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14/12/2011 | FRANCE | N°10-18105

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 14 décembre 2011, 10-18105


Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rouen, 4 mars 2010), que par acte notarié du 22 juillet 1997 la société Elboeuf Martyrs 21 a consenti un bail commercial à la société Homel contenant pacte de préférence ; que par acte reçu par M. X...le 29 juin 1999, la société Elboeuf Martyrs 21, aux droits de laquelle vient la société Financière Hamelin, a cédé le bien à la société Eurosic aux droits de laquelle vient la société Cicobail ; que le même jour un contrat de crédit-bail a été consenti par la société Eurosic à la société Compagnie Nitot ; que la société Homel a ass

igné la société Financière Hamelin, la société Compagnie Nitot et la société Euro...

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rouen, 4 mars 2010), que par acte notarié du 22 juillet 1997 la société Elboeuf Martyrs 21 a consenti un bail commercial à la société Homel contenant pacte de préférence ; que par acte reçu par M. X...le 29 juin 1999, la société Elboeuf Martyrs 21, aux droits de laquelle vient la société Financière Hamelin, a cédé le bien à la société Eurosic aux droits de laquelle vient la société Cicobail ; que le même jour un contrat de crédit-bail a été consenti par la société Eurosic à la société Compagnie Nitot ; que la société Homel a assigné la société Financière Hamelin, la société Compagnie Nitot et la société Eurosic en nullité de la vente du 29 juin 1999 et en substitution ;
Sur le moyen unique du pourvoi principal :
Attendu que la société Homel fait grief à l'arrêt de la débouter de sa demande en annulation de l'acte de vente du 29 juin 1999 et de sa demande tendant à se voir substituer à l'acquéreur, alors, selon le moyen :
1°/ que le bénéficiaire d'un pacte de préférence est en droit d'exiger l'annulation du contrat passé avec un tiers en méconnaissance de ses droits et d'obtenir sa substitution à l'acquéreur si bien qu'en se bornant à juger en l'espèce que les conditions de la substitution du bénéficiaire du pacte de préférence à l'acquéreur ne sont pas réunies, en raison de l'absence d'intention frauduleuse de la société Eurosic, crédit-bailleur, et de l'absence de preuve de sa connaissance que la société Homel, bénéficiaire, aurait eu l'intention de se prévaloir du pacte de préférence, sans rechercher si la société Compagnie Nitot, crédit-preneur, dont le dirigeant était M. Y..., également dirigeant de la société Elboeuf Martyrs 21 (qui) ne pouvait ignorer l'existence du pacte et est intervenue à l'acte de vente qui mentionnait faussement l'absence de pacte de préférence, qui a débattu des clauses et des conditions du contrat avec la société Elboeuf Martyrs 21, et enfin a entendu assumer tous les risques et obligations quels qu'ils soient qui, selon le droit commun incombent au propriétaire de l'immeuble, l'opération s'analysant à terme en une acquisition du bien par la société Compagnie Nitot au moyen d'un financement procuré par la société Eurosic, a eu connaissance de l'intention de la société Homel de se prévaloir du pacte de préférence, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles 1134, 1138 et 1147 du code civil ;
2°/ que la constatation de manoeuvres réalisées de concert par le vendeur et l'acquéreur afin de cacher intentionnellement au bénéficiaire d'un pacte de préférence une opération envisagée à son détriment suffit à justifier une annulation de la vente frauduleusement conclue de sorte que la cour d'appel ne pouvait se borner à juger que les conditions de l'annulation de la vente du 29 juin 1999 et de la substitution de la société Homel, bénéficiaire du pacte de préférence, à l'acquéreur, ne sont pas réunies, sans rechercher si, comme le soutenait la société Homel dans ses écritures, l'opération ne consistait pas en un montage frauduleux réalisé de concert par le vendeur et par le futur acquéreur de l'immeuble, tous deux représentés lors de la signature de l'acte notarié du 29 juin 1999 par M. Y..., dans le but de permettre à ce dernier, à la tête du groupe de sociétés composé de la société Elboeuf Martyrs 21, la société Financière Hamelin et la société Compagnie Nitot, d'assurer un refinancement de l'immeuble litigieux, ce qui justifiait l'annulation de la vente frauduleusement conclue au détriment de la société Homel, bénéficiaire du pacte de préférence, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles 1134, 1138 et 1147 du code civil ;
Mais attendu qu'ayant retenu que l'acte de vente du 29 juin 1999 ne faisait pas état de l'existence du pacte de préférence et mentionnait au contraire l'absence de restriction du vendeur de son droit de disposer, que le simple fait de l'existence du bail dans lequel était inséré le pacte soit mentionné dans l'acte de vente était insuffisant pour établir que la société Eurosic, acquéreur, qui n'était pas tenue de se faire communiquer ce bail, avait eu connaissance du pacte de préférence, une éventuelle négligence de la société Eurosic ne permettant pas de caractériser son intention frauduleuse et que s'il était établi que ce n'était pas la société Eurosic mais la société Compagnie Nitot qui était davantage intéressée en raison du contexte économique de l'opération, en sa qualité de futur acquéreur, qui avait choisi l'immeuble et avait négocié les conditions de la vente, la société Homel ne démontrait pas que la société Compagnie Nitot avait été mandatée par la société Eurosic qui n'intervenait en qualité d'acquéreur que pour financer l'opération, la cour d'appel, appréciant souverainement les éléments de preuve qui lui étaient soumis et procédant aux recherches prétendument omises, a légalement justifié sa décision ;
Sur le premier moyen du pourvoi incident formé par les sociétés Financière Hamelin et Compagnie Nitot :
Attendu que la société Financière Hamelin et la société Compagnie Nitot font grief à l'arrêt de condamner la société Compagnie Nitot " in solidum " avec la société Financière Hamelin et M. X...au paiement à la société Homel, d'une certaine somme, à titre de dommages-intérêts, alors, selon le moyen :
1°/ qu'un tiers engage sa responsabilité délictuelle envers une partie à un contrat s'il commet une faute lui causant un préjudice ; qu'en l'espèce, les juges du fond ont constaté que le pacte de préférence avait été violé par la vente conclue entre les sociétés Elboeuf Martyrs 21 et Eurosic ; qu'en condamnant la société Compagnie Nitot à réparer le préjudice causé à la société Homel par cette vente, sans caractériser aucune faute qui lui soit imputable, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du code civil ;
2°/ qu'un tiers engage sa responsabilité délictuelle envers une partie à un contrat s'il commet une faute lui causant un préjudice ; qu'en l'espèce, les juges du fond ont constaté que le pacte de préférence dont bénéficiait la société Homel avait été violé par un contrat de vente auquel la société Compagnie Nitot n'était pas partie ; qu'en la condamnant pourtant à réparer le préjudice causé par cette vente bien qu'aucun lien de causalité n'existe entre son comportement et le préjudice allégué, la cour d'appel a violé l'article 1382 du code civil ;
Mais attendu qu'ayant retenu qu'économiquement sinon juridiquement, l'opération s'analysait, à terme, en une acquisition par la société Compagnie Nitot au moyen d'un financement procuré par la société Eurosic, que la société Compagnie Nitot dont le dirigeant, M. Y..., également dirigeant de la société Elboeuf Martyrs 21, ne pouvait ignorer l'existence du pacte de préférence et était intervenu à l'acte de vente qui mentionnait faussement l'absence de pacte de préférence, la cour d'appel a pu en déduire que la demande de dommages-intérêts formée à l'égard de la société Compagnie Nitot était justifiée sur le fondement de l'article 1382 du code civil ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le second moyen du pourvoi incident formé par les sociétés Compagnie Nitot et Foncière Hamelin et sur le moyen unique du pourvoi incident formé par M. X..., réunis, ci-après annexé :
Attendu qu'ayant retenu que la renonciation à un droit ne pouvait résulter que d'actes manifestant sans équivoque la volonté de renoncer, que le fait pour la société Homel d'avoir eu connaissance postérieurement à l'acte de vente litigieux du changement d'identité du bailleur et de l'existence d'une opération de crédit-bail ne valait pas renonciation à invoquer le bénéfice d'un pacte de préférence qui avait vocation à s'appliquer en premier lieu au moment de la vente, que le contrat de crédit-bail signé entre les sociétés Eurosic et Compagnie Nitot était inopposable à la société Elboeuf Martyrs 21 dès lors que l'indivisibilité des deux conventions signées le même jour ne s'appliquait que dans les rapports entre Eurosic et Compagnie Nitot, que la qualité de Sicomi de la société Eurosic était indifférente dès lors que le titulaire du droit de préférence avait priorité sur elle pour acquérir aux mêmes conditions de vente et qu'il n'existait aucune condition propre au contrat de vente du 29 juin 1999 que la société Homel aurait été dans l'impossibilité de remplir et que la société Homel démontrait, par les pièces versées aux débats, que son exploitation était bénéficiaire et que son unique associé disposait à l'époque de la vente de liquidités représentant environ 30 % du prix de vente de l'immeuble, la cour d'appel, procédant aux recherches prétendument omises et appréciant souverainement les éléments de preuve qui lui étaient soumis, en a déduit que la société Financière Hamelin, la compagnie Nitot M. X...devaient être condamnés in solidum à réparer le préjudice subi par la société Homel en conséquence de la violation du pacte de préférence ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE les pourvois ;
Laisse à chaque demandeur la charge des dépens afférents à son pourvoi ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze décembre deux mille onze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit au pourvoi principal par de la SCP Peignot et Garreau, avocat aux Conseils pour la société Homel
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir débouté la Société HOMEL de sa demande en annulation de l'acte de vente du 29 juin 1999 et de sa demande tendant à se voir substituer à l'acquéreur au prix de 304. 889, 03 €,
AUX MOTIFS QUE " en conséquence de la violation avérée du pacte de préférence dont elle bénéficiait, la Société HOMEL sollicite la substitution à son profit du contrat de vente conclu entre la Société ELBEUF MARTYRS 21 et la Société EUROSIC. Elle souligne que cette dernière, professionnelle de l'immobilier et à ce titre tenue d'analyser son risque, avait connaissance de l'existence du bail évoqué dans l'acte de vente et ne pouvait donc ignorer l'existence du pacte de préférence ni l'intention du bénéficiaire de s'en servir. La Société HOMEL ajoute que la Société EUROSIC était en outre engagée par le mandat qu'elle avait confié à la Société Compagnie NITOT pour la recherche de l'immeuble. Selon elle, les contractants connaissaient parfaitement son intention de se prévaloir du pacte de préférence puisque dès l'entrée en relation en 1997 des sociétés ELBEUF MARTYRS 21 et HOMEL, la solution d'un rachat des murs ou d'une cession des parts de la Société ELBEUF MARTYRS 21 avait été sérieusement étudiée comme le démontrent les courriers versés aux débats.
Toutefois, si le bénéficiaire d'un pacte de préférence est en droit d'exiger l'annulation du contrat passé avec un tiers en méconnaissance de ses droits et d'obtenir sa substitution à l'acquéreur, c'est à la condition que ce tiers ait eu la connaissance, lorsqu'il a contracté, de l'existence du pacte de préférence et de l'intention du bénéficiaire de s'en prévaloir. Or, ainsi que le souligne la Société CICOBAIL, l'acte de vente non seulement omet de faire état de l'existence du pacte mais mentionne en sa page 11 l'absence de restriction du vendeur de son droit de disposer, voire que ce dernier « n'a conféré à personne d'autre qu'à l'acquéreur un droit quelconque de ces biens d'une promesse de vente, droit de préférence ou de préemption, clause d'inaliénabilité … ». Le simple fait que l'existence du bail dans lequel était inséré le pacte de préférence soit mentionné dans l'acte de vente est insuffisant pour établir que la Société EUROSIC, acquéreur, qui n'était pas tenue de se faire communiquer ce bail, ait eu connaissance de ce pacte. Une éventuelle négligence à cet égard de la Société EUROSIC serait insuffisante pour retenir une intention frauduleuse de sa part. Enfin, s'il est établi que ce n'est pas la Société EUROSIC mais la Société Compagnie NITOT, davantage intéressée en raison du contexte économique de l'opération et de sa qualité de futur acquéreur, qui a choisi l'immeuble et négocié les conditions de la vente, la Société HOMEL ne démontre pas que la Société Compagnie NITOT avait été mandatée pour ce faire par la Société EUROSIC, qui n'intervenait en qualité d'acquéreur que pour financer l'opération. La preuve n'est pas davantage rapportée par la Société HOMEL que la Société EUROSIC ait eu connaissance de son intention de se prévaloir du pacte de préférence. Il n'ensuit que les conditions de la substitution du bénéficiaire du pacte de préférence à l'acquéreur ne sont pas réunies et que la Société HOMEL doit être déboutée de sa demande d'annulation de l'acte de vente du 29 juin 1999.
Dès lors, la demande de la Société HOMEL relative à l'inopposabilité à son égard du contrat de crédit-bail est sans objet ",
ALORS D'UNE PART QUE le bénéficiaire d'un pacte de préférence est en droit d'exiger l'annulation du contrat passé avec un tiers en méconnaissance de ses droits et d'obtenir sa substitution à l'acquéreur si bien qu'en se bornant à juger en l'espèce que les conditions de la substitution du bénéficiaire du pacte de préférence à l'acquéreur ne sont pas réunies, en raison de l'absence d'intention frauduleuse de la Société EUROSIC, crédit-bailleur, et de l'absence de preuve de sa connaissance que la Société HOMEL, bénéficiaire, aurait eu l'intention de se prévaloir du pacte de préférence, sans rechercher si la Société COMPAGNIE NITOT, crédit-preneur, " dont le dirigeant était M. Y..., également dirigeant de la Société ELBEUF MARTYRS 21, (qui) ne pouvait ignorer l'existence du pacte et est intervenue à l'acte de vente qui mentionnait faussement l'absence de pacte de préférence " (arrêt page 16, § 1er), qui a débattu des clauses et des conditions du contrat avec la Société ELBEUF MARTYRS 21, et enfin a entendu assumer tous les risques et obligations quels qu'ils soient qui, selon le droit commun, incombent au propriétaire de l'immeuble, l'opération s'analysant à terme en une acquisition du bien par la Société COMPAGNIE NITOT au moyen d'un financement procuré par la Société EUROSIC, a eu connaissance de l'intention de la Société HOMEL de se prévaloir du pacte du préférence, la Cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles 1134, 1138 et 1147 du Code civil.
ALORS D'AUTRE PART QUE la constatation de manoeuvres réalisées de concert par le vendeur et l'acquéreur afin de cacher intentionnellement au bénéficiaire d'un pacte de préférence une opération envisagée à son détriment suffit à justifier une annulation de la vente frauduleusement conclue de sorte que la Cour d'appel ne pouvait se borner à juger que les conditions de l'annulation de la vente du 29 juin 1999 et de la substitution de la Société HOMEL, bénéficiaire du pacte de préférence, à l'acquéreur ne sont pas réunies, sans rechercher si, comme le soutenait l'exposante dans ses écritures, l'opération ne consistait pas en un montage frauduleux réalisé de concert par le vendeur et par le futur acquéreur de l'immeuble, tous deux représentés lors de la signature de l'acte notarié du 29 juin 1999 par Monsieur Y..., dans le but de permettre à ce dernier, à la tête du groupe de sociétés composé de la Société ELBEUF MARTYRS 21, la Société FINANCIERE HAMELIN et la Société COMPAGNIE NITOT, d'assurer un refinancement de l'immeuble litigieux, ce qui justifiait l'annulation de la vente frauduleusement conclue au détriment de la Société HOMEL, bénéficiaire du pacte de préférence, la Cour d'appel n'a pas légalement justifié au regard des articles 1134, 1138 et 1147 du Code civil.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits au pourvoi incident par la SCP Ortscheidt, avocat aux Conseils, pour la société Financière Hamelin et autre
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la société Compagnie Nitot, in solidum avec la société Financière Hamelin et Maître X..., à verser à la société Homel une somme de 150. 000 € à titre d'indemnités ;
AUX MOTIFS QUE dès lors que l'acte passé le 29 juin 1999 entre les sociétés Elbeuf Martyrs 21 et Eurosic constituait bien une vente, le vendeur a commis une faute en violant les obligations qu'il avait contractées en consentant à la société Homel le pacte de préférence inséré dans le bail, c'est-àdire en omettant de faire connaître à cette dernière par lettre recommandée avec accusé de réception avant la réalisation de la vente, l'identité de l'amateur, les modalités de paiement et les conditions générales de la vente projetée et en faisant ainsi obstacle à l'exercice de ce droit ; que ce manquement à une obligation contractuelle de faire à défaut de substitution à l'acquéreur, se résout en dommages et intérêts à l'égard de la société Elbeuf Martyrs 21 bailleresse aux droits de laquelle est venue la société Financière Hamelin ; que d'autre part la demande de dommages et intérêts à l'égard de la société Compagnie Nitot est justifiée sur le fondement de l'article 1382 du Code civil dès lors que cette dernière dont le dirigeant était M. Y... également dirigeant de la société Elbeuf Martyrs 21 ne pouvait ignorer l'existence du pacte et est intervenue à l'acte de vente qui mentionnait faussement l'absence de pacte de préférence ;
1°) ALORS QU'un tiers engage sa responsabilité délictuelle envers une partie à un contrat s'il commet une faute lui causant un préjudice ; qu'en l'espèce, les juges du fond ont constaté que le pacte de préférence avait été violé par la vente conclue entre les sociétés Elbeuf Martyrs 21 et Eurosic ; qu'en condamnant la société Compagnie Nitot à réparer le préjudice causé à la société Homel par cette vente, sans caractériser aucune faute qui lui soit imputable, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du code civil ;
2°) ALORS, SUBSIDIAIREMENT, QU'un tiers engage sa responsabilité délictuelle envers une partie à un contrat s'il commet une faute lui causant un préjudice ; qu'en l'espèce, les juges du fond ont constaté que le pacte de préférence dont bénéficiait la société Homel avait été violé par un contrat de vente auquel la société Compagnie Nitot n'était pas partie ; qu'en la condamnant pourtant à réparer le préjudice causé par cette vente, bien qu'aucun lien de causalité n'existe entre son comportement et le préjudice allégué, la cour d'appel a violé l'article 1382 du code civil.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir condamné in solidum les sociétés Financière Hamelin et Compagnie Nitot à payer à la société Homel une somme de 150. 000 € à titre de dommages intérêts ;
AUX MOTIFS QUE la renonciation à un droit ne peut résulter que d'actes manifestant sans équivoque la volonté de renoncer ; que le simple fait pour la société Homel d'avoir eu connaissance postérieurement à l'acte de vente litigieux du changement d'identité du bailleurs et de l'existence d'une opération de crédit-bail ne vaut pas renoncement à invoquer le bénéfice d'un pacte de préférence qui avait vocation à s'appliquer en premier lieu au moment de la vente ;
1°) ALORS QUE le titulaire d'un droit de préférence peut y renoncer, même tacitement ; qu'en se contentant de relever que le fait pour la société Homel d'avoir eu connaissance de la cession ne caractérisait aucune renonciation de sa part à l'exercice de son droit de préférence, sans rechercher, comme cela lui était demandé, si le fait pour la société Homel d'avoir, après la vente, réglé les loyers et charges à la société Compagnie Nitot, remboursé la taxe foncière à la société Eurosic et traité avec ces deux sociétés pour effectuer des travaux dans l'immeuble, ne valait renonciation à son droit de préférence, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du code civil ;
ET AUX MOTIFS QUE la qualité de SICOMI de la société Eurosic est indifférente dès lors que le titulaire du droit de préférence avait priorité sur elle pour acquérir aux mêmes conditions de vente ; qu'il n'existe aucune condition propre au contrat de vente du 29 juin 1999 que la société Homel aurait été dans l'impossibilité de remplir ; (…) ; que l'acte passé le 29 juin 1999 entre les sociétés Elbeuf Martyrs 21 et Eurosic constituait bien une vente, le vendeur a commis une faute en violant les obligations qu'il avait contractées en consentant à la société Homel le pacte de préférence inséré dans le bail, c'est-àdire en omettant de faire connaître à cette dernière par lettre recommandée avec accusé de réception, avant la réalisation de la vente, l'identité de l'amateur, les modalités de paiement et les conditions générales de la vente projetée et en faisant ainsi obstacle à l'exercice de ce droit ; que ce manquement à une obligation contractuelle de faire à défaut de substitution de l'acquéreur se résout en dommages et intérêts à l'égard de la société Elbeuf Martyrs 21 bailleresse aux droits de laquelle est venue la société Financière Hamelin ; que d'autre part la demande de dommages et intérêts à l'égard de la société Compagnie Nitot est justifiée sur le fondement de l'article 1382 du Code civil dès lors que cette dernière dont le dirigeant était M. Y... également dirigeant de la société Elbeuf Martyrs 21 ne pouvait ignorer l'existence du pacte et est intervenue à l'acte de vente qui mentionnait faussement l'absence de pacte de préférence ; (…) ; que par ailleurs la société Homel démontre par les pièces versées aux débats que son exploitation était bénéficiaire et que son unique associée, la société Dlebar, disposait à l'époque de la vente de liquidités représentant environ 30 % du prix de vente de l'immeuble ; qu'au vu de ces éléments, la cour considère que l'impossibilité pour la société Homel de trouver un financement pour acquérir l'immeuble n'est pas établie ; (…) que la société Homel fixe son préjudice à la somme de 535. 762 € sauf à parfaire, que toutefois les compagnies Nitot et Financière Hamelin sont bien fondées à soutenir que la société Homel n'a fait que perdre une chance d'acquérir l'immeuble en raison notamment des incertitudes pesant sur le financement de l'opération ; qu'il y a lieu de tenir compte des frais et droits inhérents à la passation de l'acte et à la mise en place d'un crédit pour l'acquisition ; que de la même façon, le bénéfice d'une éventuelle plus value aurait nécessité la prise en charge de droits de mutation et d'une commission de négociation ; que compte tenu de ce que le préjudice de la société Homel est inférieur au montant avancé par cette dernière et surtout qu'il s'agit d'une perte de chance d'acquérir, la cour fixera les dommages et intérêts dont seront redevables les sociétés Nitot et Financière Hamelin et M. X...à la somme de 150. 000 € ;
2°) ALORS QUE les sociétés Financière Hamelin et Compagnie Nitot faisaient valoir que la société Homel était dans l'impossibilité d'exercer son droit de préférence, dans la mesure où celui-ci ne pouvait intervenir qu'en cas d'accord de sa part sur les conditions générales de la vente convenues, où il était clairement prévu que la vente était liée à la conclusion d'un crédit-bail et où la société Homel n'était pas une SICOMI ; qu'en considérant que la société Homel avait subi un préjudice pour n'avoir pas été informée dans les conditions prévues par le pacte de préférence de la vente dont elle remplissait toute les conditions, sans rechercher si, même en l'absence d'indivisibilité objective entre les deux contrats, l'intention des parties à la vente n'avait pas été de la conclure en vue de la signature du contrat de crédit bail que la société Homel ne pouvait elle-même conclure, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du code civil ;
3°) ALORS QUE les juges du fond doivent préciser les pièces sur lesquelles ils se fondent et les analyser au moins sommairement, sans pouvoir se contenter de les viser ; qu'en l'espèce, pour considérer que l'impossibilité pour la société Homel de trouver un financement lui permettant d'acquérir l'immeuble n'était pas démontré, la cour d'appel s'est uniquement fondée sur « les pièces versées aux débats » qu'elle n'a ni identifiées, ni détaillées ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
4°) ALORS QU'une société dispose d'un patrimoine distinct de celui de son associé, même s'il est unique ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a considéré qu'il n'était pas démontré que la société Homel était dans l'impossibilité d'acquérir l'immeuble au moment de la vente au motif que son associé unique disposait de liquidités ; qu'en statuant ainsi par un motif inopérant, sans faire état de la situation financière de la société Homel, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1147 et 1382 du code civil ;
5°) ALORS QUE les juges du fond doivent préciser les éléments et pièces sur lesquels ils se fondent ; qu'en l'espèce, saisie de contestations des sociétés Financière Hamelin et Compagnie Nitot quant à l'existence et la preuve du préjudice allégué par la société Homel, la cour d'appel n'a mentionné aucun élément objectif, ni aucune pièce permettant d'éclairer l'évaluation des préjudices réparés par elle et les bases de son évaluation ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit au pourvoi incident par la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat aux Conseils pour M. X...

Il est fait grief à l'arrêt d'AVOIR condamné Monsieur X...in solidum avec les sociétés FINANCIERE HAMELIN et COMPAGNIE NITOT, à payer à la société HOMEL une somme de 150. 000 euros à titre de dommages intérêts ;
AUX MOTIFS QUE « la renonciation à un droit ne peut résulter que d'actes manifestant sans équivoque la volonté de renoncer ; que le simple fait pour la société HOMEL d'avoir eu connaissance postérieurement à l'acte de vente litigieux du changement d'identité du bailleurs et de l'existence d'une opération de crédit-bail ne vaut pas renoncement à invoquer le bénéfice d'un pacte de préférence qui avait vocation à s'appliquer en premier lieu au moment de la vente » ;
1°) ALORS QUE le titulaire d'un droit de préférence peut y renoncer, même tacitement ; qu'en se contentant de relever que le fait pour la société HOMEL d'avoir eu connaissance de la cession ne caractérisait aucune renonciation de sa part à l'exercice de son droit de préférence, sans rechercher, comme cela lui était demandé, si le fait pour la société HOMEL d'avoir, après la vente, réglé les loyers et charges à la société COMPAGNIE NITOT, remboursé la taxe foncière à la société EUROSIC et traité avec ces deux sociétés pour effectuer des travaux dans l'immeuble, ne valait renonciation à son droit de préférence, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du Code civil ;
ET AUX MOTIFS QUE « la qualité de SICOMI de la société EUROSIC est indifférente dès lors que le titulaire du droit de préférence avait priorité sur elle pour acquérir aux mêmes conditions de vente ; qu'il n'existe aucune condition propre au contrat de vente du 29 juin 1999 que la société HOMEL aurait été dans l'impossibilité de remplir ;
(…) ; que l'acte passé le 29 juin 1999 entre les sociétés ELBEUF MARTYRS 21 et EUROSIC constituait bien une vente, le vendeur a commis une faute en violant les obligations qu'il avait contractées en consentant à la société HOMEL le pacte de préférence inséré dans le bail, c'est-à dire en omettant de faire connaître à cette dernière par lettre recommandée avec accusé de réception, avant la réalisation de la vente, l'identité de l'amateur, les modalités de paiement et les conditions générales de la vente projetée et en faisant ainsi obstacle à l'exercice de ce droit ; ce manquement à une obligation contractuelle de faire à défaut de substitution de l'acquéreur se résout en dommages et intérêts à l'égard de la société ELBEUF MARTYRS 21 bailleresse aux droits de laquelle est venue la société FINANCIERE HAMELIN ; d'autre part la demande de dommages et intérêts à l'égard de la société COMPAGNIE NITOT est justifiée sur le fondement de l'article 1382 du Code civil dès lors que cette dernière dont le dirigeant était Monsieur Y... également dirigeant de la société ELBEUF MARTYRS 21 ne pouvait ignorer l'existence du pacte et est intervenue à l'acte de vente qui mentionnait faussement l'absence de pacte de préférence ; s'agissant de Monsieur X..., notaire rédacteur de l'acte de vente, sa responsabilité à l'égard de la société HOMEL est établie sur le fondement de l'article 1382 du Code civil dès lors que, tenu d'assurer l'efficacité juridique de la convention, il devait se faire communiquer l'exemplaire du bail mentionné dans l'acte, vérifier son contenu et purger le droit de préférence du locataire avant de passer l'acte ; la société COMPAGNIE NITOT dont il a été démontré plus haut qu'elle avait commis une faute personnelle dès lors qu'elle connaissait l'existence du pacte de préférence, est mal fondée en son recours en garantie contre Monsieur X..., rédacteur de l'acte ;
(…) ; que par ailleurs la société HOMEL démontre par les pièces versées aux débats que son exploitation était bénéficiaire et que son unique associée, la société DELBAR, disposait à l'époque de la vente de liquidités représentant environ 30 % du prix de vente de l'immeuble ; qu'au vu de ces éléments, la cour considère que l'impossibilité pour la société HOMEL de trouver un financement pour acquérir l'immeuble n'est pas établie ;
(…) ; que la société HOMEL fixe son préjudice à la somme de 535. 762 euros sauf à parfaire. Toutefois les sociétés COMPAGNIE NITOT et FINANCIERE HAMELIN sont bien fondées à soutenir que la société HOMEL n'a fait que perdre une chance d'acquérir l'immeuble en raison notamment des incertitudes pesant sur le financement de l'opération ; qu'il y a lieu de tenir compte des frais et droits inhérents à la passation de l'acte et à la mise en place d'un crédit pour l'acquisition ; que de la même façon, le bénéfice d'une éventuelle plus value aurait nécessité la prise en charge de droits de mutation et d'une commission de négociation ; que compte tenu de ce que le préjudice de la société HOMEL est inférieur au montant avancé par cette dernière et surtout qu'il s'agit d'une perte de chance d'acquérir, la cour fixera les dommages et intérêts dont seront redevables les sociétés COMPAGNIE NITOT et FINANCIERE HAMELIN et M. X...à la somme de 150. 000 euros » ;
2°) ALORS QUE Monsieur X...faisait valoir que la société HOMEL était dans l'impossibilité d'exercer son droit de préférence, dans la mesure où celui-ci ne pouvait intervenir qu'en cas d'accord de sa part sur les conditions générales de la vente convenues, où il était clairement prévu que la vente était liée à la conclusion d'un crédit-bail et où la société HOMEL n'était pas une SICOMI (conclusions d'appel, signifiées le 3 novembre 2009, page 12, al. 2 et s.) ; qu'en considérant que la société HOMEL avait subi un préjudice pour n'avoir pas été informée dans les conditions prévues par le pacte de préférence de la vente dont elle remplissait toute les conditions, sans rechercher si l'intention des parties à la vente n'avait pas été de la conclure en vue de la signature du contrat de crédit bail que la société HOMEL ne pouvait elle-même conclure, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du Code civil ;
3°) ALORS QUE les juges du fond doivent préciser les pièces sur lesquelles ils se fondent et les analyser au moins sommairement, sans pouvoir se contenter de les viser ; qu'en l'espèce, pour considérer que l'impossibilité pour la société HOMEL de trouver un financement lui permettant d'acquérir l'immeuble n'était pas démontré, la Cour d'appel s'est uniquement fondée sur « les pièces versées aux débats » qu'elle n'a ni identifiées, ni détaillées ; qu'en statuant ainsi, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile ;
4°) ALORS QU'une société dispose d'un patrimoine distinct de celui de son associé, même s'il est unique ; qu'en l'espèce, la Cour d'appel a considéré qu'il n'était pas démontré que la société HOMEL était dans l'impossibilité d'acquérir l'immeuble au moment de la vente au motif que son associé unique disposait de liquidités ; qu'en statuant ainsi par un motif inopérant, sans faire état de la situation financière de la société HOMEL, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1147 et 1382 du Code civil ;
5°) ALORS QUE les juges du fond doivent préciser les éléments et pièces sur lesquels ils se fondent ; qu'en l'espèce, la cour d'appel n'a mentionné aucun élément objectif, ni aucune pièce permettant d'éclairer l'évaluation des préjudices réparés par elle et les bases de son évaluation ; qu'en statuant ainsi, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 10-18105
Date de la décision : 14/12/2011
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Rouen, 04 mars 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 14 déc. 2011, pourvoi n°10-18105


Composition du Tribunal
Président : M. Terrier (président)
Avocat(s) : SCP Boré et Salve de Bruneton, SCP Defrenois et Levis, SCP Ortscheidt, SCP Peignot, Garreau et Bauer-Violas

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2011:10.18105
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