaine ; qu'un motocycliste, Christian X..., qui arrivait en sens inverse, a heurté l'arrière-droit du véhicule : il est décédé des suites de ses blessures ; qu'Isabelle A... était assurée auprès de la société Groupama océan indien ; qu'aux termes des articles 4 et 6 de la loi du 5 juillet 1985, la faute commise par le conducteur du véhicule terrestre à moteur a pour effet de limiter ou d'exclure l'indemnisation des dommages qu'il a subis et ces limitations ou exclusions sont applicables à l'indemnisation du préjudice par ricochet subi par les tiers ; que les circonstances de l'accident qui a entraîné la mort de Christian X... sont relatées dans un procès-verbal établi par les services de la gendarmerie de Saint-Pierre ; que l'automobiliste, qui circulait sur la route nationale 3, a tourné à gauche et n'avait pas terminé sa manoeuvre lorsque le motocycliste qui arrivait en sens inverse, a heurté l'arrière-droit du véhicule ; que l'accident s'est produit en plein jour, à 8 heures 25, sur une route à deux voies et présentant une courbe à gauche, ce qui réduisait la visibilité à 70 mètres tant pour l'automobiliste que pour le motocycliste ; que la vitesse restait toutefois limitée à 90 km/ h ; que les services enquêteurs ont situé le point de choc sur le milieu de la voie gauche de la chaussée par rapport au sens de marche du véhicule ; que le choc a porté sur l'arrière-droit du véhicule automobile ; que le feu arrière-droit est cassé ; que l'aile est enfoncée et des traces noires sont apparentes sur la portière arrière-droite ; que des traces de ripage de 27m20 ont été relevées sur la chaussée ; que l'automobiliste a déclaré avoir décidé de tourner à gauche dans le chemin Fontaine parce qu'un camion et un minibus ralentissaient la circulation ; qu'au moment où elle s'engageait, elle a aperçu le motard et elle a poursuivi sa manoeuvre pour dégager la chaussée ; qu'elle a été heurtée avant de l'avoir terminée ; qu'une telle manoeuvre, en raison de son caractère perturbateur et donc dangereux, nécessitait que l'automobiliste s'assurât au préalable de ce qu'elle pouvait l'effectuer sans danger non seulement pour les usagers qui la suivaient mais aussi et surtout pour ceux qui arrivaient en sens inverse ; que la réalisation de l'accident prouve qu'au moins, cette obligation n'a pas été respectée ; qu'il est vrai que l'automobiliste a déclaré que le motocycliste « devait rouler vite » ; qu'un autre automobiliste se trouvant derrière elle quoiqu'à distance puisqu'il en était séparé par un autre véhicule, affirme, lui aussi, que la moto est arrivée à grande vitesse ; que cependant, leurs déclarations ne sont confortées par aucun élément objectif ; qu'il s'agit d'impressions nourries par la violence et la soudaineté de l'accident et ne pouvant suffire à établir la faute imputée au motocycliste ; qu'en conséquence, Isabelle A... et son assureur, la société Groupama océan indien doivent être tenus de réparer le préjudice subi par les consorts X... du fait du décès de Christian X... ;
1°) ALORS QUE la faute commise par le conducteur du véhicule terrestre à moteur a pour effet de limiter ou d'exclure l'indemnisation des dommages qu'il a subis ; qu'une telle faute doit être appréciée en faisant abstraction du comportement de l'autre conducteur du véhicule impliqué dans l'accident ; qu'en prenant en considération, pour apprécier la faute du motocycliste, le comportement de madame Y... en lui reprochant un manquement à une obligation de prudence, la cour d'appel a violé l'article 4 de la loi du 5 juillet 1985 ;
2°) ALORS SUBSIDIAIREMENT QU'en déduisant de la seule réalisation de l'accident, l'inexécution par l'automobiliste de l'obligation de s'assurer qu'elle pouvait tourner à gauche sans danger, la cour d'appel s'est prononcée par un motif inopérant, et a violé l'article 4 de la loi du 5 juillet 1985 ;
3°) ALORS QUE le procès-verbal d'audition de madame Y..., épouse Y..., indiquait : Arrivée au niveau du chemin Fontaine, j'ai mis mon clignoteur, je me suis déportée sur l'axe médian, j'ai regardé dans mon rétroviseur avant de m'assurer que les autres conducteurs aient vu sur mon clignoteur. Il y avait plusieurs véhicules derrière moi. J'ai regardé en face, loin devant, s'il n'y avait pas de véhicule qui montait. Je n'ai vu aucun véhicule et j'ai donc entamé ma manoeuvre pour tourner sur ma gauche. Je me suis engagée sur le chemin Fontaine. C'est au moment où je m'engageais que j'ai vu un motard arriver. J'ai poursuivi ma manoeuvre pour dégager la chaussée et le motard m'a percutée juste au niveau de l'arrière droit de mon véhicule. Entre le moment où je l'ai vu arriver, le motard, et le moment où il m'a percutée, j'étais déjà engagée dans le chemin Fontaine. Les trois quarts de mon véhicule avaient franchi l'intersection. Seul l'arrière devait dépasser de quelques centimètres. Je pense qu'à environ dix centimètres près, le motard serait passé ; qu'en affirmant que madame Y... ne s'était pas, avant de procéder à sa manoeuvre, assurée de ce qu'elle pouvait l'effectuer sans danger pour les usagers qui arrivaient en sens inverse, la cour d'appel a dénaturé le procès-verbal d'audition précité, en violation de l'article 1134 du code civil ;
4°) ALORS QUE le procès verbal d'audition de monsieur Z..., unique témoin de l'accident, indiquait : Aucun usager n'arrivait en face sur la route nationale, le véhicule Golf a donc commencé sa manoeuvre pour tourner à gauche et elle avait pratiquement quitté la nationale. Tout d'un coup, j'ai vu une moto apparaître sur la route nationale, circulant dans le sens Saint-Pierre Plaine des Cafres ; qu'en affirmant que madame Y... ne s'était pas, avant de procéder à sa manoeuvre, assurée de ce qu'elle pouvait l'effectuer sans danger pour les usagers qui arrivaient en sens inverse, la cour d'appel a dénaturé le procès-verbal d'audition précité, en violation de l'article 1134 du code civil ;
5°) ALORS QUE les vitesses maximales autorisées ne dispensent en aucun cas le conducteur de rester constamment maître de sa vitesse et de régler cette dernière en fonction de l'état de la chaussée, des difficultés de la circulation et des obstacles prévisibles ; que sa vitesse doit être réduite notamment dans tous les cas où la route ne lui apparaît pas entièrement dégagée et dans les virages ; qu'en se bornant à exclure que le motocycliste eût roulé « vite » ou « à grande vitesse », sans rechercher, comme elle y était invitée, si sa vitesse, quelle qu'elle fût, était adaptée aux conditions de la circulation, et notamment à la circonstance qu'il abordait un virage sans visibilité, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles R. 413-17 du code de la route et 4 de la loi du 5 juillet 1985.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 10-25714
Date de la décision : 15/12/2011
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion, 21 mai 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 15 déc. 2011, pourvoi n°10-25714


Composition du Tribunal
Président : M. Loriferne (président)
Avocat(s) : Me Le Prado, SCP Ancel, Couturier-Heller et Meier-Bourdeau, SCP Didier et Pinet

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2011:10.25714
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award