La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

14/12/2011 | FRANCE | N°10-19652

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 14 décembre 2011, 10-19652


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X..., engagée par la société Villeroy et Boch le 26 novembre 1988 en qualité de vendeuse, occupait en dernier lieu les fonctions de responsable de concession à Nice ; que le 15 juillet 2004, elle a été victime d'un accident du travail entraînant un arrêt de travail jusqu'au 30 juillet 2007 ; qu'à l'issue de deux visites médicales de reprise, les 1er et 17 août 2007, le médecin du travail l'a déclarée "inapte à tout poste dans l'entreprise" ; qu'après avoir été

convoquée le 3 septembre à un entretien préalable fixé au 11 septembre, ell...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X..., engagée par la société Villeroy et Boch le 26 novembre 1988 en qualité de vendeuse, occupait en dernier lieu les fonctions de responsable de concession à Nice ; que le 15 juillet 2004, elle a été victime d'un accident du travail entraînant un arrêt de travail jusqu'au 30 juillet 2007 ; qu'à l'issue de deux visites médicales de reprise, les 1er et 17 août 2007, le médecin du travail l'a déclarée "inapte à tout poste dans l'entreprise" ; qu'après avoir été convoquée le 3 septembre à un entretien préalable fixé au 11 septembre, elle a été licenciée le 14 septembre suivant pour inaptitude et impossibilité de reclassement ;
Sur le premier moyen :
Attendu que la société Villeroy et Boch fait grief à l'arrêt de dire le licenciement dénué de cause réelle et sérieuse et de la condamner à verser à Mme X... une somme à titre de dommages-intérêts, outre le remboursement des indemnités Assedic, alors, selon le moyen :
1°/ que seules les recherches de reclassement effectuées postérieurement à la seconde visite de reprise et compatibles avec les conclusions du médecin du travail émises au cours de cette dernière visite peuvent être prises en considération par les juges pour vérifier si l'employeur a satisfait à son obligation de reclassement ; qu'en l'espèce, il résulte de l'arrêt attaqué qu'à l'issue de la première visite de reprise du 1er août 2007, le médecin du travail avait déclaré la salariée inapte à son poste actuel de responsable de concession mais apte à un poste administratif sans aucune manutention et qu'à l'issue de la seconde visite de reprise du 17 août 2007, il l'avait finalement déclarée inapte à tout poste dans l'entreprise ; qu'en reprochant à l'employeur, par motifs propres et adoptés, de ne pas avoir réellement recherché, entre les deux visites, à reclasser la salariée à un poste administratif sans manutention lorsque l'employeur n'était tenu de procéder à une recherche de reclassement qu'à l'issue de la seconde visite de reprise et au regard des préconisations du second avis du médecin du travail qui ne visait plus l'aptitude à un poste administratif sans manutention, la cour d'appel a violé les articles L. 1226-10, L. 1226-12 et R. 4624-31 du code du travail ;
2°/ que satisfait à son obligation de reclassement l'employeur qui justifie avoir interrogé tant ses établissements que les sociétés du groupe auquel il appartient sur les possibilités de reclassement de son salarié et avoir reçu des réponses négatives ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté qu'à la suite de l'avis d'inaptitude à tout poste dans l'entreprise de sa salariée, la société Villeroy et Boch arts de la table avait interrogé son bureau de Forbach, son établissement de La Ferté-Gaucher et le président de la société Villeroy et Boch SAS sur un éventuel reclassement et que ceux-ci avaient répondu par la négative par lettres des 21, 24 et 27 août 2007 ; qu'en jugeant néanmoins que l'employeur avait faussement indiqué aux délégués du personnel avoir recherché en vain des postes disponibles dans l'entreprise et dans les sociétés du groupe alors qu'elle n'aurait en réalité procédé à aucune recherche réelle et active de reclassement, la cour d'appel qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations a violé les articles L. 1226-10 et L. 1226-12 du code du travail ;
3°/ que seuls les postes disponibles avant le licenciement du salarié inapte doivent lui être proposés au titre de l'obligation de reclassement ; que n'est pas nécessairement disponible immédiatement le poste rendu vacant par la démission d'un salarié ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté qu'à la suite de la démission d'un conseiller de vente le 13 septembre 2007, l'employeur n'avait diffusé une annonce de recrutement pour ce poste que le 23 octobre 2007 ; qu'en reprochant néanmoins à l'employeur de ne pas avoir proposé ce poste dès le 13 septembre 2007 à Mme X... avant de la licencier 14 septembre 2007, sans constater que ce poste de conseiller de vente était immédiatement disponible dès le 13 septembre 2007, la cour d'appel sa décision de base légale au regard des articles L. 1226-10 et L. 1226-12 du code du travail ;
4°/ qu'au titre de son obligation de reclassement, l'employeur n'est tenu de proposer que les postes disponibles antérieurement au licenciement du salarié jugé inapte ; qu'en jugeant qu'en toute hypothèse, l'employeur aurait dû proposer à la salariée, après son licenciement, le poste de conseiller de vente qui venait de se libérer, la cour d'appel a violé les articles L. 1226-10 et L. 1226-12 du code du travail ;
5°/ que les juges du fond ne peuvent dénaturer les écrits versés aux débats ; qu'en l'espèce, pour justifier de ce que le poste de "conseiller de vente" était incompatible avec l'inaptitude de sa salariée, l'employeur avait versé aux débats la fiche de description des fonctions de ce poste qui mentionnait non seulement l'accueil et le conseil aux clients mais également des tâches physiques telles que "mise en valeur des produits (nouveautés) et de l'agencement de l'exposition" et "assurer la manutention et la gestion des brochures et matériels (rangement des carreaux, déballage des palettes…)" ; qu'en ne retenant que les fonctions d'accueil et de conseil aux clients visées par ce descriptif pour en déduire que ce poste était compatible avec l'inaptitude de la salariée, la cour d'appel en a dénaturé les termes clairs et précis et a violé l'obligation pour le juge de ne pas dénaturer les documents de la cause ;
6°/ qu'en tout état de cause, seul le médecin du travail est habilité à apprécier l'aptitude du salarié à un poste de travail ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a reproché à l'employeur de ne pas avoir proposé à la salariée un reclassement au poste de "conseiller de vente" faute de prouver qu'il était incompatible avec son inaptitude ; qu'en appréciant elle-même l'aptitude de la salariée à occuper un tel poste tout en reconnaissant que seul le médecin du travail, s'il avait été consulté, aurait pu dire si ce poste était ou non compatible avec l'état de santé de la salariée, la cour d'appel qui a violé l'article L. 1226-2 du code du travail ;
7°/ que la recherche des possibilités de reclassement du salarié déclaré inapte à l'emploi qu'il occupait précédemment en conséquence d'un accident du travail doit s'apprécier au sein des différents établissements de l'entreprise concernée et, si nécessaire, à l'intérieur du groupe auquel celle-ci appartient, parmi les entreprises dont les activités, l'organisation ou le lieu d'exploitation permettent à l'employeur d'effectuer la permutation de tout ou partie du personnel ; qu'en reprochant en l'espèce à l'employeur de n'avoir procédé à aucune recherche de reclassement dans les sociétés du groupe implantées en Europe sans constater que les activités, l'organisation ou le lieu d'exploitation de ces entreprises permettaient d'effectuer la permutation de tout ou partie du personnel, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1226-10 et L. 1226-12 du code du travail ;
8°/ que l'indemnisation d'un préjudice futur suppose que ce préjudice soit certain et non seulement hypothétique ; qu'en se bornant à affirmer, pour porter à euros le montant des dommages-intérêts alloués à la salariée "compte tenu de l'impact de son licenciement sur le montant de sa retraite future", qu'il était incontestable qu'elle ne retrouverait pas un emploi compte tenu de son âge de 56 ans et de son taux d'incapacité permanente en accident du travail de 20 %, la cour d'appel qui a indemnisé un préjudice futur hypothétique, a violé l'article 1226-15 du code du travail et l'article 1147 du code civil ;
Mais attendu qu'appréciant les éléments de fait et de preuve qui lui étaient soumis, la cour d'appel a estimé, d'une part, que l'employeur n'établissait nullement qu'aucun poste n'avait pu être proposé à la salariée au besoin par voie de transformation de poste, de mutation ou d'aménagement du temps de travail et en particulier, alors qu'il avait été informé de la démission d'un autre salarié le 13 septembre du poste de conseiller de vente, dont il n'était pas établi l'incompatibilité avec l'état de santé de la salariée, il ne l'avait nullement proposé à cette dernière avant son licenciement, et, d'autre part qu'aucune recherche de reclassement n'avait été effectuée dans les sociétés du groupe implantées en Europe alors que l'intéressée avait déjà démontré par le passé sa mobilité ; que par ces seuls motifs et justifiant le préjudice subi par celle ci par l'appréciation qu'elle en a faite, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ;
Mais sur le second moyen :
Vu l'article L. 1235-4 du code du travail ;
Attendu que pour condamner la société Villeroy et Boch à rembourser à l'Assedic Côte-d'Azur les indemnités de chômage versées à la salariée dans la limite de six mois, l'arrêt retient, au visa de l'article susvisé que cette dernière ayant plus de deux ans d'ancienneté dans une entreprise occupant plus de dix salariés, le remboursement doit être ordonné d'office ;
Qu'en statuant ainsi, alors que les dispositions de l'article L. 1235-4 du code du travail ne sont applicables qu'au licenciement sans cause réelle et sérieuse et non au licenciement prononcé en violation des règles particulières aux victimes d'accidents du travail ou de maladies professionnelles édictées par les articles L. 1226-10 et suivants du code du travail, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Et attendu que, conformément à l'article 627, alinéa 2, du code de procédure civile, la cassation doit être prononcée sans renvoi, dès lors que la cour est en mesure de mettre fin au litige par application de la règle de droit appropriée, ce qui rend sans intérêt la demande de mise hors de cause de la salariée ;
Et attendu qu'il convient de condamner la société Villeroy et Boch, qui succombe pour l'essentiel, aux dépens de l'instance ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a condamné la société Villeroy et Boch à rembourser à l'Assedic Côte-d'Azur les indemnités de chômage versées à la salariée dans la limite de six mois, l'arrêt rendu le 26 avril 2010, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
Dit n'y avoir lieu au remboursement des indemnités de chômage par la société Villeroy et Boch ;
Condamne la société Villeroy et Boch arts de la table aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Villeroy et Boch arts de la table à payer à Mme X... la somme de 2 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze décembre deux mille onze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils pour la société Villeroy et Boch arts de la table
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR constaté que le licenciement n'a pas été précédé d'une recherche sincère et sérieuse de reclassement et qu'il est dénué de cause réelle et sérieuse, et condamné la société VILLEROY et BOCH à payer à Madame X... la somme de 50.000 euros à titre de dommages et intérêts, de l'AVOIR en conséquence condamnée à rembourser à l'ASSEDIC Côte d'Azur les indemnités de chômage versées à Madame X... dans la limite de six mois d'indemnités et à lui payer la somme de 700 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.
AUX MOTIFS PROPRES QUE Sur le licenciement ; qu'aux termes de l'article L. 1226-10 du Code du travail : « Lorsque, à l'issue des périodes de suspension du contrat de travail consécutives à un accident du travail ou à une maladie professionnelle, le salarié est déclaré inapte par le médecin du travail à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités. Cette proposition prend en compte, après avis des délégués du personnel, les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu'il formule sur l'aptitude du salarié à exercer l'une des tâches existantes dans l'entreprise. L'emploi proposé est aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de poste ou aménagement du temps de travail » ; et de l'article L. 1226-12 du même code : « Lorsque l'employeur est dans l'impossibilité de proposer un autre emploi au salarié, il lui fait connaître par écrit les motifs qui s'opposent au reclassement. L'employeur ne peut rompre le contrat de travail que s'il justifie soit de son impossibilité de proposer un emploi dans les conditions prévues à l'article L. 1226-10, soit du refus par le salarié de l'emploi proposé dans ces conditions. S'il prononce le licenciement, l'employeur respecte la procédure applicable au licenciement pour motif personnel prévue au chapitre II du titre III » ; qu'il apparaît qu'entre les deux visites de reprise, le 16 août 2007, la société VILLEROY et BOCH a écrit au Médecin du travail : « Nous avons pris connaissance de vos conclusions concernant l'inaptitude de Mme X... Dominique à son poste de travail de responsable de point de vente qu'elle occupait à notre concession shop de Saint-Laurent du Var. Vous indiquez qu'elle pourrait occuper un poste purement administratif sans aucune manutention. Nous n'avons pas à ce jour de poste de ce type disponible tant dans la société VILLEROY et BOCH Arts de la table que dans les autres entités juridiques VILLEROY et BOCH présentes en France… » ; affirmation infondée puisque ce n'est que postérieurement à ce courrier que la société VILLEROY et BOCH a obtenu les réponses concernant son interrogation sur un reclassement éventuel à savoir réponse du 21 août 2007 de son bureau de FORBACH, du 24 août 2007 de son établissement de la FERTE GAUCHER et enfin le 27 août 2007 de M. VILLEROY, Président de la société, de sorte que lorsqu'elle écrit au Médecin du Travail qu'elle ne disposait d'aucun poste de type administratif elle n'en avait en réalité aucune certitude ; que la société VILLEROY et BOCH soutient que le Médecin du travail n'avait pas connaissance de son courrier du 16 août 2007 lorsqu'il a rendu son second avis le 17 août 2007, ce qu'elle n'établit pas et alors même que la chronologie de ces courriers indique au contraire que c'est en raison de l'information déloyale qu'il a reçue que le Médecin du Travail a le 17 août 2007 pu écrire que Mme X... était inapte à tout poste ; que par ailleurs, la société VILLEROY et BOCH a par ailleurs le 23 octobre 2007 diffusé une annonce de recrutement pour un poste de « conseiller de vente » à la suite de la démission donnée par M. Y... le 13 septembre 2007 et n'a pas proposé ce poste à Mme X... soutenant qu'elle n'aurait été informée de cette démission que le 14 septembre 2007 soit le jour même du licenciement de Mme X..., donc trop tard, et produisant sur ce point un fax du 14 septembre l'informant de cette démission ; que toutefois il ressort de l'attestation ASSEDIC concernant M. Y... que le préavis de ce dernier a commencé le 13 septembre 2007, que la date de la rupture est fixée au 13 septembre 2007 ce qui démontre que la société a en réalité été informée de cette démission le 13 septembre 2007 et pouvait donc proposer le poste à Mme X... avant de prononcer son licenciement ; qu'en toute hypothèse, Madame X... a été en période de préavis non exécutée mais payé jusqu'au 11 décembre 2007 de sorte que la société VILEROY et BOCH avait encore toute latitude pour revenir sur sa décision et proposer à cette dernière le poste de conseiller de vente qui venait de se libérer et dont elle ne démontre pas, contrairement à ce qu'elle soutient, qu'il n'aurait pas été compatible avec l'inaptitude de Mme X... dans la mesure « où il comportait encore moins de tâches administratives que le poste de responsable de concession pour lequel Mme X... avait été reconnue inapte » ; qu'en effet, la description des fonctions relatives au poste de conseiller de vente ne démontre pas l'incompatibilité alléguée puisqu'il s'agit de « présenter les solutions clientèle exigeantes, accueillir et répondre aux questions de la clientèle et des professionnels (architectes) et conseiller les clients dans leur choix en vue de concrétiser leur projet » , étant en toute hypothèse observé que seul le Médecin du Travail, à condition qu'il soit consulté, aurait pu dire si ce poste était ou non compatible avec l'état de santé de Mme X... ; qu'il apparaît encore que la société VILLEROY et BOCH qui emploie 9521 salariés dont 3600 en Europe produit des registres du personnel totalement incomplets, non signés et de surcroît tronqués puisque concernant les dates d'embauche, les tableaux produits, dont on ignore s'ils concernent la société VILLEROY et BOCH SAS ou la société VILLEROY et BOCH Arts de la table, commencent pas deux dates au 1er août et au 30 juillet 2007 correspondant aux matricules 70 739 et 70 738 puis s'interrompent jusqu'au 21 septembre 2007, date qui concerne le matricule 70 756 et ne fournit aucune explication sur ce qui s'est passé entre le 2 août 2007 et le 21 septembre 2007 ni sur les emplois correspondant aux matricules 70 740 à 70 755 inclus qui ne sont pas retrouvés dans lesdits tableaux, de sorte qu'elle n'établit nullement qu'aucun poste entre le 2 août 2007 et le 20 septembre 2007 n'aurait pu être proposé à Mme X... au besoin par voie d'aménagement, de mutation ou d'aménagement de son temps de travail ; que par ailleurs si les délégués du personnel, en nombre d'ailleurs très réduit puisqu'ils ont été convoqués le 29 août 2007 alors que plusieurs d'entre eux étaient encore en congé – ont donné un avis favorable à la poursuite de la procédure de licenciement, cet avis a été donné « compte tenu de la situation » qui leur a été présentée par la Direction, à savoir « après des recherches de postes disponibles dans l'entreprise et des sociétés du groupe présentes en France (VILLEROY et BOCH SAS et le bureau de Forbach), M. Z... indique qu'aucun poste administratif avec les critères mentionnés lors de la première visite n'est disponible actuellement et qu'aucun poste avec ces mêmes critères n'est susceptible de se libérer à court et moyen terme » ce qui était une information erronée puisqu'il apparaît que la société VILLEROY et BOCH n'a en réalité procédé à aucune recherche réelle, active et loyale de reclassement, ni de façon spontanée ni en prenant contact avec le Médecin du Travail ainsi que celui-ci l'y invitait par courrier du 1er août 2007 (« je me tiens à votre disposition pour toute étude de poste… ») ayant au contraire comme il a été indiqué ci-dessus écrit prématurément à ce dernier et avant même toute recherche qu'elle n'avait pas de poste administratif disponible ; qu'ainsi, les informations mensongères données aux délégués du personnel ne pouvaient permettre à ces derniers de se déterminer en toute connaissance de cause de sorte que c'est à tort que la société VILLEROY et BOCH s'appuie sur cet avis pour tenter de justifier le licenciement ; qu'il apparaît encore que la société VILLEROY et BOCH n'a procédé à aucune recherche de reclassement dans les sociétés du groupe implantées en Europe sans nullement s'expliquer sur ce point, alors que Mme X... ayant déjà exercé successivement au magasin de ROISSY-CHARLES DE GAULLE, puis à VILLACOUBLAY et à Nice, elle avait déjà démontré sa mobilité et aurait dons été tout à fait susceptible de se voir proposer un poste hors de France, la société VILLEROY et BOCH ne pouvant présumer de son refus au seul motif que son époux, également salarié de la société, travaille à Nice ; que la société VILLEROY et BOCH n'a nullement respecté son obligation de recherche de reclassement et c'est en conséquence à juste titre que le jugement déféré a dit le licenciement dénué de cause réelle et sérieuse ; qu'eu égard à l'âge de Mme X... lors de son licenciement, 56 ans, de son importante ancienneté, 19 ans, des circonstances peu loyales dans lesquelles son licenciement a été prononcé, compte tenu également que s'il est exact que Mme X... ne justifie d'aucune recherche d'emploi il ne peut par ailleurs être sérieusement contesté qu'en raison de son âge et de son taux d'incapacité permanente en accident du travail de 20% tel que retenu par l'assurance-maladie une telle recherche était vouée à l'échec, compte tenu de l'impact de ce licenciement sur le montant de sa retraite future et du préjudice moral subi, il y a lieu d'élever à 50.000 euros le montant des dommages-intérêts devant lui être alloués ; que par ailleurs, aux termes de l'article L. 1235-4 du Code du travail « Dans les cas prévus aux articles L. 1235-3 et L. 1235-11, le juge ordonne le remboursement par l'employeur fautif aux organismes concernés de tout ou partie des indemnités de chômage versées au salarié licencié, du jour de son licenciement au jour du jugement prononcé, dans la limite de six mois d'indemnités de chômage par salarié intéressé. Ce remboursement est ordonné d'office lorsque les organismes intéressés ne sont pas intervenus à l'instance ou n'ont pas fait connaître le montant des indemnités versées », de sorte que Mme X... ayant plus de deux ans d'ancienneté dans une entreprise occupant plus de 10 salariés, il y a lieu d'ordonner d'office le remboursement par la société VILLEROY et BOCH à l'ASSEDIC Côte d'Azur à laquelle une copie du présent arrêt sera adressée des indemnités de chômage versées à l'intéressée dans la limite de six mois d'indemnités ; qu'il y a lieu de confirmer le jugement sur la somme allouée au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et de condamner la société VILLEROY et BOCH en cause d'appel à verser à Mme X... sur ce fondement la somme de 700 euros.
ET AUX MOTIFS SUPPOSES ADOPTES QUE Sur l'obligation de reclassement ; qu'en vertu de l'article L. 1226-10 du Code du travail, « lorsque, à l'issue des périodes de suspension du contrat de travail consécutives à un accident du travail ou à une maladie professionnelle, le salarié est déclaré inapte par le médecin du travail à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités. Cette proposition prend en compte, après avis des délégués du personnel, les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu'il formule sur l'aptitude du salarié à exercer l'une des tâches existant dans l'entreprise. L'emploi proposé est aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de poste ou aménagement du temps de travail » ; que selon la jurisprudence, il appartient à l'employeur d'apporter la preuve de l'impossibilité où il se trouve de reclasser le salarié ; que la sanction de la violation de l'obligation de reclassement ne donne lieu au versement d'une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse (Cass.Soc. 5 décembre 1995) ; que la recherche doit s'apprécier à l'intérieur du groupe auquel appartient l'employeur parmi les entreprises dont les activités, l'organisation ou le lieu d'exploitation lui permettent d'effectuer la mutation de tout ou partie du personnel (Cass. Soc. 19 mai 1998) ; qu'en l'espèce, la société VILLEROY et BOCH justifie avoir recherché dans quelques établissement du groupe un poste pour une salariée « inapte à tout poste dans l'entreprise » mais ne démontre pas avoir recherché un reclassement sur un « poste purement administratif sans aucune manutention » comme le premier examen médical l'envisageait ; que la recherche de reclassement n'a donc pas été sérieuse et sincère, ce qui a causé un préjudice manifeste à la salariée et retentit sur le caractère réel et sérieux de son licenciement.
1° - ALORS QUE seules les recherches de reclassement effectuées postérieurement à la seconde visite de reprise et compatibles avec les conclusions du médecin du travail émises au cours de cette dernière visite peuvent être prises en considération par les juges pour vérifier si l'employeur a satisfait à son obligation de reclassement ; qu'en l'espèce, il résulte de l'arrêt attaqué qu'à l'issue de la première visite de reprise du 1er août 2007, le médecin du travail avait déclaré la salariée inapte à son poste actuel de responsable de concession mais apte à un poste administratif sans aucune manutention et qu'à l'issue de la seconde visite de reprise du 17 août 2007, il l'avait finalement déclarée inapte à tout poste dans l'entreprise ; qu'en reprochant à l'employeur, par motifs propres et adoptés, de ne pas avoir réellement recherché, entre les deux visites, à reclasser la salariée à un poste administratif sans manutention lorsque l'employeur n'était tenu de procéder à une recherche de reclassement qu'à l'issue de la seconde visite de reprise et au regard des préconisations du second avis du médecin du travail qui ne visait plus l'aptitude à un poste administratif sans manutention, la Cour d'appel a violé les articles L. 1226-10, L. 1226-12 et R. 4624-31 du Code du travail.
2° - ALORS QUE satisfait à son obligation de reclassement l'employeur qui justifie avoir interrogé tant ses établissements que les sociétés du groupe auquel il appartient sur les possibilités de reclassement de son salarié et avoir reçu des réponses négatives ; qu'en l'espèce, la Cour d'appel a constaté qu'à la suite de l'avis d'inaptitude à tout poste dans l'entreprise de sa salariée, la société VILLEROY et BOCH ARTS DE LA TABLE avait interrogé son bureau de FORBACH, son établissement de la FERTE GAUCHER et le Président de la société VILLEROY et BOCH SAS sur un éventuel reclassement et que ceuxci avaient répondu par la négative par lettres des 21, 24 et 27 août 2007; qu'en jugeant néanmoins que l'employeur avait faussement indiqué aux délégués du personnel avoir recherché en vain des postes disponibles dans l'entreprise et dans les sociétés du groupe alors qu'elle n'aurait en réalité procédé à aucune recherche réelle et active de reclassement, la Cour d'appel qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations a violé les articles L. 1226-10 et L. 1226-12 du Code du travail.
3° - ALORS QUE seuls les postes disponibles avant le licenciement du salarié inapte doivent lui être proposés au titre de l'obligation de reclassement ; que n'est pas nécessairement disponible immédiatement le poste rendu vacant par la démission d'un salarié; qu'en l'espèce, la Cour d'appel a constaté qu'à la suite de la démission d'un conseiller de vente le 13 septembre 2007, l'employeur n'avait diffusé une annonce de recrutement pour ce poste que le 23 octobre 2007 ; qu'en reprochant néanmoins à l'employeur de ne pas avoir proposé ce poste dès le 13 septembre 2007 à Madame X... avant de la licencier 14 septembre 2007, sans constater que ce poste de conseiller de vente était immédiatement disponible dès le 13 septembre 2007, la Cour d'appel sa décision de base légale au regard des articles L. 1226-10 et L. 1226-12 du Code du travail.
4° - ALORS QU'au titre de son obligation de reclassement, l'employeur n'est tenu de proposer que les postes disponibles antérieurement au licenciement du salarié jugé inapte ; qu'en jugeant qu'en toute hypothèse, l'employeur aurait dû proposer à la salariée, après son licenciement, le poste de conseiller de vente qui venait de se libérer, la Cour d'appel a violé les articles L. 1226-10 et L. 1226-12 du Code du travail.
5° - ALORS QUE les juges du fond ne peuvent dénaturer les écrits versés aux débats ; qu'en l'espèce, pour justifier de ce que le poste de « conseiller de vente » était incompatible avec l'inaptitude de sa salariée, l'employeur avait versé aux débats la fiche de description des fonctions de ce poste qui mentionnait non seulement l'accueil et le conseil aux clients mais également des tâches physiques telles que « mise en valeur des produits (nouveautés) et de l'agencement de l'exposition » et « assurer la manutention et la gestion des brochures et matériels (rangement des carreaux, déballage des palettes…) » ; qu'en ne retenant que les fonctions d'accueil et de conseil aux clients visées par ce descriptif pour en déduire que ce poste était compatible avec l'inaptitude de la salariée, la Cour d'appel en a dénaturé les termes clairs et précis et a violé l'obligation pour le juge de ne pas dénaturer les documents de la cause.
6° - ALORS en tout état de cause QUE seul le médecin du travail est habilité à apprécier l'aptitude du salarié à un poste de travail; qu'en l'espèce, la Cour d'appel a reproché à l'employeur de ne pas avoir proposé à la salariée un reclassement au poste de « conseiller de vente » faute de prouver qu'il était incompatible avec son inaptitude ; qu'en appréciant elle-même l'aptitude de la salariée à occuper un tel poste tout en reconnaissant que seul le médecin du travail, s'il avait été consulté, aurait pu dire si ce poste était ou non compatible avec l'état de santé de la salariée, la Cour d'appel qui a violé l'article L. 1226-2 du Code du travail.
7°- ALORS QUE la recherche des possibilités de reclassement du salarié déclaré inapte à l'emploi qu'il occupait précédemment en conséquence d'un accident du travail doit s'apprécier au sein des différents établissements de l'entreprise concernée et, si nécessaire, à l'intérieur du groupe auquel celle-ci appartient, parmi les entreprises dont les activités, l'organisation ou le lieu d'exploitation permettent à l'employeur d'effectuer la permutation de tout ou partie du personnel ; qu'en reprochant en l'espèce à l'employeur de n'avoir procédé à aucune recherche de reclassement dans les sociétés du groupe implantées en Europe sans constater que les activités, l'organisation ou le lieu d'exploitation de ces entreprises permettaient d'effectuer la permutation de tout ou partie du personnel, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1226-10 et L. 1226-12 du Code du travail.
8° - ALORS QUE l'indemnisation d'un préjudice futur suppose que ce préjudice soit certain et non seulement hypothétique ; qu'en se bornant à affirmer, pour porter à euros le montant des dommages-intérêts alloués à la salariée « compte tenu de l'impact de son licenciement sur le montant de sa retraite future », qu'il était incontestable qu'elle ne retrouverait pas un emploi compte tenu de son âge de 56 ans et de son taux d'incapacité permanente en accident du travail de 20%, la Cour d'appel qui a indemnisé un préjudice futur hypothétique, a violé l'article 1226-15 du Code du travail et l'article 1147 du Code civil.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR condamné la société VILLEROY et BOCH à rembourser à l'ASSEDIC Côte d'Azur les indemnités de chômage versées à Madame X... dans la limite de six mois d'indemnités
AUX MOTIF QUE (…) que la société VILLEROY et BOCH n'a nullement respecté son obligation de recherche de reclassement et c'est en conséquence à juste titre que le jugement déféré a dit le licenciement dénué de cause réelle et sérieuse ; qu'eu égard à l'âge de Mme X... lors de son licenciement, 56 ans, de son importante ancienneté, 19 ans, des circonstances peu loyales dans lesquelles son licenciement a été prononcé, compte tenu également que s'il est exact que Mme X... ne justifie d'aucune recherche d'emploi il ne peut par ailleurs être sérieusement contesté qu'en raison de son âge et de son taux d'incapacité permanente en accident du travail de 20% tel que retenu par l'assurance-maladie une telle recherche était vouée à l'échec, compte tenu de l'impact de ce licenciement sur le montant de sa retraite future et du préjudice moral subi, il y a lieu d'élever à 50.000 euros le montant des dommages-intérêts devant lui être alloués ; que par ailleurs, aux termes de l'article L. 1235-4 du Code du travail « Dans les cas prévus aux articles L. 1235-3 et L. 1235-11, le juge ordonne le remboursement par l'employeur fautif aux organismes concernés de tout ou partie des indemnités de chômage versées au salarié licencié, du jour de son licenciement au jour du jugement prononcé, dans la limite de six mois d'indemnités de chômage par salarié intéressé. Ce remboursement est ordonné d'office lorsque les organismes intéressés ne sont pas intervenus à l'instance ou n'ont pas fait connaître le montant des indemnités versées », de sorte que Mme X... ayant plus de deux ans d'ancienneté dans une entreprise occupant plus de 10 salariés, il y a lieu d'ordonner d'office le remboursement par la société VILLEROY et BOCH à l'ASSEDIC Côte d'Azur à laquelle une copie du présent arrêt sera adressée des indemnités de chômage versées à l'intéressée dans la limite de six mois d'indemnités.
ALORS QUE les dispositions de l'article L. 1235-4 du Code du travail prévoyant le remboursement par l'employeur fautif de tout ou partie des indemnités de chômage versées au salarié licencié ne sont applicables qu'au licenciement sans cause réelle et sérieuse et non au licenciement prononcé en violation des règles particulières aux salariés victimes d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle édictées par les articles L. 1226-10 et L. 1226-12 du Code du travail ; qu'en l'espèce, la Cour d'appel a constaté que le licenciement de Madame X... avait été prononcé en violation des règles particulières de reclassement applicables aux salariés victimes d'un accident du travail édictées par les articles L. 1226-10 et L. 1226-12 du Code du travail ; qu'en condamnant néanmoins l'employeur à rembourser à l'ASSEDIC les indemnités de chômage payées à la salariée licenciée dans la limite de six mois en faisant application d'office de l'article L. 1235-4 du Code du travail, la Cour d'appel a violé cet article.


Sens de l'arrêt : Cassation partielle sans renvoi
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 26 avril 2010


Publications
Proposition de citation: Cass. Soc., 14 déc. 2011, pourvoi n°10-19652

RTFTélécharger au format RTF
Composition du Tribunal
Président : M. Trédez (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Haas, SCP Gatineau et Fattaccini

Origine de la décision
Formation : Chambre sociale
Date de la décision : 14/12/2011
Date de l'import : 15/09/2022

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 10-19652
Numéro NOR : JURITEXT000024992751 ?
Numéro d'affaire : 10-19652
Numéro de décision : 51102595
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.cassation;arret;2011-12-14;10.19652 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award